Santa’s Little Elves

Dans Santa’s Little Elves, vous êtes l’un des lutins vêtus d’un ridicule uniforme vert et rouge qui, dans l’atelier du Père Noël, fabriquent et emballent à la chaine les jouets destinés aux enfants du monde entier – enfin, surtout des pays où les parents ont assez d’argent pour acheter des jouets, car le Père Noël ne perd pas le Nord. Ce dernier est en effet un capitaliste de la pire espèce, qui vous exploite de manière éhonté, profitant de la rareté des offres de travail dans le grand nord.

Une partie des Lutins du Père Noël au kiosque à jeux de la Place de la République.

Le travail est éreintant et les salaires ridiculement bas. Les heures supplémentaires ne sont généralement pas déclarées, les possibilités de promotion sont inexistantes ou illusoires. L’usine est glaciale ; vous n’avez aucune idée de la date à laquelle le chauffage sera réparé, mais certainement pas avant la fin de la campagne d’hiver. Les situations de harcèlement sont également récurrentes. Seule consolation, ce n’est pas vraiment mieux pour vos camarades qui travaillent au tri des lettres, ni sans doute pour ceux du centre d’appel récemment délocalisé en Antarctique. Sans même parler de ces pauvres rennes, enfermés tout l’été dans un hangar sordide avant d’être contraints, tout l’hiver, de galoper dans la neige avec un costume et des cloches ridicules.

Solidarité et conscience de classe n’étant pas vraiment le point fort des lutins, il serait vain d’espérer pouvoir organiser une grève. Du coup, vous avez décidé de prendre votre destin en main, en volant des jouets sur la cabine pour les revendre sur ebay, tombé du traîneau. Bien sûr, vos petits cons de collègues font la même chose, et chacun espionne ses voisins, espérant les prendre sur le fait pour les faire chanter ou les dénoncer au patron.

Dans cette ambiance de rêve, le vainqueur sera bien sûr le plus riche à la fin de la partie, qui pourra quitter l’usine et se payer une croisière de rêve dans les Caraïbes. Les autres devront se contenter de quelques bières à la taverne du coin, et tant pis si le tavernier est un pote du patron.

Ceux qui connaissent bien mes jeux ne seront guère surpris par ces Petits lutins du Père Noël, un jeu de cartes simple et rapide, tout entier construit sur le bluff et la psychologie, dans la même famille que Dolorès, Waka Tanka ou Venture Angels. Conçu il y a plusieurs années de cela, ce jeu de cartes est resté dans mes cartons assez longtemps. Plusieurs éditeurs s’y sont intéressés, mais ils voulaient soit changer un thème auquel je tenais parce que je le trouvais drôle et politique, soit rendre plus complexe un jeu dont le charme réside en partie dans sa simplicité.

Le seul changement que je regrette un peu concerne la liste des jouets. Dans mon prototype, les jouets du père Noël était extrêmement typés, genrés comme on dit aujourd’hui, des poupées et des cuisines roses pour les filles, des voitures et des jeux de construction pour les garçons. Cela gênait d’autant plus les lutins qu’ils ne sont eux-mêmes pas très clairs sur les questions de genre. Craignant que certains joueurs ne prennent cela au premier degré, l’éditeur a remplacé cela par une distinction entre jouets technologiques (avec la technologie des années quatre-vingt-dix parce que c’est plus rigolo) et jouets traditionnels. Je sais bien qu’il est toujours plus prudent de prendre les joueurs pour des imbéciles, il y en a toujours quelques-uns dans le lot, mais c’est dommage quand on leur enlève une occasion à la fois de rire et de réfléchir. Enfin, c’est un peu moins drôle, mais cela devrait marcher aussi bien. Dans un jeu aux mécanismes finalement très simples, cela passera peut-être mieux auprès des plus jeunes joueurs qui n’ont pas connu l’époque des jouets hyper-genrés, des poupées Barbie et des maquettes d’avion. Pour le reste, toute ma petite histoire de lutins pré-marxistes, classe en soi mais pas pour soi, est bien là, et c’est l’essentiel.

Les règles très simples de Santa’s Little Elves mettent certes le jeu à la portée de tous, mais son thème ne doit pas faire croire qu’il n’est destiné qu’aux enfants. C’est aussi un jeu de bluff bien fourbe qui devrait plaire aux habitués de mes petits jeux de cartes.

Santa’s Little Elves
Un jeu de Bruno Faidutti
Illustré par Marlies Barends
3 à 5 joueurs – 20 minutes
Publié par Matagot / TGG / Knight and Day games (2023)


You’re one of Santa Claus Elves, in a ridiculous red and green uniform, working on the factory line all year long, manufacturing toys for kids from the whole world, or at least from the countries where parents are rich enough to buy kids toys. Stupid rich kids who never heard of you, and who probably would not care if the had. Santa Claus, a capitalist of the worse kind, is clearly exploiting you, taking advantage of the scarcity of jobs in the far North. 

Playtesting Santa’s Little Elves at the Ludopathic Gathering.

Exhausting work, bad pay, no pay at all for overtime, no consideration, no summer holidays, no career prospects. The factory is ice cold, and you have no idea when the heating will be fixed, but certainly not before the end of this winter season. Harassment issues are commonplace. It’s probably not better for your comrades sorting letters, and certainly even worse for those at the after-sales hotline, recently outsourced to Antarctica.And there are serious work harassment problem. Worst of all, the factory is terribly cold and you’ve no idea when the heating will be fixed. And better not talk about these poor reindeers, spending the whole summer in a dirty shed and running all around the world in the cold winter with ridiculous bells.

Solidarity and class consciousness are not elves’ strong suit, so you’ve decided to help yourself. On every occasion, you steal small toys from the line, and try to sell them on eBay as fallen of the back of the sledge. Of course, your nasty colleagues are all doing the same. They’re also spying on you, and will report you when caught, unless you give them what you have stolen.

The elf with the most cash at the end of the game is the winner, resigns from the job and goes for a two-month cruise in the Caribbean. The other elves have still enough cash for a few beers at the local tavern – and, yes, this means the money goes back to Santa Claus, who also owns the tavern, but that’s life.

Those who know my card games won’t be surprised by Santa Claus’ Elves. It is a simple and fast paced bluffing card game, entirely built on bluffing and psychology, a bit like my Dolores, Waka Tanka or Venture Angels. I have designed it a few years ago, but it has stayed unpublished because I was waiting for a publisher willing to keep both the simplicity of the core mechanism and the fun storyline, and many wanted to make the game more complex, or to go for a less political setting.

There’s one change I regret a bit, with the list of toys. My prototype had two categories of terribly gendered toys, dolls and pink plastic kitchens for girls, cars and construction sets for boys. This was one more problem for the elves, most of which are not clearly settled on gender issues. The publisher was afraid some gamers would take this at face value, even when the rest of the game is obviously parodic. The publisher replaced this with two other categories, traditional and modern toys – modern meaning from the nineties, because it looks nicer. I know it’s always safer to treat gamers as fools, there must be a few ones in the crowd, but it also means removing opportunities to both laugh and think. It’s not as fun, but it works as well and will probably make more sense with younger gamers who didn’t know the time of Barbie dolls and airplane models. And anyway, all the rest of my little proto-marxist elves story, class in itself but not for itself, is still there, and that’s what matters.

Santa’s Little Elves has short and simple rules, and can be played by kids, but you must not be fooled by its topic and title – it’s not just for kids. Played with the right crowd, it can also become a nasty bluffing game, like many of the small card games I have designed.

Santa’s Little Elves
A game by Bruno Faidutti
Art by par Marlies Barends
3 to 5 players – 20 minutes
Published by Matagot / TGG / Knight and Day games (2023)

Grail Cup

Citadelles est, de tous mes jeux, celui qui se vend le mieux. Je le sais, mon banquier le sait, et surtout les éditeurs le savent qui, régulièrement, me demandent si je n’aurais pas dans un coin « un autre Citadelles ». Ce n’est pas toujours ce que j’ai le plus envie de faire mais, de temps en temps, je m’y essaie.

Aux Pierres du Dragon et, surtout, L’Ambition des Rois, sont des tentatives de recréer les mêmes sensations qu’à Citadelles à l’aide de mécanismes différents. À deux joueurs, je pense d’ailleurs que l’Ambition des Rois est un bien meilleur jeu.

J’ai aussi tenté d’exploiter le système de choix des personnages qui est au cœur de Citadelles à des bases différentes. Mes essais sur des jeux de majorité, ou de votes, n’ont pas été suffisamment convaincants pour que je les montre à des éditeurs. Lost Temple et, aujourd’hui, Grail Cup qui en est le successeur, utilisent ce principe dans un jeu de course.

Dans Lost Temple, paru il y a une dizaine d’années, les joueurs étaient des aventuriers quelque part en Orient, à la recherche d’un – devinez – Temple Perdu. Dans Grail Cup, ce sont les chevaliers de la Table Ronde cherchant à atteindre le château du Graal, avec l’aide de leurs amis l’Enchanteresse, l’Écuyer, Merlin, la Forgeronne, le Dragonnier, la Princesse, le Prêtre, la Fée et la Licorne. Ces alliés sont choisis exactement comme les personnages de Citadelles, et permettent d’avancer plus rapidement, de s’informer des possibles pièges, de s’y préparer, de changer sa place dans la course avec un autre personnage… Le jeu est plus léger, plus rapide, mais aussi méchant que Citadelles, tout en entourloupes et en queues de dragon.

Pour ceux qui ont joué à Lost Temple, la principale différence, outre bien sûr le changement de thème, est la disparition des gemmes, qui étaient une sorte de monnaie, afin de recentrer l’intérêt du jeu et l’attention des joueurs sur la position dans la course. Le jeu en devient ainsi plus rapide, plus tactique, plus fluide.

J’ai toujours beaucoup apprécié la ligne claire et l’humour subtil de John Kovalic, et je suis vraiment très heureux qu’il ait accepté d’illustrer l’une de mes créations. Ses personnages légers et colorés rendent très bien l’esprit de Grail Cup – c’est un peu Citadelles, mais c’est moins sérieux.

Grail Cup devrait arriver dans les boutiques françaises le 16 juin 2023.

Playtesting in a parisian boardgame café.

GrailCup
Un jeu de Bruno Faidutti
Illustré par JohnKovalic
3 à 8 joueurs – 30 minutes
Publié par Matagot
Boardgamegeek


Of all my games, Citadels is the one that sells best. I know it, my banker knows it, and, of course, the publishers know it. Regularly, they ask if I can show them “anorher Citadels”. It’s not always what I’m the most excited about, but, from time to time, I give it a try.

Fist of Dragonstones and, even more, Greedy Kingdoms try to recreate the same game sensations using different mechanisms. As a two player game, Greedy Kingdoms is, in my opinion, much better than Citadels.

I also tried to recycle the character selection system which is the heart of Citadels into other game systems. My attempts with voting or majority games were not convincing enough to be shown to publishers. Lost Temple, and its reimplementation Grail Cup, use it in a race game.

In Lost Temple, which was published ten years ago, players were adventurers in the Far East looking for, you got it, a lost temple. In Grail Cup, they are now the Knights of the Round Table racing to reach the Grail castle, with a little help from their friends the Enchantress, the Squire, Merlin, the Smith, the Dragonrider, the Princess, the Priest, the Fairy and the Unicorn. These allies are chosen exactly like the characters in Citadels and allow the knight to move faster, to look for possible traps, to get weapons, to swap place in another knight, etc… The game is light and fast paced. It’s less mean than Citadels, but there’s still room for a few nasty magic tricks.

If you’ve played Lost Temple, the main difference after the change in setting is the removal of gems, which were a kind of money used to pay for movement. The position on the track is now almost the only thing to take into account during the game. It makes the game faster, more tactical and more fluid.

I’ve always liked John Kovalic’s subtle humor and bright, simple art. I am really happy that he accepted to illustrate one of my creations. His light and colored characters are perfectly true to the spirit of Grail Cup – it’s lighter and faster than Citadels, but equally mean.

Playtesting with friends.

Vintage

Je joue toujours, de temps à autre, à de gros jeux de gestion, de baston ou d’expansion. Je suis néanmoins souvent un peu frustré par les jeux les plus récents, souvent conçus pour être joués chacun dans son coin, sans beaucoup de possibilités de nuire directement à ses adversaires. Du coup, comme j’avais un peu envie de me remettre à bosser sur une grosse boite, avec un plateau de jeu, des territoires et des routes, je me suis mis à chercher des mécanismes originaux et un peu méchants. Une idée intéressante m’est venue, l’obligation de poser une carte devant soi un tour à l’avance, laissant un tour entier aux adversaires pour vous la voler et la placer à leur tour devant eux avant que vous n’ayez pu l’utiliser pour attaquer par la mer, bâtir une cathédrale, traverser la montagne, invoquer un démon, chercher du minerai, lancer une fusée, acheter des moutons, corrompre un évêque. Le jeu dans une grosse boite, Trollfest, est finalement là, et j’espère qu’il sortira l’an prochain, mais ce mécanisme n’avait clairement rien à y faire. Du coup, plutôt que de faire de cette règle un système annexe d’un truc plus ambitieux, j’en ai fait le mécanisme central d’un petit jeu de cartes sans prétention. J’espère bien qu’un autre auteur l’exploitera dans un gros jeu, et qu’il m’en enverra une boîte, ne serait-ce que pour me prouver que j’avais raison de penser que ce système a de l’avenir.

Dans Vintage, les joueurs sont des brocanteurs, collectionneurs et un peu voleurs d’objets des années cinquante, soixante et soixante-dix. A son tour de jeu, un joueur peut d’abord placer dans sa pile de score l’une des cartes qu’il a devant lui, puis doit ensuite placer deux cartes devant lui, l’une qu’il choisit parmi deux cartes piochées, l’autre qu’il vole parmi les cartes de ses adversaires. Les cartes ont des caractéristiques différentes, type d’objet, couleur, valeur, période, qui rendent certaines plus intéressantes que d’autres. Si l’on veut pouvoir scorer une bonne carte, il faut d’abord la poser devant soi, au risque de la voir disparaitre de sa boutique avant que son tour ne revienne. Le dilemme est permanent, et les meilleures cartes sont soit immédiatement défaussées, soit à l’inverse volées et volées encore pendant des tours avant qu’un joueur ne puisse les ajouter à sa collection.


Le premier prototype du jeu avait 8 types d’objet et 8 couleurs. Les aspirateurs, et la couleur violette, ont disparu pour des raisons d’équilibre.

Vintage, c’est donc d’abord un mécanisme. Le thème, même s’il n’a pas changé depuis le premier prototype, est clairement second. Je l’ai choisi parce que l’idée de cartes à la fois exposées, volées et collectionnées me semblait coller assez bien avec la traditionnelle caricature des brocanteurs. Ils se trouvait aussi que j’avais dans un coin de chouettes illustrations faites par Tom Vuarchex pour un prototype abandonné de ce qui allait devenir Dolorès, dont j’ai réutilisé un assez grand nombre pour mon prototype. Le thème a ensuite eu en retour quelques effets sur les mécanismes, notamment sur le système de score, mais on pourrait sans doute en imaginer un autre.

Donc, Vintage, un petit jeu de cartes rapide et méchant pour 3 à 5 joueurs, très joliment illustré par Pilgrim Hogdson, publié chez Matagot.

Vintage
Un jeu de Bruno Faidutti
Illustré par Pilgrim Hogdson
3 à 5 joueurs  – 20 minutes
Publié par Matagot (2020)
Boardgamegeek


I still occasionally play heavy management, war or expansion games. However, I often feel a bit frustrated with recent boardgames, which often seem to be designed so that every player plays his own little game, with little or no interaction, no opportunities to play not only for oneself, but also against other players, which for me is an important par of the gaming fun. Last summer, I wanted to try again to design at least one big box game, dudes on a map with roads and territories, and tried to think of new and possibly mean mechanisms. The idea I got was to have a card driven game in which every card card must be played one turn in advance, giving every opponent an opportunity to steal them before one can use it. If he card is still here after a full table turn, then one can apply its effect, – attack by see, build a cathedral, shoot the sheriff, summon a demon, launch a spaceship, kill the witch, mine ore, buy sheep. The big box game is here, it’s called Trollfest, and I hope it will be published next year, but the « play your card one turn in advance » rule doesn’t fit in it. So I finally made this rule the core system of a small and unassuming card game instead of a side system of a big ambitious boardgame. I hope another designer will find a way to use it in heavier stuff and prove me right, and may be even will send me a copy.

Players in Vintage collect, sell and occasionally steal vintage items from the fifties, sixties and seventies. On their turn, a player can first place one of the cards in their display in their scoring pile, and then must place add new cards to their display, one chosen among two cards from the drawing pile, the other stolen from another player’s display. Cards have different characteristics, type, color, period, value, and some are obviously better than others. If you want to score a good card, you must first add it to your display, but the odds are high that it will be stolen from your display before you can score it. This makes for recuring dilemmas, and some of the best cards are sometimes discarded at once, or stolen and stolen again for turns before one can add it to their collection.


The first version of the game had 8 categories and 8 colors. For balance reasons, I had to remove one color – purple – and one category – vacuum cleaners.

Vintage is first and foremost a simple and, I think, new mechanism. The theme didn’t change since the first prototype, but it was nevertheless an afterthought. I’ve chosen it the idea of cards displayed, stolen and collected fitted well with the caricature image of second-hand items dealers. It also happened that I had many pics drawn by Tom Vuarchex when we were considering another setting for what was to become Dolores, and which I could use in my prototype. The setting then had a few reverse effects on the scoring rules, but one could certainly imagine another setting for this game.

Vintage is a small, fast and agressive card game for 3 to 5 players, nicely illustrated by Pilgrim Hogdson and published by Matagot.

Vintage
A game by Bruno Faidutti
Art by Pilgrim Hogdson
3 to 5 players  – 20 minutes
Published by Matagot (2020)
Boardgamegeek  

 

Dragons

Dans Dragons, les joueurs ne sont pas comme trop souvent de vulgaires aventuriers avides de gloire et de crânes de dragons à accrocher au dessus de la cheminée, mais bien les fiers et nobles reptiles ailés et cracheurs de feu. Ceci dit, pour très anciens qu’ils soient, les dragons n’en sont pas plus vertueux et philosophes pour autant, et leurs préoccupations sont bien proches de celles des aventuriers. Ils passent en effet leurs étés à survoler la campagne, attaquant châteaux et abbayes à la recherche d’or et de pierreries. L’hiver venu, ils retournent à leurs caves, très haut dans la montagne, où ils aiment à accrocher les armes et les armures des chevaliers qu’ils ont défaits. Ils y passent le temps à compter et recompter leurs trésors, et à les astiquer pour qu’ils brillent mieux sous les flammes. Auri sacra fames, voila pour la très antique sagesse de ceux qui jouent à se croire encore les rois du monde. Une partie de Dragons, c’est trois ou quatre étés, selon le nombre de joueurs, suivis d’autant d’hivers.

Dragons est un jeu de prise de risque, de stop ou encore (je préférais la vieille expression de quitte ou double, qui semble avoir disparu), dans lequel on joue moins avec la chance qu’avec les nerfs des autres joueurs. Chacun à son tour ajoute une carte à l’une des piles de trésors, ou craque en s’emparant de l’une des piles, laissant ses collègues dragons continuer à piller la région. Il est toujours tentant d’ajouter encore quelques cartes sur une pile qui nous semble intéressante, mais c’est au risque de voir un autre reptile la ramasser sous notre museau. Dragons est aussi, un tout petit peu, un jeu de mémoire dans lequel on s’efforce de repérer discrètement les piles les plus intéressantes. Les subtilités du système de score font que la tactique n’en est pas non plus totalement absente.

Après trois ou quatre ans, ce qui équivaut à quelques jours en temps de dragon, Glaurung, Fafnir, Rhaegal, Falkor, Mélusine et les autres se retrouvent pour comparer leurs magots.
Qui croirait que les puissants dragons sont, comme nous autres petits humains, des êtres faibles qui se laissent parfois entraîner par la soif de l’or au point d’en oublier les choses vraiment importantes de la vie, comme la nourriture? Les dragons doivent manger, et même manger plus que nous. Ceux qui n’ont pas accumulé assez de nourriture sont donc éliminés avant même l’évaluation des butins. À cinq ou six joueurs, il faut même manger équilibré, des vaches et des moutons.
Les dragons qui ont stocké, soigneusement grillée et séchée au coin du feu, assez de nourriture pour les longs hivers à venir, comparent ensuite leurs magots. Les pièces d’or en sont bien sûr la valeur de base, mais bijoux et joyaux en tous genre sont également très prisés. La légende veut que les dragons mâles préfèrent les couronnes et sceptres royaux, et les gemmes bleues, tandis que les femelles recherchent les colliers, les torques et les pierres roses, mais rien n’est moins sûr. On n’est même pas certain, en fait, qu’il y ait des dragons mâles et femelles, les quelques inconscients qui se sont approchés des monstres d’assez près pour s’en assurer n’étant pas revenus pour conter leur histoire.
Les dragons tiennent fermement à leur réputation, et une caverne bien tenue se doit d’être inexpugnable.  Quelques armures, heaumes, boucliers et épées, alignées avec soin sur les murs de la grotte, montrent le peu de cas que l’hôte des lieux fait des chevaliers les mieux équipés.
Il est enfin une légende qui se transmet chez les dragons de génération en génération, celle de l’anneau unique. Rien n’est plus classe pour un dragon que d’avoir, dans son trésor, un anneau unique – mais encore faut-il, bien sûr, qu’il soit vraiment unique, et il y en a trois dans le jeu. Enfin, il ne suffit pas d’avoir un trésor, il faut aussi le ranger, l’entretenir, le faire briller sous les flammes de son propriétaire.


L’un des premiers prototypes

Concevoir un jeu, c’est souvent du travail, mais pas toujours. Il y a ceux qui demandent des années de tests, de réflexions, de bidouillages pour, parfois, n’arriver nulle part. Il y a ceux qui marchent tout de suite, ou presque tout de suite. Dragons est de ces derniers, puisqu’il ne s’est écoulé que quelques jours entre l’idée et les premières parties, quelques semaines entre le jour où j’ai fait jouer l’équipe de Matagot, croisée un peu par hasard au Nid, un bar à jeux parisien, et la signature du contrat, et quelques mois entre cette dernière et la parution du jeu. J’aimerais que cela se passe toujours ainsi.


L’une des premières ébauches de David pour Dragons

Pour les illustrations, tout est allé très vite aussi avec mon ami et presque voisin David Cochard, avec qui je travaille pas mal ces temps-ci. David a récemment illustré Waka-Tanka, Kamasutra, et est en train de s’attaquer à mes Jongleurs et ménestrels, à paraître l’an prochain. Il avait bien aimé dessiner des dragons il y a quelques années pour Dungeon Petz,, de Vlaada Chvatil, et a été heureux de s’y remettre. Des figurines comme celles que j’avais utilisées pour mon prototype auraient coûté trop cher pour un simple jeu de cartes, et elles ont été remplacées par des silhouettes en carton. Non content de dessiner six dragons, de face et de dos, David s’est ensuite amusé à représenter les reptiles sur les bijoux, sur les couronnes, sur les armes et les armures. Dans un royaume dont ils perturbent la vie quotidienne depuis des générations, on peut en effet imaginer que l’image des dragons est présente un peu partout.

Même si je n’en étais pas vraiment conscient durant le développement du jeu, la mécanique de Dragons s’inspire sans doute un peu de De l’Orc pour les Braves, un jeu de cartes que j’avais conçu avec Alan R. Moon, et qui a été publié il y a bien longtemps par Asmodée, et presque aussitôt oublié. Les sensations de jeu sont bien différentes, puisque De l’Orc pour les Braves était un jeu frénétique et passablement chaotique, joué en temps réel. On y trouvait cependant déjà les piles disposées en cercle sur lesquelles les cartes s’accumulent, et dont les joueurs doivent mémoriser les cartes pour déterminer le meilleur tas et s’en emparer le premier.

je suis certes le spécialiste mondial et incontesté de la licorne, qui était le sujet de ma thèse d’histoire, mais dans le monde ludique, je me suis plus intéressé aux dragons. Avant Dragons, il y eut en effet L’Or des Dragons, en 2001, récemment réédité par White Goblin et IDW games. Les joueurs y sont des aventuriers qui attaquent les dragons pour s’emparer de leurs trésors, ce qui est assez aisé, puis se partagent le butin, ce qui est plus difficile. Dans Aux Pierres des Dragons, dont une nouvelle édition devrait sortir en 2018, les mêmes aventuriers se retrouvent à la taverne du coin, où ils boivent, jouent et se racontent leurs aventures. Il y a des dragons aussi dans Citadelles, très discrets, dans Castel, et surtout dans King’s Life, qui vient de paraître chez Pandasaurus Games. Il y en a aussi dans quelques uns de mes projets en développement. Je n’étais plus tout à fait sûr, je viens de vérifier, il n’y a pas de Dragon dans De l’Orc pour les Braves.

« Les auteurs ont beaucoup débattu aux sujet des dragons ailés. Ces animaux existent-ils réellement dans la nature, ou ne se rencontrent-ils que dans les fables et les contes ? Nous-même avons longtemps été hésitant sur la question de l’existence des dragons. Nous avons finalement laissé tout doute de côté, après avoir non seulement lu des extraits de nombre d’auteurs reconnus, mais aussi recueilli des témoignages oculaires dignes de foi. Ces animaux monstrueux installent leurs nids et élèvent leurs petits dans des antres souterraines qui sont le sujet de ce livre. »
Athanase Kircher, Mundus Subterraneus, 1665

Mon intérêt pour les dragons vient bien sûr d’une jeunesse passée à lire des romans fantastiques et à pratiquer le jeu de rôle – même si je suis vite passé au GN où, pour des raisons techniques, les reptiles volants et cracheurs de feu sont plus rares. Il doit cependant aussi beaucoup au très baroque Athanase Kircher, dont j’ai croisé le chemin en faisant des recherches sur les licornes de la Renaissance. La bibliographie de ce polymathe haut en couleurs, si tant est que cette expression puisse s’appliquer à un père jésuite, est impressionnante.

Contrairement à ce que cette gravure de la China Illustrata pourrait laisser croire, Athanase Kirchner n’est pas certain de la présence de dragons en Chine. Il est en revanche positif sur la Suisse, dont les sommets sont infestés de dragons, et où se déroule sans doute l’action de mon jeu.

Dans son Mundus Subterraneus, paru en 1665, le frère jésuite décrit avec soin les différentes variétés de dragons vivant dans les hautes montagnes, ainsi que dans les fleuves de lave reliant les volcans du monde entier. Ce n’est qu’une facette de son œuvre. Dans Arca Noe, on trouve les plans complets, avec cotes, de l’Arche de Noe, qui bien sûr abritait un couple de licornes – et même deux couples, mais c’est une autre histoire. Kircher a de même précisé dans Turris Babel toutes les spécifications techniques de la tour de Babel, avec les dimensions et les matériaux utilisés. Oedipus Aegyptiaticus, un siècle et demi avant Champollion, c’est trois tomes de traductions de hiéroglyphes – tout faux, certes, mais avec quelques bonnes intuitions. China Illustrata est une vaste encyclopédie des connaissances sur l’extrême orient de ce savant qui avait beaucoup voyagé entre Allemagne, France et Italie. Enfin, dans Musurgia Universalis, le père Kircher fut le premier à présenter les plans du célèbre orgue à chats, instrument rarissime tant il est difficile de trouver des chats bien accordés.

Ce dragon bossu d’Éthiopie est décrit dans un ouvrage un peu plus ancien, Draconum et Serpentum Historia, d’Ulysse Aldrovandi.

Dragons
Un jeu de  Bruno Faidutti
Illustrations de David Cochard
3 à 6 joueurs – 30 minutes
Publié par Matagot (avril 2018)
Boardgamegeek



First cover draft

Players in Dragons are not impersonating common and greedy adventurers, eager for gold and dragons’ heads to hang as trophy over the fireplace, but proud, noble, winged and fire-breathing dragons. Anyway, dragons might be fantastically ancient, but this doesn’t make them much wiser and virtuous, and their main preoccupations are very similar to the adventurers’ ones. The spent the summer flying over the countryside, attacking castles and abbeys for gold, gems and jewels. When winter comes, they fly back to their caves, high in he mountain, where they love to display the weapons and armour of knights they have defeated. They spend their time counting and recounting their treasures, and polishing it so that it shines under their fiery breath. Auri sacra fames, so much for the ancient wisdom of these creatures who like to think they are still kings in the world. A game of Dragons is three or four summers, depending on the number of players, and as many winters.

Dragons is a risk taking card game, double or quits, in which one plays less against luck than against the other players’ nerves. Each player on turn either adds one more card to a treasure pile, or yields and take one of the piles, letting other dragons keep on rampaging the kingdom. Adding cards to a pile is tempting but risky, because some other dragon can always steal it just under your big fiery nose. It is also, though to a much lesser extent, a memory game in which one tries to discreetly spot and focus on the most interesting piles. Last but not least, it’s a tactical game, because there’s some subtleties in the scoring. Nothing revolutionary, but an easy, fun, light and tense card game.

After three or four years, which amounts to a few days in dragons’ time, Glaurung, Fafnir, Rhaegal, Falkor, Melusine and their kind meet to check who has the biggest and shiniest hoard.
Mighty dragons, like us petty humans, are weak creatures. They can get so enthralled by wealth that they forget about the really important things in life, like food. Even dragons must eat, and they even must eat far more than we do. Dragons who didn’t stock enough food are out of the game. With 5 or 6 players, one must even keep a balanced diet, with cows and sheep. Surviving dragons, those who kept enough smoked meat for the coming winter, compare their hoards.
Though gold coins are the base asset, jewellery is extremely popular with dragons. The saying goes that male dragons collect royal crowns and scepters, while females prefer women pieces such as necklaces, torques and bracelets, but we’re actually not even sure there are male and female dragons. No one has ever seen a dragon from near enough to ascertain it and come back to to tell the tale.
Dragons also enjoy bragging that they defeated proud and wel born knights who wanted to kill them and steal their treasure. To support the story, and the dragon’s reputation, one must show the knight’s equipment, helmet, breastplate, shield and sword.
The legend of the one ring is one of the oldest stories in dragons’ tradition, and what is old for dragons is indeed very old. Every dragon fancies having a one ring, the one ring, in its treasure. Of course, two same rings cannot be unique, and there are three in the game. Last but not least, owning a treasure is not enough, one must also make it shine under the its owner’s flames, and that’s were polish comes handy.


Playtesting Dragons

Designing a game is not always hard work. Some games spend years in development, tests, thoughts and tweakings, sometimes for no avail. Other ones play well at once, and Dragons is one of them. There were only a few days between the idea and the first playtests, a few weeks between the day I showed the game to the Matagot team in a parisian game café, and a tew months more until the game was published. I would like things to go always that smoothly.


One of David’s first sketches for Dragons

Things went very fast as well with my friend David Cochard, with whom I’m working a lot these last times. David already made the graphics for Waka-Tanka,, for Kamasutra, and is now working on my Jugglers and Minstrels game, to be published next year. David had enjoyed drawing dragons, years ago, for Vlaada Chvatil’s Dungeon Petz, and was glad to be back at it. Plastic dragon miniatures like the one in my prototype would have made what is basically a card game far too expensive, so David had to draw six dragon cardboard standups, face and back. He then decided to draw dragons on the jewels, the crowns, the weapons and amor pieces. In a kingdom whose daily life is being disrupted by dragons for centuries, the image of the mighty animal ought indeed to be everywhere.

I wasn’t conscious of it while working on Dragons, but the mechanics of this game were probably inspired by an older card game I designed with Alan R. Moon, and which hasn’t been published in English, though we had found a name for it, For a Few Orcs More. The two games feel very different, since For a Few Orcs More was a real time and rather chaotic game. The core idea of Dragons, cards accumulating in face up piles placed in circle, and players trying to remember what is were to determine the best pile and seize it first, was already there.  

I’m the world specialist on unicorns, not on dragons, but while my PhD in history is about unicorns, my games more often involve dragons. There were several long before Dragons. Dragon’s Gold, first published in 2001, is about adventuring parties attacking dragons to steal their treasures, which is relatively easy, and then dividing up the booty, which is much more complex. This game has recently been republished by IDW and White Goblin. In Fist of Dragonstones, adventurers are back at the local tavern, drinking beer, discussing their adventures and playing some games. A new and updated version of this game ought to be published in 2018. There are few and discreet dragons in Citadels, there’s one in Castel, and there’s one in King’s Life, just published by Pandasaurus. There are a few more in games I’m working on at the moment. I’ve just checked, since I wasn’t certain, but there’s no Dragon in For a Few Orcs More.

« There has been lots of controversy between writers about winged dragons. Are there really such animals in nature, or do they appear only in fables and fairy tales? We have long been undecided on the question of the existence off dragons. After having not only read many respected authors, but also listened to first hand testimonies by trustful people, we have set aside our doubts. These monstrous animals indeed make their nests and breed their young in underground caverns, which are the topic of this book. »
Athanasius Kircher, Mundus Subterraneus, 1665

My interest for dragons comes from my youth, largely spent reading fantasy novels and playing RPGs, even though I soon moved into LARPS where, for obvious technical reasons, giant flying and fire breathing reptiles are scarcer. But I also occasionally met dragons while researching unicorns, for example in the books of a very baroque character, Athanasius Kircher. This colourful polymath, if one can say this of a jesuit priest, has an impressing bibliography.

Contrary to what this engraving from China Illustrata suggests, Athanasius Kirchner is not certain that there were living dragons in China. He is far more confident about Switzerland, whose highest mountains are infested with dragons, and where the action of my game probably takes place.

In his Mundus Subterraneus, published in 1665, the jesuit father carefully distinguishes the different species of dragons living in the hight mountains, as well as in the lava rivers joining all the volcanoes in the world. That’s only one side of his works. In Arca Noe, Kircher unveiled the plans of Noah’s Arch, with its exact measurements, and of course a room for two unicorns – well, actually four, but that’s another story. Similarly, in Turris Babel, he gave the exact measurements of the Babel Tower, as well as the materials used. 150 years before Champollion, Kircher published Oedipus Aegyptiaticus, three heavy tomes of hieroglyph translations. It’s all wrong, but he had some clever intuitions. China Illustrata is a vast encyclopaedia of the far east, written by someone who travelled a lot between France, Italy and Germany. Last but not least, in Musurgia Universalis, the SJ father was the first to discuss a revolutionary musical instrument, the cat organ, still very rare because it requires well tuned cats.

These dragons are described in Edward Topsell’s History of Four-footed Beasts and Serpents and Insects, published in 1607, of which I own a nice fac-simile.

Dragons
A game by  Bruno Faidutti
Illustrated by David Cochard
3 – 6 players – 30 minutes
Published by Matagot (april 2018)
Boardgamegeek

Rencontres ludopathiques 2016
2016 Ludopathic Gathering

Playing in the sun

Il ml’a fallu presqu’une semaine pour me remettre des rencontres ludopathiques. Je suis rentré de ces quatre jours – cinq pour moi, puisque j’étais à Etourvy dès le mardi – totalement épuisé et vaguement enrhumé. J’ai repris des forces, j’ai rangé un ou deux milliers de jeux dont beaucoup ne ressortiront plus avant l’année prochaine, j’ai posté sur Facebook les photos envoyées par les uns et les autres, et je m’attaque maintenant au traditionnel compte-rendu sur mon site web.

Je commence, parce qu’il faut le faire si je veux qu’ils reviennent ou qu’ils me renvoient des jeux l’année prochaine, par les remerciements aux éditeurs. Merci, donc, à  ceux qui sont venus en personne à Etourvy (Blue Orange, Gigamic (que j’essaie de faire venir depuis quinze ans), Iello, Tasty Minstrel Games, Days of Wonder, Letheia, FunForge, Matagot, Superlude, Portal, Libellud, Lui-Même, Sweet November, Horrible Games, Flatlined Games, MESABoardgames, Passport Game Studios, Purple Brain) et à ceux qui ont gentiment envoyé petits ou gros colis pour la table de prix (In Ludo Veritas, Edge, Blackrock, Matagot, Ravensburger, Abacus, Steve Jackson Games, White Goblin, FFG, Space Cowboys, Jolly Thinkers, Repos Prod, Gameworks , Tasty Minstrel, Philibert). Je ne sais pas quel était le plus gros colis, mais celui qui venait de plus loin était certainement celui de Jolly Thinkers, l’éditeur chinois de l’excellent CS-Files / Deception / Murder in Hong Kong – très joué tout au long du week-end.

Parce qu’il y avait de nombreux éditeurs, il y avait aussi de nombreux auteurs – à moins que ce ne soit l’inverse – et les prototypes ont beaucoup tourné. Ignacy Trzewiczek a installé ses premiers martiens sur une table qu’ils n’ont plus quitté du week-end. Bruno Cathala bougeait un peu plus, mais j’ai vu bien souvent le même jeu que l’an dernier, en plus vert et moins égyptien. On notait aussi les conséquences dramatiques du passage de Cthulhu dans le domaine public. Si je n’ai pas repéré les prototypes d’Arve, c’est parce qu’ils sont si bien faits que je les prenais régulièrement pour des jeux édités – et j’attends avec impatience le jeu de cartes avec des Samurais dont j’ai observé un bout de partie le dernier jour. J’arrête là, parce que si j’essaie de citer tous les auteurs, je vais inévitablement me fâcher avec ceux que je vais oublier, mais vous pouvez les chercher sur les photos.

Moi aussi, j’avais amené quelques protos, mais je n’ai pas eu vraiment le temps de les faire tourner et de me vendre auprès des éditeurs. Dolorès et Chawai, qui devraient tous deux sortir avant la fin de l’année, ont tourné un peu, mais sans moi. Tout juste a-t-on confirmé avec Benoit Forget, de Purple Brain, un deal qui était déjà dans l’air. Les rencontres ludopathiques sont de plus en plus professionnelles mais professionnellement je suis sans doute l’auteur qui en bénéficie le moins, trop occupé que je suis à la gestion de tout ce petit monde. Il y a un truc qui cloche…..

Codenames

Le grand succès des rencontres fut, sans grande surprise, le nouveau Taboo, Codenames, de Vlaada Chvatil. Il a été joué en français sur les jolies boites toutes neuves apportées par l’équipe de Iello, mais aussi en anglais, puis avec les cartes de Hall of Fame, un jeu italien sur les hommes célèbres, puis avec les cartes de Cards against Humanity, puis avec celles du Doigt dans la Chatte, le prototype de Martin Vidberg, et même avec vingt-cinq boites de jeu disposées en carré. On a envisagé un codenames grandeur nature avec 25 joueurs en guise de cartes, mais cela ne s’est pas fait.

Les autres grands succès du week-end, ceux que l’on voit toujours sur les photos, ont été Imagine, le jeu de dessins qui bougent de Shotaro Nakashima, et Potion Explosion. Lorenzo Silva, l’un des auteurs de Potion Explosion, avait fait le voyage depuis Milan. N’ayant pas encore joué à son jeu, je ne peux pas vous en dire beaucoup plus – si ce n’est que ça ressemble à un mélange entre Candy Crush et Harry Potter, et qu’il est rare que la foule éclairée des ludopathiques se trompe quand elle plébiscite un nouveau jeu.

Photo Party

Côté jeu d’ambiance débile en extérieur, le prototype de la nouvelle version de Photo Party, jeu de Laurent Escoffier qui se joue désormais par équipe, a donné des résultats étonnants. La deuxième partie, celle du samedi, a mobilisé trois équipes de 10 joueurs. Je poste quelques photos ci-dessous, vous en avez plus sur Facebook, et pour les règles, voire les contrats d’édition, il faut voir avec Laurent.
J’avais prévu le matériel pour un Hippo Gloutons grandeur nature, avec des joueurs hippos allongés sur des skateboard et brandissant des cuvettes en plastique, mais l’expérience s’est avérée peu convaincante et les balles de piscine ont été recyclées dans d’autres jeux – notamment Photo Party où elles ont permis de distinguer les équipes. On a fait aussi deux Brouhahas, un classique avec des  bruits d’animaux et un en chanson, mais je n’ai curieusement aucune photo !

Mission : Red Planet

J’ai eu un certain succès en faisant la promo de Kheops, dont les premières boites étaient arrivées juste à temps pour le week-end. Ce jeu à deux à la fois stratégique et chaotique (après tout, c’est Serge Laget et moi qui l’avons conçu) a été beaucoup joué. J’ai vu aussi pas mal de parties de Mission: Planète Rouge, Blood Rage, Black Fleet, Lanterns, Isle of Skye, Abracada quoi, Agent Trouble, Focus, Qui Paire Gagne, et de quelques petits jeux de cartes, Triout, Parade et Dao (ces deux derniers étant assez proches). Eric Hanuise venait peut-être à Etourvy avec l’intention de faire jouer Argo, mais il a eu la malchance de tomber sur ma boite de King’s Forge, un jeu qu’il adore mais qui est à peu près introuvable, et l’a donc fait tourner tout le week-end – moi, je n’y ai toujours pas joué. Ne pas confondre avec Dice Forge, le joli proto de Libellud, qui tournait pas mal aussi.
Sur la grande table qui, il y a quelques années, supportait les vastes paysages d’Heroscape, de riches insensés avaient installé un Cthulhu Wars avec toutes les extensions, sans doute le jeu le plus impressionnant sur les photos. Et puis, il y a eu les classiques des ludopathiques, auxquels je joue tous les ans, les incontournables Situation 4 et Clusterfuck.

Blood Rage

Ça, c’est ce que j’ai vu, mais il y avait tellement de monde et de jeux que j’imagine que d’autres joueurs ont vu autre chose. En effet, nous étions nombreux – cent vingt personnes environ le samedi – et certains, surtout les plus jeunes, bougeaient sans cesse. Nous avons clairement atteint la capacité limite du domaine. Le temps splendide nous a permis de pas mal nous étaler dans la cour et sur la pelouse, mais je ne sais pas bien comment nous aurions fait si, comme l’an dernier, il avait plu. L’absence de quelques habitués, partis pour Tokyo ou retenus en Suisse ou ailleurs, avait permis d’inviter de nouvelles têtes et de rajeunir un peu le public des ludopathiques, ce qui a été très apprécié. Le problème, c’est que si les habitués veulent revenir en 2017, il va falloir trouver des lits et des places à table pour tout le monde….. Bon, j’ai encore quelques mois pour réfléchir au problème.

Enfin bon, il fait beau, ce qui nous a permis de nous promener alentour, de jouer au Mollky ou à Photo Party, mais je ne vais pas m’attarder sur le sujet, les photos seront plus parlantes que mes mots.

À l’année prochaine.


Etourvy

It’s been almost a week since I went back from the ludopathic gathering with a truckload of games, exhausted and vaguely ill. I have not yet completely recovered from these crazy four days – five days for me since I was in Etourvy on Tuesday. I’ve had a few long nights of sleep, I’ve put back on their shelves a few thousand game, many of which will stay there until next year. I’ve posted the pictures taken by the attendees on Facebook, and now I must write traditional short report.

Let’s start with the publishers acknowledgements, which are required if I want them to come back or to send more games next year. Thanks to the publisher who personally attended the gathering (Blue Orange, Gigamic (which I had been trying to lure in Etourvy for fifteen years), Iello, Tasty Minstrel Games, Days of Wonder, Letheia, FunForge, Matagot, Superlude, Portal, Libellud, Lui-Même, Sweet November, Horrible Games, Flatlined Games, MESABoardgames, Passport Game Studios, Purple Brain) and to those who sent parcels with games for the prize table (In Ludo Veritas, Edge, Blackrock, Matagot, Ravensburger, Abacus, Steve Jackson Games, White Goblin, FFG, Space Cowboys, Jolly Thinkers, Repos Prod, Gameworks , Tasty Minstrel, Philibert). I don’t know who sent the biggest parcel, but I know the one coming from farthest away was CS-Files, aka Deception, aka Murder in Hong Kong, sent by a Chinese publisher, Jolly Thinkers. It was played a lot.

Because there were many publishers, there were also many game designers – or may be it’s the reverse – and prototypes were played as much as published games. Ignacy Trzewiczek had installed his first martians on a table and they didn’t leave it for the whole week-end. Bruno Cathala was moving a bit, but was often playing the same game as last year, only less Egyptian and more green. The dramatic impact of Cthulhu becoming public domain could also be witnessed here and there. I mistook a few of Arve’s nicely produced prototypes for published games, and even if I saw only a few rounds, I’m impatiently waiting for his small Samurai card game. Better stop here, because if I try to list all game designers, I will necessarily anger the ones I will forget – anyway, you can check all of them on the pictures below.

Like every other game designer, I had brought some prototypes, but I didn’t find the time and opportunity to get them played and shown to publishers. There were a few games of Dolorès and Chawai, both of which ought to be published later this year, but without me. Well, at least I manage to play a game and confirm a deal with Benoit Forget, of Purple Brain. The ludopathic gathering are more and more a place for business, which is certainly not a bad thing, but being always busy with organizing, I end up being the designer with the fewest business opportunities. There’s something wrong….

Potion Explosion

Unsurprisingly, this year’s big hit was the new Taboo, Vlaada Chvatil’s Codenames. It was played in French with the brand new boxes brought by the Iello team, but it was also played in English, played with the cards from Hall of Fame, an Italian game about celebrities, played with the cards from « Finger in the Pussy », a prototype by Martin Vidberg, played with the white cards from Cards against Humanity, and even played with actual game boxes. We planned about playing it with 25 people instead of cards, but it didn’t work out.

The two other big hits, the games that are on all the pictures, were Shotaro Nakashima’s game of moving pictures, Imagine, and an Italian game about Harry Potter playing Candy Crush, Potion Explosion. Lorenzo Silva, one of the designers of Potion Explosion, had made the trip from Milan. Since I’ve not played the game yet, I cannot tell much about it, but the educated crowd of the ludopathic gathering has rarely been wrong when praising a new game.

Photo Party

As for outdoors zany party games, the most popular this year was the new Photo Party prototype by Laurent Escoffier. Photo Party is now a team game, and the results – you can see some of them in the pictures album below – were surprising, especially when, on Saturday afternoon, we played with three teams of ten players. For more pictures, look on facebook, and for rules or for discussing a publishing contract, since the game is looking for a publisher, contact Laurent.
I had planned to play a live action Hungry Hippos, with hippos lying on skateboards and using plastic basins to capture swimming pool balls, but it didn’t work very well and we recycled the colored balls for other improvised outdoor games – including Photo Party. We also played two games of blind Brouhaha, one with animal noises and one with musical tunes, but surprisingly I have no picture of them.

Kheops

I successfully managed to push Kheops, whose first boxes had been delivered just on time for the gathering. this strategic and chaotic game (after all, it’s by Serge Laget and me) was much played. I also witnessed many games of Mission: Red Planet, Blood Rage, Black Fleet, Lanterns, Isle of Skye, Abraca…what?, Spyfall, Focus (a new party game by Mathilde Spriet, not available in English yet), Pluckin’ Pairs (just published in French), and a few light card games, Triout, Parade and Dao – the latter two being quite similar. Eric Hanuise had come to Etourvy with the clear intent to play Argo, but unfortunately he stumbled on my copy of King’s Forge, a game he likes a lot but which is impossible to get in Europe, so he spent much of his time teaching it – and I’ve yet to play it. There was some confusion at times between King’s Forge and Dice Forge, a nice looking prototype which was brought, I think, by Libellud.

On the big oval table which, a few years ago, used to support large Heroscape landscapes, some rich mad guys had installed a Cthulhu Wars set, with all the expansions. The pictures are impressive. I also played two games which have become classics at my gathering, Situation 4 and Clusterfuck.

Cthulhu Wars

This is what I’ve seen, but there were two main halls, and so many peopleand games that other attendees may have seen other stuff. We were more than a hundred people on Saturday, and some of us, especially the youngest ones, were perpetually moving around. We have clearly reached the maximum capacity of the place at Etourvy. Thanks to a gorgeous weather, we could spread to the courtyard and the lawn, but I don’t know how we could have managed with a rainy weather like last year. Many regulars were missing, some of them because they were at the Tokyo Games Market. This made room for new people, but if the regulars come back next yea, I’ll have troubles finding beds for everybody. Well, I’ve a few months now to think on the problem.

Anyway, the weather was good, which allowed some of us to walk around, to play Mollky and Photo Party, etc…. But pictures tell more about this than words.

See you next year.


Ignacy Trzewiczek’s video report

Raptor – Les illustrations
Raptor – The Graphics

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Je pensais que Raptor était mon premier jeu illustré par Vincent Dutrait, jusqu’à ce que lors d’une discussion, à Cannes je crois, celui-ci m’apprenne qu’il avait déjà dessiné le plateau de jeu et la boite de mon China Moon, en 1996, quand je n’étais pas encore très connu et qu’il n’était lui-même qu’un tout jeune dessinateur (on ne disait pas encore beaucoup illustrateur) débutant. Ceci dit, les illustrations de China Moon étaient déjà très chouettes.

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Vingt ans plus tard, il est un illustrateur reconnu, je suis un auteur connu, et il illustre donc Raptor, le petit jeu de plateau pour deux joueurs que j’ai conçu avec Bruno Cathala, ou plutôt que Bruno Cathala a conçu avec un peu d’aide de ma part. Et le résultat est impressionnant, délibérément un peu kitsch, avec une couverture façon affiche de film – mais film des années soixante, pour que le clin d’œil ne soit pas trop lourd – et des cartes au dessin assez réaliste.

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Il y a deux manières de faire travailler les illustrateurs dans le jeu de société. Souvent, l’illustrateur ne livre que des dessins bruts, et tout le travail de mise en page est fait en interne par l’éditeur. Plus rarement, et c’est le choix qui a été fait pour Raptor, et je crois celui que préfère Vincent, le dessinateur fait lui-même une partie de la mise en forme, ce qui suppose qu’il maîtrise les règles, et de préférence qu’il joue au jeu. Pour Raptor, Vincent a donc livré les cartes déjà montées, et dessiné jusqu’aux symboles représentant les actions des joueurs – enfin, heureusement que d’autres étaient derrière pour valider chaque étape, ce qui nous a permis d’échapper au symbole suivant, censé représenter – c’est évident – un scientifique effrayé qui s’accroupit dans les herbes hautes pour se mettre à l’abri.

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Interrogé sur le design des cartes, voici ce que m’a répondu Vincent : Pour les cartes j’ai trouvé très intéressant de travailler des sets asymétriques. J’ai poussé l’expérience jusque dans les habillages des cartes avec une ambiance plus jungle et « nature sauvage » pour les raptors et un design plus strict et « civilisé » pour les scientifiques. “ – et dire que je n’avais même pas remarqué, en effet, l’habillage différent des cartes, les bordures bien droites chez les scientifiques et irrégulières chez les raptors.

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Le dessin de couverture de Raptor, avec son relief saisissant, son raptor en colère, menaçant, prêt à bondir hors de la boite, est celui qui a entraîné le plus de discussions. Personnellement, j’aurais laissé passer sans le moindre instant de doute le premier dessin proposé par Vincent, mais l’équipe de Matagot l’a trouvé un peu trop léger, un peu trop cartoon pour un jeu finalement assez tactique et sérieux. Il fut donc demandé à Vincent d’atténuer le contraste entre des scientifiques très funs et des raptors plus réalistes – ce qu’il a fait avec brio. J’ignore cependant pourquoi la jolie blonde a, au passage, perdu ses lunettes.

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Raptor arrive bientôt, en septembre je pense, et j’espère que je n’aurais pas à attendre encore vingt ans avant de travailler de nouveau avec Vincent Dutrait.

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Un jeu de Bruno Faidutti & Bruno Cathala
Illustré par Vincent Dutrait
2 joueurs – 30 minutes
Publié par Matagot (2015)
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Le site de Vincent Dutrait


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I thought Raptor was my first game illustrated by Vincent Dutrait, until I learned from Vincent himself, at the Cannes game fair, that he had drawn the board and box of my China Moon, in 1996, as one of his first jobs, when I was still a little known game designer and he was a very young illustrator. He was certainly not as professional as he is now, but the cover and board of China Moon were really nice.

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Twenty years later, he is a well known illustrator, I am a well know designer, and he makes the graphics for raptor, a two player boardgame I have designed with Bruno Cathala – or rather Bruno Cathala has designed with some aid from me. The result is impressive, deliberately kitsch, with a cover looking like a movie poster from the sixties – a clever way to make a not so direct wink at a more recent movie – and cards in a rather realistic style.

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The illustrator can be involved in two very different ways in a game design. Most times, the illustrator just send the pictures he was asked for, and all the templates and prepress are done by the publisher. Sometimes, and that’s how Vincent Dutrait likes to work, , the illustrator also makes the card templates and the various game symbols and icons, and delivers an almost finished game mock-up. Well, it’s lucky we were checking the various steps, because that’s how we avoided the following symbol – obviously figuring a frightened scientist squatting in the high herbs to hide from the raptors.

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Let’s quote Vincent about the way he designed the cards : “Working on asymmetric card sets was very interesting. I went so far as to use slightly different templates to give a wild nature and jungle feel to the raptor cards, and a more clean and civilized look to the scientist ones.” Indeed, I had not noticed that the border lines were straight and clean on the scientist cards and irregular on the raptor ones.

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There were some interesting discussions about Raptor’s cover picture, with its angry and menacing dinosaur almost jumping out of the box. I would personally have validated Vincent’s first color drawing, but some at Matagot found it too light, too cartoony for what is a relative serious and strategic game. So, Vincent was required to soften the contrast between the fun and cartoonish scientists and the aggressive and realistic raptors. He did it, and the result is great – I only wonder why the pretty blonde lost her glasses in the way.

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Raptor arrives soon, next fall, and I hope I won’t have to wait twenty more years to have another game illustrated by Vincent Dutrait.

Raptor
A game by Bruno Faidutti & Bruno Cathala
Graphics by Vincent Dutrait
2 players – 30 minutes
Published by Matagot (2015)
Boardgamegeek
Vincent Dutrait’s website

Paris est Ludique – bilan et photos
Paris est Ludique Report

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Je reviens de Paris est Ludique, petit festival bien sympathique, mais qui, grisé par son succès, commence à être un peu à l’étroit dans le boulodrome Léo Lagrange (ça ne s’invente pas), en bordure du parc de Vincennes. Paris est Ludique se déroule entièrement à l’extérieur, ce qui suppose un peu de chance avec la météo, et ce fut le cas cette année. Mais, bon, c’est un boulodrome, c’est à dire un terrain sableux, et après 48 heures on en revient toujours blanchi et desséché. Qu’importe, tout le petit monde français du jeu était là, auteurs, éditeurs et journalistes, et on a joué, causé et bu pas mal de bière. Je ne sais d’ailleurs pas bien si c’est la fatigue, le soleil, le sable ou la bière qui est responsable de mon mal de crâne – sans doute un peu des trois.

Plusieurs de mes jeux qui doivent arriver dans les mois qui viennent étaient n avant-première à Paris Est Ludique. J’ai surtout présenté Waraehouse 51 et Waka Tanka, parce que je n’avais pas encore eu l’occasion de jouer avec les illustrations finales, et peut-être aussi parce que les éditeurs étaient l’un en face de l’autre, ce qui me facilitait les choses. Les deux ont été très appréciés. Je n’ai pas joué à Raptor, mais il n’y avait pas besoin de moi, les deux tables de démo étaient toujours pleines. Avec Éric Hanuise, nous avons réussi à extirper Serge de son jeu de Mare Nostrum géant pour une demi-heure, le temps d’une partie d’Argo, qui nous a permis de valider tous les changements apportés par Eric, qui dynamisent sacrément le jeu sans rien lui enlever de sa méchanceté ni de sa richesse.

J’étais tellement occupé à présenter et à discuter les jeux qui vont sortir que j’en avais presque oublié que j’avais aussi amené quelques prototypes. Ce n’est que dans la dernière heure que j’y ai repensé. J’ai donc juste eu le temps de montrer deux petits jeux aux frères Hascoet, de Bombyx – je les leur ai laissé, j’espère qu’ils seront convaincus.

Merci à toute l’équipe en orange, et à l’année prochaine !


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I’m just back from Paris Est Ludique, the small and cozy Paris summer game festival. Well, it’s still cozy, but it’s becoming a bit crowded, and a larger place will probably be needed next year. Je reviens de Paris est The fait takes place entirely outside, so the success depends much on the weather which, luckily, was really good this year. The place, nevertheless, is also a bocce field, and after two whole days there I am completely dry and covered in white sand. Anyway, the whole (and small) French boardgaming world was there, authors, publishers, critics and journalists. We played a few games, talked a lot and drank much beer. I don’t know if my headache was caused by sand, sun, tiredness or beer – probably a bit of everything.

Several games of mine are due to be published in the next few months and were shown at the fair. I played both Wanka Tanka and Warehouse 51 on near final prototypes, with the final graphics, for the first time. Both seemed to be really well-liked. I didn’t play Raptor, but the two tables where the game was demoed were always full. Eric Hanuise and I managed to lure Serge Laget out of his giant Mare Nostrum game to play a game of Argo together and validate the last changes made by the publisher. I’m impressed by the way Eric managed to speed-up the game without removing anything from it.

I was so busy discussing and demoing my upcoming games that I almost forgot I had also brought a few new prototypes. Actually, I remembered them only in the very last hour, and had just the time to show two of them to the Hascoet brothers, at Bombyx – they kept them, I hope they’ll like them.

Thanks to all the orange shirt team, see you next year !

Les Bruno sont de retour (III)
The Brunos are back (III)

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Deux rééditions, Mission : Planète Rouge et le Collier de la Reine, mais aussi un nouveau jeu pour deux joueurs, Raptor, sur lequel nous travaillons depuis plus de deux ans. J’en ai déjà conté l’histoire ici, il y a quelques semaines, mais les belles illustrations de Vincent Dutrait, que je viens de recevoir, sont l’occasion d’en parler à nouveau.

Dans une île paradisiaque, que l’on imagine quelque part dans l’océan Pacifique ou Indien, vivent des dinosaures « recréés » par l’homme à partir de leur ADN, comme dans Jurassic Park – dont nous ne savions pas qu’une suite était en préparation lorsque nous avons commencé à travailler sur ce jeu. Parmi eux, bien sûr, les rapides et féroces velociraptors.

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Sur l’île des dinosaures se trouve aussi une équipe de chercheurs, qui pensaient être là pour se livrer tranquillement à quelques expériences scientifiques. Car bien sûr, il y a un problème – une femelle raptor a brisé la grille de son enclos et a pondu ses œufs dans le parc. Un joueur joue donc l’équipe de scientifiques, qui doivent tuer neutraliser la maman raptor et capturer les bébés avant qu’ils ne se dispersent dans la forêt où nul ne pourra les retrouver. Son adversaire joue la femelle raptor et ses petits, qui doivent dévorer effrayer les scientifiques et parvenir à s’enfuir.

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Dans le parc se trouvent, en début de partie, maman raptor et ses cinq petits, tandis que quatre scientifiques arrivent sur les bords du plateau de jeu. Chaque joueur dispose de neuf cartes, numérotées de 1 à 9, ayant chacune un effet particulier. Les cartes permettent au joueur scientifique de déplacer ses hommes en jeep, de mettre le feu à la forêt, de déployer du gaz anesthésiant, voire d’héliporter des renforts. Le joueur raptor, quant à lui, peut rappeler les petits auprès de leur mère ou se cacher dans la forêt.

À chaque tour, les deux joueurs jouent une carte face cachée, puis la révèlent simultanément. Le joueur ayant joué la carte de plus faible valeur peut en appliquer l’effet, et son adversaire dispose ensuite d’un nombre de points d’action (mouvement ou attaque) égal à la différence entre les valeurs des deux cartes. Chacun connaissant les cartes de l’adversaire, ce petit système permet des calculs savants, mais aussi pas mal de bluff et quelques coups fourrés. Bref, c’est bien un jeu de Bruno Cathala, calculatoire et stratégique, et de Bruno Faidutti, subtil et méchant.

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Un jeu de Bruno Faidutti & Bruno Cathala
Illustré parVincent Dutrait
2 joueurs – 30 minutes
Publié par Matagot (2015)
Ludovox          Tric Trac          Boardgamegeek


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Two new editions, of Mission: Red Planet and Queen’s Necklace, but also a brand new two players game, Raptor, on which we are working for more than two years. I’ve already written a long history of this game here, a few weeks ago, but Vincent Dutrait’s gorgeous illustrations, which I just received, are a good opportunity to talk a bit more about it.

Dinosaurs, probably recreated by man from their DNA, live a paradise island, somewhere in the Indian or Pacific Ocean. Among them, of course, the fierce and fast velociraptors. This is more or less the storyline of the Jurassic Park movie, of course, but Bruno and I didn’t know a sequel was in the works when we started working on this game.

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There’s also on the island a team of scientists, who originally came here to carry out a few experiments on the dinosaurs, but now have to improvise a survival strategy after a pregnant female raptor escaped from her pen and laid her eggs in the park. One player controls the scientists who must kill neutralize the female raptor and capture the babies before they run wild into the forest where no one will ever find them again. The opponent controls mamma raptor and her hatchlings, who must get rid of the annoying humans and escape into the wild.

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The game starts with mamma raptor and the five hatchlings in the center of the park, while the scientists arrive at its extremities. Each player has nine cards, each with a value from one to nine and a special effect. The scientist cards allow for jeep movement in the park, for lightning fire, for using sleeping gas or even bringing reinforcements by helicopter. The dinosaur player’s cards can be used to call back hatchlings next to their mother, to extinguish fire, or to hide in the bushes.

Every round, both players play a face down card, and the cards are revealed simultaneously. The player who played the lowest value card can first use its effect. Then his opponent can spend as many action points as the difference between the values of the two cards for movement and attack. Since each player knows the cards left in his opponent’s hand, this makes for some tactical calculations, as well as some clever bluffing. Raptor is both a tactical brain burner by Bruno Cathala and a nasty little card game by Bruno Faidutti.

Raptor
A game by Bruno Faidutti & Bruno Cathala
Graphics by Vincent Dutrait
2 players – 30 minutes
Published by Matagot (2015)
Boardgamegeek

Le raptor et les araignées
The Raptor and the Spiders

Raptor
Bruno Cathala testant Raptor à Etourvy.

En 2011, j’ai été contacté par les gens de Sophisticated games, détenteurs des droits de publications de jeux de société inspirés de l’œuvre de Tolkien, qui souhaitaient profiter de la sortie prochaine du film inspiré par The Hobbit pour publier deux ou trois jeux basés sur cette histoire. Ayant été un grand fan de Tolkien dans mon adolescence, l’idée m’a bien sûr séduit, et je décidai aussitôt de répondre à cet appel. Il était bien entendu que d’autres auteurs avaient également été contactés, et que mon jeu ne serait pas nécessairement parmi les un ou deux sélectionnés, mais j’étais prêt à prendre le risque. Pour un auteur de jeu, travailler sur l’œuvre de Tolkien est le genre d’occasion qui ne se présente pas deux fois.

Le lendemain, j’avais relu l’Histoire d’un aller et retour, et le surlendemain, j’avais choisi un épisode, celui de Bilbo et les nains attaqués par les araignées dans la forêt de Mirkwood, qui me semblait pouvoir faire un intéressant jeu tactique asymétrique, un joueur jouant le hobbit et les nains, un autre les arachnides. Les jeux à deux n’étant pas ce que j’ai le plus de facilité à faire, je décidais de faire appel à la collaboration d’un spécialiste du genre, accessoirement excellent ami, Bruno Cathala – qui n’avait jamais lu le hobbit mais s’empressa de réparer cet oubli. Ce fut un sacré boulot, avec de multiples versions, des plateaux de diverses formes, et plusieurs fois j’eus l’impression que nous repartions de zéro. Le résultat, je dois l’avouer, est surtout un jeu de Bruno Cathala – disons 25% de Bruno Faidutti, le thème et l’idée de départ, et 75% de Bruno Cathala, les mécanismes et les centaines de parties tests et de réglages. C’est en particulier Bruno (l’autre) qui eut l’idée du système de cartes action, dans lequel le joueur ayant joué la plus faible carte effectue l’action correspondante avant que son adversaire n’ait autant de points de déplacement que la différence entre les valeurs des cartes. Oui, je sais, ça a l’air compliqué dit comme cela, mais c’est très simple à jouer et cela crée des choix tactiques et psychologiques redoutables.

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Prototype de Mirkwood, avec les araignées de Descent.

Nous étions assez contents de nous. Nous avions un jeu tactique et stratégique aux mécanismes originaux, plein de rebondissements, et au thème très bien rendu. Les araignées s’efforçaient d’endormir les nains, puis de les envelopper dans leur toile, tandis que Bilbo, armé de sa dague, cherchait à libérer ses amis. Même l’anneau avait sa place, permettant au hobbit de disparaître pour resurgir en un autre endroit de la forêt. Nous avions surtout choisi un thème original, un épisode du récit et non l’ensemble du voyage de Bilbo, déja conté dans quelques jeux.  Je crois qu’il s’en est fallu d’assez peu, mais notre jeu, Mirkwood, ne fut pas sélectionné.

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L’un des premiers prototypes de Raptor.

J’étais d’autant plus déçu qu’il me semblait évident que ce jeu, conçu à partir d’un récit très précis, et mettant en scène les personnages du conte, ne pouvait pas être adapté à un autre thème. Je pensais donc garder en souvenir dans un coin mon prototype de Mirkwood, et en rester là. J’ai donc été surpris et dubitatif lorsque, quelques mois plus tard, je reçus un coup de téléphone du Bruno des montagnes m’annonçant qu’il avait réalisé une nouvelle version de notre jeu sur un thème complètement différent. Quelques jours plus tard, et après une partie via Skype, je me rendis à l’évidence : le nouveau thème, la chasse aux dinosaures, fonctionnait parfaitement. Le hobbit était devenu maman raptor, les nains des bébés raptors, et les araignées des scientifiques cherchant à capturer des dinosaures échappés de quelque Jurassic Park. Bien sûr, le nouveau thème imposait encore quelques petits bricolages, quelques adaptations, mais il était déjà étonnant de cohérence. Là encore, ce fut l’autre Bruno, décidément plus consciencieux que moi, ou plus doué pour les réglages fins, qui s’en chargea.

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Mon prototype de Raptor

Présenté à Matagot, le jeu plut beaucoup et le contrat fut rapidement signé…. mais les choses n’allaient pas en finir là. Le développement se poursuivit en effet après la signature du contrat, et fut long et semé d’embuches. Raptor est un jeu asymétrique, Bruno un auteur pointilleux et Matagot un éditeur exigeant. Un jour, c’était le joueur raptor qui gagnait trop facilement. Quelques semaines plus tard, après réglages subtils et parfois découverte de nouvelles stratégies possibles, c’était le scientifique. Tout le monde semblait très préoccupé par l’équilibre du jeu, et je regrette aujourd’hui un peu de ne pas être intervenu plus tôt pour dire que tout cela n’avait guère d’importance tant que chacun a plus ou moins sa chance et que les joueurs s’amusent. Les réglages successifs aboutirent surtout à compliquer le jeu, et à affaiblir l’évidence du thème, et que le mieux est l’ennemi du bien. Pour je ne sais plus quelle raison, les incendies furent même délaissés pour être remplacés par des barrières électrifiées bien moins romantiques. Toutes les cartes avaient deux, parfois trois effets distincts. En voulant trop en faire, nous avions cassé l’évidence originelle du jeu. Fort heureusement, tout le monde, plus ou moins en même temps, se faisait la même remarque, et nous décidantes donc d’un commun accord de revenir à la version Raptor initiale de Bruno. Nous y jouâmes, et tout le monde fut d’accord pour dire que ce jeu était bien meilleur que celui qui avait été obtenu après deux ans de développement. Bruno refit encore quelques réglages, mais en s’interdisant toute nouvelle règle et toute carte un peu complexe avec plusieurs effets. C’était la bonne démarche, et en quelques semaines, le jeu était prêt.

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Illustrations de Vincent Dutrait.

Raptor arrive dans quelques mois, publié par Matagot et illustré par Vincent Dutrait. il y aura les noms des deux Bruno sur la boite, mais j’ai parfois l’impression que mon seul rôle dans tout cela fut d’avoir été un peu à l’origine de cette histoire, avec un thème qui n’est même plus présent dans le jeu tel qu’il va être publié. Bref, c’est surtout un jeu de Bruno Cathala, dont je me sens plus testeur que véritablement auteur. Mais c’est un jeu que j’aime beaucoup.

Raptor
Un jeu de Bruno Faidutti & Bruno Cathala
Illustré parVincent Dutrait
2 joueurs – 30 minutes
Publié par Matagot (2015)
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Raptor
Bruno Cathala plays Raptor at Etourvy

In 2011, I was contacted by the people at Sophisticated games, who own the license right for games based on J.R.R. Tolkien’s books, asking if I would be interested in submitting a game design  based on the Hobbit book, that they could publish when the movie will get out. Having been a Tolkien fan as a teenager, I was very excited at the prospect, and jumped on the occasion. It was clear from the beginning that they had asked several game designers to work on the idea, and that they would select only one or two of a dozen submissions, but I was willing to take the risk. Working on a game based on Tolkien’s books is the kind of opportunity a designer like me cannot let go by.    

Two days later, i had found my old copy of There and Back Again, and read it again for the first time in about twenty years. I had also found the episode I wanted to describe in the game, the Mirkwood Forest, when Bilbo and the dwarves are attacked by giant spiders in a deep and dark forest. I thought it could make for an interesting asymetrical two players game, with one player moving the dwarves and hobbits, and the other playing the spiders trying to capture them in their web.
Two players games are not my strong suit, so I also decided to ask Bruno Cathala for some help. Bruno is indeed  both a very good friend and a specialist in strategic two players games. Bruno accepted at once, even though he had never read the Hobbit so far – but he did in the following days.
It was a long and hard work. We made a dozen different boards, with square or hexagonal spaces, or with movement lines, and several times I felt like we were starting all over again. I must admit that the result was mostly a Bruno Cathala game – let’s say 25% Bruno Faidutti, for the original idea and the storyline, and 75% Bruno Cathala, for the core game systems, hundreds of test games and lots of fine tuning. Bruno designed the action card system, in which the players select their card simultaneously, then the player who played the lowest value card can use its special effect, before the other player has as many action points as the difference between the two card values. It might sound complex, but it’s very simple and challenging when playing, and generates subtle tactical and bluffing opportunities.

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Mirkwood prototype, with Descent spiders

We were quite satisfied with our game, Mirkwood. We had designed an original two players tactical game, dynamic, challenging, and true to the book. The spiders had to capture the dwarves in their web and put them to sleep, while the hobbit tried to cut the web with his dagger, free his friends and escape from the forest. The ring allowed the hobbit to disappear for a while and reappear somewhere else in the forest. I liked the idea that we had chosen a specific episode from the book, and not designed one more game about the whole journey of Bilbo. Our game was seriously considered for publication, but in the end was not selected.

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An early Raptor prototype

I was disappointed, and certain that our game, based on a very specific story and using the characters from the book, could not be adapted to another setting. I was ready to keep my prototype of Mirkwood as a souvenir, and play it once every other year. I was very surprised and skeptical when, a few months later, Bruno called me and proudly told me that he had made a new version of the game in a completely different setting. A few days later we played a game of the new Raptor game on Skype, and I had to admit that the n32 storyline, dinosaur hunt, was as consistent and convincing as the original Mirkwood forest episode. The hobbit was now mummy raptor, the dwarves were raptor eggs ready to hatch, and the spiders had become scientist trying to capture the mother who had just escaped from some Jurassic Park. Of course, there were some minor changes due to the new setting, mostly in the card effects, but nothing really critical. Once more, Bruno, who is much better than I am at fine tuning, or may be just less lazy, made most of the work.

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My Raptor prototype

We showed the new raptor prototype to Matagot. They liked it a lot, and we signed almost at once, but this was not the end yet. After the contract was signed, a long development process started, full of pitfalls and fires. Raptor is an asymmetrical game, Bruno is a persnickety designer, and Matagot a demanding publisher. They wanted the game to be perfectly balanced. On day, the raptor player was winning six games in ten. A few weeks later, after Bruno made some fine tuning and new strategies appeared, it was the scientist player. They were all obsessed with balance, and I regret that I didn’t jump in earlier to say that this doesn’t really matter as long as both players have some chance to win and the game is fun to play. Successful tunings and changes made the game carefully balanced, but they had two perverse effects – they made the game more complex and less thematic. At some time, the romantic fires were even replaced with ugly electric barriers. Most of the cards ended with two, or even three different effects. Fortunately, all the people involved finally realized that something was getting wrong, and we all decided to start again from Bruno’s original Raptor design, the one we had when the contract was signed. We played it again, and we all agreed it was a much better game than the one we had come up with after two years of development. So Bruno started again from it, trying to balance it again but with strict limitations – no new rules, one effect per card. This time, it was a matter of weeks.

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Graphics by Vincent Dutrait.

Raptor will be out in a few months, published by Matagot and illustrated by Vincent Dutrait. Both Bruno’s will be credited on the game box, but I sometimes feel that my only part in this game was to come up with the original opportunity, and the original setting which wasn’t even kept till the end. In short, it’s mostly a game by Bruno Cathala, and I feel more like a playtester than like a co-designer – but it’s a game I like a lot.

Raptor
A game by Bruno Faidutti & Bruno Cathala
Graphics by Vincent Dutrait
2 players – 30 minutes
Published by Matagot (2015)
Boardgamegeek