Entre création et édition, les ambiguïtés du “développement” d’un jeu
Between design and publication, the ambiguities of game “development”

En octobre 2022, j’ai été invité à participer à une rencontre d’auteurs et d’éditeurs de jeu à Puszczykowo, en Pologne, dont j’ai parlé un peu dans un autre post. J’y ai donné une conférence, inspirée par quelques déconvenues récentes, sur les bienfaits qu’apportent, mais aussi les problèmes que posent, les modifications d’un jeu par l’éditeur. Cet article en est une version rédigée, un peu développée, et mise à jour puisque plusieurs des jeux dont je parlais sont depuis arrivés en boutique, ou sont maintenant, en juin 2023, en train d’arriver.

Les romanciers assurent volontiers, en plaisantant à demi, qu’éditeurs et directeurs de collection sont des écrivains frustrés. Il n’en va pas très différemment dans le monde du jeu. Cela rend les discussions sur les détails d’un jeu à la fois intéressantes, parce que techniques, et difficiles, parce qu’empreintes de jalousie. Cela fait surtout de la phase de « développement » d’un jeu, un euphémisme pour « modifications apportées après que le contrat a été signé », la partie la plus mentalement épuisante et moralement difficile de la création, au point que je sois parfois tenté de laisser tomber.

Bien sûr, comme tous les auteurs de jeux, je ne présente à des éditeurs que des prototypes longuement testés et qui me semblent prêts à être publiés, après éventuellement l’ajout de quelques jolis dessins. Il reste néanmoins parfaitement normal que celui qui publie le jeu veuille faire quelques modifications. La nature et l’ampleur de ces bricolages devraient néanmoins être discutées à l’avance, ce qui est rarement le cas, voire précisées dans le contrat, ce qui n’est jamais le cas. Les désaccords entre auteur et éditeur sur le « développement » du jeu sont bien plus fréquents que ceux portant sur des questions financières, mais nos contrats ne parlent le plus souvent que d’argent, et parfois de temps. Malheureusement, lorsqu’un désaccord survient à propos d’un point qui n’est pas discuté dans le contrat, l’éditeur, qui il est vrai est seul à risquer son argent, se retrouve en position de force et peut faire un peu ce qu’il veut.

L’organisation du développement (j’arrête les guillemets) du jeu après que le contrat a été signé est d’abord une question pratique. Les désaccords entre auteur et éditeur sont une question morale, et pourraient même devenir une question légale, bien que je ne connaisse pas (encore?) d’exemple qui ait fini devant les tribunaux. Je signale néanmoins que le droit est, en la matière, assez différent d’un pays à l’autre. En droit français, les droits d’auteur moraux et patrimoniaux sont distincts, et seul le droit patrimonial est cédé à l’éditeur, qui ne peut donc théoriquement pas modifier substantiellement une création, et donc s’agissant d’un jeu en modifier la règle, sans l’accord explicite de son auteur originel. Cette distinction n’existe pas dans de nombreux pays, et notamment aux États-Unis.

L’important n’est cependant pas la loi. C’est l’auteur, l’éditeur, les personnes, leurs relations, et bien sûr le jeu. Si je tiens le plus souvent à ce que mes jeux soient publiés avec les règles précises que j’ai imaginées et rédigées, il m’est arrivé dans quelques cas, après en avoir discuté, de laisser délibérément le champ libre à l’éditeur – mais cela dépend du jeu, du moment, de l’éditeur. Chaque cas est particulier, et chaque cas doit être discuté à l’avance.

Je connais bien sûr quelques créateurs qui ont eu des problèmes avec le calcul ou le paiement de leurs droits d’auteur, mais je n’en connais pas un seul qui n’ait une histoire un peu absurde à raconter sur les modifications de dernière minute apportées à un jeu par un éditeur, sur les règles bidouillées à la va vite, ou, et c’est un autre problème dont j’ai déjà parlé en détail dans un autre article, sur les traductions faites avec les pieds.
Les désaccords financiers, en outre, peuvent toujours se régler, quitte à ce que ce soit avec un peu de retard, quitte à ce que soit, ce qui est heureusement rarissime et ne m’est jamais arrivé, après intervention de la justice. Les problèmes éditoriaux ne peuvent pas être réparés, un jeu n’ayant quasiment jamais aujourd’hui de seconde chance.

Si cet article parle presque exclusivement de mon expérience personnelle, c’est parce que je ne suis pas sûr que mes collègues auteurs souhaitent que je rapporte ce qui a pu leur arriver, même si beaucoup m’en ont parlé. En outre, si discuter de ces problèmes est difficile pour un auteur déjà bien installé comme moi, j’imagine que c’est plus compliqué encore pour de jeunes créateurs ayant une moindre expérience du petit monde ludique, et pesant moins lourd face à un éditeur. Je vais donc dans la suite de cet article m’adresser directement à l’auteur, même si mon propos est un peu aussi destiné aux éditeurs, souvent trop sûrs d’eux en matière de « développement ».

Rentrer dans les cases

Donc, vous êtes auteur de jeu néophyte, vous avez présenté votre projet de jeu à un éditeur, qui le trouve intéressant mais….

Le thème ne rentre pas dans sa gamme
Le thème est trop proche de celui d’un autre de ses jeux
C’est trop long
C’est trop court
C’est trop agressif
Cela manque d’interaction
C’est trop simple
C’est trop compliqué
Il faudrait que cela tourne à deux joueurs – j’ai sans cesse ce problème, car très peu de mes prototypes sont conçus pour deux joueurs.

Pour le thème, cela dépend du jeu. Il est souvent facile de le changer, mais c’est aussi parfois impossible ou absurde. Pour tout le reste, rien n’est inconcevable tant que c’est fait avec soin, sans se presser, et par l’auteur ou du moins avec sa participation. Les écrivains ont le même problème. Le manuscrit de mon livre sur les licornes était 2,4 fois trop long, mais c’est moi qui ai fait les coupes.

Le thème (enfin, l’univers)

Note : certains critiques ludiques font une distinction, empruntée à la critique littéraire, entre le thème et l’univers. Le thème serait la nature de l’intrigue (coopération, enquête…) et l’univers le contexte du récit (médiéval fantastique, exploration spatiale…). Si cette distinction est intéressante pour parler de roman ou de théâtre, elle ne fait pas toujours sens dans les jeux de société, ou ce que les littérateurs appellent « thème » est plus ou moins intégré aux mécanismes. J’emploie donc ici le mot thème dans son sens ludique usuel, et certains lui préfèreront univers.

Parfois, un éditeur est séduit par un jeu qu’il a essayé, mais pense que le thème n’est pas vendeur, ou ne convient pas à sa gamme. C’est le problème le plus fréquent, et en général le plus aisé à résoudre – un changement est possible, ou ne l’est pas.
Ne s’engageant pas à publier un jeu tant qu’ils ne sont pas fixés sur son thème, la plupart des éditeurs vont discuter d’un nouvel univers avec l’auteur, ou au moins annoncer clairement qu’ils comptent en trouver un, avant de signer le contrat d’édition. Deux ou trois fois pourtant, il m’est arrivé de voir un éditeur aborder le changement de thème après la signature, comme s’il était évident que cela ne poserait aucun problème. Ils ont toujours cependant, ce qui est la moindre des choses, discuté du nouvel univers avec moi.

Quant à savoir si ce changement est techniquement possible ou non, cela dépend bien sûr du jeu.
Beaucoup sont fondamentalement abstraits. Si le thème n’est rien de plus qu’un vague contexte exotique ou historique permettant de donner un nom au jeu et à ses éléments, en changer ne devrait poser aucun problème. Je ne me souviens plus du thème originel d’Attila, mais je suis certain qu’il n’y était pas question de barbares dont les chevaux piétinent l’herbe. L’un de mes prototypes ne s’appelle Chasseurs de vampires que parce que les pions que j’ai utilisé pour faire mon prototype représentent des vampires et des types avec un chapeau 1900. Je ne sais plus si le changement de thème de Mascarade, passé d’Alice au pays des merveilles au carnaval de Venise, est intervenu avant ou après la signature du contrat avec Repos Prod. Pigeons, un jeu dans lequel des vieilles dames donnaient des miettes de pain aux oiseaux, est devenu Chawaï, un jeu de chats polynésiens attrapant des poissons, et c’est toujours le même jeu.


À l’inverse, certains jeux sont tout entiers construits autour d’un univers, rendant le plus souvent ce changement impossible. C’est bien sûr le cas des jeux de simulation, y compris les wargames. Dans d’autres jeux de société moins ambitieux, c’est souvent le signe que ce sont de bons jeux, des jeux qui racontent une histoire. Parmi mes propres créations, je pense à Trollfest ou Mystère à l’abbaye. On peut pourtant parfois avoir des surprises, puisque je ne pensais pas que le jeu que Bruno Cathala et moi avions imaginé, dans lequel une araignée géante tentait de capturer des hobbits, pourrait avec quelques ajustements devenir un jeu où des chasseurs essaient d’attraper des bébés Raptors.

La plupart des jeux, ou en tout cas de mes jeux, se situent quelque part entre ces deux extrêmes. C’est bien sûr là que les choses se compliquent.
Souvent, le changement proposé par l’éditeur donne au jeu une nouvelle dimension que l’auteur n’avait pas imaginé, et sur laquelle il peut rebondir. C’est ce qui est arrivé pour Isla Dorada. Le prototype que j’avais présenté à Funforge avait un thème passablement ennuyeux et peu original, une caravane de marchands dans l’Europe médiévale. Je savais que ce n’était pas terrible, mais je n’avais rien trouvé d’autre. C’est Philippe Nourah, à Funforge, qui a eu l’idée de raconter l’histoire d’un groupe d’explorateurs perdus sur une ile déserte, ce qui est quand même plus sexy. Le changement a été décidé rapidement, me laissant le temps de retravailler le jeu pour l’adapter au nouveau thème, introduisant de nouveaux éléments comme un dirigeable, des pandas tueurs et des guerres tribales. Ce n’est pourtant qu’une fois le jeu publié que j’ai réalisé qu’il y manquait un cliché essentiel des îles tropicales, le volcan. Si un jour ce jeu connait une nouvelle version, je me débrouillerai pour l’ajouter.
Je suis aussi très satisfait du thème de Tonari. Mon prototype, comme le jeu d’Alex Randolph qui l’a inspiré, était purement abstrait. Je savais qu’il avait besoin d’un univers pour prendre toute sa dimension, mais n’en avait pas trouvé de satisfaisant. L’idée du bateau de pêche pris dans la tempête vient de l’éditeur, IDW games – qui a malheureusement quitté le monde du jeu de société peu après la sortie de ce joli jeu qui cherche aujourd’hui un nouvel éditeur.
Même s’il fut fait avec mon accord, le changement du thème de ce qui est devenu Dreadful Circus, a été plutôt raté. Dans le prototype, comme dans le jeu qui sortira en 2023, les joueurs étaient des nains sous la montagne amassant pièces d’or, gemmes et objets magiques. Cela collait parfaitement aux mécanismes du jeu, mais n’était guère plus original que les marchands médiévaux d’Isla Dorada. Je n’ai donc pas été très surpris que l’équipe de Portal décide de changer le thème, et j’étais très content qu’ils en aient trouvé un. Malheureusement, le nouvel univers manque de cohérence, on ne voit pas très bien quelle histoire le jeu raconte. Je ne sais pas bien dans quelle mesure cela est dû au thème lui-même, ou au fait qu’il a été mis en place rapidement, quelques mois avant la publication, sans aucun feedback sur les mécanismes du jeu.

Le premier problème, et souvent la première victime, d’un changement d’univers est la cohérence thématique. Mes jeux ne sont pas des simulations, mais le thème d’origine peut néanmoins avoir influencé les mécanismes de bien des manières. J’essaie par exemple toujours d’introduire de petites règles thématiques, ainsi que des clins d’œil dans les noms et les effets des cartes et autres éléments du jeu. Tout cela est perdu lorsque le jeu change d’univers de référence, et doit être remplacé par de nouvelles astuces, de nouveaux gags, de nouveaux clins d’œil, quitte à changer quelques règles. Souvent, je retire carrément un élément de jeu qui ne fait pas sens dans le nouveau monde. Malheureusement, cette étape essentielle de “retour vers le prototype” est souvent négligée, voire ignorée, l’éditeur se contentant, sans grand souci de logique, de donner aux éléments du jeu de nouveaux noms inspirés par le nouveau référentiel. Si le thème d’un jeu édité semble plaqué, et c’est souvent le cas, c’est parce que le thème a en effet été plaqué, vite et mal, plus souvent par l’éditeur que par l’auteur.
Introduire dans le jeu ces nouveaux clin d’œil, ces nouvelles petites règles, comme Anja Wrede et moi l’avons fait lorsque notre jeu des brebis perdues est devenu Le petit poucet demande un peu de temps, et une bonne connaissance des équilibres du jeu. C’est pourquoi cela doit être fait par, ou au moins avec, l’auteur.

Règles et mécanismes

Et là, les choses se compliquent encore, entraînant désaccords et parfois rancœur. Lorsqu’ils ne sont pas des auteurs frustrés, les petits éditeurs, et plus encore les développeurs professionnels qui œuvrent chez les gros éditeurs, sont d’anciens auteurs. Ils résistent rarement à la tentation de mettre leur grain de sel, d’ajouter de nouvelles règles, de nouvelles cartes, et de bricoler les équilibres du jeu. Ils connaissent les jeux et les joueurs aussi bien voire mieux que vous, ils savent lire et écrire des règles, ils peuvent apporter un regard extérieur et critique nécessaire, mais aussi vaste que soit leur culture ludique, ils n’en savent pas autant que vous sur votre jeu, votre création. Ils peuvent aider à terminer un jeu encore un peu brouillon, ils peuvent donner des conseils utiles, mais vous ne devez pas les laisser vous mettre sur la touche. Les meilleurs développeurs n’essaient d’ailleurs pas de réécrire les règles, et se contentent de guider l’auteur en lui indiquant dans quelle direction travailler.

Bruno Cathala et moi avons eu une expérience un peu étrange avec Raptor. Après que nous avions – enfin, que Bruno avait car c’est lui qui a fait le plus gros du travail – transformé notre jeu de hobbits et d’araignées en jeu de dinosaures et de scientifiques, nous avons trouvé un éditeur intéressé, Matagot. Les premiers mois de travail sur le jeu ont été assez pénibles, l’éditeur apportant aux règles des modifications qui n’avaient pas vraiment de sens. Tous ces changements rendaient le jeu plus complexe, moins thématique, et souvent nous renvoyaient à d’anciennes versions du jeu, d’anciennes règles que nous avions éliminées car elles ne fonctionnaient pas bien. Fort heureusement, si l’éditeur était sans doute un auteur frustré, il était intelligent et, après quelques mois de perdus, a réalisé qu’il faisait fausse route et nous a rendu la main pour, essentiellement, revenir à notre version d’origine. D’autres sont plus têtus, ou ne pensent même pas à consulter l’auteur.

Bien sûr, comme en ce qui concerne le thème, il arrive que l’éditeur / développeur ait d’excellentes idées. Plusieurs des nouveaux personnages de Mascarade, ou de la grande boite de Citadelles, sont des idées des équipes de Repos Prod et de Z-Man. Ne vous braquez pas contre l’équipe éditoriale, n’ignorez pas ses suggestions, mais – sauf exception, j’y reviendrai – ne la laissez pas non plus s’approprier votre création. Testez chaque nouvelle règle, chaque nouvelle carte, pas après pas, une par une.

Rien n’est plus frustrant que de ne pas avoir de nouvelles d’un éditeur pendant des mois, puis de recevoir soudain un lien vers des pdfs déjà quasiment maquettés, de nouvelles règles et de nouvelles cartes, avec une centaine de modifications par rapport à la version précédente. L’auteur, celui dont le nom va figurer sur la boîte, découvre alors, trop tard, que le “développement” s’est fait sans lui, que ce n’est pas son jeu qui va être publié. C’est ce qui m’est arrivé avec Dreadful Circus, et c’est la raison pour laquelle je suis passé à côté de certaines des modifications les plus problématiques. Fort heureusement, après une discussion avec mes amis de Portal où nous avons tous reconnu nos erreurs, nous nous sommes entendus pour que je récupère mes droits. Le jeu que j’avais imaginé, sans doute la création dont je suis le plus fier, avec ses règles, ses équilibres et son thème, sortira cette année chez Trick or Treat Games sous le nom de Treasure of the Dwarves.

Cela se passe bien mieux lorsque l’on accepte de lâcher un peu son bébé à l’avance, après en avoir discuté. J’aurais sans doute préféré que Oink games, le sympathique éditeur japonais de petits jeux dans de toutes petites boîtes, publie le jeu de décompte des étoiles dans le ciel que je lui avais proposé. J’ai néanmoins été très content lorsque Jun Sasaki m’a dit que cela lui avait donné une idée pour un autre jeu, assez différent, utilisant le même mécanisme central. J’ai vu son jeu, j’y ai joué en ligne avec lui et son équipe, et j’ai accepté qu’il soit publié. Mon nom vient cependant en second sur la boite après celui de Jun. Il était originellement entendu que je pourrais continuer à chercher un éditeur pour mon jeu originel, mais j’ai abandonné cette idée après quelques parties de la version finale de Whale to Look. Contrairement à ce qu’il s’était passé pour Dreadful Circus, Whale to Look est en effet meilleur, plus léger et plus dynamique, que mon Constellations.

Vampire the Masquerade – Vendetta est passé par trois phases de design successives, ce qui en fait un bon exemple de la manière dont un éditeur peut efficacement gérer le développement du jeu.
Lorsque Charlie Cleveland, designer de jeux videos, entreprit de concevoir un jeu de société sur le thème des vampires, Il décida prudemment de demander l’aide d’un auteur de jeu de société plus expérimenté. J’ai eu la chance qu’il me choisisse. Partant de son premier prototype, nous avons ensemble réalisé une deuxième version du jeu, plus fluide, et qui nous a paru suffisamment différente pour que nos deux noms figurent sur le prototype – j’étais un peu le développeur. Nous avons ensuite trouvé un éditeur, Horrible games, qui décida de situer l’action dans l’univers de la Mascarade – toujours des vampires, certes, mais des vampires un peu spéciaux, avec leur monde, leur culture. Cet univers était familier aussi bien à Charlie qu’à Lorenzo et Hjalmar, de Horrible Games, mais je n’en connaissais à peu près rien. Pour travailler avec eux à cette phase finale du développement, il aurait fallu que je passe d’abord des mois à me documenter, essentiellement en lisant des livrets de jeu de rôles. Je choisis alors de me mettre en retrait, mais l’auteur originel, Charlie, était toujours là et fit même le voyage jusqu’à Milan pour quelques sessions intensives de tests et de développement. Charlie, Lorenzo et Hjalmar ont fait, tous ensemble, un excellent boulot.

Remakes et rééditions

Étant un vieil auteur de jeu, j’ai maintenant dans mon « catalogue » de nombreux jeux qui ne sont plus édités, et dont quelques uns ont connu deux ou trois versions différentes. Si vous êtes un éditeur éventuellement intéressé, voici un post récent avec une liste de titres disponibles.

Serge Laget et moi avions, il y a quelques années, décidé de reprendre de fond en comble Ad Astra pour en faire une version plus dynamique, qui sort ces jours-ci chez un éditeur américain, Great Gamers Guild. Là encore, nous avons fait le plus gros du développement, l’éditeur testant quelques versions successives et nous envoyant de temps à autre ses remarques et suggestions. Serge n’étant pas très à l’aise en anglais, c’est moi qui ai écrit les règles, mais en discutant de chaque point avec lui. L’équipe de the Great Gamers Guild a ensuite reformulé quelques passages, mais toujours après en avoir discuté avec nous. Cela s’est malheureusement moins bien passé avec l’éditeur de la « localisation » française.

Le plus souvent cependant, et en particulier lorsque c’est l’éditeur qui m’a contacté pour faire une nouvelle version d’un jeu que j’ai un peu perdu de vue, voire dont j’ai oublié les règles, je n’ai pas de plaisir ou d’intérêt particulier à m’y replonger. Je trouve cela à la fois plus difficile et moins excitant que d’essayer de faire quelque chose de vraiment nouveau. Qu’elle ait eu du succès ou non, si « ma version » originelle du jeu a été publiée, j’e n’ai guère de problèmes à laisser un autre, le plus souvent un éditeur, la retravailler à sa guise. Ayant déjà fait ce que je pouvais faire d’une idée, je suis même curieux de voir ce que d’autres pourront en tirer.

Grail Cup, qui arrive ces jours-ci chez Matagot, est un bon exemple de cette démarche un peu plus distancée. Il s’inspire d’un jeu plus ancien, Lost Temple, paru il y a une quinzaine d’années, qui reprenait déjà le système de choix de personnage de Citadelles, mais dans un jeu de course. Lost Temple ne s’était d’abord pas trop mal vendu, mais les ventes avaient vite décliné et j’avais récupéré les droits. Me penchant à nouveau dessus, il m’a semblé que je pouvais le dynamiser en supprimant les gemmes, qui étaient un peu la monnaie du jeu. J’ai donc fait un nouveau prototype. Matagot s’y est intéressé, mais à condition de pouvoir changer le thème. Nous avons discuté ensemble de quelques idées, pour nous entendre sur les chevaliers de la table ronde et la quête du Graal. Lost Temple existait déjà, il me restait quelques exemplaires d’auteur, et j’étais déjà pas mal pris par d’autres projets, certains d’ailleurs chez Matagot. Nous avons donc convenu ensemble que ce serait l’équipe de l’éditeur qui s’occuperait de cette nouvelle version. De temps en temps, ils me montraient leur dernière version pour que je puisse la tester, la valider, et parfois y glisser mon grain de sel, mais l’initiative, les orientations, le gros du travail ne sont pas de moi. Le résultat est sans doute meilleur que ce que j’aurais pu faire.

J’ai récemment placé pas moins de cinq jeux chez un nouvel éditeur très sympathique, Trick or Treat studios. Trois d’entre eux, Trollfest, Treasure of the Dwarves et un troisième dont je ne peux pas encore parler, sont de nouvelles créations, que l’éditeur ne m’a guère demandé de modifier. Halloween Party est une nouvelle édition de Toc Toc Toc!, un petit jeu de cartes paru il y a plus de dix ans. Gwenaël Bouquin et moi, les deux auteurs d’origine, avons travaillé ensemble avec l’équipe de Trick or Treat pour revoir un peu les effets des cartes.

Le dernier jeu, qui lui aussi n’a pas encore été annoncé, est aussi une nouvelle version d’un petit jeu assez ancien. L’éditeur souhaitait changer le thème, ce qui impliquait de revoir tous les effets des cartes pour construire des decks cohérents avec le nouvel univers, et j’ai dit clairement que ce travail ne m’intéressait pas vraiment. C’est donc l’éditeur qui développe tout cela en interne, tandis que je me contente de regarder de temps à autre où ils en sont et de tester un peu les decks pour vérifier qu’ils ne sont pas trop déséquilibrés. Le boulot n’est pas encore terminé.

Les règles, écriture et réécriture

Un jeu, au fond, ce n’est qu’une règle, et c’est donc la règle que vous devez relire avec soin pour vérifier qu’une modification n’y a pas été apportée sans que vous soyez au courant. Cela peut arriver même dans les jeux les plus simples. Je me souviens de la toute première édition de Diamant, dans laquelle l’éditeur avait sans prévenir personne supprimé la règle selon laquelle, lorsque deux cartes danger identiques sont piochées, l’une d’entre elles et retirée du jeu. Lorsque je repérai, au dernier moment, cette curieuse « correction », l’explication de l’éditeur fut qu’il ne voyait pas de problème à enlever une petite règle sans importance qui ne faisait que compliquer le jeu. C’est certes une petite règle de rien du tout, mais elle est essentielle car elle augmente les enjeux et diminue les risques au fur et à mesure de la partie, rendant possible des come-backs inattendus, ce qu’il n’avait pas réalisé. Si je n’avais pas fait attention, si je n’avais pas insisté pour que ce « petit détail » soit réintroduit dans les règles, le jeu serait paru sans et n’aurait peut-être pas rencontré le succès qu’il a eu.

J’insiste désormais systématiquement pour rédiger moi-même le premier jet des règles destinées à figurer dans la boîte, l’éditeur passant derrière mais ne faisant de corrections qu’avec mon accord.
Tous les auteurs ne procèdent pas ainsi. Certains n’aiment pas rédiger des règles ou savent qu’ils ne sont pas très bons dans cet exercice. Du moins leur faut-il s’assurer qu’elles sont rédigées en bon anglais, ou en bon français, ce qui est loin d’être toujours le cas. Cette rédaction doit aussi être entamée suffisamment à l’avance pour permettre plusieurs allers-retours afin de faire toutes les corrections et reformulations nécessaires. Trop souvent, ce travail pourtant essentiel, est fait dans l’urgence, dans la semaine qui précède l’envoi à l’imprimeur.

Curieusement, ce sont surtout les éditeurs français qui ont tendance à passer des semaines, voire des mois, à soigner la maquette d’un jeu, à en retravailler les illustrations avec soin, puis à écrire les règles avec les pieds dans dans les derniers jours, avant de laisser, quand ils y pensent, une dizaine d’heures à l’auteur pour la relecture et les corrections. Les éditeurs anglo-saxons semblent mieux comprendre l’importance de la clarté et de l’élégance du texte, et c’est l’une des raisons pour lesquelles, dans les boites de jeu, les règles en anglais sont presque toujours bien meilleures que celles en français.

Il y a un temps pour tout

Auteurs et éditeurs de jeux n’ont pas la même temporalité. Je comprends très bien les problèmes de gamme et de programmation de sorties des éditeurs. Je n’en suis pas moins énervé, voire désespéré, lorsque après avoir attendu un ou deux ans sans la moindre nouvelle après la signature d’un contrat d’édition, je reçois soudain un email me disant « le jeu sort dans six mois, et d’ici là il faut changer le thème, ajouter une variante pour deux joueurs et une variante coopérative, diminuer le nombre de cartes pour baisser le coût de production, et remplacer tout le texte des cartes par des icônes pour que le jeu soit plus facile à localiser « à l’international » ». Peu importe alors que l’éditeur vous demande de faire les changements ou pense pouvoir les faire lui-même, le résultat sera toujours le même, un désastre éditorial.
Le prototype de l’auteur est le résultat de mois, parfois d’années de réglages, de bricolage et de tests. Il est toujours possible d’en faire plus, mais les nouveaux changements doivent être faits avec le même soin, et testés prudemment, l’un après l’autre, à leur rythme. Trop d’éditeurs sous-estiment le temps nécessaire pour cela, ou surestiment aussi bien l’auteur originel que leurs développeurs.

Les idées de dernière minute peuvent être excellentes, mais on n’en est jamais certain. Méfiez vous des vôtres, et plus encore de celles de l’éditeur, qui ne connaît pas le jeu aussi bien.

Tout faire soi-même

Alors, bien sûr, il reste la possibilité de tout faire soi-même, d’être l’auteur, l’éditeur et parfois aussi l’illustrateur. C’est le choix qu’a fait, par exemple, Luis Bruêh, auteur notamment de l’excellent Night Parare of a Hundred Yokais. J’apprécie son stytle de jeu comme son style graphique, et j’aimerais que tous mes jeux soient illustrés avec le même humour et aussi soigneusement édités. C’est bien sûr la meilleure façon, comme auteur, d’obtenir très exactement ce que l’on souhaite, mais je n’y ai jamais pensé très sérieusement.

La première raison est que, comme je l’ai expliqué plus haut, si les éditeurs ont parfois de mauvaises idées, ils en ont plus souvent de bonnes. Je râle pour quelques déceptions, mais si je faisais le compte, je trouverais sans doute un plus grand nombre de mes jeux auxquels le développement éditorial a vraiment ajouté quelque chose.

La seconde raison est que l’édition, c’est un métier, que je ne pense pas être capable de maîtriser. Il faut discuter illustration, maquette, imprimerie, fabrication, distribution, toute une série de domaines dont je crains qu’ils ne me passionnent pas, et pour lesquels je suis à peu près certain de ne pas être compétent. Je ne sais pas dessiner, et Kickstarter ne règle plus ou moins que le problème de la distribution. D’ailleurs, pour une success story comme celle de Luis Bruêh, que je citais plus haut, on compte de nombreux échecs, des auteurs inconnus et parfois ruinés, qui se sont lancés sans trop savoir où ils allaient, persuadés à tort qu’en concevant un jeu, ils avaient fait le plus gros du boulot. Ils n’avaient fait que le plus amusant.

Quarante ans déjà….

Les quelques mauvaises expériences que j’ai eu récemment montrent bien que la manière dont un jeu peut être « développé » (je reprends les guillemets pour la conclusion) devrait être l’un des premiers points discutés entre auteur et éditeur. Ce n’est presque jamais le cas. Les problèmes autour du jeu lui même, de son thème ou de ses règles, sont bien plus fréquents que les désaccords financiers entre auteur et éditeur, mais nos contrats consacrent de longues pages au calcul des droits d’auteur et pas une phrase au « développement » du jeu. Je ne connais pas d’exemple de désaccord éditorial qui se soit terminé devant les tribunaux, mais c’est peut-être justement parce que les contrats ne disent rien. Il n’est peut-être pas nécessaire de tout formaliser par écrit, mais auteur et éditeur devraient discuter de ce sujet clairement et systématiquement avant de se lancer dans un processus d’édition.

Cela fait maintenant quarante ans que je conçois des jeux et discute avec des éditeurs. Ce qui était un hobby un peu intello est devenu un marché et un business. La quasi totalité des auteurs et des éditeurs sont encore des joueurs, des passionnés, mais ils ont dû, comme moi, devenir aussi un peu des professionnels. Au moment de donner la dernière touche à un jeu, de faire les derniers petits réglages, de rédiger le texte définitif des règles, de choisir un illustrateur, chacun se sent responsable de tout. Peut-être parce que je ne suis pas très sensible aux images, je ne me mêle pas trop du choix des artistes qui illustrent mes jeux; j’apprécie que l’on me demande mon avis, mais je laisse l’éditeur décider. Pour tout le reste, pour tout ce qui concerne le jeu lui même, et notamment la rédaction des règles, les choses sont de plus en plus difficiles. Être ouvert à la discussion, c’est être capable de changer d‘avis, mais c’est aussi savoir défendre son point de vue.

Les éditeurs connaissent le marché mieux que vous, et mieux que moi. Ils savent ce qui se vend et ce qui ne se vend pas. Ils savent ce qui rentre dans leur gamme et ce qui n’y rentre pas. Ils risquent leur argent dans la publication d’un jeu, quand je n’y dépense guère que du temps. Face à des auteurs, jeunes et vieux, de plus en plus nombreux, ce sont eux qui font leur marché. Tout cela les met en position de force et fait qu’il est difficile à un auteur de refuser des modifications lorsqu’il pense qu’elles peuvent affaiblir le jeu.
D’un autre côté, le nom de l’auteur figure désormais sur toutes les boites de jeu, comme c’était depuis longtemps le cas sur les couvertures des livres. L’auteur de jeu est bien devenu un « auteur », presqu’un écrivain. Ce n’était pas le cas dans les années quatre-vingt-dix, où on le considérait comme une sorte d’inventeur, de bricoleur – ce qu’il est un peu aussi, c’est vrai. Mais ce nom sur la boite, parfois aux côtés de celui de l’illustrateur et toujours au dessus de celui de l’éditeur, il signifie que l’auteur est responsable du jeu, de ce qui est dans la boite. Si je suis responsable, même solidairement, je dois être impliqué jusqu’au bout.


In october 2022, I was invited to a game designers and publishers meeting in Puszczykowo, in Poland. I already told about it in an earlier blogpost, here. I gave a speech, largely inspired by a few recent bad experiences, about the benefits, but also the problems encountered when a publisher wants to “develop”, that is to change, a game. This article is a streamlined and updated version of this speech – updated because several of the games I used as examples, and on which I was working then are hitting the shelves just now, in June 2023.

Any novelist would tell you, half jokingly, that most literary editors and publishers are frustrated writers. The same is true in the boardgame industry. It makes discussing the details of a game with the publisher both interesting, because of the technicity, and challenging, because hampered by jealousy. The « development » of a boardgame, development being an euphemism for « rule changes made after the publishing contract has been signed » is the most mentally and morally exhausting part of boardgame designto the point I am sometimes tempted to give it up.

Of course, like every other boardgame designer, I only show to publishers well tested prototypes which, I think, are finalized and nearly ready for publication after the addition of some art. It is perfectly understandable, however, that the publisher might want to implement some changes. The nature and possible extent of these changes should be discussed in advance, which is rarely the case. May be they should even be specified in the contract, which is never the case. Design and development issues between designer and publisher are much more frequent than money issues, but most game publishing contracts deal almost exclusively with royalty rates and publication deadlines. Unfortunately, when there’s a disagreement about something which is not dealt with in the contract, the publisher is in a position of strength – meaning they can do more or less what they want.

How to organize the game development after a publishing contract has been signed is a practical issue. How to deal with disagreements between the designer and the publisher about a game is also a moral issue, and could become a legal one, though I don’t know (yet?) of a single case of game development issue which ended before a court. I’d like to stress, however, that the law on these issues is very different depending on the country. In French law, there is a patrimonial author’s right which is sold via the publishing contract, and a moral author’s right which cannot be sold and implies that, no matter what’s in the contract and how many subcontracors there are, a cultural work cannot be substantially modified without the agreement of its author. As far as I know, there’s no such distinction in US law.

What is important however is not the law, it is the designer, the publisher, their relations, and of course the game. While I wanted most of my games to be published with the exact rules I had devised, and usually managed to do it, there are some designs for which I was ready to give the publisher free rein, and even a few cases where I asked for it. It all depends on the people, the game, the timing – every case is different, but every case must be discussed beforehand.

I know very few designers who ever had troubles with the calculation or the payment of their royalties. I don’t think I know a single one who doesn’t have an absurd story to tell about how a publisher modified, or wanted to modify, one of his designs. We also all experienced clumsy rules rewriting, or but that’s another topic which I already discussed in an article last year, terrible rules translation.
Furthermore, money issues can always be solved, even if late, even if with help from a court, something which is luckily extremely rare and never happened to me. Editorial issues, on the other hand, cannot be corrected. What’s done is done and games almost never get a second chance.

I will write here almost exclusively from my experience, because that’s what I know best, but also because I’m not sure fellow designers would like me to make public stories I’ve heard from them. If discussing this issues is still very difficult for a well established designer like me, I imagine it must be even harder to young publishers with no or little experience in the boardgame business, and therefore no strong standing when facing a publisher. Of course, even though I formally address designers, this article is also, in a way, intended to be read by publishers.

The game “must fit”

So, you’ve shown your prototype to a publisher and they find your game interesting but…

The theme doesn’t fit with their line
The theme is too much like another of their games
It’s too long
It’s too short
It lacks interaction
It’s too aggressive
It’s too simple
It’s too complex
It should accommodate two players – this happens to me all the time, because my first prototypes usually don’t.


Theme issues depends on the game. Sometimes the setting can be changed, sometimes not. Changes in the game systems should always be conceivable, as long as they’re not excessive. It must be done carefully, with no hurry, and if not by the original designer at least with them. It happens to writers as well, who often have to shorten their text, or rewrite some parts of it. My unicorn book was 2.4 too long for my publisher, I accepted it, but I did the cuts.

The theme – OK, the setting, if you prefer

Note : As is now usual in the gaming world, I use indifferently the terms « theme » and « setting » to describe the universe in which the game action is taking place. I know perfectly well that some critics make a difference, taken from literary theory, with the theme being the plot underlaying the game action (cooperation, whodunnit…) and the setting the universe in which it takes place (medieval fantasy, science fiction…). While this distinction is interesting when discussing novels or theater plays, it doesn’t always make sense with boardgames. What literary critics call « theme » is, in most games, inherent with the mechanisms.

A very common situation is when a publisher enjoys playing a game, but thinks the setting won’t sell or won’t fit their line. A change in theme is the most frequent publisher request, and usually the easiest one to deal with – it’s possible, or it isn’t.
Since they don’t plan to publish a game before knowing what its setting will be, most publishers will discuss it with the designer before signing the publishing contract, or at least make clear that they want to look for a new theme. Two or three times however, I have signed a contract with a publisher who didn’t specify beforehand that they wanted to change the theme of a game, because they didn’t really think it could be an issue. At least they always discussed the new setting with me afterwards.

Of course, whether a change is possible or not depends on the game.
Many games are, at their heart, abstract. If the setting doesn’t go further than giving a vaguely historical or exotic name to the game and its pieces, changing it should never be a problem. I don’t remember what was the original theme, if any, of
Attila, but I know it wasn’t barbarians swamping grass. I have a prototype named Vampire Hunters only because the pieces I used in the prototype are vampire shaped, and which could have hundreds of other themes. I don’t even remember if the change of theme in Mascarade, from Alice in Wonderland to Venice Carnival, happened before or after I signed the publishing contract with Repos production. Miaui was about old ladies giving bread crumbs to pigeons, the publisher made it about Polynesian cats catching fishes, but this doesn’t affect the gameplay.


Conversely, some games are built around their theme, making a change of setting clearly impossible. This is obviously the case with simulation games, including wargames, but that’s also true of many other lighter games. Among my own designs, that’s the case with
Mystery of the Abbey or Trollfest, and if often means these are good games, games that tell a story. There may be surprises, though – I never imagined that the Hobbits vs giant spider that Bruno Cathala and I had designed could, with minor rules changes, become a game about Raptors and hunters scientists.

Most games, or at least most of my designs, are in between, and that’s where things can get tricky.

Often, the change initiated by the publisher is for the better. A good example of this was Isla Dorada. The original prototype I had shown to Funforge had the most boring setting one can imagine – medieval merchants in central Europe. I knew it was bland but had vainly been looking for another meaningful and consistent setting. The idea of making it the exploration of an island, which is undoubtedly more sexy, came from the publisher, Philippe Nourah. The change was implemented soon enough to let us about one year to introduce new and fun thematic elements such as airship, killer pandas and tribe wars. Only after the game was published did I realize that we forgot to add an essential exotic island cliché, the volcano – if there’s a new edition someday, I’ll manage to bring one in.
Another nice story is that of
Tonari. My prototype, like the simpler Alex Randolph’s game which inspired it, was purely abstract, and I knew it needed a more or less meaningful setting. The idea of a fishing boat, which fits perfectly, came from the publisher, IDW games (who unfortunately left the boardgame business since, so this fun little game is looking for a new publisher).
Even when I had agreed with it when proposed by the publisher, the theme change in
Dreadful Circus was a miss. The prototype, like the upcoming new version of the game, was about dwarves collecting coins, gems and magical treasures. It fitted perfectly well with the game mechanisms, but it was only slightly more original than German medieval merchants. I was not really surprised when Portal asked to change it, and I was happy they had found an idea. The problem is that the new universe doesn’t really make sense when playing, and the game never feels like the unfolding of a story. It’s hard to say if it’s because of the setting itself, or because it was implemented in a hurry, a few months before publication, without any real feedback to the game elements.

My designs are not simulations, but the original universe can nevertheless inform the game mechanisms in many ways. I usually try to give hints to the setting, either with minor thematic rules, or with jokes linking card names and their game effects. These small rules, these lights puns, are obviously lost when there’s a change of theme and should be replaced with other ones, even if it means changing a few rules. When a given rule doesn’t make sense in the new setting, it’s often better to just remove it. Most times, this necessary feedback from the new theme into the game rules and cards is forgotten. The publisher takes the card, pieces and effects from the prototype and just gives them more or less random new names inspired by the new setting, names which don’t always make sense. If the theme of so many games feels « pasted on », it usually is because it has indeed been hurriedly and carelessly pasted on.
Bringing new small thematic rules, small thematic puns into the game, like Anja Wrede and I did when our
Lost Sheep game became Lost in the Woods, needs some time, and an intricate knowledge of the game balance. That’s why it should be done by, or at least with, the original designer.

The mechanisms – that is, the rules

That’s where things can get tricky, and this can lead to disagreements and even bitterness. The few publishers who are not frustrated designers are former game designers. Both can’t resist jumping in, adding new rules, new cards, reworking the game balance. Big publishers even hire in-house “game developers”, who are something like glorified professional frustrated game designers. These people have a vast game culture, lots of experience with reading and writing rules, they know the games and the gamers better than you do. The problem is that despite their larger game culture, they don’t know your specific game as well as you do. They can help finalizing a game that is still a bit rough, they can give you valuable advice, but you should not let them put you aside. The best developers are those who don’t try to rewrite the game rules but rather guide the designer and tell them in what direction they should work.

Bruno Cathala and I had a strange and mixed experience with Raptor. After we – well, mostly Bruno – had changed the setting of our Hobbits/Spider game to Raptors/Scientists, we found a publisher for it, Matagot. The first months of development were painful, the publisher trying to make changes to the game that didn’t really make sense, like replacing fire on the different spaces with barbed wire between the spaces. It made the game more complex, less thematic, and in some ways it was sending it back to earlier versions we knew didn’t work. Luckily, if the publisher was a frustrated designer, it was an intelligent one who realized this didn’t work. We mostly went back to our original version, but after a few months lost. Other publishers are more stubborn, or don’t even think of discussing the changes with the designer.

Of course, just like with theme, the publisher or developer can have really good ideas. Some of the characters in Mascarade, or in the new version of Citadels, are in-house additions made by the people at Repos prod and Z-Man. As a designer, you should not block developers, you should not ignore them, but you should not let them get loose. Keep control of your game, be sure to check every new card, every new rule – and that’s why they must be implemented one by one.

Nothing is most frustrating than getting no news from a publisher and then suddenly finding out that the development has been made and more or less playtested without you, when receiving a link to a new set of rules and cards with hundreds of changes from your last version. That’s what happened with Dreadful Circus and is the reason why I missed some of the most critical and problematic changes. I had long discussions with Ignacy and the team at Portal, we all admitted our errors, and we decided that I will get my rights on the game back. My original game, probably the design I’m most proud of, will be published at the end of 2023 by Trick or Treat Games as Treasure of the Dwarves, with its original setting, its original rules and its original balance. It’s defintely not the same game as Dreadful Circus.

It might be OK, and even go very smoothly, when everything has been discussed from the beginning. I would have preferred Oink games, the small Japanese publisher of small games in very small boxes, to publish my original game about counting stars in the sky, Constellations. I was nevertheless happy when Jun Sasaki told me it had given him an idea for something a bit different, using one of the core mechanisms of my game. I saw his game about tourists going whale watching, Whale to look, played it online with their team, and agreed to have it published. My name, however, is second after Jun’s one on the box. We originally agreed that I would still be allowed to look for a oublisher for my original game, though I gave up this idea after a few plays of the final version of Whale to Look, which, unlike what happened with Dreadful Circus, is indeed better and more fun than my Constellations.

Vampire the Masquerade – Vendetta, which had three successive design phases, is a good example of how publisher development can be dealt with efficiently.
When Charlie Cleveland, who was already a successful video game designer, decided to give a try at a Vampire themed boardgame, he prudently chose to ask an old boardgame designer for collaboration, and he chose me. We started from his original prototype and together designed a second version, more fluid and different enough to deserve both our names on the prototype box – in a way, I was the developper there. Then we found a publisher, Horrible Games, who decided to move the game into the Masquerade universe. It’s still a vampire settiong, but a very specific and sophisticated one. Charlie, Lorenzo and Hjalmar of Horrible games were all familiar with it, I wasn’t. Working on this with them would have implied spending months reading sourcebooks to get acquainted with this universe, and I didn’t have the time for it. This is why, for mostly technical reasons, I decided to step aside from this last development phase, but the original designer, Charlie, stayed in and even made the trip from San Francisco to Milan for a few intensive playtest and development sessions. They made a fantastic job.

New versions of older designs

Being an old game designer, I now have a “catalog” with many out of print games, and even a few ones which have had two or three successive editions. By the way, if you’re a publisher interested in republishing some of my older stuff, here’s a recent blogpost with a list of available titles.

A few years ago, Serge Laget and I have decided to work on a more dynamic version of Ad Astra. This new version ought to be published soon by Great Gamers Guild. Like for a brand new game, Serge and I made most of the development. The publisher was just testing successive iterations and emailing us remarks and advice, of which we made good use. Similarly, I wrote a first draft of the rules, which were rewritten here and there by the Great Gamers Guild, but always after discussion with us. Unfortunately, it didn’t went as smoothly with the publisher of the French version.

Most times however, and especially when the idea of a new edition of an out of print game comes from the publisher, I am not that much intellectually interested in reworking my older designs. It’s never as exciting as making something really new. When « my » original version of a game has already been published, no matter whether it has been successful or not, I have no problem with giving a publisher free rein on a new version. What I could do with this game has been done, I’m now curious to see what others can do out of it.

A good example is Grail Cup which is hitting the shelves just now, published by Matagot. It is a reworking of an older game, Lost Temple, published ten or fifteen years ago. Lost Temple was itself a different take on the Citadels character system. It sold relatively well, but the success didn’t last and the publisher discntinued it. I took it back, made a streamlined version without the gem/money element, and showed it to a few publishers. Matagot was interested, but they also wanted a different settoing, to emphasize that it’s not the same game. We discussed it together and ended with a fun idea, Knights of camelot racing for the Grail castle. Lost Temple was already here, I still had a few author copies on my shelves, I was working on other projects at the time, so we decided together that their development team will handle the changes. Everey few months, they showed me their last version of the prototype so that I can playtest it and, sometimes, jump in with a few small ideas. I’m really happy with the result, which is probably better than what I could have done.

Similarly, I recently signed for five games, no less, with a new publisher, Trick or Treat Studios. Three of them were brand new designs, Trollfest, Treasure of the Dwarves and a third one which has not been announced yet; the publisher didn’t ask for any major change to their rules. The two other ones are new versions of older card games. Knock Knock! Has just been republished as Halloween Party. The development was a real collaborative work, the two designers, Gwenaël Bouquin and I, working together with the publisher on the fine tuning of some card effects.

The last one, a card game which has not been announced yet, is also a new version of an older design which already had several iterations. Trick or Treat wanted to change the setting, and the new theme meant that we have to design new cards and decks embedded in this new universe. I made clear from the beginning that I was not very interested in working this, and I let them do the development. I check from time to time what they are doing, I playtest new cards deck to make sure everything works. It’s still a work in progress.

Writing and rewriting rules

In the end, a game is just a set of rules. That’s why, until the very end, the designer should check every version of the rules to make sure no unexpected and unwelcome change has been made. Theoretically, no change should be made that was not discussed with you before, but, well, it happens. It even happens in the lightest and simplest games. When checking the final rules for the very first edition of Diamant, I suddenly realized the rule stating that when two identical danger cards are revealed, one of them is removed from the game, was missing. This had not been discussed before with the publisher. I emailed the publisher, whose answer was that this was just a very minor rule which was removed for the sake of simplicity. It is indeed a small rule, but it is essential because it changes the odds, making advancing slightly less hazardous when the game moves on, and therefore making dramatic comebacks more likely. If I had not noticed this, if I had not insisted on bringing back this trivial rule, the game would have been published without, and would probably have been less successful.

I now insist on writing the first draft of the final ruleset, which then comes back and forth between publisher and designer for corrections and, here or there, rewriting. Most game authors don’t work like this, because they don’t like rules writing or because they know they’re not very good at it. At least, you must make sure the rules are clear, grammatically correct, and that there is enough time for corrections and serious proof-reading. Too often, this is made hurriedly, sometimes in the week before the game goes to the printer. No wonder so many game rules are ambiguous and badly written.

Some publishers (mostly French ones, I don’t know why) spend months reworking the art and graphic design of a game, before writing clumsy rules in the last wekk and letting a day or two to the designer for prof-reading and correction. US publishers seem to be more aware of the importance of a clear and elegant writing. That’s one of the many reasons why the English rules of a game are almost always better than the French ones.

There’s a time for everything

Game designers and game publishers have different time frames. I can understand why, I can sympathize with publishers’ schedule issue. I nevertheless feel both overwhelmed and frustrated when I sign a publishing contract, wait one or two years with little or no news, and then suddenly receive an email saying « we plan to publish the game six months from now and, in the meantime we would like to change the setting, add a two player and a cooperative variant, remove a few cards and replace all the text with icons to make it language independent ». No matter whether the publisher asks you to do the changes or assumes it can work on it in-house, this is a recipe for editorial disaster
The designer’s prototype is usually the result of months, if not years, of playtesting and fine tuning. Changes can always be made afterwards, but they must be made with the same care, one after the other, with enough playtesting and feedback in between. Many publishers underestimate the time needed to implement these changes, or overestimate both their developers’ and the original designer’s ability to do it.

Last minute ideas can be great, but you are never sure. Be wary of your own ones, and be even more wary of those from developers who don’t know the game as well as you do.

All by oneself ?

Of course there’s always the temptation to do all by oneself, to be at the same time designer, publisher and sometimes even illustrator. This is the choice made, for example, by Luis Brueh, who designed, among others, the recent and excellent Night Parade of a Hundred Yokais. I like his design style, and I would like all my games to be so well illustrated and produced. This might look like the best way to get exactly the game one wants. I never really seriously considered it, for two reasons.

The first reason is that, as I explained before, while publishers sometimes have bad ideas, they more often have good ones. I can grumble here for a few disappointments, but if I were to reckon all lmy published games, there are probably many more which were realy improved by the publisher’s “development”.

The second reason is that publishing is a different job, and one I don’t think I can master. I don’t feel like discussing graphic design, printing, production and distribution, and I’m quite sure I would be very bad at it. I’m terrible at drawing, and Kickstarter partially solves only one other issue, distribution. For one relatively successful story like that of Luis Bruêh, there are many unknown and sometimes ruined designers, who went all-in, confident that by designing a game, they had made the hardest part of the job. They had not.

What has changed in 40 years….

I’ve had a few bad experiences recently. How a game will be « developed » should be clear from the beginning, and it almost never is. Between publishers and designers, issues with game development are far more frequent than issues about money, when our contracts sometimes have more than ten pages about how to reckon royalties and not a single sentence about the development and finalization of the game. It might make little sense to write it down if no one is willing to go to court about it, but at least it should be clearly and openly discussed by designer and publisher before signing a contract.

I’ve been designing games and dealing with publishers for forty years now. There has been lots of changes in what went from a tiny hobby to a mass market. Most designers and publishers are still enthusiast gamers, but they also had to become more professional. When it comes to finalizing a game, making last adjustments to the rules, choosing an artist, writing the final ruleset, everyone feels more and more responsible and wants to check everything. May be because I’m not that good at art, I don’t try to mess with the publisher’s choice of illustration, even when I prefer to be informed and sometimes give my opinion. But on all other publishing issues, on everything that deals with the game itself, discussions have become more tense. I’m open to discussion, but if I’m not convinced, I try to hold my ground, and I think more designers should try to hold theirs.

Publishers know the market better than I do, and better than you do. They know what sells and what doesn’t. They know what can fit in their line and what cannot. Contrary to game designers, they spend their own money in publishing a game. All this places them in a stronger position and can make difficult for a boardgame designer, especially a wannabe one, to resist a change they are afraid might weaken the game.
On the other hand, the designer’s name is now on the game box like the novelist’s name is on a book cover. A game designer is now recognized as an « author », almost a writer ; this was not the case in the nineties, when he was seen as a kind of « inventor ». This also means the designer / author is accountable for what is in the box, the game, its setting, its mechanisms, its rules. If I’m accountable, I need to be in
charge, or at least involved.

Grail Cup

Citadelles est, de tous mes jeux, celui qui se vend le mieux. Je le sais, mon banquier le sait, et surtout les éditeurs le savent qui, régulièrement, me demandent si je n’aurais pas dans un coin « un autre Citadelles ». Ce n’est pas toujours ce que j’ai le plus envie de faire mais, de temps en temps, je m’y essaie.

Aux Pierres du Dragon et, surtout, L’Ambition des Rois, sont des tentatives de recréer les mêmes sensations qu’à Citadelles à l’aide de mécanismes différents. À deux joueurs, je pense d’ailleurs que l’Ambition des Rois est un bien meilleur jeu.

J’ai aussi tenté d’exploiter le système de choix des personnages qui est au cœur de Citadelles à des bases différentes. Mes essais sur des jeux de majorité, ou de votes, n’ont pas été suffisamment convaincants pour que je les montre à des éditeurs. Lost Temple et, aujourd’hui, Grail Cup qui en est le successeur, utilisent ce principe dans un jeu de course.

Dans Lost Temple, paru il y a une dizaine d’années, les joueurs étaient des aventuriers quelque part en Orient, à la recherche d’un – devinez – Temple Perdu. Dans Grail Cup, ce sont les chevaliers de la Table Ronde cherchant à atteindre le château du Graal, avec l’aide de leurs amis l’Enchanteresse, l’Écuyer, Merlin, la Forgeronne, le Dragonnier, la Princesse, le Prêtre, la Fée et la Licorne. Ces alliés sont choisis exactement comme les personnages de Citadelles, et permettent d’avancer plus rapidement, de s’informer des possibles pièges, de s’y préparer, de changer sa place dans la course avec un autre personnage… Le jeu est plus léger, plus rapide, mais aussi méchant que Citadelles, tout en entourloupes et en queues de dragon.

Pour ceux qui ont joué à Lost Temple, la principale différence, outre bien sûr le changement de thème, est la disparition des gemmes, qui étaient une sorte de monnaie, afin de recentrer l’intérêt du jeu et l’attention des joueurs sur la position dans la course. Le jeu en devient ainsi plus rapide, plus tactique, plus fluide.

J’ai toujours beaucoup apprécié la ligne claire et l’humour subtil de John Kovalic, et je suis vraiment très heureux qu’il ait accepté d’illustrer l’une de mes créations. Ses personnages légers et colorés rendent très bien l’esprit de Grail Cup – c’est un peu Citadelles, mais c’est moins sérieux.

Grail Cup devrait arriver dans les boutiques françaises le 16 juin 2023.

Playtesting in a parisian boardgame café.

GrailCup
Un jeu de Bruno Faidutti
Illustré par JohnKovalic
3 à 8 joueurs – 30 minutes
Publié par Matagot
Boardgamegeek


Of all my games, Citadels is the one that sells best. I know it, my banker knows it, and, of course, the publishers know it. Regularly, they ask if I can show them “anorher Citadels”. It’s not always what I’m the most excited about, but, from time to time, I give it a try.

Fist of Dragonstones and, even more, Greedy Kingdoms try to recreate the same game sensations using different mechanisms. As a two player game, Greedy Kingdoms is, in my opinion, much better than Citadels.

I also tried to recycle the character selection system which is the heart of Citadels into other game systems. My attempts with voting or majority games were not convincing enough to be shown to publishers. Lost Temple, and its reimplementation Grail Cup, use it in a race game.

In Lost Temple, which was published ten years ago, players were adventurers in the Far East looking for, you got it, a lost temple. In Grail Cup, they are now the Knights of the Round Table racing to reach the Grail castle, with a little help from their friends the Enchantress, the Squire, Merlin, the Smith, the Dragonrider, the Princess, the Priest, the Fairy and the Unicorn. These allies are chosen exactly like the characters in Citadels and allow the knight to move faster, to look for possible traps, to get weapons, to swap place in another knight, etc… The game is light and fast paced. It’s less mean than Citadels, but there’s still room for a few nasty magic tricks.

If you’ve played Lost Temple, the main difference after the change in setting is the removal of gems, which were a kind of money used to pay for movement. The position on the track is now almost the only thing to take into account during the game. It makes the game faster, more tactical and more fluid.

I’ve always liked John Kovalic’s subtle humor and bright, simple art. I am really happy that he accepted to illustrate one of my creations. His light and colored characters are perfectly true to the spirit of Grail Cup – it’s lighter and faster than Citadels, but equally mean.

Playtesting with friends.