Factions

Je viens de découvrir deux excellents jeux de cartes Summoner Wars et Smash Up. Ils sont très différents. Summoner Wars, qui se joue sur une sorte de damier, est un jeu de stratégie passionnant, malgré des graphismes tristounets, qui rappelle à la fois jeu d’échecs et jeux de figurine. Smash Up, à l’inverse, est un jeu de cartes loufoque, coloré et désordonné, un peu dans l’esprit de Rencontre Cosmique.

Ces deux jeux ont cependant en commun un mécanisme très intéressant, que j’appellerai les factions. Chaque joueur y joue en effet avec un peuple – et même deux dans le cas de Smash Up – c’est à dire avec un paquet de cartes ayant un thème, un style, des tactiques et des stratégies bien différentes. Un paquet de cartes pourra être très agressif, un autre puissant et peu mobile, un autre permettre de réagir ou de contrer les actions adverses, etc… De ce fait, chaque partie prend une physionomie différente, un affrontement entre des nains et des elfes ne prenant pas la même tournure qu’une guerre entre des orques et des trolls.

Ce sont peut-être les jeux de cartes à collectionner, et au premier rang d’entre eux Magic thé Gathering, qui ont popularisé ce principe, même si on le retrouve dans quelques jeux plus anciens, comme le délirant BloodBowl, qui dès les années quatre-vingt voyait s’affronter des équipes de nains, orques, humains ou elfes dans une parodie de football américain. Mes souvenirs de joueur de Magic sont faits de decks thématiques, des decks bleus plein de magiciens ou de tritons, de decks rouges à base de petits Gobelins ou de gros dragons, des decks noirs faits de zombies et de malédictions. Plus tard, des deck à thèmes tout prêts ont même été commercialisés. Je ne joue pas au jeu de cartes du Game of Thrones, mais j’imagine là aussi que l’on ne construit pas un deck Lannister ou Greyjoy comme un deck Stark.

Répandu dans les jeux de cartes à collectionner, le principe des factions s’est vite retrouvé dans les jeux de société. Plus de deck à construire, où très marginalement lorsque des jeux comme Blue Moon ou Summoner Wars proposent d’ajouter des cartes d’alliés ou de renforts, mais des paquets tout prêts, fortement thématisés, aux points forts et aux points faibles bien différents. Si BloodBowl, aux mécanismes un peu datés, a disparu, son univers et toutes ses factions archétypales, hommes lézards, elfes des bois, nains ou orques, ont été repris dans un jeu de cartes plus rapide, BloodBowl Team Manager, auquel je n’ai pas joué mais dont on m’a dit le plus grand bien.

Toutes ces factions, ces équipes, ces peuples, permettent des parties typées, car asymétriques, et toujours différentes. Rien qu’avec quatre armées, comme dans la boîte de base de Neuroshima Hex, six configurations différentes sont possibles pour des batailles de deux joueurs. Ajoutez deux armées supplémentaires, avec l’une des extensions Duel ou Babel 13, et vous avez déjà 15 configurations. Je ne me risquerai pas à faire le calcul pour Smash Up, qui se joue plus à trois ou quatre joueurs qu’à deux et dont les decks sont constitués de deux peuples mélangés. Quant à Summoner Wars, il existe, je crois, une dizaine d’extensions différentes, avec deux nouveaux peuples chacune, ce qui doit donner quelques centaines de batailles possibles.

Certes, les factions, les paquets de cartes, de tuiles ou de pions spécifiques ne sont pas le seul moyen de construire un jeu de société asymétrique. Bien avant Magic, il y eut Cosmic Encounter et ses centaines d’aliens aux pouvoirs aussi puissants qu’improbables, que l’on retrouve un peu dans les peuples de SmallWorld, de Terra Mystica, de Twilight Imperium et de nombreux autres gros jeux de plateau. Un jeu comme A Game of Thrones (le jeu de plateau), combine même des factions sous forme de cartes avec des pouvoirs et des unités spécifiques sur le plateau de jeu. Avant cela même, il y a bien des jeux, et notamment  les jeux de guerre, dans lesquels les positions et souvent la nature des armées sont différentes – Britannia est un excellent exemple. Le souci de fidélité historique et littéraire des auteurs de ces jeux fait cependant que l’on ne peut pas renouveler les parties en changeant les factions ou les positions initiales, et que l’on n’est donc pas tout à fait dans ce que j’appelle les jeux de factions.

Les factions sont donc une nouvelle méthode, récente, de parvenir non seulement à rendre un jeu asymétrique, mais aussi à le renouveler sans cesse. Bien sûr, ce choix n’est pas toujours exempt d’arrière pensées commerciales. Si le jeu plaît, on peut espérer que les joueurs les plus accros s’achèteront quelques factions supplémentaires, et les extensions composées de deux nouvelles armées sont devenues un format classique. Pour autant, ces jeux ne sont pas des pompes à fric comme les jeux à collectionner, et j’ai déjà largement de quoi m’amuser avec les six peuples de mon Master Set de Summoner Wars et les huit de ma boîte de base de Smash Up. J’ai acheté ou me suis fait offrir les premières extensions de Neuroshima Hex, mais ne les ai pas toutes essayées.

Si le principe est si génial, pourquoi, alors que je suis un spécialiste des jeux de cartes, ne l’ai-je  guère exploité?
Nous y avions pensé avec Bruno Cathala pour Tomahawk, mais les cartes spéciales nous ont permis de personnaliser les armées à moindre frais. Sinon, il faut dire que le principe s’adapte généralement mieux aux jeux à deux joueurs – même si le jubilatoires Smash Up est une notable exception – qui ne sont pas ma spécialité. Je suis aussi particulièrement intéressé par les jeux de bluff et de double-guessing, dans lesquels la psychologie des joueurs suffit généralement à créer l’asymétrie. Surtout, concevoir une demi douzaine de factions demande un énorme travail de test et d’équilibrage des différentes combinaisons, alors que je ne suis un auteur plutôt paresseux et peu intéressé par ce genre de réglages, même si je me réjouis que d’autres s’y consacrent avec constance. Le seul jeu de ce type que j’ai jamais fait, Le Combat des Dieux Le seul jeu de ce type que j’ai jamais fait, Le Combat des Dieux, est très amusant à jouer mais relativement simple, , est très amusant à jouer mais reste aussi extrèmement simple, et je ne suis pas certain qu’il soit parfaitement équilibré, raison pour laquelle je suggère d’inverser les factions des joueurs pour une seconde partie. Mais, bon, un jour, pourquoi pas un projet plus ambitieux – je discutais le week-end dernier d’un jeu opposant les pingouins, les pandas, les grenouilles, les singes et les moutons, chacun essayant de prendre le contrôle total du marché du jeu de société.

Quelques bons jeux de factions :

X-Bugs, de Francesco Nepitello et Marco Maggi, réédité sous le nom de Micro Mutants, puis dans une version simplifiée sous celui de Micro Monsters, aurait du être un immense succès commercial. C’est du moins ce à quoi je m’attendais, et ce à quoi s’attendaient les éditeurs – Steve Jackson, Tilsit, Edge, Fantasy Flight et quelques autres – qui à un moment ou à un autre ont tenté de le lancer et de le relancer. L’idée, adapter le principe des factions au bon vieux jeu de puces, est géniale. Les graphismes sont très réussis, et l’humour vaguement historico-politique des factions assez bien amené. Chaque joueur à donc une faction de bestioles représentées par des puces de plastique de taille et de formes différentes qui vont s’attaquer sur le sol de votre salon en faisant des sauts de puces. Certaines font plusieurs sauts d’affilée, d’autres retournent les puces adverses, d’autres se multiplient…C’est drôle, c’est simple, c’est varié, et je n’ai jamais vraiment compris pourquoi cela n’a pas vraiment pris. Ce jeu d’adresse loufoque et stratégique ressort encore une fois dans les semaines à venir, chez Ares Games, sous le nom de Micro Monsters – ne le laissez pas passer.


James Ernest a osé : il y a, au dos des pochettes de cartes de Brawl, des conseils tactiques en fonction du personnage que vous jouez. Comme si on avait le temps de penser tactique en jouant à un jeu pareil…
Brawl – ça veut dire baston en américain – c’est une sorte de Speed avec des règles avancées et des cartes événements. Pas de tour de jeu, les deux jouent en même temps, essayer d’aligner le plus possible de coups droits dans la gueule de l’adversaire. Comme dans la vraie vie, quoi. Bien sûr, chacun a aussi des cartes spéciales permettant de bloquer l’adversaire, d’éliminer une rangée entière de cartes, et caetera. Rien de bien complexe cependant, puisqu’il n’y a en tout qu’une dizaine de types de cartes différents.
Brawl, un jeu rapide et aux règles simples, un temps publié en France sous le nom de Fight, semblait aussi parti pour un grand succès commercial, et je ne comprends pas bien pourquoi il a finalement disparu. On trouve cependant encore parfois des decks, simples ou parfois par deux, dans les boutiques de jeux.

Très proche de Brawl dans son esprit – c’est aussi un jeu de cartes de rapidité avec des decks aux caractéristiques très différentes, Frenzy, d’Eric Lang, n’en est pourtant pas du tout une copie. Les mécanismes sont très différents, et tout aussi amusants. Si vous aimez Brawl et avec l’occasion de trouver un pack de quatre decks de Frenzy – je ne crois pas qu’il en soit sorti d’autres -, vous ne le regretterez pas.


Quelque part entre le jeu de pose de tuiles à l’allemande et le wargame post-apocalyptique, Neuroshima Hex, de Michał Oracz, est un hybride surprenant, profondément stratégique, étonnamment rapide et violemment efficace.
Formellement, on a affaire à un jeu de placement, chaque joueur à son tour piochant des tuiles hexagonales de son « armée », tireurs d’élites, troupes de combat rapproché ou modules technologiques, pour les placer sur la surface de jeu. Avec 35 tuiles par joueur pour un plateau de 19 cases, on réalise très vite que l’on n’est pas à Carcassonne et que les places vont être chères.
C’est à deux joueurs, chacun contrôlant l’une des quatre armées disponibles, aux personnalités très différentes, que Neuroshima Hex est le plus intéressant, et le plus stratégique. La partie alterne généralement des phases de positionnement tactique  et des batailles dévastatrices. La stratégie à adopter est très différente selon que vous jouez le Moloch, dont les robots lents mais résistants manquent cruellement d’initiative, l’Outpost aux unités mobiles mais mal protégées, le Borgo dont les troupes rapides doivent aller immédiatement au contact, ou l’Hégémonie habile à neutraliser les pièces adverses – ou l’une des nombreuses armées publiées depuis.



Summoner Wars, de Colby Dauch, est aussi un jeu d’affrontement, de guerre. Sur un plateau rectangulaire de 6 x 8 cases chacun doit, un peu comme aux Échecs, s’efforcer d’atteindre, puis d’éliminer le sorcier adverse. Les pièces sont représentées par des cartes qui se déplacent orthogonalement. Certaines attaquent au contact, d’autres tirent à trois cases de distance, beaucoup disposent de pouvoirs particuliers. Les règles sont très intuitives, le jeu tactiquement très intéressant, avec juste ce qu’il faut de hasard dans le tirage des cartes et les jets de dés lors des attaques pour contraindre les joueurs à s’adapter sans cesse. La boîte de base contient six armées différentes. Les Orcs des marais qui font pousser des murs de ronces pour ralentir puis immobiliser leurs adversaires; les elfes de la nuit sont agiles et rapides; les hommes-boucs de la montagne se regroupent et chargent en masse; les Gobelins des sables et les nains des profondeurs jouent sur l’effet de surprise et leurs puissantes cartes actions; les mystérieux et aériens Benders, enfin, sont redoutables au tir à l’arc. Une  vingtaine d’autres armées ont été publiées, et il y a toute la place dans la boîte pour les ranger.
Neuroshima Hex et Summoner Wars sont tous deux des jeux d’affrontement tactique, entre échecs et jeux de figurine. Ils font peut-être un peu double emploi, mais si vous appréciez vraiment l’un, vous avez de bonnes chances d’aimer l’autre aussi.

Contrairement aux quatre précédents, Smash Up, de Paul Peterson, est clairement conçu pour être joué à trois ou quatre joueurs plutôt qu’à deux. Les huit paquets de cartes, les aliens, les dinosaures laser, les ninjas, les pirates, les robots, les petits lutins de la forêt, les sorciers et les zombies, qui s’affrontent pour le contrôle d’on ne sait pas trop quoi, le vaisseau mère, la grande cathédrale ou l’oasis oubliée. Pour créer plus de variété, chaque joueur joue une alliance de deux peuples dont il mélange les cartes en début de partie, lutins et robots, zombies et pirates, ninjas et dinosaures… Thématiquement, on est dans le grand n’importe quoi assumé façon Heroscape, et l’on peu donc attendre une extension avec incas, nains du chaos, moines de Shao Lin, agents secrets, légions romaines, nazis de l’espace, ours en peluche, templiers et communistes. Mécaniquement, c’est une sorte de Mille Bornes sous acide où les cartes ne cessent de sauter d’une base à une autre dans une ribambelle d’effets pour le moins farfelus. J’avoue avoir eu un peu de mal à m’y retrouver dans ma première partie, mais je devine que cela devient beaucoup plus rapide et jubilatoire avec un peu d’expérience.

Certains auront sans doute remarqué que la plupart des jeux dont j’ai parlé dans cet article sont des jeux d’affrontement, de baston, de guerre. Bien sûr, la métaphore de la guerre est très fréquente dans les jeux de société, sans doute parce qu’elle apparaît comme l’archétype de la compétition, mais elle est heureusement loin d’être la seule. Ah, oui, j’ai parlé de Blood Bowl Team Manager, qui a vraiment l’air excellent, même si je n’ai pas eu l’occasion d’y jouer jusqu’ici, mais les rencontres sportives y ont quand même un air assez guerrier.

Bref, il est assez étonnant que ce système de factions n’ait pas beaucoup été utilisé pour l’instant dans les jeux de gestion, de politique, ou de course… Tiens, c’est peut-être une idée – surtout pour un jeu de course, façon Fous du Volant.

Update, 20 novembre : il faut croire que les bonnes idées sont dans l’air. Tandis que je rédigeais cet article, et imaginais un jeu de factions sur le thème des Fous du Volant plus ou moins inspiré d’Ave Cesar, le jeu arrivait dans les boutiques. Bref, encore une bonne idée que j’ai eue trop tard, ce n’est pas la première fois.


Hot Rod Creeps oppose donc six véhicules appartenant aux équipes des martiens, des monstres, des rockers, des voraces et des morts-vivants et des sorciers. La licence Wacky Races n’était sans doute pas dans les prix d’un petit éditeur, mais l’esprit en est bien là, et ça a l’air diablement marrant.


I’ve discovered these last weeks two very different recently published card games, Summoner Wars and Smash Up. Summoner Wars has grey and serious looking cards, is played on a chess-like board and is indeed a deep strategic and tactical game feeling a bit like a cross between chess and miniatures games. Smash Up has cards in all possible mixes of bright colors, and is a zany and chaotic card game, somewhere between Fluxx and Cosmic Encounter.

Both games, however, have a common and very interesting mechanism, factions. Each player plays with a different race – or even with two in Smash Up – represented by a specific card deck. Each deck has a theme, a style, different tactics and strategies. One can be very aggressive, another one powerful but static, another one full of nasty reaction or counter effects. This way, each game feels completely different, a war between elves and dwarves being very different from a war between orcs and trolls – different characters, different magics, different tactics, different weapons.

The factions idea can be traced back to a few older games, such as the zany Bloodbowl, published in the eighties, in which various fantasy teams (human, orc, dwarf, elf and some more) compete in a parody of Football. It went mainstream with collectible card games, and especially Magic the Gathering. I remember blue decks made of merfolk and sorcerers, red ones made of big fiery dragons or small nasty goblins, black ones made of zombies, undeads and curses. Later, thematic preconstructed games were published. I’ve never played the Game of Thrones CCG, but I can imagine than one doesn’t build a Greyjoy or Lannister deck like a Stark one.

The faction was the basic deck building principle of many CCGs, and resurfaced later in several board or card games. There’s no deck to construct in games like Blue Moon or Summoner Wars, or only with optional allies or reinforcement rules. The decks are ready in the box, each one with its theme, its graphic style, its strengths and weaknesses. The old BloodBowl is no more around, and would probably feel a bit slow and heavy if republished now, but its fantasy setting and archetypal teams, lizard men, orcs, wood elves, dwarves and the like, have been recycled in a faster card game, BloodBowl Team Manager. I’ve not played it, but I’ve heard only really good things about it.

All these factions, races, teams or armies make for strongly typed games, both asymmetric and balanced. With only four armies in the basic box of Neuroshima Hex, six different two players configurations are possible. Add two more armies from the Duel or the Babel 13 expansion, and you already have 15 different possible post apocalyptic wars. I won’t try to reckon the number of configurations in Smash Up in which each players shuffles two different decks to make his army. As for Summoner Wars, it must have now about twenty different armies, for more than a hundred two players configurations.

Of course, factions – meaning specific sets of cards, tiles or tokens, are not the only means to build an asymmetric boardgame. Long before Magic the Gathering, there was Cosmic Encounter and its hundreds of different alien races, which later evolved into the races of SmallWorld, Terra Mystica, Twilight Imperium and hundreds of heavy fantasy or sci-fi boardgames. The Game of Thrones boardgame has both different hero cards for each house, like in the factions card games I described before, and specific positions and units on the map. Long before, many games, and specifically wargames, had armies different not only in their starting position, but also in their abilities – Britannia is a good example. Most times, however, these games try to be true to their historical or literary setting, and don’t allow to change the houses / races / nations or their starting positions from game to game.These are therefore not exactly faction games like the ones I am writing about here.

Factions, however, are a recent and very versatile way of making a game not only asymmetric, but also always different and highly replayable. Of course from the publisher point of view, it’s a clever trick if players regularly buy a few more factions, and two factions sets have become the standard expansion format of all these games, but they are in no way money pits like collectible card games. As a matter of fact, I am entirely satisfied with my basic sets of Summoner Wars and Smash Up and don’t feel so far the urge to buy new armies. I’ve bought, or have been offered, most Neuroshima Hex expansions, but I’ve not played them.

So, factions are a fantastic tool for the game designer, and even more for someone specializing like me in lighter card games. Why didn’t I seriously use it so far in my own designs? Bruno Cathala and I toyed with the idea when designing Tomahawk, but finally opted for a small set of special cards used to fine tune the players’ decks. A reason why i didn’t give it another try might be that factions are mostly effective with two players games – with some noteworthy exceptions like Smash Up – which are not really my cup of tea. Another reason might be that I like bluffing and double-guessing games, in which enough asymmetry is generated by the players minds. But the main reason is probably that designing five or six different and balanced factions requires many tests and hard work, while I’m a rather lazy game designer – but I’m glad others take the time and effort to do it. The only faction game I designed so far, Battle of the Gods, is a very light and basic one, and even so, I’m not sure it’s perfectly balanced, and always suggest players swap factions for a second game. But why not a more ambitious design, some day – I was discussing last week a game idea about penguins, pandas, monkeys and sheeps vying for the control of the children game market.

A few good factions games :

Francesco Nepitello and Marco Maggi’s X-bugs, republished as Micro-Mutants and now Micro-Monsters, should have been a world hit. That’s what I was expecting, and that’s why the successive publishers – Steve Jackson Games, Tilsit, Fantasy Flight and others – who tried to launch or relaunch it at some time in the ten last years. The idea – tiddlywinks armies with special abilities – is clever and fun, the game is challenging and light, the graphics and setting are humorous. Each player controls an army of bugs figured by tiddlywinks in different colors and shapes, and the army fight on the floor, with jumping and maneuvering. Most bugs have special abilities, like making consecutive jumps, or turning over opponent bugs, or reproducing.  It’s fun, simple, varied and I never understood why it was not an instant hit. Anyway, this game is once more republished with some improvements, this time by Ares games, as Micro Monsters. If you didn’t know about it so far, seize the opportunity to discover this hidden gem.


There are really tactical advice on the back of every deck of James Ernest’s Brawl, and they are not completely pointless, even when the game is mostly frenzy and hectic fun.
No game turn, both players play cards simultaneously, trying to align rows of direct hits right in the face of the opponents. Sounds like real life. Though most cards are hits, some are not and have various special effects, like blocking the opponent or clearing a whole row of cards, and so on. Nothing really complex, though, and there are only eight or ten different cards, with effects easy to memorize.
Both players have different decks, each with a different character on it. Characters – which means decks – have different personnalities – which means differend card mixes. Some strike harder, like Hale, some are vicious and nasty, like Bennet or Pearl, with lots of strange card effects. Several set series have been published, and the lack of a common graphic style can be a drawback, but who does really care in a two minutes game.

Eric Lang’s Frenzy has sometimes be accused of being a copy of Brawl, and I think it’s unfair. Of course, it’s also a real time fighting card game with few different cards. The game philosophy – if one can call this philosophy – is the same, but the game systems are different enough for me to own both, play both and enjoy both. If you like Brawl, give it a try.



Somewhere between a German Style tile laying game and a post-apocalyptic wargame, Michal Oracz’s Neuroshima Hex is a strange hybrid, deeply strategic, surprisingly fast, and violently efficient. It looks like a tile laying game, each player in turn drawing some hex shaped “army” tiles and placing them on the board. However, the board has only 19 spaces while each player has 35 tiles to play, so you just have time to realize that this is not Carcassonne when the gameboard becomes a battlefield.
This game is most challenging and strategic with two, each player controlling one of the four army sets in the box. Each player on turn tries to deploy some of his units on the board, placing his melee fighters, his long range gunners, his technologic modules in the best positions to attack the opponent’s headquarters. There are long intervals of calm and strategic positioning, but when a battle starts, it’s not exceptional to have half or more of the units on the board destroyed.
The strategy are very different depending on the army set you play. The Moloch’s robots are tough but slow, and lack initiative. The Outpost units are very mobile, but not well defended. The Borgo’s fast units must look for contact immediately. The Hegemony is best at neutralizing opponent’s units – and many more armies, often with very specific abilities, have been published since.


Colby Dauch’s Summoner Wars is also a battle game, played on a 6 x 8 rectangular board, with strong analogies both with Chess and miniature games. Like in Chess, the goal is to reach and kill the opponent’s main piece, called the Summoner. Pieces are cards placed face up on the board spaces, and moving orthogonally. Some attach in melee, other have range attacks, and most have some special ability. The rules are clever and intuitive, the game tactically challenging, with just enough luck of the roll or of the draw to have players adapt and reconsider their tactics. The basic box has six armies. Swamp orcs grow vine walls to slow and hurt their opponents; Mountain goat-people charge and fight en masse; Sand goblins and Deep dwarves have powerful action cards and rely on surprise attacks; Shadow elves are fast and agile, Benders are expert bowmen. Twenty or so other army sets have been published, usually sold in sets of two, and there’s place in the big box for all of them.
Being both tactical battle games, feeling a bit like chess and a bit like miniature wargames, Neuroshima Hex and Summoner Wars obviously scratch the same itch. you might not need both, but on the other hand, if you like playing one, you’re most likely to enjoy the other.


Unlike the former ones, Paul Peterson’s Smash Up is designed to be played with three or even better with four players, not with two. Eight different army decks – aliens, dinosaurs, ninjas, pirates, robots, forest tricksters, wizards and zombies fight for the control of unlikely places, the mothership, the jungle oasis or the great cathedral – I’m not sure there’s a great cathedral, but there could be one. The theme is a fun and assumed mish-mash of all and everything, just like in Heroscape. The coming expansion will probably have Zulu warriors, chaos dwarves, men in black, Shao Lin monks, space nazis, teddy bears, templar knights and commies. mechanically, it feels like Mille Bornes on LSD, with cards always jumping from one base to the other and zany effects triggering one another. My first game was a bit comfusing, but i can see how it becomes fast, frantic, fun and challenging after a few games.

You have probably noticed that most of the games I’ve quoted in this article are games of war, of battle, or at least of brawl. The war metaphor is very usual in games, probably because war is seen as the archetypal competition, and games are all about competition. Blood Bowl Team Manager, which I’ve not played so far but looks really excellent, is supposed to be about sport, but it looks like a bloody and warlike sport.

Luckily, there are also other kind of competitions figured in games, but there has been very few faction politics, management or race game so far. Might be an idea, especially a race game – Wacky Races anyone ?

November 20 update : It seems that, once more, I had the good ideas a few months too late. While I was writing this article, and starting to imagine a wacky races faction card-driven racing game more or less inspired by Ave Caesar, the game was hitting the stores.


Hot Rod Creeps has six strange vehicles in a zany race on a customizable board. The teams are Epic Battle Wizards, Monsters, The Underworld, Food Fighters, Aliens and Rockabilly, each with a very different movement cards deck.  The Wacky races was probably too expensive fr a small publisher, or they didn’t bother, but the feel is there – wacky.

Idées reçues et truismes
Commonplaces and truisms

Il y a quelques jours, écoutant par hasard la radio dans ma voiture, j’ai entendu un journaliste interroger sur le jeu de société la responsable de l’exposition Kidexpo, qui se tient en ce moment à Paris. Ses réponses étaient impressionnantes de suffisance, d’inconsistance et de méconnaissance du sujet. En effet, elle ne faisait que reprendre un certain nombre d’idées reçues fausses ou simplistes, et montrait une ignorance crasse aussi bien de ce que sont aujourd’hui le marché et le milieu du jeu que des rares réflexions qui ont été menées sur le sujet par les sociologues ou philosophes, ou même simplement pas les joueurs. J’ai donc décidé de détruire ici quelques unes de ces idées fausses, même si je sais bien que l’audience de mon blog n’est pas grand chose en comparaison de celle de France Inter.

Idée fausse n°1 : le jeu, c’est d’abord pour les enfants.

Certes, les adultes consacrent moins de temps à jouer que les enfants, sans doute parce qu’ils en perdent plus à travailler et à discuter, mais cela ne signifie en rien que le jeu soit une activité spécifiquement enfantine. Le jeu, qui permet de se réfugier quelques temps dans un univers aux règles simples et arbitraires, est tout autant nécessaire aux adultes. Peut-être parce que notre société devient chaque jour plus complexe et moins compréhensible, les adultes jouent de plus en plus. Le marché du jeu pour adultes, que ce soit sous forme de jeu vidéo ou de jeu de société, est celui qui se développe le plus rapidement, et beaucoup des jeux rangés dans la catégorie enfants, comme par exemple Jungle Speed ou Dobble, sont au moins autant joués par des adultes. Et je ne parle pas des jeux vidéos, avec tous les articles sur le danger des jeux en réseau pour les adolescents, alors que la moyenne d’âge des joueurs de WoW est au delà de trente ans.

Idée fausse n°2 : les jeux en ligne sont en train de tuer le jeu de société.

Vu le développement des jeux en réseau depuis une dizaine d’année, s’ils avaient vraiment entrepris de tuer le jeu de société, ce dernier serait mort depuis longtemps, or il se porte plutôt bien. Loin de tuer le jeu de société, les jeux de rôles dans les années quatre-vingt, les jeux de cartes à collectionner dans les années quatre-vingt-dix, le renouveau du poker et les jeux informatiques aujourd’hui, lui ont amené de nouveaux adeptes. En effet, toutes ces nouvelles formes de jeu ont permis à beaucoup de réaliser que le jeu n’était pas une activité réservée aux enfants. Toutes les études de marché montrent que les gros consommateurs de jeux de société et de jeux informatiques sont assez largement les mêmes personnes. Comme ce sont les mêmes qui consomment aussi de la bande dessinée, de la littérature et des séries télé, on peut se demander s’il leur reste du temps pour travailler, mais c’est une autre question.
Les mondes du jeu informatique et du jeu de société sont d’ailleurs très proches. Beaucoup d’auteurs et d’éditeurs s’intéressent aux deux domaines, et les passages de l’un à l’autre ne sont pas rares. L’un des plus amusants est sans doute le bon vieux chamboultou des foires, devenu Angry Birds sur nos téléphones, avant de revenir en jeu de société, comme si l’on réinventait le chamboultou.

Idée fausse n°3 : les seuls jeux qui se vendent bien sont les grands classiques, Monopoly, Cluedo, Risk et autres.

Je n’ai pas les chiffres – il faut payer pour les avoir – mais je suis à peu près certain que les ventes de Jungle Speed, Time’s Up, Les Aventuriers du Rail, Dobble ou Les Loups Garous ne sont pas ridicules à côté de celles du Monopoly ou du Cluedo. Il faudrait en outre tenir compte du fait que beaucoup des “grands classiques” sont des cadeaux offerts par des parents ou grand parents qui ne connaissent pas les jeux plus modernes à des enfants qui  n’y joueront jamais, ou une seule fois. Bref, les grands classiques sont toujours là, mais les jeux plus récents, et souvent bien plus subtils, sont loin d’être marginaux et gagnent régulièrement des parts de marché.

Idée fausse n°4 : un bon jeu est un jeu éducatif.

C’est très exactement le contraire : les jeux éducatifs sont tous mauvais. Ils sont répétitifs, didactiques et ennuyeux, et ce pour deux raisons. D’abord, ils ne sont pas conçus pour faire jouer, pour amuser ou intéresser les joueurs, mais pour leur faire apprendre ou comprendre quelque chose. Rien d’étonnant par conséquent à ce qu’ils soient moins fascinants que des jeux qui ont été conçus pour jouer. Surtout, tout le plaisir du jeu vient de sa déconnection avec le réel, de ce qu’il ne sert à rien. Si cela doit servir à quelque chose, ne serait-ce qu’à apprendre, ce n’est plus vraiment un jeu, et il n’y à plus de plaisir. Comme les grands classiques cités plus haut, les jeux éducatifs ne sont généralement pas achetés par les pauvres malheureux qui vont devoir y jouer, mais par leurs parents, grands parents ou parfois par leurs instituteurs.
Le jeu est une chose, l’éducation en est une autre. En tant que joueur, auteur de jeu et enseignant, j’ai pu constater que la mode du jeu éducatif nuisait à la fois à l’image du jeu et à l’efficacité de l’enseignement.

Idée fausse n°5 : le jeu, ce n’est pas sérieux.

Au contraire du travail, qu’il vaut souvent mieux faire sans trop y croire et sans le prendre au sérieux, le jeu demande à être pris très sérieusement, à ce que l’on entre dans le jeu, à ce que l’on se prenne au jeu. Dans la vraie vie, il est sans doute préférable de ne pas toujours chercher à être un “winner”, pour éviter les désillusions et pour ne pas avoir l’air trop ridicule. Dans un jeu, il faut chercher à gagner à tout prix, sinon le jeu ne fonctionne pas et tout le monde s’ennuie. On peut, et c’est d’ailleurs mon cas, avoir un goût particulier pour les jeux qui font appel à l’humour, comme on peut apprécier les films ou les romans comiques, mais l’humour n’est pas plus consubstantiel au jeu qu’il ne l’est à la littérature ou au cinéma. Il n’y a pas la moindre trace d’humour dans les échecs, dans les Aventuriers du Rail, dans les Colons de Catan – ce qui n’empêche pas que l’on puisse s’y amuser ou, plus précisément, s’y divertir. Pascal l’avait bien compris dans sa théorie du divertissement, et Freud l’a dit plus clairement encore : le contraire du jeu, ce n’est pas le sérieux, c’est le réel.

Le jeu de société, art mineur, est souvent bien mal traité par des médias qui n’y connaissent rien. Ils ne s’intéressent qu’à l’aspect commercial, qu’ils traitent à grands coups de poncifs et d’idées reçues, et ignorent totalement l’aspect créatif. On pourrait au moins attendre des prétendus spécialistes interrogés qu’ils fassent l’effort de remettre les choses en place, mais cela demanderait sans doute qu’eux-même connaissent un peu leur sujet!


A few days ago, while absent-mindedly listening to the radio in my car, I heard a short interview of the manager of Kidexpo, an exhibition actually taking place in Paris. She was asked about boardgames, and her answers were appalling, inconsistent, obsolete and malinformed. She was basically repeating the most simplistic truisms and commonplaces about games, and clearly didn’t have the slightest knowledge neither of the game market and the gaming world nor of the recent reflections on games by sociologists or philosophers – or even only by gamers. That’s why I’ve decided to write about these commonplaces, and to explain why they are wrong, even when I know there are much fewer people reading my blog than listening to the French national radio.

Commonplace #1 : Games are first and foremost for children.

Of course, adults spend much less time playing than children, probably because they loose much more time working and talking nonsense, but this doesn’t imply that games are a specifically childish thing. Games are an efficient way to leave the actual world for a while and take refuge in a simpler and more arbitrary one, something adults need as much as children. In a society becoming more complex every day, adults are taking a sane and safe refuge in gaming. The market for adult games, be they video games or boardgames, is growing fast, and many of the games usually sold as children games, such as Jungle Speed, are often played by adults. As for video games, the many press articles about the danger of online games for teenagers are quite funny when you know that the average WoW player is over thirty.

Commonplace #2 : Online games are slowly killing traditional boardgames.

If it were true, given the success of online gaming these ten last years, boardgames ought to be dead for a while. As a matter of fact, they are alive, and their sales is growing. The reality is exactly the reverse. Role playing games in the 1980s, Collectable card games in the 1990s, online games and the renewal of poker these ten last years, all these trends brought new people to boardgames. They helped young adults realize that games are not just for kids, and these people started to be interested in other kind of games. All the market researches show that boardgames and computer games big buyers are mostly the same persons. Since these same persons are also buying lots of comics and novels and watching lots of TV series and movies, one can wonder if they still have time for work, but that’s a different question.
The boardgame and computer game business worlds are very similar, and often involve the same people. Many game authors can design one or the other, many publishers move from one to the other, and sometimes back. A good illustration of this is Angry Birds. It was first a computer adaptation of a traditional fair game – known in French as Chamboultou, but I couldn’t find its English name. Now, the successful computer game is reimplemented as a boardgame that feels exactly like the original fair game.

Commonplace #3 : Best sellers are still only Monopoly, Clue and the like, and its gonna stay so.

I don’t know the exact figures – one must pay to geth them – but at least in France, I’m sure the sales of Jungle Speed, Time’s Up, Ticket to Ride, Settlers of Catan, Dobble or Werewolves are not ridiculous when compared with the ones of Monopoly or Clue. One must also consider that the “old classics” are often bought by older people who don’t know anything about more recent games, and offer them as a gift to children who will probably not play them, or just once. It’s true the old classics are still there, and some of them are not bad games – I quite like Clue – but more recent, and more subtle, games are not to be dismissed and are steadily growing.

Commonplace #4 : A good game is also an educational tool.

It is the exact opposite. Educational games are bad games, and it can’t be otherwise. They are repetitive, didactic and boring. They are not designed to play, to raise the attention of players, but to teach them or make them understand something. No wonder they are less challenging than games that were designed to be challenging. The real pleasure in playing comes from the total disjuncture from the real world, from the knowledge that the game is useless. If it’s not useless, if it teaches something, it’s not a game and it cannot be played as a game. Like most of the old classics, so-called educational games are usually bought by well intentioned parents or grandparents, or sometimes teachers, and then imposed on the youngest ones, who would certainly prefer a real game, like the ones the adults play.
Games are one thing, teaching is another. As a gamer, game designer and teacher, I’ve had many occasions to confirm that trying to bring them together just make education less efficient and gaming less exciting.

Commonplace #5 : Games are not intended to be taken seriously.

Unlike work, which needs some detachment and ought not to be taken too seriously, games need to be played with the utmost seriousness and dedication. Always trying to be a winner in real life is a very bad idea, since it brings disappointment and often makes you look ridiculous. In a game, if all players are not trying to win, the game simply falls flat and becomes pointless and boring. The reason is that victory is its only point, when no one has the slightest idea what the point of real life is.
This doesn’t mean games can’t be fun. I like fun games, and I think I design fun games, but fun is no more a necessary feature of games than it is of novels or movies. They can be fun, they don’t have to. There’s not the slightest fun in Chess, Ticket to Ride or Settlers of Catan, but this doesn’t mean one can’t have fun playing them. That’s what Blaise Pascal has explained in his theory of diversion, and that’s what Freud later said : the opposite of play is not seriousness, it’s reality.

Boardgames are a minor art and are often very badly treated by mass medias. Journalists only look at the commercial aspect, and their ideas about it are mostly commonplaces and truisms. They totally ignore the creative aspect. When so-called specialists are called in, one could at least hope they try to put things right. Of course, they can’t if they don’t know much more about the topic.

Speed Dating & Speed Dating

Marcel André Casasola-Merkle est un ami, et un auteur de jeu talentueux, avec à son actif des perles comme Verräter, Taluva, Santa-Cruz ou… Speed Dating. Il m’est arrivé de tester des prototypes de Marcel aux rencontres ludopathiques, mais lorsque Nathalie et moi avons imaginé notre jeu de cartes Speed Dating, nous ignorions totalement que Marcel-André avait déjà publié un jeu sur le même thème et portant, bien évidemment, le même titre. Fort heureusement pour nous, les deux jeux sont bien différents, celui de Marcel-André étant plus basé sur l’attention et la mémoire et le nôtre sur la tchatche. Un grand merci en tout cas à Marcel et à son éditeur, Kosmos, qui n’ont rien vu de mal à ce que nous reprenions le même titre pour notre jeu.

 

Marcel André Casasola-Merkle is a good friend, and a talented game designer, author of many great games like Verräter, Taluva, Santa-Cruz or… Speed Dating. I’ve playtested several of Marcel-André’s designs, but not this last one and, when Nathalie and I imagined our Speed Dating game, we didn’t know that Marcel had already published a game on the same topic, and of course, with the same title. Luckily, the games are really different, Marcel’s one being more based on attention and memory, and our on sweet and smooth talk. Anyway, we must thank Marcel and his publisher, Kosmos, for allowing us to publish a game under the same name.

Toy’s Don’t Cry

Barbara Turquier est universitaire, angliciste, sa sœur Emmanuelle Piard est architecte, et toutes deux sont les auteurs de Et Toque, un délicieux jeu de société culinaire. Toy’s Don’t Cry, leur blog, se situe au croisement de leurs passions – il y est question de jouets et de jeux, avec un intérêt particulier pour le design, et une certaine récurrence du style américain des années trente aux années soixante-dix. Tout cela est certainement un peu bobo, mais c’est très agréable à visiter, à feuilleter.

Si j’en parle aujourd’hui, c’est aussi parce que le dernier posté sur Toys Don’t Cry est une interview que j’avais donné à Barbara lors des dernières rencontres ludopathiques, en juin dernier. J’y parle de Speed Dating, de The Big Movie, et de mes autres créations du moment. Vous pouvez la lire ici.

Barbara Turquier in an English language scholar, her sister Emmanuelle Piard is an architect, and they both designed Et Toque, a boardgame about French cuisine. No wonder their blog, Toy’s Don’t Cry, mixes all this – except cooking. It’s about toys and games, with an emphasis on graphic design, and a recurrence of older American stuff, from the thirties to the seventies. All this feels a bit bobo, but it’s a pleasure to browse and read – though in French only.

If I’m talking of Toy’s Don’t Cry today, it’s because the last blog entry is a long interview I gave to Barbara at the last ludopathic gathering, in June. I talk of Speed Dating, of The Big Movie, and of some other recent designs of mine. You can read it there.

Speed Dating

J’ai passé une dizaine d’années – les années quatre-vingt – à jouer aux jeux de rôles à l’ancienne, sur table, puis une dizaine – les années quatre-vingt-dix – à faire régulièrement du jeu de rôles grandeur-nature. J’en ai gardé le goût des jeux à thème fort, et le sentiment que le jeu de rôles était un peu l’aboutissement du jeu, toutes les autres formes ludiques n’en étant que des succédanés un peu lâches et paresseux. Parce que je vieillis, parce que je n’ai pas le temps, parce qu’il fallait passer à autre chose, j’ai arrêté le jeu de rôles, mais je l’ai toujours un peu regretté.

J’y retourne un peu avec Speed Dating, le jeu de cartes délirant que j’ai conçu avec mon amie Nathalie Grandperrin. Dans Speed  Dating, chacun doit utiliser les cartes de sa main pour présenter un personnage et expliquer à un autre joueur qu’il est l’homme ou la femme, de sa vie. Speed Dating est donc une sorte de jeu de rôles minimaliste, dans lequel votre personnage est constitué de trois petites cartes, toujours différentes, par exemple : Collectionne les armes de guerre, Passe ses vacances au Kazakhstan, Son livre préféré : le petit prince (cartes hommes), ou se nourrit de légumes bio, adore raconter son enfance avec des parents échangistes, veut sauver les baleines (cartes femmes). Le scénario, lui, est toujours le même, une soirée de Speed Dating. Au Dernier bar avant la fin du monde, où j’ai fait pas mal de soirées test ces derniers mois, Speed Dating est celui de mes prototypes qui a le mieux tourné, et cela n’a rien d’étonnant. Ce jeu de cartes, avec ses règles simplissimes, se prête fort bien à l’ambiance de bistrot, y compris après quelques cocktails, et beaucoup de geeks sont d’anciens rôlistes.

Si Speed Dating est techniquement une sorte d’épure de jeu de rôles, c’est quand même d’abord un cousin de Taboo, Time’s Up ou The Big Idea, et c’est plus à ces jeux d’ambiance drôles et délirants que l’on pense en y jouant. Les jeux d’ambiance, les party games, sont un genre que j’ai toujours beaucoup apprécié comme joueur, faisant d’innombrables parties de Taboo dans ma jeunesse,  de Big Idea, de Gift Trap ou de Win ces dernières années, mais qui m’a longtemps posé problème comme auteur, mes tentatives échouant régulièrement, ou s’avérant trop proches de jeux déjà existants. Sans que je sache très bien pourquoi, tout semble s’être débloqué début 2012 et j’ai imaginé coup sur coup plusieurs party games dont je suis assez content. Speed Dating, puis le tout aussi délirant Mouette Rieuse, avec mon amie Nathalie Grandperrin, A Day in my Life avec une autre jolie rousse, Anja Wrede, et tout seul The Big Movie et Devine qui vient dîner ce soir. Speed Dating, qui a trouvé un éditeur dès la deuxième partie test, est le premier à paraître. The Big Movie devrait suivre assez rapidement. Les trois autres cherchent un éditeur, donc, si vous êtes intéressé…

Speed Dating ne paraît pour l’instant qu’en français,  mais j’espère qu’il sera rapidement adapté dans bien d’autres langues. Adapté et non simplement traduit, car les références et les clichés sexistes qui ont fourni la matière de la plupart des cartes de ce jeu ne sont pas tout à fait les mêmes en France, aux États-unis, en Allemagne, en Chine ou ailleurs. Si certaines cartes peuvent être simplement traduites, beaucoup devront sans doute être totalement réécrites, et cela demandera un peu de temps et de travail.

Speed Dating est publié par un jeune éditeur, Letheia, dont c’est la deuxième réalisation, et très joliment illustré par Giulia Ghigini. Il devrait arriver dans les boutiques fin octobre.

Speed Dating
Un jeu de Bruno Faidutti & Nathalie Grandperrin
Illustré par Giulia Ghigini
3 à 8 joueurs –
40 minutes
Publié par Letheia (2012)
Ludovox          Vind’jeu          Tric Trac         Boardgamegeek


In the eighties, I used to play tabletop role playing games, mostly Dungeons and Dragons. In the nineties, I moved to live action RPGs. I’ve kept from these good old days a liking for strongly themed games, and the idea that live action role playing games are the essential form of gaming, and that all other games, be they sport, boardgames or even online games, are only lazy substitutes. I got older, I wanted to move to something else, and I didn’t have enough time, so I gave up role playing games, but I always regretted it a bit.

I’m coming back to it with Speed Dating, the hilarious card game I’ve designed with my friend Nathalie Grandperrin. In Speed Dating, each player must use the cards in his hand to design a character, to introduce him (or her), and to convince another player that he (or she) is her o(or his) best match. Speed Dating feels like a minimalistic role playing game, in which a character is just made of three small cards, always different ones – for example “war weapons collector, spends his holidays in Kazakhstan, likes movies about gladiators” – all male cards, of course – or “eats only organic vegetables, enjoys to talk about her childhood with swinger parents in the seventies, campaigns to save the whales” – all female cards. The scenario is always the same, a Speed Dating evening. At the Last bar before the end of the world, the Parisian geek café where I made several game tests sessions these last months, Speed Dating was the most played and the most praised among my prototypes. This is not surprising. This talking game with simple rules fits well in a café ambiance, especially after several cocktails, and most geeks are former RPG players.

Technically, Speed Dating could be considered an epitome of role playing game, but it’s also, and may be more, a hilarious party game, in the vein of Taboo, Time’s Up or The Big Idea. Party games are a very specific genre. I’ve always enjoyed playing them, having regularly played Taboo as a teenager, and The Big Idea, Gift Trap or Win these last years. On the other hand, I didn’t think I was good at designing them, since my previous attempts either completely failed, either happened to be too similar with existing games. I don’t know exactly why, but the deadlock was broken in early 2012 and, in a few months, I designed four. Speed Dating and Sitting Bull, another zany card game, I designed with my friend Nathalie Grandperrin. A Day in my life I designed with another pretty redhead, Anja Wrede. Guess who’s Coming for Dinner and The Big Movie I designed all by myself. Speed Dating found its publisher during the second playtest, and is the first to hit the shelves. The Big Movie ought to follow soon, but the three other ones are looking for a publisher. If you’re a publisher looking for a light party game, I’m your man.

Speed Dating is published only in French so far, but I have strong hopes that it will be adapted soon in other languages. Adapted and not just translated, because it’s not only language dependent, it’s culture dependant. The sexist clichés, puns and references which are used in most of the cards are not exactly the same in France, in Germany, in the US, in China or elsewhere. More or less half of the cards can probably be simply translated, but the other ones have to be replaced, and this means some time and some work.

Speed Dating is the second game of a new French publisher, Letheia. It has been cutely illustrated by Giulia Ghigini. It ought to be on sale in France in late October.

Speed Dating
A game by Bruno Faidutti & Nathalie Grandperrin
Art by Giulia Ghigini
3 to 8 players – 40 minutes
Published  (in French) by Letheia (2012)
Boardgamegeek

Jean-René Vernes – Rome & Carthage

En 1955, Jean-René Vernes publiait, chez Miro Company, Rome et Carthage. Avec son système de combat faisant appel tout à la fois à la tactique, à la mémoire et au bluff, ce jeu était en avance sur son temps – trop sans doute, puisqu’il a été injustement oublié tandis que le moins subtil Risk, imaginé par son ami Albert Lamorisse mais auquel il avait apporté les derniers réglages, allait connaître une longue carrière.

En 2006, au festival de jeux de Cannes, j’ai eu la chance de dîner avec Jean-René Vernes et sa femme, tout étonnés et amusés de voir que le monde du jeu de société n’avait pas oublié Rome et Carthage – et bientôt excités à l’idée d’une possible réédition. Il faut dire qu’entre temps cet intellectuel un peu touche à tout avait contribué avec Roger Caillois à la naissance de la sociologie du jeu, s’était intéressé au bridge, aux probabilités, puis avait tâté de la théorie économique, avant de se replier sur les valeurs sures de la philosophie classique. Alors, bien sûr, Rome et Carthage…

Or voici que je viens d’apprendre, à quelques jours d’intervalle, une triste et une bonne nouvelle. Jean-René Vernes est en effet décédé il y a une dizaine de jours, à l’âge de 98 ans, quelques semaines à peine avant l’arrivée de la nouvelle édition de Rome et Carthage, qui sera présentée au prochain salon d’Essen. Gageons qu’il eut le temps de voir les épreuves, la maquette, et de s’en réjouir.


 

In 1955, Jean-René Vernes’ Roma & Carthago was published in France by Miro Company. A US edition soon foloowed, as Mediterranean. With its clever combat system made of tactics, bluffing and some memory, this game was ahead of its time. It may have been far too much ahead, since it was soon forgotten. The less subtle Risk, imagined by his friend Albert Lamorisse and finalized by Jean-René Vernes, was, on the other hand, to become a lasting world hit.

In 2006, I was lucky enough to have dinner with Jean-René and his wife. They were surprised and amused to find out that Roma & Carthago had not been completely forgotten in the boardgaming world, and excited at the prospective of a new edition. Since the fifties, Jean-René Vernes had left boardgaming and this intellectual jack of all trades had contributed, with Roger Caillois, in the very beginnings of game sociology, then indulged in bridge theory, in probabilities, in economics theory, and finally retreated on the stable values of classical philosophy. So, Mediterranean again ! But why not ?

I just learned, within less than a week, a sad and a good news. Jean-René Vernes, aged 98, died a dozen days ago, a few weeks before the new edition of Mediterranean, under its original name Roma & Carthago, will be introduced at the Essen game fair. I bet he had time enough to see a mock-up of the new version, which looks much nicer than the flashy seventies version.

Steampunk

L’uchronie Steampunk

L’Empire Britannique à la conquête de Mars.
The British Empire flies to Mars.

Deux de mes jeux, Mission : Planète Rouge et Novembre Rouge sont situés dans l’univers fantastique et uchronique qu’il est convenu d’appeler Steampunk. Le Steampunk est, du moins dans sa variante la plus répandue, que l’on pourrait appeler victorienne, un monde dans lequel la science de la révolution industrielle, celle des machines à vapeur, des dirigeables, des calculateurs mécaniques, a connu des développements fabuleux, allant parfois jusqu’à la conquête et la colonisation de Mars par les empires britanniques et allemands, grâce à de gigantesques navires spatiaux. Autant qu’une thématique, c’est, comme le montrent les boîtes de jeu qui illustrent cte article, une esthétique, mécanique, cuivrée et enfumée.

Un bon gros jeu de figurines, avec des cuirassés volants. En général, la thématique steampunk met en avant l’empire britannique, mais ici c’est un navire français qui est au premier plan.
A miniature game with flying dreadnoughts. Note that the forefront ship is French and bot British, the only unusual feature of this typical steampunk picture.

Le prototype de Mission : Planète Rouge s’appelait simplement Mars, et relevait de la science fiction réaliste; celui de Novembre Rouge s’appelait Sauvez le Kursk, et relevait de l’humour noir. Ce sont les éditeurs, Asmodée et Fantasy Flight Games, qui ont choisi pour Mission: Planète Rouge et pour Novembre Rouge cette thématique et l’univers graphique très particulier, tout en engrenages, en machineries, en fumées grises et rousses, qui lui est conventionnellement associé. Ils ne sont pas les seuls à avoir fait ce choix, et les jeux de société Steampunk sont de plus en plus nombreux. Ils comptent quelques chefs d’œuvre comme Planet Steam, Wiraqocha ou Sky Traders. Même dans des jeux qui n’ont thématiquement rien de Steampunk, comme Thèbes ou la dernière version d’Evo, le style graphique pointe le bout de son nez cuivré avec des roues du temps qui semblent les engrenages de gigantesques machines. Il est vrai que, autant qu’un thème, le Steampunk est une esthétique aux codes assez précis – les textes y parlent d’acier, mais sur les illustrations, cet acier a toujours la couleur du bronze ou du cuivre. Si Full Metal Planet était un peu moins bleu, si Funkenschlag était un peu moins vert, et s’ils étaient plus rouges, plus bruns, plus gris, ce seraient des jeux Steampunk.

Aucune idée de ce qu’était ce jeu, mais l’illustration n’est pas sans faire penser à Mission Planète Rouge.
I have no idea what this game was, but this picture reminds a bit of the box of Red November.

Cet univers est également de plus en plus populaire dans le jeu de rôles, et devient même une inspiration pour de nombreux couturiers, alors même que, contrairement à ce qu’il en est de la science fiction ou de l’Heroic Fantasy, la littérature Steampunk, qui pourrait lui servir de support, reste peu fournie. Cela ne veut pas dire qu’elle ne soit pas parfois de grande qualité, et souvent d’une impressionnante érudition, comme dans les délires de David Calvo ou dans le foisonnant Against the Day, de Thomas Pynchon, récent chef d’œuvre du genre.

Pourquoi donc l’univers Steampunk convient-il si bien aux jeux ?

Parce qu’il a une forte cohérence graphique, ce à quoi les éditeurs désireux de mettre en avant leurs produits sont de plus en plus attentifs. Parce que, comme tous les mondes un peu fantastiques, il permet de justifier aisément bien des effets ou mécanismes de jeu, ce qui est bien pratique pour les auteurs. Parce qu’il est suffisamment exotique et décalé pour faire rêver les joueurs, mais reste proche de nos angoisses techniciennes et écologiques – et sur ce dernier point, un parallèle avec la mode des vampires, qui vivent aussi souvent à la fin du XIXème siècle et nous renvoient à d’autres angoisses, serait sans doute intéressant. Et surtout, sans doute, parce qu’auteurs, joueurs et éditeurs se sont un peu lassés d’univers imaginaires plus classiques.

De toutes les boites de jeux que j’ai utilisées pour illustrer cet article, c’est la seule que je trouve moche, mais le jeu est peut-être très bon.
I don’t know if the game is good, but this is the only picture I really don’t like among the many ones I used in this post.

Cinq jeux Steampunk

Donc, pour ceux que cet univers intéresse, voici cinq bons jeux Steampunk – dont deux auxquels j’ai participé, je sais.

À la fin des années quatre-vingt, le jeu de rôles Steampunk Space 1889 connut un certain succès. Les puissances coloniales européennes, au premier rang desquelles l’empire britannique, s’y affrontaient dans un “scramble for Mars”, avec les martiens dans le rôle des zoulous. Excepté un jeu de combat de miniatures, Sky Galleons of Mars, dont j’ai depuis plus de vingt ans une boite avec laquelle je n’ai jamais joué, aucun jeu de société n’est, je crois, situé dans cet univers. Mission : Planète Rouge, comme je l’ai expliqué plus haut, à d’abord été conçu dans un univers de science fiction futuriste plus classique, avec des états ou des grandes multinationales rivalisant pour le contrôle des principales zones de la planète Mars. Un jeu de majorité, donc, de la famille d’El Grande ou de San Marco, sur lequel Bruno Cathala et moi avons greffé un système de personnages plus ou moins inspiré de Citadelles. La thématique Steampunk, décidée par l’éditeur, convient pourtant fort bien au jeu, et l’on imagine bien les grandes puissances coloniales, France, Grande Bretagne, Allemagne et quelques autres, partant à la conquête de Mars dans des fusées à vapeur. Les dessins sont l’œuvre du talentueux Christophe Madura, qui semble bien aimer le genre. Si vous aimez Citadelles, ou si vous appréciez le tout nouvea Libertalia, essayez-donc de vous procurer une boite de Mission : Planète Rouge, il en reste quelques unes dans quelques boutiques.

Les personnages typiquement steampunk de Mission : Planète Rouge
The typically steampunk characters in Mission : Red Planet

On imagine mal des machines à vapeur dans les profondeurs océaniques. Les sous-marins sont pourtant partie intégrante de l’univers Steampunk, qui doit un peu à Jules Verne et, en particulier à Vingt-mille lieues sous les mers. Sauvez le Kursk, le jeu de coopération que j’avais imaginé avec mon ami Jef Gontier, à fait rire bien des éditeurs mais était difficilement publiable en l’état. On a pensé à déplacer l’action dans une station spatiale, mais cela impliquait beaucoup de changements dans la structure du jeu. Les gens de Fantasy Flight Games ont donc imaginé de neutraliser un peu l’humour noir du jeu en faisant du Novembre Rouge un sous-marin à aubes et à vapeur piloté par des gnomes, et en chargeant Christophe Madura, déjà cité plus haut, de lui donner une esthétique Steampunk. Mission accomplie, et ce jeu de coopération plein de rebondissements, aussi drôle que tendu, est un succès qui ne se dément pas.

Novembre Rouge, un sous-marin gnome russe et à vapeur.
Red November, a russian gnome steam-propelled submarine

Planet Steam, de Heinz Georg Thiemann, est un bon gros jeu de gestion à l’allemande, un de ces jeux où l’on investit pour produire des cubes en bois – pardon, pour extraire des matières premières – que l’on cherche ensuite à revendre avec profit. Superbement édité dans une énorme boite, ce jeu exploite remarquablement le thème de la planète fumante sur laquelle les corporations multinationales s’affrontent pour prospecter, pour installer des plateformes de forage au dessus des lacs de lave en fusion, pour extraire les précieux minerais, et pour affréter de gigantesques vaisseaux capables de les emporter. C’est un jeu de commerce, de gestion, un bon gros jeu qui prend la tête et qui,soutient aisément la comparaison avec Funkenschlag ou d’Age of Steam.

Planet Steam – il y fait trop chaud pour que ce soit Mars.
Planet Steam – too hot to be Mars

Dans Wiraqocha, de Henri Kermarrec, nous ne sommes pas sur Mars, mais plus près de chez nous, dans la jungle mexicaine où des explorateurs cherchent à mettre la main sur les secrets perdus de la technologie inca et sur les riches gisements de somnium, un minerai source d’une énergie quasi-inépuisable. Le steampunk inca, qui donnerait sans doute un très mauvais film et un médiocre thriller, a produit un excellent jeu de placement et d’affrontement, plus tactique que stratégique, très agressif et plein de rebondissements, dans lequel il faut savoir s’adapter et saisir la moindre opportunité. Au premier coup d’œil, ça ressemble un peu aux Colons de Catan, mais ça se joue plus comme un croisement entre Neuroshima Hex et Alien Frontiers.

Les artefacts incas de la vallée de Wiraqocha
Incan artifacts from the Wiraqocha valley

L’univers de Sky Traders, de Gioacchino Prestigiacomo, n’est pas à proprement parler Steampunk, puisque la divergence technologique s’y est produite avant la révolution industrielle, au tournant des XVIIème et XVIIIème siècle. Dans ce monde ou Descartes aurait eu raison contre Newton, des navires de bois, propulsés au gaz phlogistique, voguent dans l’espace sur des tourbillons d’éther. Un peu long mais très fluide et plein de rebondissements, Sky Traders est un gros jeu à l’américaine, avec des la baston, des cartes action, de la négociation et des lancers de dés, dans lequel le thème, omniprésent, est traité avec humour et intelligence. Dans le genre “pick-up and deliver” ameritrash, je trouve ça plus sympa et plus moderne que Merchant of Venus.

Sky Traders, un look vénitien qui change du steampunk victorien.
Sky Traders, more venitiana than victoriana.

Et ce n’est pas fini… dix minutes sur le boardgamegeek m’a fait trouver trois jeux Steampunk à paraître dans les mois qui viennent – Mars needs Mechanics, City of Iron et Kings of Air and Steam. À priori, c’est City of Iron qui a l’air le plus prometteur.

City of Iron, sur Kickstarter – mais un peu cher quand on n’est pas aux États-Unis.
City of Iron, on Kickstarter, but too expensive if you’re not in the US.

Quelques figurines du jeu Dystopian Legions.
Miniatures for Dystopain Legions.


The Steampunk uchrony

The action of two of the games I designed, Mission : Red Planet and Red November,  is supposed take place in the fantasy and uchrony setting known as Steampunk. Steampunk is, in its most popular victorian version, a world in which the science of the industrial revolution, steam engines, Zeppelins and mechanical computers, have been developed to a fabulous level, allowing for example to the conquest and colonization of Mars by the British and German Empire using  gigantic ether or steam propelled spaceships. Steampunk is a fantasy setting, but it’s also, and may be even more, a mechanical, rusty and smelly esthetic, as can be seen on the various game boxes and cards inserted in this blogpost.

Sky Galleons of Mars, sans doute le premier jeu de société Steampunl.
Sky Galleons of Mars, probably the first Steampunk boardgame.

The prototype of Mission: Red Planet was simply called Mars, and was more realistic hard science-fiction. Red November’s one was called Save the Kursk and was dark and somewhat tasteless humor. The steampunk setting, and the associated graphic style heavy on red, brown and grey and dull of gears and pipes, was in both cases decided by the publisher, first Asmodée then Fantasy Flight. Steampunk games have become quite common these last years, and some of them, like Planet Steam, Wiraqocha and Sky Traders, are masterpieces. Even games which have little or nothing to do with the Steampunk universe sometimes borrow elements from its graphic style, for example with the bronze mechanical time wheels in Evo and Thebes, which look like piece from giant mechanical watches. In the end, steampunk is probably more a graphic style than a fantasy setting – steampunk texts talk of iron, but on the pictures, this iron always looks more like bronze or copper. If Full Metal Planet were less blue, if Funkenschlag were less green, and if both were more rusty brown, they would be steampunk games.

Un clone steampunk de Citadelles.
A Steampunk Citadels clone.

This universe is also quite popular in role playing games, and even in fashion, when steampunk literature, which should be the basis for all this, is still scarce. On the other hand, it’s often – not always – clever and erudite, like Thomas Pynchon’s Against the Day, the best steampunk novel I ever read.

So, why so many Steampunk games ?

Because the steampunk world is graphically consistent, and this helps publisher highlight their games. Because, like all fantasy settings, it allows for easy explanation of any strange rule or card effect. Because it’s enough exotic and out of line to make players dream of a fantasy world, and still very near from our technical and ecological concerns. A comparison with vampire settings, which are also quite popular in gaming, are also mostly late XIXth century, and bring forth other contemporary concerns, could be interesting. But may be, more simply, gamers, authors and publishers are just looking for imaginary settings other than the frequently used heroic fantasy and science fiction.

Un steampunk au look plus germanique que britannique.
A steampunk game with a name that sounds more German than British.

Five steampunk games

Anyway, if you’re looking for Steampunk games, here are five good ones – including two of mine, I know.

The Steampunk Space 1889 tabletop role-playing game achieved some success in the late eighties. If features the British Empire and the other European colonial powers in a “scramble for Mars”, with wild martians as Zulu warriors. There was a miniature game based on it, Sky Galleons of Mars, and I happen to own a box of it, still unplayed after twenty years. As I explained earlier, Mission : Red Planet wasn’t originally designed in a steampunk universe. It was more typical science fiction, with major companies from all over the world vying to settle on Mars and exploit its precious ore. It was a classical wooden-cubes majority game, like El Grande or San Marco, on which Bruno Cathala and I had grafted a character card system more or less inspired by Citadels. The steampunk style and setting was decided by the publisher, but fits the game very well, and it’s easy to imagine the XIXth century colonial powers launching steam rockets to Mars. The gorgeous and sometimes unsettling graphics were made by Christophe Madura, who seems to like the steampunk genre. Mission : Red Planet is out of print, but if you like Citadels, or the brand new Libertalia, it might be worth trying to find a copy.

Mission Planète Rouge – le cosmonaute en haut de forme est un peu inquiétant.
Mission : Red Planet – the top hat astronaut looks a bit scary.

Though it’s hard to imagine steam engines in the deep seas, submarines are a not uncommon in steampunk settings, partly because Jules Verne, and most of all among his books Twenty Thousand Leagues under the Sea, is often considered a precursor of the steampunk genre. Save the Kursk!, the cooperation game I had designed with my friend Jef Gontier, was probably impossible to publish with its original setting. We thought of moving the action into a space station, but this meant too many changes in the game’s structure. The Fantasy Flight Games team had the idea of making the storyline harmless with having the submarine driven by gnomes – Jef and I insisted on Russian gnomes – and asking the same Christophe Madura, who has already illustrated Mission : Red Planet, to give it a steampunk style. The result is gorgeous, and Red November is a best-seller translated in many languages – though not Russian.

Une vue en coupe d’un sous-marin steampunk.
A cross section of a steampunk submarine.

Heinz-Georg Thiemann’s Planet Steam is a heavy German style management game, a game about investing in in producing wooden cubes of different colors – or rather in extracting various ores – and then selling them at the best price. The graphics, by Czarné, and the gorgeous production,  help feel the heat and smell of the fuming planet. That’s probably why this game feels more thematic than most management eurogames. Players are space tycoons prospecting the hot red planet, building drills over the magma lakes, extracting the precious ore and sending them to earth in giant spaceships. Planet Steam is a trading and management game, a typical “woodenkubs” game, but it’s a really good one and it stands the comparison with better known ones such as Funkenschlag or Age of Steam. There were talks of a US edition, but it seems to have been cancelled.

Les personnages très steampunk de Steam Planet.
The steampunk characters in Steam Planet.

In Henri Kermarrec’s Wiraqocha, the action doesn’t take place on a faraway planet but in the Mexican jungle, where fierce explorers try to uncover the lost and powerful artifacts of inca technology, and the rich deposits of somnium requested to activate them. Inca Steampunk could have made a terrible movie, and a mediocre thriller, but it makes a great tactical game placement and war, aggressive and dynamic, in which, like in Alien Frontiers, one must make the best use of one’s dice rolls. It looks like Settlers of Catan, but it plays like a mix between Alien Frontiers and Neuroshima Hex. 

Masque inca ou machine steampunk ?
Inca mask or steampunk engine ?

Gioacchino Prestigiacomo’s Sky Traders is not, strictly speaking, a steampunk game, but it has a very similar look and feel. The technological divergence has happened before the industrial revolution, in the late XVIIth or XVIIIth century. Descartes was right, Newton was wrong, and wooden spaceships propelled by phlogiston travel on the ether whirlwinds. Sky Traders might a bit too long, but it’s fluid, nasty, and full of twists and turns. It’s a good “ameritrash” game, with dice, random event cards, negociations, and of course boarding parties. The theme is strong, clever and humorous – it’s probably a better pick-up and deliver game than the old Merchant of Venus, and certainly a more modern one.

Marchands de l’espace, mais aussi pirates de l’espace.
Sky Traders are also Space Pirates.

Of course, there will be more. In ten minutes on the boardgamegeek, I’ve already found three Steampunk games to be published in the coming months – City of Iron, Mars needs Mechanics and Kings of Air and Steam. City of Iron looks the most promising.

City of Iron, un jeu à voile et à vapeur.
Sorry, untranslatable pun.

Soluna

Paru pour la première fois en 2004 sous le nom de Babylone, Soluna occupe une place un peu à part dans ma ludographie. Pas de cartes farfelues, pas d’effets incontrôlables, pas de bluff dans ce jeu de stratégie minimaliste, aux règles simples, aux parties rapides, et dont le matériel se limite à douze pions, sans même un plateau de jeu.

Steffen Mühlhaüser s’est fait une spécialité de ces jeux sobres et élégants, comme auteur avec des petites perles comme Six, un jeu d’alignement de la famille du morpion, ou Linja, un jeu de déplacement très subtil. Le succès venant, il est devenu éditeur. Steffen-Spiele, c’est un peu le Bauhaus du jeu de société, le choix assumé de l’épure aussi bien dans les principes que dans l’esthétique. Je suis très fier que Soluna, un jeu d’empilement, paraisse dans la même collection.

Babylone avait pour thème, assez logiquement, la construction interrompue de la tour de Babel. La lune, le soleil et les étoiles de Soluna font peut-être moins sens, mais permettent une réalisation d’une grande élégance. Les pions ont désormais un symbole différent au recto et au verso, ce qui permet des configurations de départ différentes d’une partie à l’autre.

Le principe reste le même : chaque joueur à son tour déplace une pile de pions sur une pile de même hauteur, ou dont le pion du dessus présente le même symbole. Dès qu’un joueur ne peut plus jouer, il a perdu.

Comme le morpion, et comme beaucoup de ces jeux de stratégie au matériel limité et aux règles simples, Soluna est un jeu résolu. Ce peut-être un problème si vous voulez jouer contre un ordinateur, mais ce n’en sera pas un si vous jouez avec un ami, et c’est pour cela que sont faits les jeux de société.

Soluna sera disponible pour le salon du jeu de société d’Essen, en octobre.

Soluna
Un jeu de Bruno Faidutti
2 joueurs – 5 minutes
Publié par Steffen Spiele (2012)
Tric Trac    Boardgamegeek


Soluna was first published in 2004 as Bayblon, and it’s an odd bird in my ludography – no fun cards, no zany effects, no bluffing or double guessing. Soluna is a minimalistic strategy game, played in ten minutes, with few rules and fewer components – just twelve pawns, and not even a board.

Sober and elegant game designs have been Steffen Mühlhaüser hallmark for years, first as a designer with little gems like Six, a cute five in row variant, or Linja, a subtle race game, then as a publisher. His company, Steffen-Spiele, is the Bauhaus of boardgames, the champion of simplicity and clarity both in game rules design and in graphic design. I’m proud that Soluna is now published in the same series and style.

Linia et Six, deux petits jeux de stratégie publiés par Steffen-Spiele
Linia and Six, two minimalistic strategy games by Steffen-Spiele

Babylon’s theme was, quite logically, the interrupted building of the Babel tower. Moon, sun and stars in Soluna make less sense, but they make for a really nice looking game. Discs now have a different symbol on both sides, allowing for different starting configurations.

The core rule is still the same : on his turn, a player moves a pile of discus atop another pile, providing both piles have either the same height or the same top symbol. First player with no legal move loses the game.

Like five in a row, like most light strategy games with few components, Soluna is a solved game It can be a problem if you plan to play against a computer, but it shouldn’t be if you play with a friend – and that’s what games are for.

Soluna will be at the Essen game fair in October.

Soluna
A game by Bruno Faidutti
2 players – 5 minutes
Published by Steffen Spiele (2012)
Boardgamegeek

Anse

Une partie de Speed Dating
A game of Speed Dating

Le week-end ludique d’Anse, tous les ans au mois de septembre, c’est un peu le petit frère de mes rencontres ludopathiques, et je m’y rends toujours avec grand plaisir. Depuis quelques mois, m’étant pas mal remis à la création, je consacrais le plus clair de mes soirées ludiques à mes prototypes. J’avais donc amené mes dernières créations, parmi lesquelles la plus appréciée fut sans nul doute la Mouette Rieuse. Mais ce week-end fut surtout pour moi l’occasion de jouer à quelques jeux récents relativement conséquents, quelques nouveautés qui avaient attiré ma curiosité mais que je n’avais pas eu l’occasion d’essayer. Bien m’en a pris puisque, sur les sept ou huit nouveaux jeux auxquels j’ai joué ce week-end, quatre se sont avérés excellents, et auraient sans nul doute intégré ma ludothèque idéale si je ne l’avais pas lâchement abandonnée.

Le premier jeu auquel j’avais très envie de jouer était Libertalia, de Paolo Mori, dont j’avais suivi une partie d’un œil et d’une oreille en mai, aux rencontres ludopathiques, mais que je n’avais pas essayé. Ce jeu de tactique et de double guessing est une petite merveille. La grosse boite, les graphismes un peu sombres et le matériel abondant peuvent faire croire à un gros jeu de plateau, mais Libertalia est en fait un jeu de cartes simple, amusant et subtil, où la psychologie se mêle à la tactique. Le système de cartes personnages, qui n’est pas sans rappeler Citadelles ou Mission: Planète Rouge, permet une grande variété. Le thème de la piraterie est magnifiquement exploité, et les illustrations superbes. Longue vie aux fourmis rouges de Marabunta.
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J’étais à priori moins attiré par Santa Cruz, bien que son auteur soit mon ami Marcel-André Casasola-Merkle. C’est Gwenael qui m’a convaincu de l’essayer, et il a eu bien raison car, là encore, c’est un chef d’œuvre plus fin et original qu’il n’y parait. Santa Cruz est un vrai jeu allemand, où l’on pose de petites maisons et construit des réseaux sur un vilain plateau représentant une île vaguement exotique. Mais c’est aussi, ce que j’apprécie toujours, un jeu à objectifs secrets, qui rappelle un peu Isla Dorada ou Golden City. Surtout, c’est un jeu en deux temps – une première phase très tactique, dans laquelle on explore l’île et tente de jouer au mieux ses cartes de score, et une seconde phase dans laquelle on sait que les objectifs sont plus ou moins les mêmes que dans la première, ce qui permet plus d’anticipation et presque de stratégie. Un jeu dans lequel on retrouve bien la patte du génial auteur de Taluva et Verräter.
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Ma troisième découverte de week-end est plus inattendue, tant l’excellent Sky Traders, de Gioachino Prestigiacomo, que j’avais acheté un peu par hasard, est passé totalement inaperçu. Je ne suis habituellement guère porté sur le genre Steampunk, mais il est traité là avec énormément d’humour, d’intelligence et d’ à-propos, et servi par de très belles illustrations. Sky Traders est un gros jeu de commerce, de “pick-up and deliver” aux mécanismes futés et originaux. On achète et revend des marchandises légales et illégales, on évacue les déchets toxiques dont les villes ne savent que faire, on menace ou attaque les vaisseaux adverses, on fait face à bien des défis inattendus, et on ne s’ennuie jamais. Je suis très surpris par la note médiocre sur le boardgamegeek de ce gros jeu à l’angle-saxonne, intelligent, drôle et parfois chaotique.
Certes, Sky Traders a quelques petits défauts. Le jeu est un peu trop long, mais il suffit de baisser le coût des points de victoire à 4 piastres pour accélérer les parties. Le très original et très amusant système de marché serait en outre plus dynamique, me semble-t-il, si l’on ne limitait pas le nombre de dés placés de chaque côté d’une marchandise, les dés en excès n’étant juste pas pris en compte.

Enfin, le dimanche matin, juste avant de partir, j’ai fait une très agréable partie de The Island, de Julian Courtland-Smith. Certes, ce jeu est loin d’être nouveauté, et j’y avais déjà joué il y a une vingtaine d’années, quand il s’appelait Escape from Atlantis et quand requins et monstres marins étaient en plastique et non en bois, mais j’en avais à peu près tout oublié de cet excellent jeu de société familial. C’est une excellente idée qu’ont eu Stronghold et Asmodée de ressortir cette petite perle qui date d’une époque et les jeux grand public pouvaient aussi être méchant, et où il n’était pas politiquement incorrect de faire dévorer ses enfants par des requins.
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Bref, un excellent week-end, et un plaisir que j’avais un peu délaissé ces derniers temps, celui de découvrir des nouveaux jeux, et des bons. Vous pouvez en trouver quelques photos ici, prises par mon ami Gwenaël, avec notamment mes prototypes de Speed Dating et de Mouette Rieuse.


Une partie de Mouette Rieuse : Renard Naïf
A game of Sitting Bull : Naive Fox

The Anse gaming week-end, every year in early September, is like the younger brother of my ludopathic gathering, and it’s always great fun to be there. These last months, since I’ve starting again designing games with some intensity, I had spent most of my gaming sessions playing my prototypes. I did bring them to Anse, and Sitting Bull was highly praised and generated some big laughs. But for me, this week-end was mostly an opportunity to play some bigger recent games which I was curious of, but which I hadn’t played so far. I’ve been quite lucky since, from the seven or eight new games I played, four happened to be really great, and would certainly have entered my ideal game library if I had not given up updating it.

The first game I really wanted to play was Paolo Mori’s Libertalia. I was very excited about this game since I had seen it in playtest at the last ludopathic gathering. This card game of tactics and double guessing is a real gem. Don’t be fooled by the big box and the dark graphics, this is a light, fun and subtle card game, with more psychology than real strategy. The character card system, which reminds both of Citadels and Mission: Red Planet, makes for a highly replayable game. The pirate setting is well implemented, both with the character effects, the booty shares and the gorgeous graphics. Long live to the red Marabunta ants.
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I was less attracted to Santa Cruz, even when his authors is my goof friend Marcel-André Casasola-Merkle. Gwenaël convinced me to give it a try, and well he did. This is an outstanding game, subtler and more original than it first looks. Santa Cruz is a typical german style game, where players place little wooden houses along networks on the ugly looking map of some vaguely exotic island. It is also a hidden objectives game, a bit like a lighter Isla Dorada or Golden City. The most interesting feature is its two parts structure. In the first half of the game, players discover the island and try to make the best use of their score cards. In the second round, the island is better known, and everybody has some knowledge of the goal cards in play, and the game becomes more about stategy and anticipation. Another masterwork by the author of Verräter and Taluva.

My third discovery will probably be more of a surprise for most readers of this blog. I bought Gioachino Prestigiacomo’s Sky Traders on a whim, with no precise idea of what it was. I don’t like the Steampunk universe when it feels too dark and rusty, but here it’s light, humorous and clever, and gorgeously illustrated. Sky Traders is a very original “ameritrash” style Pick-up and deliver game, full of clever and original systems. One can make money with buying and selling various goods, but also with helping the cities to get rid of toxic waste, or with attacking or even only menacing opponent’s ships – especially when they are wanted by the space police, for example for dumping toxic waste over a city. The game is deliberately chaotic, full of dice rolls and unexepected event cards, but it’s also gorgeous, dripping with theme, full of twists and turns.
It might be a bit too long for what it is, but the problem is easily solved with lowering the price of influence points, from 5 to 4 bucks. The fun and original market system can also be made more dynamic if the number of dice placed on any side of a good is not limited, the excess dice being simply ignored when reckoning the market prices.
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On Sunday morning, before I left, I played a great game of Julian Courtland Smith’s Escape from Atlantis – strangely published in France uner another English name, The Island. This is far from being a new game, and I had already played it about twenty years ago, with plastic whales and sharks instead of wooden ones, but I had forgotten how this outstanding family boardgame plays. Stronghold and Asmodée had a great idea publishing a new edition of it. This gem was really ahead of its time, and comes from a time when mass-market family games could also be nasty, and when it wasn’t politically incorrect to send sharks to devour one’s parents or children.
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It was great weel-end, and a great occasion to discover new and good games. Gwenael has posted some pictures – including my prototypes of Speed Dating and Sitting Bull – there.

Mouette Rieuse :  Canari charmeur
A game of Sitting Bull : Flirtatious Canary

Guillaume d’Ockham au cirque
William of Ockham at the Circus

Dans un billet récent, j’ai justifié l’importance que j’attache, dans la conception d’un jeu de société, au principe de l’économie de moyens, que les intellectuels appellent le rasoir d’Ockham. Je préfère toujours introduire un effet amusant, un choix difficile, une stratégie intéressante dans un jeu sans avoir recours à de nouveaux mécanismes, plutôt qu’en ajoutant une nouvelle règle, un nouvel élément, un nouveau type de cartes. C’est la principale raison pour laquelle je n’étais pas entièrement d’accord avec les gens de Hans im Glueck, l’éditeur allemand de Citadelles, lorsqu’il s’est agi d’imaginer quelques cartes supplémentaires dans la nouvelle édition allemande du jeu. Les effets des cartes de la mini-extension sur le thème du cirque sont simples et bien trouvés, et ajoutent certainement du dynamisme au jeu. J’aurais pourtant préféré que, à la manière de ce que j’avais fait dans la Cité Sombre, ces effets soient amenés par des cartes quartiers, ce qui aurait le plus souvent été possible, plutôt que par un nouveau type de carte dont l’invention rompt avec ce principe d’économie. Certes, c’est plus une question d’élégance que d’intérêt ludique, car les cartes sont amusantes, longuement testées et renouvellent le jeu. Mais bon, j’ai mon amour-propre, et j’aurais préféré que Citadelles se développe sans avoir recours à de nouvelles règles.

J’ai peut-être tort. C’est en effet pour la même raison que je n’étais pas favorable à l’introduction des cartes artefacts dans Diamant. Avec le recul, je pense m’être trompé et suis content qu’Alan ait insisté pour que ces  cartes soient ajoutées à l’édition américaine, Incan Gold. Il en ira peut-être de même pour Citadelles.

C’est un peu la même chose en ce qui concerne la thématique choisie pour ces cartes. D’un côté, je pense que donner à ces nouvelles cartes un thème commun était une excellente idée, et que le cirque est un univers fort bien choisi. Les illustrations sont superbes, notamment le dessin de la voyante. D’un autre côté, je regrette que les graphismes et les noms des cartes les situent au début du XXème siècle, donc sans cohérence avec l’univers graphique de Citadelles, plutôt ancré dans une Fantasy Renaissance. Et je n’ai toujours pas compris pourquoi le fort des halles s’appelle Raspoutine.

Bref, une extension qui renouvelle et dynamise le jeu, avec laquelle je jouerai sans doute avec plaisir, mais qui rompt à la fois avec l’élégance et la sobriété des mécanismes et avec la cohérence thématique de Citadelles. Je le regrette d’autant plus que je pense qu’il aurait été possible de faire autrement.


In a recent post, I explained why I considered economy of means, aka Ockham’s razor, to be a basic principle of sound game design. When adding a new fun effect, critical choice or challenging strategy to a game, I always try first to do it without adding any new rule, any new turn phase, any new card type, any new game system. It’s not always possible, but at least I try. That’s the reason why I am not enthused by the new cards the German publisher of Citadels, Hans im Glueck, has added to the new reprint of Citadels. The card effects are simple enough, cleverly designed and well balanced, and certainly make the game more dynamic. I would nevertheless have preferred to have the same effects triggered by new district cards, which was possible for most, than by a new type of card which Ockham’s razor would have shaven off. Of course, the issue is more with style than with gaming interest. The new action cards look really fun, and I’m confident they have been balanced and tested well, but at least for pride and elegance reasons, I would have preferred Citadels to be developed without adding any new rule.

I may be wrong. I was with Diamant, when for the same reason I didn’t want to add the artifact cards in the US edition of the game, Incan Gold. I’m now very happy that Alan insisted on this, because I’ve realized they add a lot to the game. May be it will be the same with actions cards in Citadels.

I have a similar feeling with the theme of these new cards. On the one hand, choosing a specific theme for all these action cards was a great idea, and the Circus is a good theme. The graphics are great – I especially like the Seer. On the other hand, it’s a bit strange to have early XXth century pictures added to a fantasy-renaissance setting. Why not Renaissance artists? And I still don’t understand why the strong guy is called Rasputin.

This small 15 cards expansion revitalizes the game and makes it more dynamic, and I will certainly play with it, but it breaks with the sobriety and elegance of Citadels mechanisms, and with its thematic consistency. I regret it because I don’t think this break was absolutely necessary.