Deck & Dice Building

Si je les trouve théoriquement très intéressants, notamment du fait des dilemmes statistiques qu’ils génèrent, je pratique cependant très peu les jeux de deck-building, et n’en ai jamais conçu aucun. Je leur trouve en effet deux grands défauts. Depuis Dominion, ce sont presque toujours des jeux très abstraits et très techniques, alors que j’apprécie les jeux avec un vrai thème, et où celui qui connaît déjà le jeu ne bénéficie pas d’un grand avantage.


C’est pourquoi je me dois de signaler deux jeux qui m’ont récemment un peu réconcilié avec ce genre.

Le premier est Clank!, de Paul Dennen. L’univers, des nains qui explorent des souterrains pour en rapporter des trésors, n’est pas particulièrement excitant ou original mais, pour une fois, il fonctionne, chaque carte, chaque action des joueurs, a du sens. Il y a un plateau, des pions qui s’y déplacent, et pas mal d’interactions. On s’y imagine très bien en nain un peu lourdaud, trop chargé, qui trébuche, fait du bruit, et réveille le dragon – et à c’est drôle à chaque fois. Après, cela reste du deck building classique, un peu calculatoire, mais c’est bien conçu et plus léger que beaucoup d’autres.

Dice Forge, de Régis Bonnessée, reste assez abstrait, et l’on ne s’y sent pas vraiment dans la peau d’un héros grec. Ce n’est pas un jeu de deck building mais un jeu de dice building, dans lequel on peut modifier les faces des deux dés que l’on lance à chaque tour. Tout l’intérêt du jeu vient de sa simplicité statistique – un dé n’a jamais que six faces, et lorsque l’on en ajoute une, on doit en retire une autre. Les choix sont donc assez simples, et leurs conséquences immédiates. On joue très vite, on ne passe pas son temps à mélanger des cartes, et on ajoute au plaisir de la construction celui du lancer de dés.

As a game designer, I’ve always been fascinated by deck-building games, and by the statistical dilemmas they generate. On the other hand, I didn’t play many, and I didn’t design a single one, because they have two major drawbacks. Since the very first one, Dominion, they have always been abstract games with pasted-on themes, and highly technical engines giving an unfair advantage to the player who knows the game – meaning the card combos – best.
These last weeks, two games have reconciled me with this genre.

The first one is Paul Dennen’s Clank!. Dwarves exploring a dungeon and bringing back treasures is not a very original or exciting setting, but, for once, it works well, and every card, every token, every player action makes sense. It also has a board, moving pieces, and strong interaction. Players really feel like heavy and clumsy dwarves stumbling in the dungeon and awakening the dragon – and it’s always fun. This being said, it’s classical deck building, but relatively light and really well designed.

Régis Bonnessée’s Dice Forge is rather abstract, and players don’t really impersonate greek heroes. It’s not a deck building but a dice building game, in which players can buy new sides to replace the old ones on their two six-sided dice. The appeal of the game comes from its fast pace and its statistical simplicity. Choices are statistically simple and their effects are easy to track. Players don’t spend the whole game shuffling cards, and the planning pleasure of deck / dice building is reinforced by the fun of rolling dice.

Secrets

Eric Lang et moi avons, ces deux dernières années, travaillé ensemble sur trois petits jeux de cartes.

Dilemma, notre premier prototype, construit autour du dilemme du prisonnier, s’appelle finalement Dolorès, et est sorti l’an dernier chez Lui-Même éditions. Secrets, notre deuxième jeu va bientôt arriver chez Repos Production, dans le même format que Mascarade. Le troisième, qui pour l’instant s’appelle Animal Farm, n’en est qu’à de premières mais prometteuses ébauches. J’entends déjà les critiques affirmer que ces petits jeux de cartes assez légers et psychologiques ressemblent plus à du Faidutti qu’à du Lang, mais le fait est qu’ils ont vraiment été tous, du début à la fin, des collaborations. Nous avons aussi essayé de faire un party game, et un gros jeu plus langien dans une grosse boite, mais cela n’a rien donné de très convaincant pour l’instant.


Discussion avec Eric Lang à la Gen Con

Dolorès n’était pas encore totalement finalisé lorsque nous avons commencé à réfléchir à notre deuxième jeu. Depuis le succès des Loups-Garous, les jeux à identités secrètes – ce que les anglo-saxons appellent les « social deduction games » – sont devenus un genre à part entière, avec ses précurseurs, Hoax et Mafia (et peut-être Citadelles), ses classiques, Les Loups Garous, Résistance ou Complots et de nombreuses variations plus ou moins originales.  Ce sont des jeux vivants, rapides, tendus, tout en bluff et en interactions – un genre qui semble fait pour moi, et auquel je me suis déjà essayé avec Mascarade et quelques projets inaboutis. Eric Lang, de son côté, était plutôt spécialisé ces dernières années dans les gros jeux de plateaux avec plein de règles et de figurines, mais ayant souvent une dimension psychologique, comme dans le draft de Blood Rage, sans doute celle de ses créations que je préfère.

La feuille de route de notre deuxième projet, griffonnée lors d’une discussion à la Gen Con, était assez simple – un jeu à identités secrètes, par équipe, dans lequel les joueurs doivent enquêter et intriguer pour découvrir quels sont leurs partenaires, et peuvent changer d’équipe en cours de partie. Le titre, Which Side are you on?, chanson emblématique des syndicats et de la gauche américaine, s’est imposé de lui-même, et le premier prototype avait donc des équipes rouge et jaune.


Which Side are you on ? aux rencontres ludopathiques

Alors que Mascarade est un jeu que l’on joue chacun pour soi, Which Side are you on? était dès le début, comme l’indique son titre, un jeu opposant des équipes secrètes et mouvantes, et où l’une des difficultés est d’identifier ses partenaires. Au cours du développement, nous y avons quand même ajouté un ou deux joueurs qui la jouent perso, mais ils n’ont pas le même objectif que ceux qui jouent en équipe.

Contrairement à Dilemma / Dolorès, qui avait été terminé assez vite, Which Side are you on ? / Secrets  a demandé beaucoup de réglages. Dans les premières ébauches, par exemple, l’identité d’un joueur était déterminée par la majorité de trois jetons, un qu’il avait devant lui et deux qu’il partageait avec chacun de ses deux voisins. C’était sans doute malin, mais finalement un peu lourd à manipuler. De même, les joueurs avaient très classiquement des cartes en main, et le manque de données sur les mains des autres joueurs rendait le bluff difficile. Nous avons essayé bien des versions, avec plus ou moins de cartes, plus ou moins d’information, plus ou moins de jetons, plus ou moins de mouvement. Même après la signature du contrat, nous avons continué à faire des modifications – la dernière règle que j’aie rédigée portait le numéro 6.8, et c’était avant que l’équipe de Repos ne suggère d’autres réglages.

Pour le thème, après les syndicats américains, nous avons essayé une version ésotérique, cabalistes contre illuminatis, qui fonctionnait assez bien, mais le thème était un peu trop, justement, ésotérique. Dans le même esprit fantastique, nous avons pensé aux grandes religions, islam et christianisme ; cela collait assez bien, avec des conversions plus ou moins secrètes et un ou deux bouddhistes pour faire bon poids, mais il est devenu trop risqué aujourd’hui de se moquer de la religion. Chats et chiens ne fonctionnait pas vraiment, faute d’ambiguïté entre les deux statuts et de problèmes existentiels. Je sais que l’éditeur a essayé un temps une thématique science-fiction, vaguement Star Wars, Empire et rebelles. Finalement, après bien des tâtonnements, Repos a choisi la guerre froide, CIA contre KGB dans les années 60 – avec quelques hippies venus semer le trouble dans les consciences. Un thème plus original, et qui permet des illustrations au look vintage et un peu décalé, la spécialité de Carole Chaland.

Pour le titre, j’aurais voulu conserver Which Side are you on? , qui a l’avantage de suggérer déjà les mécanismes du jeu, mais cela ne marche qu’en anglais, et rappelle trop aux américains l’univers des grèves et des syndicats, certes positif mais pas très excitant. C’est donc finalement Secrets – car à notre grande surprise, comme vous pouvez le vérifier sur le Boardgamegeek, il n’y a pas encore de jeu qui s’appelle ainsi.

Secrets se joue de 4 à 8 joueurs. La majorité d’entre eux appartiennent à l’une des agences rivales, CIA et KGB, et un ou deux sont des hippies. Les cartes représentent des personnages, Politicien, Journaliste, Diplomate, Scientifique et quelques autres que chacun essaie de recruter dans son camp, tout en s’efforçant de déterminer quels sont ses alliés. Pour cela, chaque joueur à son tour pioche deux cartes, connues de tous, et en choisit secrètement une qu’il propose à l’un des autres joueurs, face cachée. Le joueur à qui la carte est proposée décide alors lequel des deux recrute la carte et en applique les effets – effets bons ou mauvais, qui peuvent affecter les scores des joueurs, révéler des informations, et parfois faire changer de camp un joueur.  Secrets demande donc de la psychologie, un peu de sens tactique, et une certaine capacité à déjouer les embrouilles.

Secrets
Un jeu de Eric M. Lang et Bruno Faidutti
Illustré par Carole Chaland
4 à 8 joueurs – 20 minutes
Publié par Repos Prod (2017)
Vindjeux      Ludovox     Trictrac      Boardgamegeek


These last years, Eric Lang and I have worked together on three light card games.

Our first co-design, built around the prisoner’s dilemma, H.M.S. Dolores, has been published last year by Lui-Même. The second one, Secrets, is published by Repos Production, in the same box size as Mascarade. The third one, with working title Animal farm, is only a rough prototype so far, but shows some promise. We’ve been already told a few times that these light and psychological games felt more like Faidutti than Lang , but the truth is that they all have been, from the original idea to the final version, collaborative work. We’ve also thought of a party game, and started working on heavier and more langesque stuff, but none of this has been very convincing so far.

We’ve started thinking on our second game before HMS Dolores was even finalized. Since the world success of Werewolves, secret identity games, also known as social deduction games, have become a genre in itself, with its precursors, Hoax and Mafia (and may be Citadels), its classics, Werewolves, The Resistance or Coup, and several more or less original variations. These are lively, tense and fast paced games, built around bluffing and interaction, a genre I’ve always liked and with which I already tinkered with with Mascarade and a few abandoned projects. These last years, Eric Lang has mostly worked on big boxes full of rules, cardboard and plastic, but often with some psychological elements, like the draft in Blood Rage, which is probably my favorite among his designs.

The roadmap for our second design, which we discussed very shortly two years ago at gen Con, was relatively simple. It was to be a secret identity game, in which players had to find out who their teammates were, but could also try to change teams when they thought the other side was winning. The obvious title was Which Side are you on ?, and the first prototype was therefore themed about worker unions, the teams being red and yellow (In French, “yellow” is slang for strike-breaker – I don’t know if it also works in English).

While Mascarade is every player for himself, Which Side are you on was, as one can guess from its original name, a team game with secret and sometimes changing teams, in which every player must try to find out who is on their side. During the game development, we added one or two players with a different and individual victory condition.
Unlike Dilemma / Dolorès, whose development went very fast, Which Side are you on ? / Secrets needed lots of tuning. For example, in the first versions, a player’s team was determined by the majority in three tokens, one in front of them and two shared with their left and right neighbor. It was clever, but it was also confusing and a bit heavy. Similarly, players had hands of cards, and the lack of information about other players’ hands mad bluffing very hazardous. So we changed all that, and tried many versions with fewer or more tokens or cards, with more or less movement and information. Even after the contract was signed, we kept on making criticl changes to the game. The last rules version I wrote was the 6.8, and that was before the Repos team took over and suggested more changes.

US trade unions made for an original setting, but not something very easy to sell. We tried something esoteric, cabalists against illuminatis; it worked but the setting was too, well, esoteric. We thought of another strange fantasy, religion, Islam vs Christianism, with more or less secret conversions and one or two Buddhists thrown in just for fun, but it has become too risky to mock religions. Cats vs Dogs didn’t work, due to a lack of ambiguity between the two positions. I know the publisher tried a sci-fi version, empire against rebels. We finally agreed on one of the publisher’s ideas, the cold war, CIA against KGBs in the sixties, with a few hippies thrown in to question the meaning of all this. It’s relatively original, and makes for a nice vintage graphic look, something Carole Chaland masters perfectly.

Which Side are you on? was a nice title that suggested the mechanisms, and I would have liked to keep it, but the pun worked only in English and might have been too strongly associated with the trade unions history – something positive but not very exciting. We finally settled on something less original – Secrets – and you can check on the BGG, there’s no boardgame so far with this name.

Secrets is a 4 to 8 players game. Most players belong to one of the two rival agencies, CIA and KGB, and one or two might be hippies. Cards figure various characters, Politician, Journalist, Diplomat, Scientist… that players try to recruit on their side – assuming they know which side they are on, and with whom. Each player on turn draws two cards, shows them to everyone, and then secretly proposes one, face down, to some other player. This player then decides if he takes the card for himself and applies its effects, good or bad, or if the proponent does. Cards effect can affect scoring, can reveal information to one or all players, and can even make players swap team. Secrets requires subtle psychology, tactical sense, and an ability to see clearly in muddled situations.

 

Secrets
A game by Eric M. Lang & Bruno Faidutti
Art by Carole Chaland
4 to 8 players – 20 minutes
Published by Repos Prod (2017)
Boardgamegeek

Mon bilan du festival des jeux de Cannes
Short report of the Cannes games festival

Dans le train qui me ramène du festival de jeux de Cannes, j’écris ce petit compte rendu de trois jours passés un peu à jouer et à boire, et surtout à causer et à arpenter les travées du salon. Comme je n’ai pas pris de photos, il va falloir en arrivant chez moi qui je fasse le tour des fils facebook de mes amis et éditeurs pour trouver de quoi illustrer cet article.

Le salon a commencé bizarrement, jeudi soir, par une chambre d’hôtel si moderne et tellement design que j’ai eu bien du mal à découvrir la porte de la salle de bain, puis à trouver comment l’ouvrir. On est resté dans l’improbable avec l’annonce du jeu de l’année français, l’As d’Or. Si Scythe et Kikou le Coucou sont des choix fort pertinents pour les jeux pour gros et pour tout petits joueurs, celui d’Unlock pour le jeu grand public m’a pour le moins surpris – comme tout le monde, j’attendais Codenames, meilleur jeu de vocabulaire, voire meilleur jeu familial depuis Taboo.  Il est vrai que je ne suis pas le public pour les jeux d’enquête logique façon escape room, que j’ignore un peu comme, il y a trente ans, j’ignorais consciencieusement dans Jeux et Stratégie les pages de casse-têtes logiques.


Fearz! un peu perdu entre DC Marvel deck building game, Ghostbusters et Attack on Titan…

Ce fut pour moi cette année un salon tranquille, car je n’avais aucun nouveau brouillon* de jeu à présenter aux éditeurs, ayant casé le dernier qu’il me restait chez Matagot il y a quinze jours. J’avais une petite nouveauté en vente, Fearz, ma première collaboration avec Anja Wrede, dont j’ai fait quelques parties sur le stand de Don’t Panic Games, mais ce petit jeu de cartes rigolo était un peu perdu sur un stand plein de figurines monstrueuses et/ou robotiques. Au fait, Cédric est de retour.

Deux jeux à paraître cet été, Small Detectives (écrit à quatre mains avec Charles Chevalier) et Secrets (conçu avec Eric Lang) étaient présentés sur les stands de Pixie Games et de Repos Prod.


Avec Charles Chevallier sur le stand de Pixie Games

Pixie Games est le petit éditeur-distributeur qui monte, une sympathique équipe qui vient d’arriver et qui, outre l’édition de petits jeux malins, a fait quelques choix de distribution très astucieux, notamment les jeux de vikings de Shem Phillips illustrés par l’extraordinaire Mihajlo Dimitrievski, et les bons gros jeux à l’allemande des italiens de What’s your Game. Small Detectives, une sorte de Cluedo en quinze minutes, en plus dynamique et en plus rigolo, m’a semblé être très apprécié par les quelques uns qui ont pu y jouer sur l’unique boite disponible. J’ai découvert à Cannes les illustrations définitives du jeu, elles sont mignonnes et très efficaces – même si on a tous été d’accord pour demander un peu plus de couleur sur la boite.


Une présentation de Secrets en québécois (à 1’56″”)


Je parle de mon travail avec Eric Lang (à 0’40”), et Eric Lang parle de plein de choses dans un franglais parfait (à 12’56”)


Et là, à 1’50”, j’explique pourquoi il n’y a pas de sexe oral dans kamasutra .

Repos Prod n’avait pas fait les choses à moitié pour la première présentation en public de Secrets, le deuxième jeu que j’ai créé avec Eric Lang, qui sortira en août à la GenCon  d’Indianapolis (les belges à sombrero vont cependant devoir changer de logo et de costume s’ils ne veulent pas être refoulés à l’entrée des États-Unis). À Cannes, Secrets était joué sur une grande table dans un magnifique stand aux couleurs du jeu. Secrets, dont je parlerai bientôt plus en détail sur ce site, est une sorte de Mascarade pour joueurs et par équipe. L’action se situe durant la guerre froide, chaque joueur pouvant être affilié au KGB ou à la CIA, ou bien être un hippie et jouer à un autre jeu. Les illustrations sont drôles comme tout, et les premiers essais de pions en bakelite absolument magnifiques.

 
Soirée belgo-mexicaine – et je ne sais plus pourquoi je suis le seul à faire la gueule.

J’ai d’ailleurs passé pas mal de temps avec Eric Lang sur ce salon, sur les stands des éditeurs de nos deux collaborations, Dolorès et Secrets, et aux soirées festives organisées par les grosses boites. Vendredi soir, après avoir déjà pas mal bu à la soirée Iello, nous sommes quand même parvenus à trouver le chemin de celle d’Asmodée. Comme me l’a fait remarquer Eric, le monde de l’édition ludique en France étant “very political”, il faut y naviguer prudemment. Samedi, c’était la soirée Repos Prod, et nous sommes restés sobres.


Un beau totem pour Waka Tanka

Sinon, j’ai trainé un peu sur les stands d’Atalia, de Sweet Games, de Lui-Même et de Iello pour signer quelques boites d’Argo, de Waka Tanka, de Dolorès et de Diamant, j’ai discuté avec éditeurs et illustrateurs de projets dont je n’ai pas encore le droit de parler, et j’ai trainé un peu entre les stands pour regarder les nombreuses, très nombreuses, trop nombreuses peut-être nouveautés.

Comme souvent sur les salons, je n’ai eu le temps de jouer à rien, mais j’ai regardé des bouts de partie ici et là, et entendu les commentaires d’amis moinjs surbookés. On m’a dit beaucoup de bien de Seeders – Exodus de Serge Macasdar et des Montagnes hallucinées de Rob Daviau et j’ai eu très envie de jouer à Cannon Buster, de Gun Hee Kim, à Top Face Fantasy de Wlad Watine, à Profiler de Romaric Galonnier, et au petit jeu de cartes avec des chats kawaii chez Bombyx – mais rien de tout cela n’est encore en vente. Et puis, il y a ceux que j’ai du mal à considérer comme des nouveautés parce que j’y ai déjà pas mal joué sur les protototypes brouillons, Watizit et Yamatai de mes amis Hervé Marly et Bruno Cathala, ainsi que Sentai Cats, un tout petit jeu d’une demi douzaine de grands auteurs.


Paul Mafayon, l’illustrateur, dédicaçant une boite de Diamant. Derrière, c’est Antoine Bauza qui dédicace son Oceanos, un excellent jeu dont on ne comprends pas bien pourquoi il ne se vend pas.

Les allées du salon m’ont semblé moins encombrées que l’an dernier, peut-être parce que la surface a été un peu agrandie, ou parce que les contrôles de sécurité et les longues files d’attente ont découragé pas mal de visiteurs. Côté professionnel, en revanche, il y a de plus en plus de monde, et un monde de plus en plus international – j’ai causé jeu avec des coréens, des polonais (mes vieux amis Ignacy et Merry), des allemands, des anglais, des italiens, des américains, des canadiens, des finlandais et même une polyglotte allemande voulant importer en France des jeux japonais – sans compter le schizophrène culturel qu’est David Cochard. Il y avait même Eric Martin, en famille, filmant pour le boardgamegeek.


Avec Stefania Niccolini, qui présentait Railroad Revolution chez Pixie Games.

Samedi matin, c’était l’assemblée constitutive de la société des auteurs de jeux, que j’ai malheureusement dû avant que les sujets les plus chauds ne soient discutés. C’est une excellente initiative, menée par des personnes sympathiques et compétentes, et j’espère trouver le temps de m’y impliquer un peu.

Le dernier épisode fut dimanche, sur le quai de la gare où je pense avoir laissé un sac contenant une partie des jeux que j’ai achetés ou que je me suis fait offrir sur le salon. Donc, si quelqu’un a trouvé un sac Pixie Games contenant Clonk!, Mot pour Mot, Top Face Fantasy et une ou deux autres petites boites, faites-le moi savoir.

* Les vieilles et mauvaises habitudes sont difficiles à abandonner mais, si nous voulons que les jeux soient considérés par les joueurs et par les pouvoirs publics comme des œuvres culturelles, il me semble que nous devons faire l’effort d’éviter le vocabulaire de la technique et lui préférer celui de la culture. Tout comme j’essaie de dire et surtout d’écrire “critique” et non “test”, je vais désormais essayer d’utiliser “brouillon” ou “ébauche” et non “prototype” pour parler des premières versions de mes jeux. Si les boites réalisées par les éditeurs, avec les illustrations et le mise en page définitive, sont effectivement des prototypes, celles que je réalise pour jouer avec des amis sont bien des brouillons, des versions préparatoires, inachevées…. et souvent brouillonnes.


 

In the train back from the Cannes game festival, I’m writing a short report of these three days spent sometimes playing and drinking, but most times just talking and walking through the fair alleys. Since I didn’t take any pictures, I’ll steal a few ones on my friends and publishers’s facebook threads to illustrate it.

The fair started strangely, on Thursday night, with a modern design hotel room, so conceptual that I needed five minutes to find the bathroom door, and then to understand how to open it. Then came the surrealistic  results of the French game of the year award, the As d’Or. While Scythe and Go Cuckoo! are good and informed choices for the hardcore gamers and the kids awards, everybody was surprised by the choice for the main award, Unlock!. Like everyone here, I was expecting Codenames, the best word game since Taboo. I might have been even more shocked because I’m not interested in escape rooms and escape rooms like logical deduction games which seem to be the new craze – and are certainly not for everybody. Let’s hope it won’t last.

I had no new prototype to pitch to publishers, having sold the last one to Matagot two weeks ago, so it was a relatively calm fair for me. My only new game sold on the fair was Fearz!, codesigned with Anja Wrede. I played a few games at the Don’t Panic booth, but our light children game was a bit lost, surrounded with much heavier stuff, with lots of monsters and/or giant robots miniatures. And, by the way, it looks like Cedric is back.

Two games that will hit the shelves this summer, Small Detectives (designd with Charles Chevalier) and Secrets (designed with Eric Lang) were shown in advance at Pixie Games and Repos Prod.

Left, with Charles Chevallier at Pixie Games
 
Pixie Games is a small but dynamic and fast growing French publisher and distributor. They have already published a few cute and clever light games, and are also importing in France some great stuff, like Shem Phillips’s viking games illustrated by the fabulous Mico, and the great German style games by the Italian publisher What’s Your Game. Small Detectives is a 15 minutes deduction game, clearly derivative of good old clue but much lighter, fun and dynamic. There was only one advance copy and one table to play it, but it seemed to be a hit with the few people who could play it. I saw the near final components for the first time, and they look great – even if we all agreed that there must be more bright colors on the box.

Repos Prod did things properly for the first public presentation of Secrets, my second collaboration with Eric Lang, which will be out for the Indianapolis Gen Con, in August (The Sombrero wearing Belgians might have to change their costumes and logo if the don’t want to be rejected when entering the U.S). Secrets was played on a large table in a large booth decorated with images from the game. Secrets feels a bit like a hardcore player and team version of Mascarade. The theme is the cold war, with most players being members of the CIA or the KGB and one or two being hippies and playing a different game. Graphics are really fun, and the first prototypes of bakelite tokens were impressive.

At the Iello party, with some designers, developpers and publishers.

I spent much time at Cannes with Eric Lang, at the booths of the publishers of our codesigns, HMS Dolores and Secrets, and at various publishers parties. On Friday night, after having already drunk a bit at the Iello party, we managed to find our way to the Iello one. As Eric said, the game publishing business in France being “very political”, one must sail very carefully through it (not sure one can say this in English, but I like the “sailing” image). Saturday, at the Repos party, we didn’t drink much.


Serge Laget demoes Argo

I’ve stopped at the Atalia, Sweet Games, Lui-Même and Iello booths to sign a few copies of Argo, Waka Tanka, Dolorès and Diamant. I also had some discussions with publishers and illustrators about stuff I’m not allowed to discuss publicly yet.

As always in such fairs, I could not find the time to play many games. The few new games I will recommend, most of which are not out yet, are from hearsay and from looking for ten minutes at people playing and enjoying them. I’ve heard very good reports of Rob Daviau’s Mountains of Madness and of Serge Macasdar’s Seeders : Exodus. I’ve seen people playing Wlad Watine’s Top Face Fantasy, Gun Hee Kim’s Cannon Buster, Romaric Galonnier’s Profiler and a card game with kawaii cats whose title and designer I forgot at the Bombyx booth. There are also games I don’t always think as new stuff, since I already played them long ago in prototype form, Watizit and Yamatai, by my friends Hervé Marly and Bruno Cathala, and Sentai Cats, a small game by half a dozen designers.

I’ve wandered in the alleys looking at the many, really many, may be too many, new games. I had a feeling the place was less crowded than last year, but this might be due a to a larger exhibit are, or to the long and fastidious lines, due to security check, to enter the fair.
On the professional side, there seemed to be more people from all around the world. I discussed games with Koreans, Poles (my old friends Ignacy and Merry), Germans, English, Italians, Finns, Americans, Canadians and even a German polyglot trying to bring Japanese games into France – and I don’t count the cultural schizophrenic David Cochard. Even Eric Martin was here, with his family, for the boardgamegeek.


With Bruno Cathala and Kevin Kimchan Kim

The constitutive meeting of the French game designers association took place on Saturday morning, but unfortunately I had to leave before the most interesting topics were discussed. Anyway, it’s a great initiative pushed forward by really nice and efficient people, and I hope to find some time to invest in it.

The last episode took place on Sunday. I probably forgot on the station platform, or may be in my hotel, a bag with some of the games I bought or was offered on the fair. If someone found a Pixie Games purple bag with copies of Clonk!, Mot pour Mot, Top Face Fantasy and one or two more small boxes, please tell me !


Tiring and challenging work session with Ludovic Maublanc, Corentin Lebrat and Antoine Bauza.

Intrigues et complots
Intrigues and Schemes


Cesare Maccari, Cicéron dénonce Catilina, 1888

Je ne pense pas avoir un tempérament d’intrigant. Les rares fois où je m’y suis essayé, j’ai d’ailleurs eu l’impression de n’être pas très doué pour le rôle. En GN, en revanche, je me suis parfois débrouillé assez bien. Dans les jeux de société, j’aime bien l’intrigue, la magouille, que ce soit comme thème ou comme substrat aux mécanismes. Voici donc quatre bons jeux de cartes, tous des poids moyens, auxquels j’ai joué récemment et ayant pour thème les intrigues de toute sorte.

Intrige, de Stefan Dorra, n’est pas vraiment une nouveauté, puisque la première édition – qui reste ma préférée – est parue en 1994. Après avoir été injustement oublié, il vient de ressortir en français chez un petit éditeur, Igiari. Si vous ne connaissiez pas ce qui est sans doute le plus pur jeu d’enfoirés et de trahison, c’est l’occasion de le découvrir. Intrige est, en fait, un jeu sur la corruption. Chaque joueur a un certain nombre de postes, plus ou moins rémunérateurs, à pourvoir en les attribuants à ses concurrents. Chacun d’entre eux verse le pot de vin qu’il souhaite, puis le joueur encaisse tout et attribue le poste à qui il veut, pas nécessairement celui qui a payé le plus cher. C’est très méchant, mais pas bête du tout, et c’est bien sûr le plus riche qui gagne à la fin.

On reste à la fin du Moyen-Âge avec le curieux House of Borgia, de Scott Almes, dans lequel chacun soutient secrètement un candidat à la papauté et intrigue pour augmenter son influence à la curie de Rome (ou peut-être d’Avignon). Le mélange d’un système de dés à la Perudo avec un jeu à identités secrètes est très surprenant mais permet bien des embrouilles.

Aujourd’hui, quand on pense intrigues de cour et jeux de pouvoir dans un univers médiéval, on pense souvent à Game of Thrones. Dans Hand of the King, le personnage central que tous les joueurs manipulent – à moins que ce ne soit lui qui manipule les joueurs – est l’eunuque Varys, l’intriguant ultime. Le thème est très présent, mais pas vraiment convaincant, les mécanismes assez abstraits ne laissant guère de place aux intrigues psychologiques – on est quand même chez Bruno Cathala – mais c’est quand même un excellent jeu.

On quitte le Moyen-Âge pour un univers vaguement steampunk avec Grifters, mais on pourrait tout autant être dans le Chicago des années trente. Le but est d’ailleurs, comme toujours, le profit. Côté mécanique, on est d’ailleurs plutôt dans la combinazione, car Grifters – qui signifie intrigant, magouilleur – est un jeu de combos, dans lequel il faut utiliser au mieux les membres de son gang, sans jamais perdre de vue ce qu’il se passe dans les autres quartiers.

Secret Hitler est un excellent jeu d’intrigues et d’identité cachées de la famille des loups garous. Le thème aurait sans doute peu être mieux choisi, puisque l’on imagine mal des fascistes, prompt au culte de la personnalité, avoir un leader secret et caché. Une fois dans le jeu, on oublie ce détail et on se laisse vite prendre aux intrigues et magouilles pour d’une part découvrir qui sont nos partenaires, et faire passer notre programme politique.

Black Orchestra est un jeu de coopération au thème plus politiquement correct, et plus historique, puisque l’on y joue des résistants comploteurs qui tentent d’assassiner Hitler – il y en eut un certain nombre. J’en ai une boite, mais c’est un assez gros truc, plus sérieux et ambitieux que tout ce qui précède, et du coup j’attends encore l’occasion d’y jouer. J’espère que ce sera bientôt, car la lecture des règles est prometteuse.

Et, bon, ce n’est pas parce que je dis du bien d’autres jeux d’intrigues, d’embrouilles et de complots qu’il faut oublier mes grands classiques que sont Citadelles et Mascarade…. J’en ai un autre un peu de la même famille, conçu avec Eric Lang, qui arrive bientôt.


The Gunpowder Conspiracy

I don’t think I have a schemer or intrigant temper. The few times I gave it a try, I felt that I was not very good at it. In LARPS, on the other hand, I managed much better. In boardgames, I like intrigues as a setting, or as an incertain bedrock for the game systems. Here are four middle weight card games I’ve recently played and whose theme is intrigues, schemes and manipulations.


Stefan Dorra’s Intrige is nothing new, since the first version, which is still my favorite, appeared in 1994. A new French edition has just been published by Gigamic, which was the opportunity to play it again. This extremely nasty game of intrigue and deception is still as good as it was. Each players controls several positions, some more profitable than others, which must be attributed to their rivals. Each other player first gives a bribe, and then the active player awards the position to whom they want, not necessarily the highest bidder. It’s nasty and clever, and of course richest player wins.

We stay in the late middle ages with an odd game, Scott Almes’ House of Borgia. Each player secretly supports a cardinal which he wants te be elected as the new pope, and tries to increase his influence in Rome’s (or may be it’s in Avignon). The game systems  involve secret identity, bidding, bluffing… and the Liar’s Dice / Perudo dice system. This surprising mix makes for scores of scheming opportunities.

When one thinks of intrigue and scheming for power in a medieval setting, the usual reference has become not historical Middle Ages but fantasy ones, and most of all Game of Thrones. In Hand of the King, all players move the same character, the ultimate schemer, the eunuch Varys – or may be he is manipulating the players. The intrigue theme is a bit deceptive, since this mostly a strategy game where everything is played in the open – after all, it’s designed by Bruno Cathala – but it’s a great game.

Let’s leave the Middle Ages for a vaguely steampunk setting with Grifters – but this could as well be Chicago in the thirties. The goal of the game is, as usual, money. The mechanisms are more about card combinations – or combinazione. The cards represent members of the players’ gangs, which must be played as accurately as possible to maximise profit, without losing sight of what’s happening in the other parts of the town.  

Secret Hitler is one of the best secret identity games, in the werewolf family. The theme doesn’t really works, since it’s hard to imagine fascists, always prone to personality cult, having a secret leader. Anyway, once the game starts, this detail is rapidly forgotten once scheming and maneuvers to discover one’s teammates and push one’s political agenda starts.

Black Orchestra is a cooperative game with a more politically correct and more historically accurate setting. Players are  conspirators involved in a plot to assassinate Hitler – there have been several attempts. I have a copy of it, but it’s something relatively serious and ambitious, which probably explains why I’ve not played it yet. The rules look very interesting, and I plan to bring it to the table soon.

I’m praising a few other intrigue games, but don’t remember mine. Citadels and Mascarade, at least, are classics in this genre. A third one of this kind, designed with Eric Lang, is scheduled for the end of this year.

Vincenzo Camuccini, The Death of Cesar, 1798

David Cochard

La publication sur ce site du Kamasutra, qu’il a illustré avec finesse, a été l’occasion de faire une longue interview de mon ami David Cochard, un personnage hors du commun.

• Bruno : La plupart des illustrateurs que je connais sont venus au jeu de société parce qu’ils étaient déjà joueurs. Ce n’est pas ton cas. Comment es-tu devenu illustrateur de jeux ?

David : Il est vrai que malheureusement, je suis un handicapé de l’esprit de compétition, et cela m’empêche de profiter pleinement de la plupart des jeux. Si je peux sans problème comprendre la mécanique d’un jeu, et parfois même être capable de proposer des améliorations, mon désintérêt absolu de mon sort ou de celui de mon équipe dans une compétition fait de moi un horrible client pour ce genre d’activité. Je rêvasse, pense à autre chose, m’ennuie, pendant qu’autour de moi la colère contre le boulet que je suis commence à monter.
Si je suis tombé dedans, c’est parce que dans les années 90, deux options existaient pour un dessinateur comme moi passionné de science-fiction ou de fantasy : la bande dessinée et les jeux de rôles. Mais déjà dans les années 90, les éditeurs de bande-dessinées proposaient des contrats que je trouvais intolérables. De plus la bd n’autorise pas la diversification des styles comme peut le faire l’illustration. Donc les jeux de rôles étaient mon terrain de jeu. J’y ai rencontré des gens que j’apprécie toujours maintenant, Didier Guiserix, Pierre Rosenthal, etc. Et c’est par l’intermédiaire de l’un deux, Serge Olivier, transfuge de Casus Belli, le magazine de référence du jeu de rôle jusqu’en 2000 vers Tilsit éditions, éditeur de jeux de plateau français, que j’ai rencontré Didier Jacobee, puis Vlaada, etc


Himalaya, de Régis Bonnessée, publié chez Tilsit (2002)

• Tu travailles souvent pour les mêmes éditeurs, notamment CGE (Czech Games Edition), pour qui tu as illustré beaucoup des jeux de Vlaada Chvatil, et Sweet November, où tu as notamment fait les dessins de mon Waka Tanka. Pour quelles raisons ?

Pour des raisons de personnes. Je ne peux vraiment bien travailler que pour une personne que j’apprécie.
Vlaada est un créatif incroyable, d’une rapidité et d’une ouverture d’esprit rafraîchissantes, et avec un humour ravageur. C’est lui qui est venu me chercher en Argentine pour que je l’aide à créer son Dungeon Lords. Il avait senti que j’étais la personne avec qui il pourrait en imaginer l’univers. Nous partageons cela, le goût de la création de mondes aussi bizarres que possibles. Dans la roue de Vlaada, Filip Murmak, grâce à son exigence, et sa patience, m’a toujours permis de me dépasser.
Mon amitié avec Didier date de l’époque où Tilsit a coulé grâce à l’intervention de XXXX (Note de Bruno: les initiés devineront quel éditeur David cite ici, j’ai retiré le nom pour éviter les ennuis mais je partage l’analyse) qui se sont comportés de manière intelligente selon le capitalisme version Trump, comme des enfoirés de mon point de vue. Alors que tout le monde le lâchait, et qu’il croulait sous les dettes et les emmerdes, j’ai appris à connaître un type vraiment bien. Je lui ai donc offert mon amitié et je n’ai jamais eu à le regretter. Ni l’argent, ni la renommée ne sont pour moi des motivations.  Créer, dessiner, m’amuser si.

Dungeon Petz, de Vlaada Chvatil

• Dungeon Lords, Dungeon Petz, Trôl qui arrive bientôt, et aussi, en dehors du monde du jeu de société, ta série de peintures sur les monstres de Paris – Il me semble que tu aimes bien dessiner les monstres. Sais-tu pourquoi ?

La beauté existe sous de multiples formes. La plus évidente est certes intéressante, mais je préfère la beauté bizarre des monstres. Je suis passionné par la vie, et ses formes les plus extrêmes. Les organismes des grands fonds par exemples sont fascinants, mais aussi les champignons, les zooplanctons, les acariens etc. Qui fera l’éloge du psoque si je ne le fais pas ? Sur un plan plus personnel,  j’ai dû me battre longtemps contre une dysmorphophobie qui faisait que je me sentais d’une laideur si repoussante que je m’étonnais quotidiennement qu’on ne me jetât pas de pierres, et je pense que c’était une manière de dire que si j’étais monstrueux dehors, je n’étais pas si pire dedans. Maintenant, ça va beaucoup mieux, je me trouve normal, et c’est un sentiment grisant.

Découvrez ici Les Monstres de Paris, série de peintures de david Cochard

• Quel est le jeu que tu as eu le plus de plaisir à illustrer ? Pourquoi ?
Dungeon Petz Dark Alley. Le monde était déjà rodé, l’idée encore plus drôle, plus particulièrement destinée à un public plus jeune et féminin (même si la mécanique restait pour les enfants à mon avis trop complexe) et que lorsque je proposais des personnages plus délirants les uns que les autres, Vlaada adaptait, quand c’était possible, pour les intégrer

• Avant Kamasutra, tu avais déjà illustré deux de mes jeux, Key Largo, il y a bien longtemps, et plus récemment Waka Tanka. As-tu une anecdote, ou un truc particulier à raconter sur l’un ou l’autre ?

Key Largo est le premier « gros jeu » que j’ai illustré. Je ne savais pas comment et vers quoi aller et j’ai juste essayé de faire de mon mieux.

Pour Waka Tanka, j’ai particulièrement travaillé le style, et je suis tombé par hasard sur l’imagerie traditionnelle américaine.  Ce n’était en réalité pas si étonnant, car je me suis pas mal inspiré de l’imagerie indienne européenne, et en particulier celle de Morris dans Luky Luke Ça a été suffisamment réussi pour provoquer un mini scandale outre Atlantique, où l’on a dû changer l’illustration de couverture.

• Venons-en au Kamasutra. Qu’est-ce qui a été amusant ? Qu’est-ce qui a été difficile ?

L’idée du jeu est particulièrement amusante, et imaginer les gens s’efforcer d’éclater les ballons dans les positions que nous avons choisies et un plaisir récurrent
La difficulté a été de trouver un style qui soit suffisamment mignon pour éviter tout côté salace aux illustrations. Au départ j’avais pensé à des pandas, mais ces sympathiques animaux sont trop courts sur pattes pour se prêter à toutes les positions. Je me suis donc rabattu sur les humains. J’ai donc recherché différents traitements. Les premiers étaient trop comiques à mon goût, d’autres trop réalistes, et je suis finalement tombé sur un traitement qui fait penser un peu à Arthur de Pins, ce qui est plutôt flatteur.

• Comment illustres-tu un jeu ? Techniquement, fais-tu tout sur écran, ou commences-tu sur papier ?

Ça dépend. Si beaucoup de recherches sont indispensables, je préfère dessiner sur papier, et possiblement ailleurs que dans mon bureau. Pour Vlaada par exemple, je vais à Pragues ou à Brno et je crayonne au café pendant que Vlaada, Petr, Filip et autres discutent des personnages. Je jette quelques idées sur le papier, sur lesquelles ils rebondissent, jusqu’à ce que j’obtienne un personnage ou une composition qui satisfasse tout le monde. Je rentre ensuite chez moi et finalise à l’ordinateur.

• T’y prends-tu de la même manière quel que soit le jeu ?

Ça dépend des jeux et du résultat que je veux avoir. Pour Kamasutra par exemple, j’ai fait tous les crayonnés à la main, et les ai repris sur calque pour avoir un grain spécifique. J’ai ensuite aquarellé après les avoir imprimés sur papier (d’où la trame dans les cheveux) et j’ai retouché le résultat sur Photoshop.
En général, il est rare que je fasse autant de travail sur papier, mais je voulais un résultat sensuel, et donc j’ai privilégié le tactile sur le digital, la main plus que le doigt.
Sinon, le plus souvent, pour des raisons de délais, je privilégie l’ordinateur.

• Préfères-tu les éditeurs qui te laissent libre d’improviser ou ceux qui donnent des consignes précises ? J’ai entendu d’autres dessinateurs pester tantôt contre les uns, tantôt contre les autres…

J’aime les deux extrêmes, même si j’ai une légère préférence sur ceux qui ont des consignes précises. Mes clients de l’enfer sont ceux qui disent qu’ils ne savent pas ce qu’ils veulent mais savent ce qu’ils ne veulent pas. En réalité, ils attendent inconsciemment que le dessinateur fasse une vingtaine de propositions différemment géniales pour tomber amoureux d’une d’entre elles. Evidemment, cette méthode exige un travail dingue de la part du dessinateur, un investissement égal pour chaque version, et amène autant de déceptions que de refus pour une seule rémunération. C’est un peu comme si un type entrait chez un pâtissier, goûtait toutes les pâtisseries pour n’en choisir qu’une seule, après bien sûr qu’il ait commenté toutes celles qu’il n’aime pas en disant : ah, celle-ci non, j’aime pas la fraise, etc.
Avec un client qui sait précisément ce qu’il veut, il suffit d’être professionnel. Dans celui qui laisse libre, on doit en plus être créatif, et si le sujet inspire, c’est un bonheur, si non, c’est un travail supplémentaire. Si j’aime travailler avec Vlaada, c’est qu’il a les deux. Il a une idée précise mais sait quand lâcher la bride.
Toi, tu fais clairement de la seconde catégorie, et je pense que c’est parce que tu as confiance dans la capacité du graphiste à exercer son métier (Note de Bruno : c’est surtout parce que je suis conscient de mon incompétence totale en matière de graphisme). Sache que j’apprécie cela énormément.


The publication here of Kamasutra, a card game he has illustrated subtly and cleverly, was a good opportunity for an interview of my friend David Cochard, a very special guy.

• Most of the boardgame illustrators I know went into the job because they were already gamers. It’s not your case. How did you become a boardgame illustrator?

I’m handicapped by a lack of competitive spirit, and this prevents me from really enjoying most boardgames. I have no problem understanding game mechanics, I can even sometimes suggest some improvements, but I can’t get interested in my victory, or even that of my team, and I’m therefore not a nice guy to play with. I dream, my mind wanders, and fellow gamers start getting angry at me pretty soon.
In the ninetiesin France, there were two possible careers for a graphic artist fascinated by fantasy and science-fiction, comics and role playing games. Comics publishers were already proposing the kind of deals I found unacceptable. Furthermore, comics artists cannot change style like illustrators can. Role playing games were my artist playing field, where I met people I still meet occasionally and like, such as Didier Guiserix, Pierre Rosenthal… One of them, Serge Olivier, who had worked at Casus Belli, the grandad of all French rpg magazines, left for a French boardgame publisher, Tilsit editions, and that’s how I met Didier Jacobée, then Vlaada, etc…


With Vlaada Chvatil

• You often work for the same few publishers, mostly CGE (Czech Games Edition), where you made the art for most of Vlaada Chvatil’s games, and Sweet November, where you illustrated many small games, including my Waka Tanka. Why ?

It’s all about personal relations. I can only work for people I like.
Vlaada is incredibly creative, with a fast and open mind, and a devastating humor. He managed to track me in Argentina to help himon his Dungeon Lords, because he felt I was the guy who could help him imagine the right graphic universe. We both like designing bizarre worlds. With Vlaada, there is always his buddy Filip Murmak, whose exigence and patience (or lack of) always help me to give the best I can.
My friendship with Didier dates back to when Tilsit went out of business thanks to the help of XXX (Bruno’s note : insiders will guess whose publisher David is naming here, but though I agree with him, I’d rather not name it) who acted in a clever way according to Trump’s version of capitalism, like bastards according to my view. Everybody was dropping him, he was crumbling under debts, and that’s when I found out he was a really good guy. He became a true friend, and I never regretted it. My motives are not fame or money, they are to create, draw and have  fun.
I  could tell why I like you but it would be too personal ;-).


Trôl, a game by Christophe Lauras, soon to be published by Sweet November.

• Dungeon Lords, Dungeon Petz, soon Trôl, and outside the gaming world your series of paintings about Parisian monsters. It looks like you like to draw monsters. Do you know why?

There are many types of beauty. The obvious one is interesting, but I prefer the strange and disturbing beauty of monsters. I’m fascinated by life, and most of all by its most extreme forms, like deep sea creatures, but also mushrooms, zooplanktons, acarids… Who will praise the Booklice if I don’t? On a more personal note, I’ve long been affected by dysmorphobia, I was feeling so ugly that I was surprised people didn’t throw stones at me. May be it was a way to state that, if I was ugly on the outside, I was not that bad on the inside. I feel better now, normal, and this feeling of normalness is exhilarating.


Parisian Monsters, paintings by david Cochard

• Which game did you have the most fun illustrating? Why?

Dungeon Petz Dark Alleys.
The world was already there, the teamwork already built, but we were targeting other gamers, kids  and women (even when, imho, the systems are still too complex for kids), and many times when I was suggesting some zany and bizarre characters, Vlaada managed to bring them into the game.

• Before Kamasutra, you have already illustrated two of my games. The first one, long ago, was Key Largo. More recently came Waka Tanka. Do you have any fun anecdote about these?

Key Largo was my first “big box” game. I did not really know how to do it, and I just tried to do my best.

For Waka Tanka, I thought a lot on the style, trying to make ironical references to American imagery – it was successful enough to raise a small controversy over there, and we had to change the cover for the US edition.

• What about Kamasutra? What was fun in illustrating it, what was hard?

The game idea is incredibly fun, and I’m always giggling when I’m imagining players trying to pop the balloons in the various positions we have selected.
The most difficult thing was to create the right style, cute enough to defuse any vulgarity in the illustrations. The first idea was pandas, but these cute beasts are too short legged for most of the positions. So I reluctantly went back to humans, and tried several styles. The first ones were too funny and comical, the next ones were too realistic. I finally settled on a graphic style a bit similar with Arthur de Pins (a French comic artist).

• How do you work on game illustrations? Is-it all on-screen work, or do you start on paper?

It depends. If it needs some research and thinking, I’d rather start on paper, and if possible not in my office. To work with Vlaada, I fly to Prague or Brno and sit in some café while Vlaada, Petr, Filip and the rest discuss the characters. I draw some wild ideas on paper sheets, and they react on them until we got a character or a composition they like, then I fly back home and finalize it on the computer.

Tash Kalar, by Vlaada Chvatil

Dungeon Lords, by Vlaada Chvatil

• Do you always work in the same way, or do you change tools and methods depending on the game?

It depends on the game, and what I want to achieve. With Kamasutra, for example, I first drew sketches by hand (là, je n’arrive pas à traduire, ne serait-ce que parcequ’il y a des termes techniques dont je ne connaismême pas bien le sensenfrançais – calque, grain, trame…
I’ve made all the rough first hand and redraw them with tracing paper, in order to get a nice texture. I printed the result on watercolour paper to paint them in watercolours (the halftone screen dots in the hair come from that stage) and I finally photoshopped the whole in order to fix the mistakes I’ve left.
I usually don’t do that much on paper, but I wanted the final result to be sensual, so I needed to handle sensitive tools, working with the hand rather than digital. Most times, due to deadlines, I work more on computer.

• Do you prefer publishers who let you free to improvise, or those who give precise insttuctions for every picture? I’ve heard other illustrators curse the ones and the others.

I prefer those who give detailed instructions, but I can work and enjoy it both ways. What I don’t like are those who pretend they don’t know what they want, but know what they don’t want. In fact, they unconsciously expect the artist to show them a dozen different designs, so that they can get enthusiast about one. This requires more work from the illustrator, the same amount of work for every possible version, with the same final number of disappointments and cancellations but the same pay as a one version work. It feels a bit like someone entering a bakery and tasting all cakes before choosing only one – and making comments about all the ones one dislikes – oh, no, I don’t like strawberries…. 
When the client knows what he wants, the artist just has to do the job. When the artist is free, the artist must also be creative, which is a pleasure when he likes the setting, and a painful job when he doesn’t. What I like in working with Vlaada is that he works both ways. He has a precise idea of what he wants, but he also knows when to give more rope.
You belong to the last type of client, and I guess the reason you let so much rope is that you trust the graphist to know his job, and that’s truly appreciated

Citadelles
Citadels

Quelles bizarreries ne trouve-t-on pas dans une grande ville, quand on sait se promener et regarder? La vie fourmille de monstres innocents.
Charles Beaudelaire, Le Spleen de Paris

citadels etourvy 1« Si non confectus, non reficiat »  (si ça marche, n’y touchez pas) est, dans le disque monde, la devise de Lord Vetinari. Elle explique que Citadelles, de loin celui de mes jeux qui se vend le mieux, et dont l’action passablement chaotique pourrait très bien se situer à Ankh-Morpork, n’ait guère évolué depuis sa première édition en 2000. Tant que les boites se vendaient bien, les éditeurs ne souhaitaient guère toucher ni aux règles, ni aux illustrations. Une autre raison est que les droits sont partagés entre trois éditeurs, Edge pour les éditions en français et espagnol, Hans im Gluck pour l’allemand, le tchèque et le hollandais, et Fantasy Flight Games, donc maintenant Asmodée, pour le reste du monde, ce qui rend tout travail sur ce jeu un peu compliqué.

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La première édition française de Citadelles (2000)

Quatre ans après le jeu de base est parue une extension, la Cité Sombre, introduisant dix nouveaux personnages issus pour la plupart d’un concours organisé par Hans im Glück, et une quinzaine de nouveaux quartiers. Plus tard, les cartes de la Cité Sombre ont été intégrées aux différentes éditions de Citadelles. En 2012, l’éditeur allemand a également publié une version comprenant une dizaine de cartes action sur le thème du cirque, qui selon moi n’apportent pas grand-chose au jeu.

Deux ou trois fois par an, je suis contacté par des fans de Citadelles qui ont imaginé leur propre extension. Malheureusement, la quasi-totalité de ces propositions vont dans la même direction, une direction que je ne souhaite pas suivre, celle d’un jeu sensiblement plus complexe et plus stratégique, et laissant une moindre part au hasard et au bluff. On y trouve souvent des quartiers aux interactions sophistiquées, et chaque joueur y contrôle parfois deux ou trois personnages. J’ai toujours regardé ces propositions avec attention, mais je ne les avais jusqu’ici jamais transmises à mes éditeurs car je tiens à ce que Citadelles reste un jeu simple, direct, et plus méchant que stratégique, plus psychologique que tactique.

Mission Red Planet - CoverLost temple cover

Quitte à m’intéresser à Citadelles, j’ai trouvé plus intéressant d’en réexporter le système de personnages dans des jeux entièrement différents, Mission : Planète Rouge,  un jeu de majorité sur Mars développé avec Bruno Cathala, et Lost Temple, un jeu de parcours à la recherche d’un temple perdu, plus léger et plus familial que Citadelles. J’ai aussi tenté de recréer des sensations similaires en utilisant de tout autres mécanismes, dans Aux Pierres du Dragon, conçu avec Michael Schacht, puis dans Mascarade, qui a lui aussi remporté un très grand succès.

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En août 2013, j’ai reçu encore une proposition de neuf nouveaux personnages imaginés par un jeune joueur, Robin Corrèze, mais ceux-ci m’ont semblé plus frais, moins tarabiscotés que ce que j’avais l’habitude de voir. Je les ai fait tourner un peu dans ma tête, puis dans quelques vraies parties. J’en ai aussi glissé un mot aux gens de Fantasy Flight Games, l’éditeur américain de Citadelles. Quinze ans après la sortie du jeu, ils ont estimé qu’il était peut-être temps de prendre quelques risques et de tout remettre à plat. Deux ans de travail, de tests et de développement plus tard, voici donc les deux nouvelles  de Citadelles, qui seront sans doute rapidement adaptées dans la plupart des  langues dans lesquelles le jeu est disponible.

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La nouvelle édition “classique” de Citadelles, avec une belle couverture de Florence Magnin.

L’édition « classique » de Citadelles, bon marché, dans une petite boite carrée, reprend désormais pour l’essentiel le jeu d’origine, tels qu’il a été publié en 2000, avec ses huit personnages emblématiques – Assassin, Voleur, Magicien, Évêque, Roi, Marchand, Architecte et Condottiere – dessinés par Jean-Louis Mourier. Seuls deux ou trois quartiers violets, parmi les plus intéressants de la Cité Sombre, ont été ajoutés. C’est donc le Citadelles de base, simple et efficace mais sans possibilité de « customisation ». Puisque c’est un retour aux sources, les illustrations ne pouvaient qu’être celles du jeu d’origine, par Florence Magnin, Julien Delval et Didier Graffet, qui ont largement contribué au succès du jeu.

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L’édition complète, dans une boite carrée plus grande, est la vraie nouveauté, avec pas moins de 27 personnages en format tarot – trois pour chaque numéro d’ordre, de 1 à 9 – et une trentaine de merveilles. Elle a été concoctée avec l’équipe de Steven Kimball, désormais responsable de Windrider Games, et avec qui j’avais déjà travaillé sur la nouvelle version de Mission: Planète Rouge. Ce fut encore une fois encore très agréable. Steven a plein d’idées, est toujours ouvert à la discussion, et est parvenu à apporter énormément à ce nouveau Citadelles sans que je m’en sente pour autant jamais dépossédé.

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La nouvelle édition complète de Citadelles

Je n’avais jamais été complètement satisfait des nouveaux personnages de la Cité Sombre. Plus complexes que ceux du jeu d’origine, ils n’étaient pas toujours aussi amusants à jouer, et certains faisaient entrer trop d’or dans la partie. Beaucoup ont été un peu modifiés, et le Bailli ne ressemble même plus guère à celui d’origine. S’y ajoutent neuf personnages entièrement nouveaux, issus pour moitié environ des propositions de Robin Corrèze, l’Échevin, la Maître-Chanteuse, l’Espion, la Voyante, le Patricien, le Cardinal, le Bourgeois, l’Archiviste, le Capitaine. Les quartiers violets, les Merveilles, ont aussi été tous étudiées avec soin. Quelques uns ont vu leurs effets modifiés, les moins utilisés ont disparu, et d’autres comme la Nécropole, la Statue ou la Crypte font leur entrée dans la Cité. Attention au Théâtre – quand il est sur la table, on joue en même temps à Citadelles et à Mascarade.

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Citadelles est un jeu d’il y a bientôt vingt ans. Les goûts et les habitudes ont changé, et les jeux actuels sont plus rapides. Une partie de Citadelles se jouera donc désormais en sept quartiers et non huit. Certains des nouveaux effets permettent en outre de poser plusieurs quartiers à son tour de jeu, contribuant aussi à accélérer les parties.

Les magnifiques illustrations d’origine ont certainement beaucoup fait pour le succès de Citadelles, mais nous ne pouvions pas les utiliser dans cette nouvelle édition. En effet, le travail de maquettage date d’il y a bien longtemps, et nous ne sommes pas parvenus à retrouver les fichiers images d’origine. Quant aux originaux, j’en ai deux de Julien Delval chez moi, je sais où se trouve le dessin de couverture de Florence Magnin, mais tout les autres ont disparu.

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Pour la version « de luxe » de Citadelles, il fallait donc de nouvelles illustrations. Les quartiers ont été commandés à une quinzaine d’artistes, qui ont été laissés assez libres de représenter comme ils l’imaginaient l’univers du jeu. Simon Eckert a dessiné la couverture, dans une Renaissance imaginaire plus lumineuse que celle de Florence Magnin pour l’édition originale. Les personnages, dessinés par Andrew Bosley, sont eux-aussi plus engageants.  J’aimais bien le côté sombre, un peu inquiétant, du jeu original mais je pense que je me ferai vite au ton plus joyeux de la nouvelle édition – et le jeu, lui, reste tout aussi méchant.

Citadelles
Un jeu de Bruno Faidutti
2 à 8 joueurs – 30 à 60 minutes
Publié par Windrider Games, Edge, Hans im Glueck
Ludovox      Vind’jeu     
Tric Trac    Boardgamegeek


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What is the City, but the People ?
William Shakespeare, Coriolanus

Wickedness is always wickedness,
but folly is not always folly.
It depends upon the character.

Jane Austen, Emma

In Discworld, Lord Vetinari’s motto is “Si non confectus, non reficiat” (If it ain’t broke, don’t fix it). This is also why Citadels, by far my best-selling game and a game whose chaotic action could have taken place in Ankh-Morpork, has not changed much since its first edition in 2000. As long as it kept selling well, publishers were not pushing for changes, neither with the rules nor with the art. Another reason is that the publishing rights are divided among three different publishers: Edge for French and Spanish versions, Hans im Glück for German, Dutch and Czech, and Fantasy Flight Games, now Asmodée North America, for the rest of the world. This makes working on this game a bit complex.

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The first French edition of Citadels (2000)

Four years after the basic game was published, The Dark City expansion was released, with characters mostly taken from a design contest held by Hans im Glück, and a dozen new districts of my own design. in 2012, the German publisher also designed in-house a dozen new cards with a circus setting, which I think don’t add much to the game.

Two or three times a year, I get an email from a Citadels fan who has designed his own expansion. Unfortunately, almost all of these submissions try to force the game in a different direction by making it more complex, more strategic, more convoluted, and reducing the luck and bluffing elements. There are often districts that interact with each other, or with some characters, and sometimes players end up playing two or even three characters every round. I always take a close look at these variants, but so far I never forwarded one to my publishers because I’ve always wanted to keep Citadels simple, direct, more nasty than strategic, more psychological than tactical.

Mission Red Planet - CoverLost temple cover

This doesn’t mean I never thought about the Citadels system, but I found it more fun and challenging to repurpose the character-selection system, or parts of it, in entirely different games. The results were Mission: Red Planet, a majority game on the planet Mars I designed with Bruno Cathala, and  Lost Temple, a light racing game which might be the family fare version of Citadels. I’ve also tried to create similar sensations using completely different systems, and the results were Fist of Dragonstones, designed with Michael Schacht, and Mascarade, which seems to become also a lasting hit.

Mascarade boxDragonstones cover

In August 2013, I received an email by a young gamer, Robin Corrèze, with yet another Citadels expansion. It was mostly made up of nine characters who felt fresh and not convoluted like most of the suggestions I usually received. I thought about them a bit, and eventually I printed them and played a few games. Then I informed the guys at Fantasy Flight Games, the main publisher. Fifteen years after the game was originally published, they decided to seize the opportunity to revamp the game. After two years of intense testing and development, here come the two new versions of Citadels, which will likely be adapted soon into most languages.

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La the new Citadels classic edition

The “classic” version of Citadels, in small square box, is mostly the game as it was first published in 2000. It has the original set of eight characters—Assassin, Thief, Magician, Bishop, King, Merchant, Architect and Warlord—all of whom were illustrated by the famous French cartoonist Jean-Louis Mourier. We kept all of the original purple districts and added a couple of the simpler and more interesting ones from The Dark City. Since this is intended as a kind of return to the roots of the game, it needed to use the same art as the original game, by Florence Magnin, Julien Delval, and Didier Graffet, which has had a significant impact on the game’s success so far.

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The real new stuff appears in the new version of Citadels, in a larger square box. It has 27 different tarot-sized character cards, three for each rank number, and thirty unique purple districts. It was slowly cooked with Steven Kimball and his team, now in charge of the Windrider Games brand. This was just after I had finished working with Steven on Mission: Red Planet, and once more it was a great experience. Steven has lots of clever ideas, is always open to discussion, and managed to bring lots of stuff into this design without making me feeling dispossessed of anything.

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The new complete edition of Citadels

I had never been completely satisfied with all the new characters from The Dark City expansion. They were more complex than the original set, not always as fun to play, and some of them brought a little too much gold into the game. This is why some of them have been slightly modified, and the Tax Collector even changed its rank number. We have also added nine brand new characters, half of them being derived from Robin Corrèze’s suggestions. These are the Magistrate, Blackmailer, Spy, Seer, Patrician, Cardinal, Trader, Scholar, and Marshal. The unique purple districts also have been carefully reconsidered. the least popular ones are gone, a few have had their effects modified, and a dozen new ones, like the Necropolis, the Statue, and the Basilica enter the city. Be careful when the Theater is in play, as you will be playing both Citadels and Mascarade at the same time.

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Citadels is now almost twenty years old. The tastes of gamers have changed over the years, and most games are now shorter and more fast-paced. This is why a game of Citadels is now played until someone has seven districts and not eight, and it’s also why several of the new card effects allow players to build more than one district per turn. Without changing any of the core rules, we’ve made the Citadels game experience more fun and more dynamic—but just as ruthless as ever.

The gorgeous art in the original game has probably been decisive in Citadels’ success, but is was not possible to use this art in the new edition. This game dates back so many year that the original source files have been lost. And, since the original had all been scattered to the four winds, there was no way to obtain clean scans of the original pieces. As for the originals, I own two by Julien Delval, I know where Florence Magnin’s cover art is, and that’s all.

citadels 2 thieves dencitadels 2 warlord

This means that, for this new version of Citadels, we needed new art. The districts art has been made by a handful of different artists, which were left free to picture the game’s world as they imagined it. Simon Eckert drew the cover art, in an imaginary Renaissance much lighter than Florence Magnin’s one. The characters, all drawn by Andrew Bosley, also look a bit friendlier and saner than the ones in the original set. This lighter tone certainly has a broader appeal and potential to have Citadels reach audiences who weren’t possible to reach before.

Citadels
A game by Bruno Faidutti
2 to 8 players – 30 to 60 minutes
Published by Windrider Games, Edge, Hans im Glueck
Tric Trac    Boardgamegeek

Même pas mort !
Dead or not dead ?

Je viens de voir passer cette video, et je me suis dit qu’il y avait la matière à un vrai petit jeu d’ambiance, pour lequel il suffisait de trouver un système de score efficace et de rédiger les règles. Et voila :

Même pas mort !
Un jeu de Bruno Faidutti sur une idée de Mathieu Madénian et Thomas VDB

4 à 13 joueurs
Matériel : deux cartes à jouer par joueur, un cœur et un pique, et quelque chose pour compter les points.

Chaque joueur à son tour est le maître de jeu.

• Le maître de jeu annonce le nom d’un personnage connu dont il pense que les joueurs ne savent pas très bien s’il est mort ou non.
• Tous les joueurs votent simultanément en posant face cahée  leur carte cœur (vivant) ou pique (mort).
• Toutes les cartes sont révélées simultanément.
• Le maître de jeu vérifie la bonne réponse sur internet.
• Tous les joueurs autres que le maître de jeu ayant donné la bonne réponse marquent 1 point.
• S’il a donné la bonne réponse, le maître de jeu marque autant de points que de joueurs ayant donné la mauvaise réponse. S’il a donné la mauvaise réponse, ou si tous les joueurs ont donné la bonne réponse, il ne marque aucun point.

Le joueur à gauche du maître de jeu devient le nouveau maître de jeu. La parte s’arrête quand les joueurs veulent passer à autre chose.

Même pas juif !
Un lecteur me signale l’existence d’une variante, popularisée aux États-Unis dans les années quatre-vingt par un sketch de Tom Hanks, Jew or not jew. Je n’ai pas trouvé la video du sketch, seulement la transcription du texte. Le principal problème va être la vérification, car parmi tous les conspirationnistes un peu cinglés qui trainent sur le web, on trouvera toujours quelqu’un pour assurer que n’importe qui est juif.


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I’ve recently seen the funny video here over (sorry, it’s in French) and thought that there was a true game to be designed from this core idea. It lacked only written rules, and a functional scoring system. Here they are :

Dead or not dead ?
The ultimate trivia game
A game by Bruno Faidutti based on an idea by Mathieu Madénian & Thomas VDB

4 to 13 players
you need two game cards for each player, a heart and a spade, and some way of keeping score.

Each player on turn is the gamemaster.
• The game master speaks the name of a celebrity of whom he thinks the players don’t know if he/she is dead or alive.
• All players vote simultaneously with playing face down either their heart card (alive) or their space one (dead).
• The game master checks the right answer on the internet.
• All the other players who gave the right answer score one point.
• If the game master gave the right answer, he scores as many points as players who gave the wrong answer. If the gamemaster was wrong, or if all players were right, he doesn’t score any point.

The player on the left of the gamemaster becomes the new gamemaster, and so on. Game ends when players are bored of it.

Jew or not jew ?
An american gamer just told me about this variant described in an old sketch by Tom Hanks, in the eighties. I could not find a video of the sketch, but the transcript is there. The only real issue will be the fact checking. With so many crazy conspirationists around, one can always find someone on the internet assuring that anyone is a jew.

L’artbook de Pierô
Pierô’s Artbook

piero

Illustrateur de jeux de société, c’est un métier à part, et de plus en plus un métier à part entière. Quelques illustrateurs de jeux touchent aussi un peu à la bande dessinée, ou aux livres pour enfants, ou aux jeux videos, ou au dessin d’humour, certains sont aussi auteurs de jeux de société, mais ils sont de plus en plus nombreux à se spécialiser dans les jeux de société. J’ai déjà eu l’occasion ici, profitant de la sortie de certaines de mes créations, de présenter le travail de quelques-uns, comme Vincent Dutrait, Paul MafayonAndrew Bosley, Josh Cappel, ou Rafael Zanchetin. Un de ces jours, je vous parlerai de mes amis David Cochard, Julien Delval, Naiiiade ou Gérard Mathieu.

S’il fantasme parfois un peu sur la bande dessinée, Pierô (il tient à l’accent circonflexe), de son vrai nom Pierre Lechevalier, est l’un de ces illustrateurs qui ont fait le choix de travailler avant tout dans le jeu de société. Je le connais depuis une quinzaine d’années, et il a déjà illustré deux de mes créations.

Agent Double, ma seule collaboration à ce jour avec Ludovic Maublanc, est un petit jeu de bluff malin – enfin je crois – pour deux joueurs. Je le pensais épuisé, mais je viens d’apprendre que l’éditeur, Matagot, a fait un petit retirage.

Agent Double cover  Double Agent

Lost Temple, publié par White Goblin, est un jeu de parcours utilisant le système de sélection de personnages de Citadelles. L’idée était de faire une sorte de Citadelles light, pour un public plus familial. Bien que je sois très content du résultat, et des dessins de Pierô, le jeu est loin d’avoir eu le succès de son prédécesseur.

Lost temple coverLost Temple - Seer

Lorsque j’habitais à Avignon, nous nous retrouvions souvent pour des soirées ludiques chez un ami commun, Marc Laumonnier. Depuis longtemps aussi, Pierô participe chaque printemps à mes rencontres ludopathiques. C’est un joueur passionné, aux goûts assez proches des miens. Il a essayé un grand nombre de mes jeux quand ils n’étaient que des ébauches aux règles inabouties.

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Marc et Pierô jouant à Codenames aux rencontres ludopathiques.

Ilinx, c’est à dire Natacha Deshayes et Adèle Perché, est un jeune éditeur qui cherche à poser un regard artistique et un peu intello sur l’univers du jeu de société. L’une de ses premières publications est l’art book de Pierô, 150 pages en français et en anglais, abondamment illustrées, dans lesquelles il présente son travail et explique aussi bien sa technique de dessin que sa passion pour le jeu. C’est plein de croquis, de jolis dessins, et de commentaires dans lesquels je trouve parfois Pierô un peu dur avec lui-même.

ilinxAdèle et Natacha jouant à Agent Trouble

C’est une belle initiative, et j’espère que ce beau livre sera le premier d’une longue série. Vous pouvez l’acheter en librairie, ou dans une boutique de jeux, mais si vous le commandez directement à l’éditeur, ça fera un peu plus de sous pour nos amies Natacha et Adèle, et donc un peu plus de chances que la collection continue.

Si vous êtes parisien, vous pouvez aussi venir ce samedi soir, 3 décembre, au Centre National du Jeu, à Boulogne Billancourt, pour une soirée consacrée à Pierô et aux jeux qu’il a illustrés.

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piero

Boardgame illustrator is a specific job and, more and more, a job in itself. A few boardgame artists also tamper with comics, children books, video games or cartoons, a few also design boardgames, but there are more and more illustrators now dedicating themselves only or mostly to board and card games. When some of my recent games were published, I already seized the opportunity to write a few lines about the work of Vincent Dutrait, Paul MafayonAndrew Bosley, Josh Cappel, ou Rafael Zanchetin. One of these days, I’ll write a blogpost about my friends David Cochard, Julien Delval, Naiiiade or Gérard Mathieu.

Pierô (he insists on the circumflex accent) still occasionally fantasizes on comics, but he is one of the artists who have decided to work mostly on board and card games. I know him for about fifteen years, and he has illustrated two of my designs so far.

Double Agent, my only collaborative design with Ludovic Maublanc, is a light and clever – well, I hope it is clever – two player bluffing game. I thought it was out of print, but I’ve just heard that the publisher, Matagot, just made a small new print run.

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Pierô and I (when we were young) in Double Agent

Lost Temple, published by White Goblin, recycles the character selection system from my best seller Citadels in a racing game. The idea was to design a lighter version of Citadels, a Citadels for families with kids. I really like the game, and Piero’s art, but it wasn’t a hit like its adult predecessor.

Lost Temple - ElderLost Temple - Canoe

When I lived in Avignon, in southern France, Pierô and I often met at gaming nights held by a common friend, Marc Laumonnier. He is also, for quite a long time, a regular at my spring Ludopathic Gathering. Pierô is an avid gamer, we have similar tastes in games, and he has played many of my designs when they were only rough prototypes.

piero-silasPierô and his son (right) playing Celestia

Ilinx, meaning Natacha Deshayes and Adèle Perché, is a young publisher who tries to take an artistic and cultural look at the boardgaming world. One of their first offerings is Pierô’s art book, 150 pages in both French and English, gorgeously illustrated, in which Pierô talks about his job, describes how he works and discusses his passion for games. It’s full of sketches, drawings and well thought comments – in which I think Pierô is often a bit too hard on himself.

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Adèle and Natacha at the Ludopathic gathering

It’s a good initiative, and I hope this is only the start of a whole series of artbooks. You can find it in bookshops and gameshops, but if you order it directly from the publisher, it will mean some more money to the publisher and therefore better odds for the series to carry on.

dicetown

Fearz !

fearz

Anja Wrede est une sympathique et charmante auteur (auteure, c’est moche) de jeux berlinoise, spécialisée dans les jeux pour enfants, avec laquelle j’ai déjà commis pas mal de prototypes, qui ont en commun de tous mettre en scène des animaux. Fearz!, un jeu de rapidité, de mime et de reconnaissance visuelle (si, si, tout ça) sera le premier à paraître, mais il y en aura d’autres bientôt.


Petite histoire du développement de Fearz! par Étienne Mineur

Fearz est un jeu drôle, stupide et qui peut être joué par les plus petits comme par les plus grands, parce qu’il n’y a pas d’âge pour faire des bêtises. Il est publié par mes amis des éditions Volumiques, l’équipe derrière World of Yo-Ho, spécialiste des trucs hybrides et conceptuels mêlant le réel au virtuel. Vous pouvez donc jouer à Fearz avec le jeu de cartes, avec l’application sur tablette (4 joueurs max), ou, et c’est sans doute le mode le plus amusant, en combinant les deux.

appli et carte
Fearz!, le jeu de cartes et l’application
appli
Fearz!, l’application seule

Démonstration de Fearz! au salon d’Essen

Fearz !
Un jeu de Anja Wrede et Bruno Faidutti
Illustré par Nicolas Tham
Développement informatique par Ryad Godard
2 à 10 joueurs – 10 minutes
Publié par Volumiques et Don’t Panic Games (2016)
Ludovox      Tric Trac      Boardgamegeek
itunes / android


fearz

Anja Wrede is a cute and nice game designer from Berlin, with whom I’ve already designed several games, all involving animals. Fearz!, a mimic, fast reaction and visual recognition (yes, all of that) party game is the first out – but there will be more soon.

fearz-proto2From left to right, the designers’ prototype, the first publisher prototype, the published game.

Fearz! is a fun, stupid, and can be played by kids and adults all together. Itis published by my friends of Volumiques, the guys who developped World of Yo-Ho, specialists in hybrid and conceptual strange stuff mixing real and virtual worlds. You can play Fearz with just the card game, with the tablet app (4 players max), or with both the card game and the app – and that’s probably the best and most fun way.

appli et carte
Fearz!, cards and app
appli
Fearz!, app only

Fearz! demo at Essen

Fearz !
A game by Anja Wrede and Bruno Faidutti
Graphics by Nicolas Tham
App development by Ryad Godard
2 to 10 players – 10 minutes
Published by Volumiques and Don’t Panic Games (2016)
Boardgamegeek
itunes / android