La carte et le poing
Fists and Cards

v315- grand chaman

Il est toujours tentant, surtout avec un jeu aux règles simples, de procéder à une modélisation mathématique. Le jeu sur lequel je travaille actuellement avec Eric Lang, largement basé sur le dilemme du prisonnier, s’y prête tout particulièrement…. et pourtant. Quelques expériences menées ces derniers jours montrent les limites de l’approche par la modélisation mathématique ou par le calcul stratégique.

dials

Assez régulièrement dans la partie, les joueurs doivent faire une choix tactique entre trois décisions que nous avons baptisées Paix, 1, et Guerre. Dans les prototypes qui ont servi à tous les tests, ce choix est effectué sur un cadran. Chaque joueur prend un petit cadran de carton et oriente la flèche vers le symbole de son choix, et les cadrans sont ensuite révélés.

cards

Les cadrans coûtant un peu cher à produire, nous mous sommes d’abord demandés s’ils ne pouvaient pas être remplacés par des cartes. Dans cette version, chaque joueur a trois cartes avec les symboles de la Paix, du 1 et de la Guerre. Chaque joueur choisit une carte, et les cartes sont révélées simultanément. Les joueurs trouvent cela un peu moins agréable à utiliser que les cadrans, mais cela fonctionne très bien, et statistiquement, les résultats obtenus sont les mêmes.

fists

Nous avons ensuite eu l’idée de supprimer tout matériel, et de procéder comme à Pierre / Feuille / Ciseaux, avec une main ouverte pour la Paix, un point fermé pour la Guerre, et un pouce levé pour le 1. En théorie, ce mécanisme est parfaitement équivalent aux deux autres. En pratique, il donne un feeling et des résultats un peu différents, plus de guerre et moins de paix. Peut-être le geste du bras tendu pousse-t-il «naturellement » à l’agressivité, peut-être le fait de devoir prendre la décision en un instant, sans pouvoir hésiter ni revenir en arrière, nous pousse-t-il à des choix plus risqués. En tout cas, on ne joue plus tout à fait de la même manière.

Cela m’a rappelé un article que j’avais écrit il y a quelques années, dans lequel j’expliquai la différence entre piocher une carte au début ou à la fin de son tour. Là encore, en théorie mathématique, cela ne devrait faire aucune différence, mais en réalité cela influe beaucoup sur le style du jeu.


v314-shaman

It’s always tempting to reduce a game to a mathematical model, especially with relatively simple games. The game I’m actually designing with Eric Lang, based on the prisoner’s dilemma, is a perfects candidate…. but a recent experience has shown the limits of a strategic or mathematical approach.

dials

Every round, players have to choose secretly and simultaneously between three possibilities, which we have names Peace, 1 and War (or sometimes Greed). In our first prototypes, players had cardboard dials, and had to point a plastic arrow to one of the three symbols for Peace, 1 and Greed before the dials were revealed simultaneously.

cards

Dials are expensive to produce, so we first tried to replace them with cards. Players have three cards with the symbols for Peace, 1 and Greed. Each player plays a card face down, then the cards are simultaneously revealed. It works, the results are more or less the same, but most players prefer dials.

fists

Now comes the real experience. Get rid of cards and dial, and play this à la Rock / Paper / Scissors. A closed fist means War / Greed, an open Hand means Peace, a thumb up means 1. Theoretically, this system is equivalent to the two former ones. When playing, however, the feeling is very different, and it seems that the results are slightly more aggressive, with more wars and less peace. May be holding one’s arm makes one agressive, may be the requirement to play fast, without hesitation, makes us less careful ? Anyway, it’s the same game, but it plays a bit differently.

This reminded me of an article I wrote a few years ago about the timing for drawing cards in card games – after one’s turn or before one’s turn. Once more, theoretically, there ought to be no difference, but in practice there is, and it makes games feel differently.

Pirates !

Les pirates de notre imaginaire sont cruels, ivrognes, souvent vêtus de noir, portent de longs sabres recourbés, arborent fièrement un drapeau à tête de mort… bref, de sinistres personnages. Pourtant, les enfants, et même ces grands enfants que sont les joueurs, les aiment bien.
On peut trouver plein d’explications à cela. Bandeau sur l’œil, capitaines unijambistes, singes et perroquets, tout cela illustre le fait que le monde de la piraterie n’est pas perçu comme un univers historique mais comme un monde imaginaire et exotique, plus proche du médiéval fantastique ou de la science fiction que du XVIIème siècle. Que l’île de la Tortue soit bien réelle, que Francis Drake l’ait été, cela n’est que très marginal dans un passé qui échappe suffisamment aux historiens pour que l’imagination s’y donne libre cours. Elle le fait sans trop en rajouter dans la violence, et en faisant des équipages pirates les porte parole assez décalés de préoccupation contemporaines. Les pirates de nos jeux sont en effet ceux des films – ce sont des brutes, violents, ivrognes et machos, qui cachent parfois un cœur d’or, et leurs équipages sont « multiculturels », mixtes et fraternels. Les capitaines pirates sont des entrepreneurs sans scrupules motivés uniquement par l’appât du gain et le goût du sang, mais les frères de la côte sont une utopie socialiste qui aurait inventé la sécurité sociale. Chacun y trouve donc son compte, et les illustrateurs aussi s’en donnent à cœur joie avec les gueules cassées, les longues barbes, les ponts de navires, les perroquets et les singes.

Bref, la mer, le soleil, la baston, des visages virils découpés au sabre et hâlés au soleil – le thème idéal pour un film d’aventure, une bande dessinée ou un jeu. J’ajoute que, pour des raisons que j’ignore, la violence y est mise particulièrement à distance, comme le montre le fait que les parents qui n’aiment guère voir leurs enfants jouer aux petits soldats ne s’inquiètent aucunement de les voir se déguiser en pirates.

pic994729_md
La Fièvre de l’Or, jeu d’enchères conçu avec Bruno Cathala et originellement paru en 2004 est épuisé depuis longtemps. Il y a quelques années, un éditeur polonais, Egmont, en a publié une nouvelle version… sur le thème des pirates. J’avoue avoir été d’abord sceptique sur ce changement de thème, mais à l’usage il s’avère que le nouvel univers convient tout aussi bien au jeu, et que les illustrations de Maciej Szymanowicz sont absolument superbes. Le succès de l’édition polonais a attiré la curiosité de quelques éditeurs français, et elle devrait donc d’ici quelques mois arriver en France, publiée par Bombyx.

blackfleet1black fleet
Un peu avant sans doute arrivera Black Fleet, de Sebastian Bleasdale, publié par mes amis les Space Cowboys. Black Fleet est un jeu au feeling un peu retro, où l’on déplace ses galions et ses frégates sur une carte, allant d’île en île et attaquant à l’occasion les navires adverses. A la fois très tactique, du fait des déplacements sur la carte, et un peu imprévisible du fait des nombreuses cartes spéciales dont peuvent bénéficier les joueurs, Black Fleet est un jeu familial, léger, dynamique auquel je prédis un grand succès, un jeu de pirates à l’ancienne mais modernisé, dynamisé, accéléré.

Mais si j’ai eu envie de parler de jeux de pirates, c’est surtout parce que, hier soir, avec quelques amis, nous avon consacré une soirée entière aux jeux de pirates, et j’y ai découvert pas moins de trois excellents jeux.

francisdrake1 francisdrake2
L’idée de départ était de jouer à Francis Drake, un jeu de Peter Hawes publié par Eagle Games. Ce jeu avait remporté un grand succès à mes dernières rencontres ludopathiques. Il a fallu trouver quatre joueurs encore capables s’asseoir autour d’une table pour un jeu de plusieurs heures avec quelques dizaines de pages de règles, mais je n’ai pas regretté l’expérience. Francis Drake, c’est deux jeux en un. Les joueurs préparent d’abord leur expédition, recrutent leur équipage, arment leur navire, cherchent des informations –  c’est du « placement d’ouvrier » dans une rue où l’on ne peut pas reculer et dont l’ordre des boutiques change à chaque tour, ce qui permet des configurations très différentes. Ensuite, ils partent en expédition dans les Caraïbes, essayant de profiter des meilleures occasions, d’attaquer les forts et les galions espagnols devant lesquels les autres pirates ne sont pas passés d’abord – et il y a là un peu de bluff assez amusant. Donc, quelque chose de beaucoup moins classique, de beaucoup moins abordable et de beaucoup moins « baston » que Black Fleet, mais un jeu d’une grande richesse dont je sais qu’il ressortira.

portroyal1 portroyal2
Comme il nous restait du temps, nous avons aussi essayé deux petits jeux de cartes de pirates, bien plus modestes et tous deux très intéressants.
Port Royal est un jeu à l’allemande, un de ces nombreux jeux de pioche de cartes basés sur un mécanisme de « stop ou encore » (en bon français on devrait dire « quitte ou double », mais plus personne ne comprend). Comme dans la première phase des tours de Francis Drake, les joueurs sont des capitaines pirates qui dans les rues non plus de Plymouth mais de Port Royal cherchent à recruter leur équipage.  À partir d’un mécanisme déjà utilisé cent fois – à votre tour, vous piochez aussi longtemps que vous voulez, mais si vous piochez un deuxième navire de la même couleur, vous perdez tout – Alexander Pfister est parvenu à concevoir un jeu bien plus subtil qu’il n’y parait, où il nous manque toujours une pièce d’or, où l’on veut toujours piocher une carte de plus. Rien de très original, donc, mais un petit chef d’œuvre quand même.

dreadcurse1 dread_curse
Pour terminer la soirée, nous avons joué à Dread Curse, de Stuart Sirk, un jeu de cartes acheté un peu par hasard. Ici, les joueurs sont membres d’un même équipage et, avec le sens de la camaraderie bien connu des frères de la côte, cherchent à s’embrouiller l’un l’autre, se voler des pièces d’or et se refiler la maudite tâche noire. J’ai beaucoup aimé, mais préfère vous mettre en garde – ce jeu n’est pas pour tout le monde. Si vous êtes de ceux qui reprochent parfois à mes jeux d’être chaotiques et incontrôlables, n’essayez surtout pas Dread Curse. Entre les effets des personnages, assez violents, et ceux des cartes, parfois monstrueux, ce jeu part dans tous les sens, va très vite, et les rebondissements sont incessants. On a vraiment beaucoup ri à ce qui ressemble à un croisement de Fluxxx et de Citadelles, mais je pense que nous aurions été nerveusement épuisés si nous avions voulu en faire plus d’une partie.

Voici donc trois excellents jeux de pirates, dans des styles très différents, du petit jeu délirant, Dread Curse, au monstre qu’est Francis Drake, en passant par un jeu à l’allemande de facture très classique, Port Royal. Et deux autres qui arrivent bientôt, Piraci et Black Fleet. Je ne souhaite qu’une chose, que les pirates reprennent dans le monde ludique la place que les sinistres zombies leur ont indument volé depuis quelques années.

Pirates are ferocious, drunk, dressed in black, carry long curved swords and sport a sinister black flag dispalying skull and bones. Not really nice fellows, but children like them, as do gamers, who often are old children.   .
One can find many explanations. One-legged captains, eye-patches, monkeys and parrots, all these icons show that the pirate’s world is not perceived as historical but as exotic fantasy, more similar in a way to medieval heroic fantasy or to science fiction than to historical XVIIIth century. Even though Turtle island is real, though Francis Drake was a historical figure, the pirates world is not known to us through historians but through novelists, and imagination can get loose about it. It does, without adding much violence, and pirate crews become surprising spokesperson about. The boardgame pirates are the as the videogames or movies ones. They are violent and brutish drunks, but they are kind hearted, their crews are mixed, « multicultural » and fraternal. They are the best and the worst possible people. Pirate captains are the epitome of private entrepreneurs, driven by the lure of profit and a taste for blood, but the brotherhood of the coast is a socialist utopia which invented the welfare state. Pirates suit all tastes, and Illustrators also have great times drawing scarred and bearded faces, old ships, parrots and monkeys.
Sea, sun, brawls and fights, tanned and virile faces – the best possible setting for an adventure movie, comics or game.  Also, and I don’t know the reason why, the obvious violence is neutralized, kept at a distance. Concerned parents who don’t like to see their children play war never have a problem with pirates outfits….


pic994729_md
Boomtown, an auction game I designed with Bruno Cathala, was published in 2004 and is long out of print in the US. A few years ago, a Polish publisher, Egmont, decided to retime it as pirate game. I was skeptical, but I l must admit the new settings fits as well as the old one, and Maciej Szymanowicz graphics are absolutely gorgeous. The Polish version was a hit, and it caught some interest from the French publisher Bombyx. A french version of the Polish version will soon be published in France, and may be later in the US.

blackfleet1black fleet
Sebastian Bleasdale’s Black Fleet, published by my friends at Space Cowboys, will probably be there first. Black Fleet has a retro look and feel. Players move their galleons from island to island, trade various resources and occasionally attack one another. Movement on the map is very tactical, but there’s also much luck with the many action cards in the players’ hands. Black Fleet is a light and dynamic board game. It has a very classical feel, but it’s much faster paced, more fun, less pedestrian than games from the eighties. I’m confident it will be a hit.

But the true reason I’ve started this article about pirate games is that, yesterday night, with a few friends, we’ve spent a few hours playing only pirate games, and I’ve discovered three great new games.

francisdrake1 francisdrake2
The original idea for the evening was to give a try at Peter Hawes’ Francis Drake, published by Eagle Games, which had been a hit at my ludopathic gathering. I had to find four players who were still able to sit at a table for a long game, more than two hours, with rules a dozen pages long. I didn’t regret this experiment. There are two games in one in Francis Drake. First, players prepare their expedition, recruit crew members, find a ship, upgrade it, listen for rumors… this first game is worker placement in the main street of Plymouth, a one way street in which the shops are rearranged every round, making it a new challenge every time. Then, ships sail to the Carribean, planning to attack Spanish ships, Spanish forts, Spanish ports. There’s some interesting planning and bluffing, when each player tries to be the first to launch an attack on a given target. This is much heavier stuff than Black Fleet, it’s more about planning and less about launching surprise attacks, but it’s a very rich and deep game which I will certainly play again.

And then, because we had time left, we played two lighter and faster pirate-themed card games, and both were also really good.
portroyal1 portroyal2
Port Royal is a typical German style card game. Like in the first phase of Francis Drake, players are pirate captain walking the street of Port Royal and trying to hire crewmen, buy a ship and launch an expedition. The basic system might have been overused – on one’s turn, one draws cards one after another, stopping when one wants, and if one happens to draw two ships of the same color, one loses one’s turn. The genius of Alexander Pfister was to build a fresh, intricate, subtle and terribly tense game on this unoriginal premise. A game in which one always wants to draw one card more, one always lacks one gold. Nothing very original, but one of the very best card games I’ve played recently.
dreadcurse1 dread_curse
Then we ended the game night with Stuart Sirk’s Dread Curse, a card game I had bought more or less at random. This time, players are all members of the same crew and, of course, try to cheat and steal one another. I better warn all those who sometimes find my own designs too chaotic and uncontrollable for their taste – this is far worse. Character cards have violent effects, action cards have even more violent ones, and the game flow is very fast, completely chaotic but undeniably fun. If you have the guts for a mix between Fluxxx and Citadels, give Dread Curse a try. We had great fun, but were really too exhausted for a second game.

So, here are three great pirates games, in three very different styles. A light and zany card game, Drad Curse. A more restrained and classical one, Port Royal. A heavy multifaceted board game two or three hours long, Francis Drake. And two more soon to hit the shores, Piraci and Black Fleet. Now, I would like pirates to take back the leading place in the gaming world, which has been unduly stolen from them by zombies two or three years ago.

A speech by the captain of the Red November

This is not a fake, but it’s actually a speech by the captain of the British Submarine HMS Superb, recorded by one of the submariners in 2008, shortly before the ship was decomissioned.

Paris Est Ludique

1779058_737509846283710_389905317_n

Paris Est Ludique, c’était, un petit festival ludique en plein air, près de la porte de Charenton. Il y avait du soleil – surtout dimanche – et du monde – mais pas trop, grâce à la grève de la SNCF.

Ayant casé pas mal de mes projets ces derniers moins, je n’avais pas de nouveau prototype suffisamment avancé pour le présenter aux nombreux éditeurs présents. Je me suis donc promené tranquillement de stand en stand, discutant ici et là de mes six ou sept projets en cours chez tel ou tel éditeur, buvant des bières avec tous ceux qui le voulaient bien, et jouant de temps en temps à un nouveau petit jeu qui me semblait amusant. Bref, pour moi tout au moins, un salon décontracté, pas trop business et presque reposant.

Chez Gigamic, les premières boites d’Animal Suspect, qui arrive en boutique dans quelques semaines, auraient dû être là. Malheureusement, leur palette de jeux s’était perdue et les animateurs qui n’avaient aucun jeu sous la main en ont été réduits à aller mendier quelques boites de leurs dernières production auprès des boutiques présentes. Enfin, bon, j’ai confirmation de ce qu’Animal Suspect devrait être en boutique d’ici quelques semaines. 
Mascarade, lui, tournait en boucle chez Repos Prod, mais trop content d’avoir tout mon temps pour me promener tranquillement sur le salon, je ne leur ai pas dit que j’avais mon prototype de l’extension dans mon sac. J’en ai profité pour récupérer les illustrations de tous les nouveaux personnages, et j’ai reçu comme consigne de faire le buzz tout doucement en révélant les personnages petit à petit. Voici donc déjà l’un de mes préférés, La Comédienne.

La Comédienne recopie le pouvoir du dernier personnage à avoir été joué. The Actress copies the ability of the last character played.

La Comédienne recopie le pouvoir du dernier personnage à avoir été joué.

Samedi après-midi, j’ai remis la Patate d’Or sculptée avec amour par Martin Vidberg a son deuxième titulaire, Croc. J’avais noté sur mon agenda que c’était dimanche, et c’est vraiment par chance que j’étais au lieu et à l’heure prévue. Pris au dépourvu, je n’avais absolument pas préparé le discours d’intronisation de Croc, et j’ai raconté un peu n’importe quoi. Peu importe, puisqu’il n’y avait pas grand monde pour m’entendre. Si cela s’était passé dimanche et si j’avais donc un peu préparé mon texte, j’aurais expliqué les multiples raisons qui m’ont fait choisir Croc. Il est bien moins méchant qu’il n’en a l’air (mais ça, tout le monde le sait plus ou moins). Il est un auteur de jeux aux talents variés, avec des jeux de rôles (Bitume, Animonde, In Nomine Statanis/ Magna Veritas…), des Murder Parties (Dieu est Mort…) et des jeux de plateau (Gore, L’Âge des Dieux, Claustrophobia). L’Âge des Dieux, en particulier, est un jeu original et très amusant qui n’a pas eu le succès qu’il méritait. Mais Croc a aussi écrit dans tous les magazines touchant plus ou moins au monde du jeu, a aussi participé, chez Asmodée, au développement de nombreux jeux, et y contribue encore chez Space Cowboys. Bref, l’homme orchestre tout indiqué pour un prix destiné à remercier quelqu’un pour tout ce qu’il a fait, d’une manière ou d’une autre, pour le jeu. Au lieu de dire tout cela, j’ai balbutié deux ou trois conneries, parce que je n’avais rien préparé, parce qu’il y avait un peu de vent et parce que, l’air de rien, Croc m’intimide encore un peu.

Je n'ai trouvé que deux photos de l'événement sur facebook, l'une avec Martin faisant son discours, puis une où je fais le mien, mais aucune avec Croc, ici à droite, recevant sa glorieuse patate.

Je n’ai trouvé que deux photos de l’événement sur facebook, l’une avec Martin faisant son discours, puis une où je fais le mien, mais aucune avec Croc, ici à droite, recevant sa glorieuse patate. Honte à nous !

Update : voici une photo de Croc avec sa patate, plus petite mais plus dorée et plus jolie que la mienne.

Update : voici une photo de Croc avec sa patate, plus petite mais plus dorée et plus jolie que la mienne.

N’ayant fait qu’une seule partie d’un de mes prototypes, j’ai pu jouer à six ou sept petits jeux, dont trois en particulier m’ont vraiment impressionné. Chez Lui-Même, ’ai enfin essayé la nouvelle version de Romans, Go Home!, avec quelques petits changements intéressants dans les pouvoirs des personnages. Chez Ravensburger, j’ai enfin joué à l’excellent Linko, de Wolfgang Kramer et Michael Kiesling, un petit jeu de défausse très malin, qui set un peu use version plus sophistiquée et plus tactique de l’un de mrs jeux préférés du moment, Big Deal. Charles Chevalier m’a fait découvrir Wakanta, un jeu tactique pour deux joueurs particulièrement subtil, qui devrait bientôt sortir chez Blue Orange. J’ai également fait la connaissance de Virginie et Karim, d’Elemon Games, qui devraient bientôt publier La Chasse aux Gigamons, un jeu de mémoire avec pas mal d’effets spéciaux qui devrait rassembler petits et grands autour d’une même – petite – table. Il y avait plein d’autres bons jeux, mais on ne peut pas être à toutes les tables.

Les démonstrateurs de Romans Go Home étaient assez impressionnants....

Les démonstrateurs de Romans Go Home étaient assez impressionnants….

Le sujet de discussion du salon était indiscutablement Kickstarter, puisqu’il n’y a sans doute aucun secteur d’activité où le financement participatif ait pris une telle ampleur que dans le jeu de société. A-t-on atteint un seuil au delà duquel les kickstarters ludiques, trop nombreux, ne peuvent que décliner, ou y a-t-il encore de la place pour une croissance qui se ferait désormais aux dépens des boutiques ? Au delà des boutiques, quels sont les dangers, ou les opportunités, pour les éditeurs, les illustrateurs, les auteurs ? Et quel impact sur la qualité des jeux publiés ? Disons que sur tous ces points, le débat reste très ouvert.
J’ai eu aussi avec Charles Chevalier une intéressante conversation sur le style des auteurs de jeu, Charles m’ayant parlé d’un prototype qu’il n’arrive pas à caser chez les éditeurs parce qu’on lui dit que ce n’est pas du Chevalier, c’est du Faidutti…. J’en ai profité pour prendre ma seule photo du salon, que je pense utiliser cet été, à la Gen Con, pour illustrer ma conférence sur Postcolonial Catan – il serait temps, d’ailleurs, que je me mettre sérieusement à préparer cela.

2014-06-15 13.53.28

Sinon, comme d’habitude, on a dit du mal des éditeurs, des distributeurs et des auteurs – surtout de ceux qui n’étaient pas là – mais je ne vais pas tout vous répéter.

Un grand merci à toute l’équipera sympathique équipe de Paris Est Ludique. J’ai toujours un petit complexe à gagner ma vie grace au jeu quand je vois la gentillesse et la générosité des bénévoles qui organisent un événement comme celui-ci.

Paris Est Ludique


1779058_737509846283710_389905317_n

Paris Est Ludique is a ,small and casual open-air game festival at the Porte de Charenton, in Paris. This year, it was sunny – at least on sunday – and crowd – but not too much, thanks to the train strike.

Since many of my prototypes have found a publisher these last months, I had nothing really new to show to the many publishers who were there. I mostly walked from stand to stand, discussing my six or seven projects in the pipe with various publishers, drinking beers here and there, and occasionally playing a new light game that looked fun and/or interesting. I had a cool time, mostly socializing and never talking business.

The first copies of Animal Suspect were supposed to be available to play at the Gigamic stand. They were not, because the whole Gigamic Pallett of games had been lost somewhere between their warehouse and the fair. The demonstrators had to ask the nearby game resellers for a few copies of their last published games. Never mind, Animal Suspect is nearly there and ought to hit the shelves – only in France so far – in the next few weeks.
Mascarade was constantly played at Repos Prod. Being quite happy to walk freely through the fair, I didn’t tell them that I had brought my testing copy of the expansion, but I seized the opportunity to ask for the files of all the new character pictures. I was requested to publish them slowly, one or two at a time, to generate a slow buzz – so, here is one of my favorites, the Puppet-Master.

The Puppet-Master chooses two players and takes 1 gold from each. The two chosen players must get up and switch places, while their Character card and their fortune stay in place.

The Puppet-Master chooses two players and takes 1 gold from each.
The two chosen players must get up and switch places, while their Character card and their fortune stay in place.

Satrurday afternoon, I gave the « golden potato » lovingly sculpted by Martin Vidberg to its new awardee, Croc. I had written it down in my agenda for sunday, and it was by sheer luck that I happened to be at the right place at the right time. I was off guard, and had not yet prepared my speech, so I talked mostly jokes and nonsense. Not much harm, since there were few spectators listening to us. If it had been on Sunday, and if I had prepared my speech to explain the many reasons why I had chosen Croc, here is what I would have said. First, Croc is much nicer than he looks – but more or less everyone in the gaming world knows this by now. He is a multifaceted game designer, who designed role-playing games (Bitume, Animonde, In Nomine Satanis / Magna Veritas), Murder Parties (God is Dead) and boardgames (Gore, Age of Gods, Claustrophobia). Age of Gods is a really fun and original board game which didn’t get the success it deserved. Croc also wrote in more or less all the game magazines published these last thirty years. With Asmodée, and now Space Cowboys, he also helped develop many of the boardgames published in France. This one-man band was the obvious choice for the Golden Potato, a reward for a whole life dedicated to  all kind of games. Instead of telling all this, I just made a few bad jokes, because I was unprepared, because the wind was cold, and because I’m still a bit intimidated by Croc.

I could find only two pictures of this memorable ceremony on the internet, one in which Martin makes his speech, one in which I make mine, but no picture with Croc holding his golden potato.

I could find only two pictures of this memorable ceremony on the internet, one in which Martin makes his speech, one in which I make mine, but no picture with Croc holding his golden potato. Shame on us !

Update : I finally got a picture of Croc with his potato - smaller than mine, but better looking and more glossy.

Update : I finally got a picture of Croc with his potato – smaller than mine, but better looking and more glossy.

I played only one game of one of my prototypes, so I had enough time to play six or seven other light new games, some of which really impressed me. At Lui-même, I played the new version of Romans Go Home!, with some interesting changes in the characters abilities. At Ravensburger, I played Wolfgang Kramer and Michael Kiesling’s Linko, a very clever card game, kind of a more involved and tactical version of one of my current favorites, Big Deal. I played with Charles Chevalier his game Watanka, soon to be published by Blue Orange, a subtle two players game with both strategy and risk taking. I also got to know Virginie and Karim, of Elemon Games, who will soon publish « the Hunt for Gigamons », a memory game with lots of special abilities, the kind of game that is interesting both for kids and adults. There were certainly many other great games I missed.

Impressive demonstrators for Romans Go Home!

Impressive demonstrators for Romans Go Home!

The top topic of discussion on the fair was Kickstarter. The board game industry has been more affected by Kickstarter than any other, for good and for bad. Have we reached a critical threshold, and will kickstarted boardgames start to recline, or is there still place for growth, in which case both traditional and online shops will be greatly affected ? What are the opportunities, and the risks, for established publishers, designers, illustrators ? What about the quality of the games published via kickstarter ? These points, and a few other ones, are still open to discussion.

I had a fun conversation with Charles Chevalier about the style of game designers. Charles told me  of a prototype of his which he cannot get published because publishers tell him it’s not Chevalier, it’s Faidutti, and he’s not expected with such a design… I seized the opportunity to take my one and only picture of the week-end, Charles holding a copy of Sultaniya, which I will probably used at the GenCon for my seminar on Postcolonial Catan. By the way, I ought to start thinking seriously of what I intend to say there….

2014-06-15 13.53.28

And, of course, we spoke badly of publishers, distributors and designers – mostly of those who were not here – but I won’t tell you everything.

Many thanks to the whole Paris Est Ludique team. I always feel a bit uneasy making money with games when I experience the kindness and generosity of all the volunteers organizing such an event.

Paris Est Ludique

Jeux et émotions
Games and emotions

v314-shaman

Je suis de ceux qui versent facilement quelques larmes en regardant un film ou en lisant un livre, mais jamais cela ne m’est arrivé en jouant à un jeu de société. Le jeu de société est en effet bien peu romantique, et cela le distingue de bien d’autres formes culturelles, qu’il s’agisse du livre, du cinéma, de la peinture, de la musique, mais aussi du jeu de rôles, et dans une certaine mesure des jeux en ligne et des jeux d’argent.

Le joueur n’a pas d’amis, ni d’états d’âme, il n’a a que des objectifs et des intérêts. Il ne s’apitoie pas sur telle figurine qui n’est pas parvenu à prendre pied sur Omaha Beach, ou sur telle autre qui s’est fait dévorer par les zombies. Il la remet dans sa « réserve », pour la ressortir à l’occasion représentant un autre personnage tout aussi anonyme.
Cela n’a bien sûr rien d’étonnant si l’on voit dans le jeu un mécanisme abstrait, sans âme, et dans les règles une simple métaphore destinée à en faciliter l’explication, comme semblable à l’énoncé d’un problème de robinet. Ce n’est cependant pas le cas de tous les jeux, en tout cas pas de tous les miens, mais même les jeux au thème fort comme mon Mystère à l’Abbaye, même les jeux au thème triste comme les jeux de guerre, ne suscitent pas chez les joueurs de réelle émotion.

Les contraintes matérielles de leur conception et de leur réalisation, la limitation à l’usage de cartes, de dés, de pions, pour render compete d’histoires complexes, tout cela tend à faire des jeux, et tout particulièrement des jeux de société, des systèmes très simplifiés dont les éléments sont, au sens propre du terme, objectivés. On ne s’attache pas à un pion de bois ou de plastique comme à un personnage de roman, de film, ou même de jeu de rôle, dont il n’a pas la profondeur. C’est cette objectivation, cette simplification, plus que le caractère relativement abstrait, des jeux, qui contraint l’auteur de jeu à faire vivre son thème à coup de clins d’œil là où l’écrivain ou le cinéaste recourent au récit et le concepteur de jeux videos à la simulation, et qui fait du jeu de société le moins romantique des loisirs.

Pour autant, nos jeux ne sont pas dénués d’émotion. On y pleure rarement, mais on sourit beaucoup, et on rit assez fréquemment. Ça fait du bien aussi.


v315- grand chaman

I often shed a tear when reading a book or watching a movie, but I don’t think it ever happened when playing a board game. Boardgames are definitely les romantic than books, movies or paintings, and even less than role playing games, gambling and most online games.

The gamer has no friends, no conscience, only goals and interests. He doesn’t feel any pity for a miniature that couldn’t land at Omaha Beach or was eaten by zombies. He just puts it back in his « reserve », and takes it out later to represent some other anonymous figure.

This isn’t surprising if you think that games are just soulless mechanisms, and theme a metaphor used to make explanations easier, like water taps in a math problem. Some games are like this, but not all, and certainly not all of mine. Nevertheless, I’ve never seen a player cry or express a strong story related emotion even in a game with a strong theme, like my Mystery of the Abbey, or with a really sad theme, like wargames.

Because of the strong constraints of board game design and production, of the limitation mostly to cards, dice and pawns to create complex storylines, boardgames are very simplified systems in which all elements are, strictly speaking, objectified. One doesn’t feel the same empathy with a simple wooden or plastic figure, no matter how nice it looks, as with a much deeper novel, movie or role playing character. This objectification, this simplification, and the relatively abstract character of boardgames, forces the game designer to build his theme using nods and winks where the writer or moviemaker uses storytelling and some vied game designers simulation. That’s probably why boardgames are definitely not romantic.

On the other hand, our board and card games are definitely not devoid of emotions. There are no cries when playing, but we have lots of smiles and laughs.

Les petits jeux du moment
Light games I’m playing

C’est la saison des prix et des listes de jeux, et celles du Spiel des Jahres me laissent assez dubitatif, du moins pour ceux des jeux présentés auxquels j’ai eu l’occasion de jouer. Voici donc ma liste à moi de petits jeux que j’ai récemment appréciés. Ce ne sont sans doute pas les meilleurs jeux de l’année, mais ce sont des jeux que vous devriez apprécier si vous aimes mes créations et fréquentez mon site web. J’ajoute que la très grande majorité d’entre eux méritent d’être soutenus soit parce qu’ils ont un éditeur ou un auteur sympathique, soit parce qu’ils sont passés largement inaperçus, et que ce n’est pas juste.

tonne

Ab in die Tonne, qui doit signifier quelque chose comme « à la poubelle », est un petit jeu de paris imaginé par Carlo Rossi et publié par Abacus, un éditeur que j’aime beaucoup, même s’il n’a jamais publié aucun des nombreux projets que je lui ai proposés. Mais revenons à notre poubelle dans laquelle on peut mettre des briques de lait, des canettes de bière, des bouteilles de vin et des trognons de pomme. Le but du jeu est, bien sûr, de mettre toutes ses ordures à la poubelle de manière à ce que ce soient les adversaires qui soient obligés de la sortir. Un petit système de paris malin, un peu d’adresse pour mettre les objets dans la poubelle sans la faire déborder mais en embêtant les voisins qui vont passer après, et cela donne un excellent jeu éducatif pour les petits et les grands.

romansgohome

Romans Go Home, d’Eric Vogel, dont j’avais déjà parlé ici, est un jeu d’enchères – un genre que j’apprécie – particulièrement malin et quelque peu chaotique, dans lequel les joueurs sont des clans calédoniens rivaux qui cherchent à péter le plus grand nombre possible de forts romains. Comme dans Ab die Tonne, on joue des cartes faces cachées, et il faut donc deviner ce que combinent vos adversaires. Il va encore y avoir quelques pisse-froids pour dire que c’est du hasard et que le hasard, ce n’est pas bien. Alors, bon, c’est peut-être un peu du hasard, mais c’est aussi de la psychologie, et le hasard c’est drôle, surtout quand on le mélange avec la psychologie. L’édition originale était très moche, mais une édition retravaillée et magnifiquement illustrée par François Bruel arrive bientôt, publiée par Lui-même, c’est à dire Philippe des Pallières.

verona

Council of Verona est un jeu de cartes minimaliste publié à compte d’auteur par Michael Eskue. Nous sommes donc à Verone, Romeo aime Juliette, Juliette aime Romeo, mais la politique – c’est à dire les joueurs – et les histoires de famille – encore les joueurs – s’en mêlent, et tout devient vite très compliqué, même avec juste 17 cartes, une de plus que dans Love Letter …. Les amateurs de Mascarade, Coup ou Love Letter devraient adorer le plus british des petits jeux à la japonaise. Une édition française est paraît-il en route, mais Romeo et Juliette en français, ce n’est plus vraiment Romeo et Juliette.

bang

Si vous êtes dans le petit monde du jeu depuis assez longtemps, vous ne pouvez pas ne pas connaître Bang!, l’un des premiers jeux de cartes à personnages secrets, dans lequel les hors la loi doivent descendre le sheriff protégé par ses adjoints. Bang, avec ses nombreuses cartes et ses règles parfois tarabiscotées, avait un peu vieilli, mais il nous revient en jeu de dés. Bang!, le jeu de dés, reprend le thème et les personnages de Bang! et les mélange à un jeu de dés de style Yam’s. Et ça marche – on y retrouve toutes les intrigues et les duels au revolver du jeu de cartes, dans un format plus simple, plus léger, plus rapide.

wink
Wink!, de Fred Krahwinkel, est un jeu de cartes surprenant- un jeu où vous devrez faire des clins d’œil à vos partenaires sans vous faire repérer. Mon amie Stéphanie, de Letheia éditions, a eu une excellente idée en ressortant ce jeu d’ambiance qui ne ressemble à aucun autre.

clusterfuck

Plus osé que les clins d’œil, les sextos – Clusterfuck est un jeu de cartes dans lequel les joueurs s’envoient des messages coquins (voire franchement obscènes) sous la forme de cartes, tentant de constituer des couples assortis, voire de réussir un plan à trois sans se faire repérer, ce qui vaut une victoire immédiate. Clusterfuck, disponible en téléchargement, n’est sans doute pas du meilleur goût, mais cela n’est guère étonnant venant des auteurs de Cards against Humanity.

tralala

Tralala, de Frédéric Morard, publié par Superlude, est un pur jeu d’ambiance, dans lequel, par un système de draft, chaque joueur doit  les joueurs utilisent un système de kraft pour mettre bout à bout des morceaux de phrases et constituer un tube des années soixante-dix ou quatre-vingt. Bien sûr, après, il faut chanter…. C’est débile, mais c’est très, très, très drôle.

shinobi

Shinobi WAT-AAH !, de Théo Rivière, est un jeu de cartes extrêmement chaotique, mélange de rami et de bataille dans lequel toutes les cartes ont des effets spéciaux, généralement assez violents. Certains clans permettent de détruire des cartes adverses, de voler des cartes adverses, d’échanger des cartes avec des cartes adverses, etc.… Des très nombreuses variations sur le rami, Shinobi WAT-AAH est l’une des plus sophistiquées, des plus chaotiques mais aussi des plus intéressantes,

bigdeal

Il y a des éditeurs suicidaires. Schmidt a donc fait tout ce qui était possible pour que The Big Deal, petit jeu de cartes de Brent Beck, passe inaperçu, avec un titre idiot et déjà utilisé une dizaine de fois et une boite qui ne donne vraiment, vraiment pas envie. À la lecture des règles, ça a l’air idiot. On pioche des cartes, on essaie de faire des paires. Mais dès que l’on joue, on découvre que c’est bien marrant, car on peut aussi tenter de chiper les cartes de ses adversaires, qui peuvent se défendre, etc…. Cela devient donc un jeu avec pas mal de chance, beaucoup de méchanceté, mais aussi un peu de bluff, un peu de de prise de risque, et un peu de mémoire si on s’amuse à compter les cartes. En fait, c’est un peu comme la version ultralight de Shinobi WAT-AAH, et c’est diablement addictif.

francis drake

Bon, tout ça, ce sont des petits jeux. Et les gros, me direz-vous ? Les gros, les jeux de plusieurs heures avec des dizaines de pages de règles, je n’y joue plus guère, et il m’arrive de le regretter un peu. Celui qui me tente en ce moment, c’est Francis Drake. J’ai assisté à une partie, qui avait l’air passionnante. Je m’en suis donc procuré une boite, et j’espère bientôt l’essayer – si je trouve les joueurs.


v314-shaman

TIt’s the time of game lists and awards, and I’m a bit skeptical when reading the recommendations of the Spiel des Jahres jury – at least when it comes to games I’ve played. So here comes a completely different list of  games I’ve recently enjoyed. These might not be the best games of the year, but they are games you will probably enjoy if you like my own designs. Also, most of them either have a nice and friendly author or publisher, either went unfairly under radar so far. 

tonne

Ab in die Tonne probably means something like « into the Trash ». This light double-guessing game was designed by Carlo Rosi and published by Abacus – one of my favorite German publishers, even when they did not publish any one of the many designs I submitted to them. But let’s go back to the trash, and the stuff we will toss into it – milk cartons, tin cans, wine bottles and apple cores. Of course, the goal is to put as much garbage as possible into it, and to have the other players take it out when it’s full. This is done with a double-guessing card system to determine who will play first and how many items he can put into the tin, and some dexterity in placing the wooden items so that they don’t fall out. An educational game for the whole family….

romansgohome

I have already written here of Eric Vogel’s Romans Go Home. A new, and much nicer looking edition of it is coming, published by Lui-même, meaning by my friend Philippe des Pallières. Romans Go Home is a chaotic auction game – a genre I always like – in which rival caledonians clans are vying to destroy the most roman forts. Like in Ab die Tonne, bidding cards are played face down, so some sad guys will argue that it’s random, and therefore bad. Well, it might be somewhat random, but let’s say it’s psychology, so it will sound more serious and acceptable. And, well, the randomness / psychology mix is always fun.

verona

Council of Verona is a minimalistic card game self published by Michael Eskue. The action takes place in Verona, Juliet loves Romeo, Romeo loves Juliet, and then everything becomes more complex than necessary because of politics – meaning players – and family affairs – meaning players as well. There’s much intrigue here for just 17 cards, only one more than in Love Letter. Players of Mascarade, Coup or Love Letter will love Council of Verona, the most British of all Japanese style games.

bang

If you are into card games for ten years or more, you have certainly played Bang!, one of the first hidden characters games, in which outlaws must kill the sheriff, who is protected by his two deputies. Bang!, with his many cards, intricate rules and too many expansions was showing its a. It’s back as a dice game, and the new version is much better. It has the same setting and characters as the original card game, but these are now mixed with a yathzee style dice game. It has all the intrigues and gunshots of the card game, but in a lighter, faster and simpler format.

wink

Fed Krahwinkel’s Wink, republished in France by my friend Stéphanie, of Letheia,is a game like no other. It’s all about winking at their partners without getting caught by other players. The first German edition, more than ten years old, had poor graphics. The new one looks really great.

clusterfuck

You can go for something more risqué with Clusterfuck, a card game in which player pass each other sexy notes in order to hook up with a partner, or get an instant win for arranging a discreet threesome. Clusterfuck is an incredibly fun card game designed by the authors of Cards against Humanity – a token of good taste – and can be downloaded for free.

tralala

Tralala, designed by Frédéric Morard and published par Superlude, is a zany party game in which players draft a hand of sentences to write the lyrics of a song, and then sing it. Unfortunately, there’s no English version and it’s extremely language dependent.

shinobi

Shinobi WAT-AAH ! is an extremely chaotic game, kind of mix of War and Rummy with violent card effects thrown in. Some clans destroy opponent cards, some steal them, some swap them, so there’s always something happening with your display. Of the many rummy-like games published these twenty last years, Shinobi WAT-AAH is one of the most sophisticated, the most chaotic, but also the most challenging.

bigdeal

Some publishers are suicidal. Cover your A$$ets might not have been the most elegant title, but at least it was fun. It has now an international edition with the completely bland title « Big Deal ». The ugly red box doesn’t help either. The rules don’t sound much more exciting – draw cards, play pairs. But once you start playing, you discover that this is incredibly fun, because you not only play pairs in front of you, you can try to steal pairs from your opponents, who can defend them with cards of the same suit. So, there’s indeed much luck, but also much nastiness, some risk taking, some bluffing, some card counting, and some more nastiness. This feels a bit like the ultra-light version of Shinobi WAT-AAH, and it’s a great game both for young kids and adults.

francis drake

There are no heavier games in bigger boxes in this list. I don’t have many opportunities to play games several hours long and with dozens pages of rules,, but I miss them a bit.  The one I’m a bit excited about at the moment is Francis Drake. I’ve watched a game of it, and it looked very original and multifaceted. I got myself a copy afterwards, and I’m really eager to play it one of these days. – if I can find players

Livres, jeux et tablettes
Books, games and tablets

Mammouths - carte 1

Depuis que j’ai acquis un Kindle, je ne lis plus guère que des livres au format électronique. La liseuse est plus légère que le livre, surtout quand, comme moi, on lit surtout des pavés de quelques centaines de pages. Elle ne perd jamais la page, elle fatigue moins les yeux, elle permet de prendre des notes, de voyager avec sa bibliothèque et de passer en deux clics d’un livre à un autre.
J’ai pourtant bien du mal à me mettre aux jeux sur écran, que je pratique très rarement. Même les jeux hybrides, très à la mode en ce moment, où l’on déplace sa figurine sur l’écran d’une tablette, ne parviennent ps à m’enthousiasmer.

Je me suis donc demandé quelle était la différence, d’où venait mon attachement à l’objet jeu, à la boite en carton, et ma relative indifférence à l’objet livre, aux pages de papier brochées ou reliées.
L’objet réel de la lecture n’est pas le livre, c’est le texte. La preuve en est que si je me sens toujours un peu mal à l’aise à l’idée de lire un livre en traduction, ce que je fais pourtant bien souvent faute de parler le russe, la japonais ou le chinois, je n’ai aucun scrupule particulier à lire sur un écran. Le livre traditionnel n’est que l’un des supports possibles du texte. Il représente un progrès sensible par rapport aux rouleaux de parchemin et aux tablettes d’argile, mais je ne vois aucune raison d’avoir pour lui un attachement fétichiste quand une liseuse, malgré quelques défauts, permet dans l’ensemble une lecture plus facile. Les livres qui ne se prêtent pas au portage sur liseuse sont ceux, peu nombreux, qui sont de réels objets, des albums de pop-up à l’excellent « House of Leaves » de Mark Z. Danielewski.

L’objet réel du jeu n’est pas non plus la boite, les cartes, les pions et les dés. Ce sont les règles, et les interactions qu’ils génèrent entre les joueurs. Or il me semble que, pour l’instant, l’informatique ne permet pas d’accéder à ces règles et de représenter ces interactions avec autant de clarté que le carton, le bois, et occasionnellement le plastique – du moins si l’on conserve les mêmes règles. Il n’y a rien de plus frustrant que les adaptations sur écran de jeux de société en boite, et même les mieux réalisées, comme celle des Aventuriers du rail, ne m’ont retenu que quelques jours.
Si tablettes et ordinateurs sont de médiocres supports pour les jeux qui n’ont pas été conçus pour eux, ils permettent en revanche la création de bien des jeux qui auraient été impossibles sans eux, et même l’apparition de nouvelles manières de jouer. Nous avons alors d’autres règles, d’autres interactions, assez différentes de celles deux jeux classiques et c’est ce qui explique le succès de bien des jeux en ligne, qui ne sont en rien des jeux de cartes ou des jeux de plateau sur écran (Hearthstone est ici l’exception qui confirme la règle).

Ma seule objection de principe au support informatique pour les jeux est qu’il encourage plutôt à jouer chacun chez soi, seul ou en réseau, et est donc un peu moins social que le jeu sur table. Rien n’oblige cependant à ce qu’il en soit toujours aussi. Il existe des jeux sur tablette nécessitant d’être ensemble et générant de sacrées interactions, comme l’excellent Space Team. Je me suis moi-même mis à réfléchir, ces dernières semaines, à deux jeux devant être joués l’un avec un téléphone, l’autre avec une tablette. Ce sont des jeux de société, puisqu’ils demandent aux joueurs de s’asseoir autour d’une même table, de se regarder, de se parler, mais ils se jouent avec une tablette ou un téléphone, comme d’autres avec des pions ou des cartes.

Bref, si la liseuse renouvelle la lecture, elle ne révolutionnera sans doute pas le livre – entendu au sens de texte. À l’inverse, tablettes et téléphones ont déjà commencé à révolutionner le jeu, mais ne changeront sans doute pas la manière dont je joue aux Aventuriers du rail ou aux Colons de Catan. Je ne suis peut-être pas si mécontent que cela que la version numérique de Citadelles ait pris une dizaine d’années de retard….


Mammouths - carte 3

Since I bought a Kindle, I read most of my books in electronic format. E-readers are lighter than books, especially when, like me, you read mostly massive tomes several hundred pages long. It never forgets the last page, it’s less tiring for eyes, it makes taking notes and jumping from a book to another much easier, it even allows me to travel with a whole library.  

Surprisingly, since I’m far from being a luddite, I play very few digital gamest. Even the trendy hybrid games, where players move a plastic miniature on their tablet screens, leave me cold.

I’ve tried to understand why I still feel bound to physical games, with meeples in a cardboard box, and not to good old paper books, be they soft or hardcover. I think the main reason is that the true object of reading is not the book, but the text. The best proof is that, while I have no problem reading an old book on my kindle, I still feel uneasy every time I read a translation, something I unfortunately have to do regularly since I can’t read Russian, Japanese or Chinese in the original text. Paper books are only one of the possible format for text. They are much more efficient than parchment scrolls or clay tab The only books that can’t really be read on an e-reader are the few ones which are more object than text, ranging from pop-up albums to Mark Z. Danielewski’s House of Leaves.     

Similarly, the object of gaming is not the box, the cards or the dice but the rules and the interactions they create between the players. The problem is that, so far, these rules and interactions usually cannot be smoothly and efficiently implemented digitally. Digital portings of physical boardgames feel frustrating, and even the best designed ones, like Ticket to Ride, didn’t get me hooked for more than a few days.

On the other hand, while tablets and phone are poor medias for games that were not designed initially for them, they make possible many new games, even complete new ways of gaming, that could not be achieved in the pure physical world. They have different rules, different systems, different kinds of interaction – they are tablet games or computer games, not card or boardgames on a screen. OK, Hearthstone might be an exception.
My only caveat on digital games is that they usually encourage solitaire gaming, at home. There is interaction in online games but, most times, players are not facing each other, and computer games tend to feel less social than boardgames. This trend, however, is not a necessity, and there are some digital games that require strong social interactions and physical proximity, like the fabulous Space Team. Last weeks, I’ve started to think of two digital game designs, one using a tablet and another one using a smartphone. Both feel like boardgames, since players have to sit around a table, to talk, to look at each other, but they cannot work without a digital device.

E-readers will certainly revolutionize reading, but most books will stay the same – just text. Computers, tablets and phones have already changed what tai play Ticket to Ride or Settlers of Catan. And may be it’s not that bad that the online version of Citadels is almost ten years late.

L’école et l’Europe
Europe at school

Il n’y a pas plus européen, pro-européen, pan-européen que moi, même si ce n’est pas avec le même enthousiasme qu’il y a une vingtaine d’années – peut-être parce que j’aimerais une Europe des lumières et pas une Europe des nations. Les lumières, c’est joli et sympa; les nations, c’est moche, bête et méchant.
Je devrais être rassuré en feuilletant les programmes et les manuels scolaires de lycée, très favorables à l’idée européenne, mais je suis effaré – surtout lorsque je dois les utiliser. En économie, histoire, géographie, sociologie, l’Europe est abordée sans cesse, les mêmes fausses évidences rabâchées d’année en année, avec une finesse digne de la propagande stalinienne. Ce bourrage de crane, dont les élèves ne sont pas dupes, ne peut à terme que les dégoûter d’une idée européenne qui, me semble-t-il, serait encore en mesure de supporter l’intelligence, la réflexion, la subtilité et pourquoi pas la discussion.
Ceux qui définissent les programmes scolaires, ceux qui rédigent les manuels, oublient une règle d’or de l’enseignement – il ne faut jamais prendre les élèves pour des cons. Ils le sont parfois, mais c’est loin d’être une règle générale.


No one feels more european, pro-european, even pan-european than me, even when I might be less enthusiastic than twenty years ago – may be because I’d rather have the Europe of the enlightenment than the Europe of Nations. Light is nice and cute, nations are ugly, dumb and nasty.
I should feel reassured when browsing school curricula and schoolbooks, all very pro-european, but I’m aghast. In economics, history, geography, sociology, Europe comes back almost every year, in every syllabus, as an evidence that should not be discussed, like historical materialism in stalinist schoolbooks. Students are not fooled by this cramming, whose most likely effect will be to put them off all things european. It’s shame, because I’m sure European ideas can still stand thought, subtlety and even discussion.
Those who write curricula and schoolbooks forget a golden rule of teaching – never talk to students like they’re dumb. They might be, sometimes, but it’s far from being a general rule.

Éléphants de guerre, éléphants de course
War elephants, race elephants

pic207233_mdpic9880_md

Les jeux ne sont pas, ou très rarement, des simulations. Ils fonctionnent cependant presque toujours à l’aide de métaphores assez simples qui permettent de faire le lien entre thème et mécanismes. Les plus fréquentes, mais pas les seules, sont celles de la guerre et de la course. Une partie de go ou d’échecs sera décrite en termes militaires, un jeu de pli sera vécu comme une succession de batailles – et le plus simple d’entre eux en tire d’ailleurs son nom. Le jeu de l’oie est décrit comme une course, et les deux métaphores peuvent se mêler au backgammon, tout à la fois course et bataille.
Les choses sont un peu plus complexes dans les jeux de société modernes. On peut notamment repérer au moins une nouvelle métaphore majeure, celle de la croissance, du développement, de la construction, illustrée notamment par les colons de Catan ou les Aventuriers du rail. Les jeux décrits comme un affrontement, qui sont loin d’avoir tous des thèmes guerriers, restent très nombreux. Les jeux de course sont en revanche passés de mode, et sont parfois traités avec condescendance, comme s’ils étaient réservés aux enfants.

Je le regrette. Mes raisons ne sont pas politiques. J’ai pratiqué suffisamment de jeux ouvertement guerriers, avec des dragons mais aussi avec des tanks et des avions, pour savoir que la métaphore, même appuyée, n’est en elle-même ni coupable, ni dangereuse.  La raison est technique : la course permet de créer entre les joueurs une tension et une compétition assez différentes de celle que créent les jeux d’affrontement direct. On ne se bat plus contre l’autre, on essaie d’aller plus vite, de passer devant. Cela ne signifie absolument pas l’absence d’interaction; on peut faire la course en se tirant dans les pattes ou, pour ceux qui trouvent l’expression un peu violente, en se mettant des batons dans les roues. Mes jeux de course préférés, comme Ave Cesar, ou La Poursuite en Ballon, sont d’ailleurs des jeux assez méchants, et il en va de même de mes créations – China Moon où l’on peut déplacer les grenouilles adverses, Pony Express où l’on peut bluffer sur son jet de dés, Lost Temple avec ses personnages inspirés de Citadelles. Dans Formula E, tous les joueurs peuvent déplacer les vaches sacrées pour bloquer le passage des éléphants, et les pachydermes n’hésitent pas à se pousser et se bousculer.

Card_Move_5Gpic1502976_md

Si Formula D était un jeu de courses de voiture, Formula E est donc un jeu de courses d’éléphants. Pas de dés, tout se passe avec des cartes, permettant de faire avancer ses éléphants plus ou moins vite, mais aussi de déplacer les vaches sacrées, de faire intervenir une souris pour effrayer un éléphant adverse. Il y a aussi des cartes Sadhu, tigre, charmeur de serpent et même tapis volant, chacun permettant quelques entourloupes et déplacements imprévus. C’est ce que l’on appelle généralement un jeu « familial » – expression de plus en plus inadaptée puisque les jeux « familiaux » sont le plus souvent joués entre amis -, un jeu aux règles simples, très dynamique, mêlant chance et tactique.

Puisque c’est un jeu « familial », il ne supporte pas l’alcool, et l’éditeur a transformé la carte alcool de mangue – je ne sais même pas si l’alcool de mangue existe réellement – en un plus politiquement correct jus de mangue. Qu’importe, les joueurs ne se feront sans doute guère d’illusions quand ils verront leurs éléphants avancer en diagonale. De même, l’éditeur, Clever Mojo, a trouvé un peu trop méchant pour un contexte « familial » l’effet original du serpent, qui faisait diminuer de 1 le nombre de cartes piochées par un joueur à la fin du tour, et l’a modifié pour qu’il fasse défausser une carte après avoir pioché, ce qui est parfois avantageux. Je continuerai sans doute à jouer avec notre méchante règle d’origine.

Mais ce sont là des détails, car l’éditeur, en la personne de David MacKenzie, a fait sur ce jeu du très beau boulot. Il nous a largement guidés, Sergio, André et moi, dans la conception d’une extension dont je n’étais pas vraiment convaincu de l’utilité, et qui finalement, avec ses pistes boueuses et ses manguiers, renouvelle vraiment le jeu et s’avère très agréable. Les illustrations de Jaqui Davis, tout en pastels chauds et vifs, sont parfaitement dans l’esprit du jeu – notamment les éléphants peinturlurés de la couverture. Bref, ce jeu a mis bien du temps à venir, mais je suis très content du résultat.

Formula E, que j’ai conçu avec les auteurs brésiliens André Zatz et Sergio Halaban, est publié par Clever Mojo / Game Salute, un petit éditeur américain aux tirages modestes, et pas toujours bien distribué, et vous ne le trouverez donc peut-être pas dans votre boutique préférée – mais vous pouvez sans doute lui demander de se le procurer. Aux États-Unis, vous pouvez commander le jeu directement auprès de l’éditeur.

Formula E
Un jeu de Sergio Halaban, André Zatz et Bruno Faidutti
Illustrations de Jacqui Davis
3 à 6 joueurs – 60 minutes
Publié par Game Salute
Tric Trac      Boardgamegeek


pic320858_md 21421_3

Boardgames are usually not simulations, but the almost always use strong (and rough) metaphors which link the theme and the mechanisms. War and race are the most frequently used metaphors, though not the only ones by far. A game of chess or go is always described in military terms, while a trick taking game is seen as a succession of battles – and the simplest one is the game of war. Snakes and Ladders and the game of Goose are described as races, while Backgammon managesd to be both a race and a war.
Things are slightly more complex with modern boardgames. There’s at least one more major metaphor, that of growth, development, building, exemplified by Settlers of Catan or Ticket to Ride. Games described as a confrontation, a war – most of which are not about war – are still numerous, but racing games seem to be out of fashion, and are usually treated with some condescension by so-called « hardcore gamers », as if they were necessarily childish – and they are not.

It’s a shame. Not for political reasons – I’ve played enough war games, mostly with dragons but sometimes with tanks, to know that the metaphor, even when a bit heavy, is in most cases innocent and harmless – but for technical reasons. RacePlayers do not fight one against the other, they try to go faster, to overtake one another. This doesn’t mean there’s no interaction – players can also block or hinder one one another. We have two French proverbial expressions to express this idea, I don’t know if they work in English or have some English equivalent – to shoot in each other’s legs, and to put sticks in each other’s wheels. My favorite race games, Ave Caesar and The Great Balloon Race, are quite nasty, and so are my own designs. In China Moon, one can move opponents’ frogs; in Pony Express, one can bluff his dice roll; the characters in Lost Temple have the same kind of interaction as the ones in Citadels. In the last one, Formula E, all players can move holy cows to block the other players, and pachyderms jostle and push one another.

Card_Move_8Ppic1986761_lg

Formula D was a car racing game, Formula E is an elephant racing one. No dice, the game is played with cards with various effects. Some move one’s elephant forward, slower or faster, but some can move these pesky holy cows, or call a mouse to frighten the pachyderm. There are even Sadhu, snake charmer or flying carpet cards, allowing for some unexpected moves and nasty tricks. Formula E is what is often called a « family » game – a increasingly wrongly named category since these games are more and more played among friends. This means a light and dynamic game, with simple rules, and with an even mix of luck and tactics.

Since it’s a family game, it’s also a dry one, and the publisher changed the mango spirit card into mango juice. Anyway, the players won’t be fooled when their elephants will start moving diagonally. For similar reasons, the Clever Mojo guys also thought that the original effect of the snake, which reduced by one the number of cards drawn at the end of one’s turn, was too nasty and changed its effect for something much lighter. Now, it only make its target to discard a card after having drawn, which is sometimes a good thing. I’ll probably keep on playing our original evil rule.

These are really small details, and the publisher – namely David MacKenzie – made a great job with developping the game. He coached André, Sergio and me in designing the expansion track. I was skeptical about . And Jaqui Davis pictures, especially the cover art with these painted elephants. It took some time, more than we have wished for, but the result looks beautiful.

Formula E, a game I’ve designed with Brzailian authors André Zatz and Sergio Halaban, is published by Clever Mojo / Game Salute, a small US publisher, with low print runs and not the largest distribution, so you might not find it in your favorite shop. You can always order it directly from the publisher.

Formula E
A game by Sergio Halaban, André Zatz & Bruno Faidutti
Graphics byJacqui Davis
3 to 6 players – 60 minutes
Published by Game Salute
Boardgamegeek

Il y a aussi des éléphants de transport commercial. There are also freight elephants.

Il y a aussi des éléphants de transport commercial.
There are also freight elephants.