Diamant

diamant cover

Diamant est le deuxième jeu que j’ai conçu avec Alan R. Moon. Le premier, de l’Orc pour les Braves, a été totalement oublié, ce que je regrette parce qu’il était vraiment original et amusant. Le second, Diamant, paru en 2005, a remporté un certain succès. L’édition américaine, Incan Gold, se vend toujours bien, mais le jeu n’était plus disponible en français depuis quelques années. Après bien des vicissitudes, des hésitations et des retards, c’est donc Iello qui publie la nouvelle version française de Diamant, avec des illustrations du talentueux Paul Mafayon.

Diamant coverDiamant - Incan Gold - Cover

Diamant est ce que l’on appelait autrefois un jeu de quitte ou double, expression au charme un peu désuet qui laisse de plus en plus la place à celle, assez laide, de stop ou encore. Autrement dit, un jeu de prise de risque, un jeu où il faut savoir jusqu’où on peut aller trop loin.
Les grottes de Tacora, quelque part en Amérique centrale, sont connues de tous les aventuriers pour les trésors cachés laissés là par quelque civilisation précolombienne, mais aussi pour les pièges mortels et les animaux venimeux qui les protègent. Votre petite équipe d’explorateurs avides et sans scrupules a installé son camp devant l’entrée des cinq grottes, et va les explorer une à une, ramassant au passage tout ce que la lumière de vos torches fait briller. À chaque tour, vous devez choisir entre vous enfoncer plus profondément dans la grotte à la recherche de trésors oubliés, au risque de perdre ce que vous avez amassé jusque là, et rentrer prudemment – certains disent lâchement – au camp de base pour mettre vos précieux rubis et diamants à l’abri.

La grande originalité de Diamant par rapport à d’autres jeux de “stop ou encore”, comme Can’t Stop, Cloud 9 / Celestia ou même le très classique Blackjack est que les joueurs prennent leurs décisions simultanément. Une partie de Diamant n’est donc pas plus longue à huit joueurs qu’à trois, et vos choix doivent être guidés moins par les calculs de probabilité que par ce que vous devinez des décisions de vos compagnons et rivaux. C’est un jeu de psychologie plus que de statistiques.

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Je ne reviendrai pas en détail aujourd’hui l’histoire de la conception du jeu, que j’ai déjà raconté il y a quelques années ici, dans un post consacré aux précédentes éditions.

Le nouveau Diamant, qui paraitra cet été, reprend le meilleur des versions précédentes. On y trouve, comme dans le tout premier tirage de l’édition Schmidt, un plateau de jeu pour y placer les explorateurs rentrés au camp, de jolis pions aventuriers  en bois (enfin, je pense qu’ils sont jolis mais je ne les ai pas encore vus au moment où j’écris cet article), et des coffres pour mettre ses trésors à l’abri des regards. Certes, le plateau ne sert en principe à rien en termes de jeu, mais il met dans l’ambiance et permet bien des plaisanteries, raison pour laquelle j’ai insisté pour sa présence. Il y a aussi, comme dans l’édition Gryphon Games, Incan Gold, des trésors un peu particuliers car ils ne peuvent être divisés et partagés, les reliques. Surtout, le nouveau Diamant est joliment illustré par Paul Mafayon, qui revisite Indiana Jones dans un esprit cartoonesque et moqueur. Je n’étais pas vraiment fan des graphismes des deux versions précédentes, mais je trouve la nouvelle édition magnifique – je vous reparlerai donc un de ces jours du travail de Paul sur les illustrations.

Diamant
Un jeu de Bruno Faidutti & Alan R. Moon
Illustré par Paul Mafayon
3 à 8 joueurs – 20 minutes

Publié par Iello (2016)
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diamant cover

Diamant is the second game I’ve designed with Alan Moon. The First one, De l’Orc pour les Braves, went under radar and wasn’t even published in English, something I deeply regret because it was really original and great chaotic fun. Anyway, the second one Diamant, originally published in 2005, was more successful. The Us edition, Incan Gold, is still in print, but the game has not been available in Europe for years. It’s back, after lots of complications and delays, and the new French version is published by Iello, with graphics by the great artist Paul Mafayon.

Diamant coverDiamant - Incan Gold - Cover

Diamant is a double or bust game, a risk taking game in which the only question is to know how far one can go too far. The caverns of Tacora, somewhere in Mesoamerica, are known for their wealth, for the jewels and artifacts buried there by some ancient pre-Columbian civilization, but also for the venomous animals and deadly traps guarding them. Your small team of adventurers has set camp near the entry of five hidden caves, and plans to explore them one after the other, taking back anything that shines in the light of the torches. Every round, players must whose whether to move forward, deeper into the cave, looking for more treasures at the risk of losing all they gathered so far, or to walk back prudently – some would say cowardly – to the safety of the camp in order to secure their rubies and diamonds.

What makes Diamant different from most other double or bust games, such as Can’t Stop, Cloud 9 or even good old Blackjack, is that player’s decisions are trade simultaneously. That’s why a game of Diamant doesn’t last longer with eight players than with five, and why choices are based more ion double guessing opponents than on probabilities. It’s more a game of psychology than of statistics.

diamant belierdiamant relique

I won’t write again the whole history of the game design, since I’ve already told most of it in an older blogpost about the former editions of this game.

The new French edition of Diamant, coming this summer, has the best features from all versions. Like the very first European print run, a camp board to place the explorers who leave the caves; this has no real use in the game, but it’s really good for in game jokes and puns. It has nice explorer wooden meeples – well, I assume they’re nice, since I’ve not seen them yet – and cardboard chests to hide one’s gems. It also has, like the US edition Incan Gold, artifact cards, special treasures which cannot be divided among players.
Most of all, the new Diamant has been illustrated by the talented French illustrator Paul Mafayon, who revisits the Indian Jones mythos in a cartoonesque style. I was not enthralled by the graphics of the former editions, I really love the new ones. One of these days, I’ll write a longer post about Paul’s work on Diamant.

Diamant
A game by Bruno Faidutti & Alan R. Moon
Graphics by Paul Mafayon
3 to 8 players – 20 minutes

Published by Iello (2016)
Boardgamegeek

Le traître, le regard neuf et le bouillon de culture
The Traitor, the Fresh Look and the Petri Dish

Bruno grand shaman

J’ai récemment eu sur Facebook, dans les commentaires d’un lien vers cet article, quelques échanges avec Frédéric Henry, l’auteur, entre autres, de Timeline et de Conan. Fred, qui n’était pas d’accord avec l’article, expliquait qu’il jouait finalement assez peu aux jeux de société, et ce en partie pour éviter d’être trop influencé, afin que son travail reste une véritable création. À l’inverse, je revendiquais le fait de jouer un peu à tout, à de nombreux jeux différents, parce que j’aime cela mais aussi parce que cette culture ludique me servait dans des créations pour lesquelles je n’hésite pas, à l’occasion, à reprendre ici ou là une idée ou un mécanisme. Les deux démarches sont sans doute aussi légitimes et efficaces l’une que l’autre, et je ne suis même pas sûr qu’elles débouchent sur des jeux très différents.
Ce débat est assez spécifique au monde du jeu. J‘ai du mal à imaginer un musicien déclarant ne rien écouter d’autre que ses propres œuvres pour ne pas être influencé. En littérature, j’ai cherché un peu. J’imaginais que des auteurs comme Flaubert ou Houellebecq auraient pu ne pas s’intéresser à leurs médiocres contemporains, mais je me trompais. Je n’ai trouvé qu’un seul écrivain, Normal Mailer, qui affirme ne pas lire d’autres romanciers, pour quelques milliers se vantant de leur vaste culture littéraire et de leur frénésie de lecture.

Bref, j’emprunte, je recycle. Pas toujours, pas systématiquement, jamais entièrement, mais quand même assez souvent. J’essaie, quand mes sources sont conscientes car elles ne le sont pas toujours, de les citer. Mon dernier jeu paru, Waka Tanka, s’inspire du jeu traditionnel du menteur (Bullshit pour les américains), comme le Roi des Nains s’inspirait du Barbu. En ce moment, je réfléchis sur la Bataille. Mystère à l’Abbaye n’existerait pas sans le Cluedo, Novembre Rouge doit beaucoup aux Chevaliers de la Table Ronde et un peu à Thèbes, Mascarade emprunte aux Loups Garous et à un jeu japonais peu connu, Warumono – mais pas à Complots, paru alors que mon jeu était déjà terminé. Isla Dorada, mais c’est un cas très particulier, a été d’emblée conçu comme le regroupement de mécanismes empruntés à deux autres jeux, Ulysses et Elfenland; c’est moi qui ai fait le mélange, mais Alan Moon et Andrea Angiolini et Pier-Giorgio Paglia, sont crédités comme auteurs du jeu et touchent des droits d’auteur. Je pourrais continuer la liste, avec sans doute la moitié de mes créations – pour l’autre moitié, les influences sont aussi là mais plus vagues, moins conscientes et plus entrelacées. L’univers du jeu, comme celui de la littérature, me semble être et devoir être un monde de références, d’influence, d’écoles, de citations – ou le bon sens et l’amour du jeu, plus que la loi, fixent les limites à ne pas dépasser. Jusqu’ici, cela se passe d’ailleurs plutôt bien.

Je n’ai jamais envisagé de m’isoler délibérément du reste de la création ludique, comme le font des auteurs aussi différents que Reiner Knizia ou Frédéric Henry. Leur choix est sans doute courageux, mais il est aussi un peu triste, car il revient à refuser l’idée d’un véritable monde du jeu, d’un bouillon de culture ludique dans laquelle tous, joueurs, auteurs, éditeurs, critiques, baigneraient côte à côte, passant parfois d’un rôle à l’autre, comme c’est le cas dans la littérature ou la musique. il me semble en outre que le « confort moral » que peut entraîner ce refus de voir ce que font les autres, par peur d’en être trop influencé, se paie dans l’immédiat par une perte du plaisir de découvrir des jeux et de jouer, et peut à terme, paradoxalement, entraîner une moindre créativité et une forme de répétition.

MysteriumAgent Trouble

Mysterium et Agent Trouble, sont incontestablement deux des meilleurs jeux parus en 2015. Ils sont aussi profondément originaux, et ce peut-être parce qu’ils nous viennent d’Ukraine, c’est à dire de nulle part, d’auteurs inconnus qui, par la force des choses et non par choix, ne baignent sans doute pas comme moi dans la culture ludique de ces trente dernières années. CodeNames, l’autre grande nouveauté pour moi, est certes original mais conçu par un auteur blabchi sous le harnais et clairement inspiré de Taboo. Comme en littérature, il y a donc toujours à côté des yeux blasés flottant dans le bouillon de culture une place pour les regards neufs, une place de choix mais un peu marginale. Cette absence de culture ludique des auteurs venus d’ailleurs est néanmoins condamnée à ne pas durer – le succès les ouvre sur le monde, et leurs prochaines créations ne viendront plus de nulle part.
Je me demande parfois si les milliers de boites de jeu qui trainent sur mes étagères ne sont pas devenues un poids, si ma culture ludique un peu trop lourde et systématique n’est pas devenue un handicap qui m’empêche de prendre du recul, de faire des choses vraiment nouvelles. C’est peut-être ça la vieillesse. Mais c’est aussi cet ensemble de références qui me permet de faire ma cuisine et qui, paradoxalement, me contraint aussi à l’originalité, à ne pas refaire ce qui a déjà été fait, puisque je sais que cela a déjà été fait. D’ailleurs, il n’est pas rare que des amis auteurs, considérant que je connais un peu tout, ce qui est de moins en moins vrai, viennent me demander si leur projet de jeu ne ressemble pas trop à quelque chose d’existant.

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Je cite mes sources et revendique mes influences. Chiper un mécanisme ici ou là ne me gêne pas. Enfin si, il y en a un cas qui me gêne un peu. Citadelles est celui de mes jeux qui s’est le plus vendu, et m’a rapporté pas mal d’argent. L’un des mécanismes au cœur de Citadelles, celui qui génère le bluff et la tension, est le choix de la carte personnage par les joueurs, l’un après l’autre, dans une sorte de « draft à une carte ».

Ce système, je l’ai directement emprunté à un petit jeu de cartes de Marcel-André Casasola-Merkle, Verräter (Le Traitre), paru en 1998, deux ans avant Citadelles. Pour le reste, les jeux sont assez différents, Verräter étant un jeu d’alliances quelque peu fluctuantes pour trois ou quatre joueurs. À chaque tour un seul joueur, celui qui choisit le personnage du Traître, peut retourner sa veste et passer du clan de l’aigle à celui de la rose, ou l’inverse.

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Avec Marcel-André (à droite) il y a quelques années aux Rencontres Ludopathiques.

Verräter a été bien reçu, a remporté quelques prix, et le jeu, illustré par Marcel-André lui-même, est toujours disponible chez Adlung, éditeur allemand de petits jeux de cartes. J’ignore combien d’exemplaires en ont été vendus, mais certainement beaucoup moins que de Citadelles. Et, dans le monde du jeu, quand on pense aujourd’hui à ce mécanisme, c’est toujours à Citadelles, et à moi, que l’on pense, et non à Verräter et à Marcel-André. C’est un peu injuste.

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Le même système de choix de personnages a ensuite été utilisé par Hayato Kisaragi dans Marionette Kingdom, auquel je n’ai pas joué mais qui a l’air très intéressant.  Il est aussi au cœur de Mad Zeppelin, un jeu qui mérite malheureusement de rester oublié. C’est certainement dans Citadelles et non dans Verräter que leurs auteurs ont trouvé l’inspiration. J’ai pour ma part réutilisé ce système, sous une forme très proche de celles de Citadelles, dans un jeu de parcours plus simple et plus léger, Lost Temple.

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Je voudrais donc profiter de ce petit article pour faire une fois de plus un peu de pub à Verräter, un jeu bien fourbe peu connu hors d’Allemagne mais vendu avec des règles en anglais et en français, et qui plaira sans aucun doute aux fans de Citadelles.


Bruno shaman

I’ve recently had a discussion on Facebook with Fred Henry, the designer of Timeline, Conan and a few other games. We were commenting a link I had posted to this article about Stealing Game Mechanics. Fred plays relatively few boardgames by other designers, because he doesn’t want to be influenced by them and wants his games to be his authentic creations. I play lots of different games, because I have fun playing, but also because I think my large gaming culture helps me in designing games which indeed often borrow an idea or mechanism from one or more other ones. Both approaches are probably legitimate and efficient, and I’m not even sure they produce very different games.
This discussion is very specific to the calming world. I cannot imagine a musician claiming to listen only to his own works to avoid being influenced. I made some research on novelists. I was imagining that writers like Flaubert or Houellebecq could ignore the writings of their mediocre and despicable contemporaries, but I was wrong. I could find only one novelist claiming not to read novels in order not to be influenced by them, Norman Mailer, against thousands taking pride in their literary culture and reading frenzy.

I steal, I borrow, I recycle. Not always, not systematically, not entirely, but nevertheless quite often. My sources and influences are not always conscious, but when they are, I try to credit them. My last published game, Waka Tanka, is clearly a variation on the traditional game Bullshit, like The Dwarf King was a variation on the Queen of Spades. I’m now thinking on making something with War. Mystery of the Abbey would never have existed without Clue. Red November was inspired by Shadows over Camelot and borrows one mechanism from Thebes. Mascarade owes to Werewolves and to a little known Japanese game, Warumono – but not to Coup, which was released when my game was already designed. Isla Dorada is a very specific case, a game designed from the very beginning with mixing systems borrowed from two other ones, Ulysses and Elfenland. I made the mix, but Alan Moon, Andrea Angiolini and Pier-Giorgio Puglia are credited as co-designers. I could go on with more or less half of my games. For the other half, influences are still there but more vague, less conscious and more interwoven. It seems to me that the world of games, like the world of books, is and should be made of references, influences, schools, quotes, and that common sense, and not the law, should decide of the ethic limits. It hascdone well so far.

I never even imagined deliberately isolating myself from other designers’ games, like designers like Fred Henry, or even Reiner Knizia himself, claim to do. It’s certainly brave and difficult, but it’s also a bit sad, because it also means rejecting the idea of a swarming « gaming world », a petri dish in which gamers, designers, publishers, reviewers bath together and sometimes swap roles, like it happens in music or literature. I also think that the price to pay for this « moral comfort » is too high. It involves renouncing a good part of the fun of playing and discovering new games, and in the long run it can probably result in a more repetitive and less creative design output.

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Mysterium and Spyfall are clearly two of the best and most innovative games published last year. They are deeply original, and may be because they are arriving out of nowhere – which means Ukraine – by unknown designers who, by contingency and not by choice, probably do not bask in the gaming culture for decades as I do. The other great new game of 2015, Codenames, was designed by a veteran designer and is clearly inspired by Taboo. Like in literature, there’s always a place for for fresh looks, for autodidacts, a place both prominent and marginal. Of course, this lack of gaming culture cannot last. Success brings them into the gaming world, and their next games won’t come out of nowhere.

I sometimes wonder if the thousands of games which clutter my small Parisian flat have not become a nuisance, if they are not a dead weight preventing me from taking a step back, from having fresh ideas. May be that’s just getting old. On the other hand, this bumk of references is what allows me me to cook my own meals, and what prevents me from doing again what has already been done, since I know it has been done. Fellow game designers sometimes ask me if the prototype they are working on is not something which already exists.

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I name my sources and I’m proud of my influences. Stealing a mechanism here or there doesn’t bother me. Well, except in one case. Citadels is, by far, my best selling game, and made me good money. Its core system, the mechanic which delivers tension and bluffing opportunities, is the « one card draft » character selection.

This system was directly borrowed from an earlier small card game, Verräter (the Traitor), by Marcel-André Casasola-Merkle, published in 1998, two years before Citadels. The games are very different, but this common mechanic gives them a similar feel. Verräter is a game of unstable alliances for three or four players, in which every round only one player, the one who picks the traitor character card, can change team and move from the clan of the rose to the clan of the eagle, or vice versa.

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Marcel-André a few years ago at my Ludopathic Gathering.

Verräter was well received, got a few awards, and is still in print by Adlung, a German publisher specialized in small and cheap card games. I don’t know how many copies it sold, but certainly much less than Citadels. Furthermore, when people in the small gaming world think of the « single card draft character selection system », they always associate it with Citadels, and with me, and not with Verräter and Marcel-André, which is not fair.

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The same character drafting system was later used by Hayato Kisaragi in Marionette Kingdom, a game I’ve not played yet though I own a copy and it looks really interesting.  It’s also used in Mad Zeppelin, a game which deserves to be forgotten. In both cases, the inspiration was certainly found in Citadels and not in Verräter. Il also recycled this system, in a way very similar to the what I ahd used in Citadels, in a lighter racing game, Lost Temple.

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This was the point of this blogpost – make some promo for Verräter, a card game which is not much known outside of Germany. It has rules in French and English and, believe me, if you like Citadels you will like it.

Mission: Planète Rouge – Les illustrations d’Andrew Bosley
Mission: Red Planet – Andrew Bosley’s Graphics

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Une fois prise la décision de publier une nouvelle édition de Mission Planète Rouge, l’équipe de Fantasy Flight Games s’est trouvée face au même problème que celle de Cool Mini or Not pour Queen’s Necklace. Parce que le jeu a beaucoup changé, et pour que cette nouvelle édition soit vraiment perçue comme une nouveauté, il fallait de nouvelles illustrations qui fassent oublier les anciennes – ce qui était d’autant plus difficile que les dessins de Christophe Madura pour la première édition étaient superbes.

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La Couverture de l’édition Asmodée, en 2005

La première question qui s’est posée fut de savoir si le jeu allait rester dans un univers Steampunk, comme la première édition, ou si l’on allait revenir à de la science fiction classique, comme dans notre prototype initial. Le choix qui a été fait est intermédiaire. L’univers reste Steampunk, avec des uniformes vaguement victoriens et des fusées à vapeur, mais le style graphique est beaucoup plus cool, tranquille, faisant moins appel aux codes un peu durs du genre que dans la première édition. D’une certaine manière, et j’ignore dans quelle mesure cela fut délibéré, l’univers graphique créé par Andrew Bosley pour ce jeu est une sorte de synthèse entre la thématique steampunk et le style des bandes dessinées et affiches des années soixante. Les geeks préfèreront sans doute les illustrations un peu violentes de l’édition Asmodée, les autres – dont je suis – apprécieront la légèreté de la version de Fantasy Flight Games (oui, je sais, c’est aussi Asmodée, mais c’est un autre débat et ce n’était pas prévu quand le travail a commencé sur cette nouvelle édition).

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Les quatre premières mises en scène proposées par Andrew Bosley, et quelques ajouts sur celle qui a été finalement choisie. Le logo de l’ancienne édition aide à visualiser la mise en page.
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Sur le croquis de gauche, on remarque l’ajout d’une échelle Art Nouveau du meilleur effet, et l’arrivée d’un véhicule d’exploration. Sur le premier essai de couleur, ce véhicule devient une charmante roulotte martienne.
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Mission Red Planet - cover
Le dessin définitif d’Andrew Bosley, travail réalisé entièrement sur ordinateur, et la couverture finale. Il aurait aussi mérité son nom sur la couverture.

Outre la thématique punk à vapeur, il est un autre point commun aux illustrations des deux éditions, le choix d’une dominante rouge, que ce soit pour la boite, les cartes ou le plateau de jeu. J’avais personnellement insisté là dessus, et aurait même souhaité qu’aucun des joueurs n’ait de pions rouge ou oranges, réservant ces teintes à la planète rouge. Avec l’ajout d’un sixième joueur, je n’ai pas pu vraiment empêcher l’arrivée d’un joueur orange.

Andy Christensen, responsable du graphisme de Mission Planète Rouge chez Fantasy Flight Games a particulièrement apprécié travailler sur ce jeu. Le plus gros de son travail se fait sur des extensions de jeux existants, notamment les jeux de cartes, ou sur des univers bien balisées, genre Star Wars ou Game of Thrones, pour lesquels il a assez peu d’initiative. Sur un jeu comme Mission Planète Rouge, il pouvait faire appel à un illustrateur unique pour créer librement un univers cohérent. Et je suis très content qu’il ait choisi Andrew Bosley, que je ne connaissais pas, et dont le style parfois plus proche de la bande dessinée européenne que de l’illustration fantastique anglo-saxonne convient remarquablement bien à un jeu relativement sérieux, mais néanmoins simple et familial.

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Le scientifique de Christophe Madura, et les principales étapes de celui d’Andrew Bosley, des croquis initiaux eu dessin final.

Pour décrire son travail, je laisse maintenant la parole à l’illustrateur, Andrew Bosley :

Je n’ai pas joué à Mission: Planète Rouge avant de commencer les illustrations, mais j’aurais adoré le faire. J’ai approché ce travail un peu comme une couverture de livre. On m’a expliqué l’univers, l’intrigue, le but du jeu, mais nous n’avons pas discuté avec Andy des détails des règles et des mécanismes. Mon rôle comme illustrateur est de donner une réalité au jeu, de raconter l’histoire qui est derrière les actions des joueurs. Si le jeu est bon, l’histoire est déjà amusant, mais je peux la rendre plus excitante, plus prenante. Cela ne demande pas nécessairement de pratiquer le jeu, mais cela m’aurait sans doute influencé si je l’avais fait.

Si je n’ai pas joué au jeu, j’ai pu voir quelques unes des illustrations de l’édition originale, et je les ai adorées. Elles ont clairement influencé mon travail pour cette seconde édition. Dès le début de ce travail, nous avons étudié les illustrations de la première édition, et discuté des éléments de référence qui devaient apparaître dans mes dessins, notamment le style, la forme, l’allure des fusées. Je n’ai pas reproduit les dessins d’origine, mais je pense avoir conservé un peu de leur esprit.

Notre méthode de travail sur Mission: Planète Rouge était très simple et claire. Pour chaque scène ou personnage, j’essayais de proposer plusieurs options, plusieurs croquis. L’éditeur en choisissait une et, après quelques révisions, nous arrivions au dessin final. Toit au,long de ce travail, je sentais qu’Andy Christensen voulait vraiment faire de ce jeu quelque chose d’extraordinaire. Son excitation était contagieuse. Ce fut un fantastique projet, et j’ai hâte de recevoir ma copie.

Le look d’un jeu, ce n’est pas seulement les illustrations, les dessins, c’est aussi la maquette, les icônes, les logos – tout cela, c’est Samuel Shimota qui s’en est occupé, en respectant parfaitement le style un peu fifties, un peu steampunk, un peu art nouveau aussi, des dessins d’Andrew Bosley.

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Restent les pions, qui ont fait l’objet de bien des discussions. Le premier prototype réalisé en interne par FFG utilisait des petits pions empilables en plastique, empruntés à Novembre Rouge. Je les trouvais mignons et parfaitement adaptés avec leur boule ressemblant à un casque de scaphandre. J’étais donc un peu réticent lorsque l’équipe américaine a proposé de les remplacer par ce qui est la spécialité, la marque de fabrique de FFG, des figurines, et ce bien que les figurines coûtent un peu plus cher. Mais, bon, tout le monde, y compris l’autre Bruno, était contre moi et je me suis finalement incliné. Les figurines, jolies, pas trop sérieuses et très colorées, sont bien dans l’esprit du jeu, et aujourd’hui je ne regrette plus vraiment les petits pions brillants.

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Un grand merci encore à Andrew Bosley, mais aussi à tous ceux qui, chez FFG, ont travaillé à cette superbe nouvelle édition de Mission : Planète Rouge, et notamment Steven Kimball, Cynthia Hornbeck, Andy Christensen et Samuel Shimota.

Et pour en savoir plus sur le design du jeu, voyez ce que j’avais écrit pour la première édition, en 2008 ou 2009.

Mission : Red Planet (Mission: Planète Rouge)
Un jeu de Bruno Faidutti & Bruno Cathala
Illustré par Andrew Bosley
2 à 6 joueurs –
60 minutes
Publié par Fantasy Flight Games (2015)
Tric Trac         Ludovox          Boardgamegeek


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Once the decision to republish Mission Red Planet was taken, the FFG team faced the same problem as Cool Mini or Not with Queen’s Necklace. In order to make this game a real novelty, it had to use new graphics. What made this difficult is that they had to stand comparison with the first edition illustrations by Christophe Madura, which had been universally and rightfully praised.

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The original Asmodée edition cover.

The first question was wether the setting would be steampunk, like the first edition, or more classical science-fiction, like the first prototypes I had made with Bruno Cathala. The answer was a subtle compromise. It’s still steampunk, with vaguely victorian uniforms and steam rockets, but the graphic style is lighter, cooler, far from the rough codes of steampunk. I don’t know how deliberate it is, but the graphic world created by Andrew Bosley for this game looks like a synthesis of the steampunk theme and the sixties posters and european comics style. Geeks will probably prefer the original graphics of the Asmodée edition, while others – including me – will prefer the lighter shades of red of the Fantasy Flight Games edition (yes, I know, now it’s Asmodée too, but that’s another issue which arose after we had started working on this new edition).

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The four first set-ups suggested by Andrew Bosley, and on the right a more detailed sketch of the one which was chosen. The old edition logo is here to help visualize the box. 
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On the left sketch, a nice Art-Nouveau stairway has been added, as well as an exploration vehicle. It becomes a nice looking trailer on the first color sketch.
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Mission Red Planet - cover
Andrew Bosley’s final computer drawing, and the game box as published. He would have deserved his name on it as well.

The two editions of the game have the same steampunk setting, and the same color scheme, with cards, board and box all in shades of red and brown. It’s a point i always insisted upon, and I even would have preferred that no player had red or orange pieces, keeping these shades for the red planet. This hold until a sixth player was added and I had to accept orange pieces – but not red.

Andy Christensen and Samuel Shimota who worked on the art development and graphic design of Mission: Red Planet at Fantasy Flight Games, really enjoyed working on this game. New art is usually comissioned for expansions for living card games, or on licensed settings such as Star Wars and A Game of Thrones, all constrained settings where the style has already been firmly established. With Mission: Red Planet, they had a new setting for which Andy could hire a single artist to devise a consistent graphic universe. I’m extremely happy that he chose Andrew Bosley, whom I hadn’t heard about before, and whose subtle style, inspired both by American fantasy and by european comics, fits perfectly well a serious but light and family fare game.

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Christophe Madura’s explorer, and the evolution of Andrew Bosley’s one, from initial sketches to final pictures. A French saying is that “dogs always look like their masters”.

Here’s what Andrew Bosley has to tell about his work on Mission: Red Planet :

I didn’t play the game before starting on the designs, though I would have loved to.  The approach was much more like creating a book cover.  The back story for the original game was explained to me.  The “plot” and goals of the game.  But gameplay mechanics were not discussed at length.  I feel like my role as the illustrator is to give a reality to the game.  Tell the story behind the gameplay.  It’s already fun, but I can help it feel more inviting and engrossing.  Doing that doesn’t necessarily require playing the game, though it may have influenced it if I had. 

While I didn’t play the game, I did get to see some of the art from the original version, which I loved!  It had a significant influence on the direction I went in the newer version.  Early in the development, we reviewed the original art and discussed the iconic elements that were important to see in my designs.  Style of the ship and architecture were big parts of that.  While it didn’t replicate the old art, I believe it kept some of its spirit.

The process for working on Mission: Red Planet was fairly straight forward.  I tried to give the team several options to choose from for each scene/character.  They picked the direction to take and, after a revision process, we went to final art.  Throughout the process, I could tell that Andy Christensen really wanted to create something awesome with this game.  And that excitement was contagious.  It was a fantastic project to work on and I can’t wait to get my copy!

The way a game looks depends not only on the pictures, the actual illustrations, but also on the card and board designs, the logos, the icons… All this was made by Samuel Shimota, in a way that fits perfectly the slightly steampunk, slightly fifties, slightly art nouveau style of Andrew Bosley.

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The players tokens, the astronauts, were probably the most discussed issue. The first prototype made at Fantasy Flight with the final illustrations had stackable tokens like the ones used for tracking time in Red November. They were cute and shiny, with their upper half sphere shaped like a spacesuit helmet. I liked them a lot, and protested when I was told they will finally be replaced by miniatures – an FFG specialty – even when these miniatures were slightly more expensive. Since every one, including the other Bruno, preferred the miniatures, I gave up. In the end they are cute, cartoony, brightly colored and I don’t regret the basic plastic tokens.

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Once more, cheers to all those who worked on this great new edition of a classic game – Andrew Bosley, of course, but also the whole FFG team, and notably Steven Kimball, Cynthia Hornbeck, Andy Christensen and Samuel Shimota.

To learn more about the design process, read what I wrote in 2008 or 2009 when the first edition was published.

Mission : Red Planet
A game by Bruno Faidutti & Bruno Cathala
Graphics by Andrew Bosley
2 to 6 players –
60 minutes

Published by Fantasy Flight Games (2015)
Boardgamegeek

Raptor – Les illustrations
Raptor – The Graphics

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Je pensais que Raptor était mon premier jeu illustré par Vincent Dutrait, jusqu’à ce que lors d’une discussion, à Cannes je crois, celui-ci m’apprenne qu’il avait déjà dessiné le plateau de jeu et la boite de mon China Moon, en 1996, quand je n’étais pas encore très connu et qu’il n’était lui-même qu’un tout jeune dessinateur (on ne disait pas encore beaucoup illustrateur) débutant. Ceci dit, les illustrations de China Moon étaient déjà très chouettes.

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Vingt ans plus tard, il est un illustrateur reconnu, je suis un auteur connu, et il illustre donc Raptor, le petit jeu de plateau pour deux joueurs que j’ai conçu avec Bruno Cathala, ou plutôt que Bruno Cathala a conçu avec un peu d’aide de ma part. Et le résultat est impressionnant, délibérément un peu kitsch, avec une couverture façon affiche de film – mais film des années soixante, pour que le clin d’œil ne soit pas trop lourd – et des cartes au dessin assez réaliste.

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Il y a deux manières de faire travailler les illustrateurs dans le jeu de société. Souvent, l’illustrateur ne livre que des dessins bruts, et tout le travail de mise en page est fait en interne par l’éditeur. Plus rarement, et c’est le choix qui a été fait pour Raptor, et je crois celui que préfère Vincent, le dessinateur fait lui-même une partie de la mise en forme, ce qui suppose qu’il maîtrise les règles, et de préférence qu’il joue au jeu. Pour Raptor, Vincent a donc livré les cartes déjà montées, et dessiné jusqu’aux symboles représentant les actions des joueurs – enfin, heureusement que d’autres étaient derrière pour valider chaque étape, ce qui nous a permis d’échapper au symbole suivant, censé représenter – c’est évident – un scientifique effrayé qui s’accroupit dans les herbes hautes pour se mettre à l’abri.

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Interrogé sur le design des cartes, voici ce que m’a répondu Vincent : Pour les cartes j’ai trouvé très intéressant de travailler des sets asymétriques. J’ai poussé l’expérience jusque dans les habillages des cartes avec une ambiance plus jungle et « nature sauvage » pour les raptors et un design plus strict et « civilisé » pour les scientifiques. “ – et dire que je n’avais même pas remarqué, en effet, l’habillage différent des cartes, les bordures bien droites chez les scientifiques et irrégulières chez les raptors.

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Le dessin de couverture de Raptor, avec son relief saisissant, son raptor en colère, menaçant, prêt à bondir hors de la boite, est celui qui a entraîné le plus de discussions. Personnellement, j’aurais laissé passer sans le moindre instant de doute le premier dessin proposé par Vincent, mais l’équipe de Matagot l’a trouvé un peu trop léger, un peu trop cartoon pour un jeu finalement assez tactique et sérieux. Il fut donc demandé à Vincent d’atténuer le contraste entre des scientifiques très funs et des raptors plus réalistes – ce qu’il a fait avec brio. J’ignore cependant pourquoi la jolie blonde a, au passage, perdu ses lunettes.

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Raptor arrive bientôt, en septembre je pense, et j’espère que je n’aurais pas à attendre encore vingt ans avant de travailler de nouveau avec Vincent Dutrait.

Raptor    
Un jeu de Bruno Faidutti & Bruno Cathala
Illustré par Vincent Dutrait
2 joueurs – 30 minutes
Publié par Matagot (2015)
Ludovox          Tric Trac          Boardgamegeek
Le site de Vincent Dutrait


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I thought Raptor was my first game illustrated by Vincent Dutrait, until I learned from Vincent himself, at the Cannes game fair, that he had drawn the board and box of my China Moon, in 1996, as one of his first jobs, when I was still a little known game designer and he was a very young illustrator. He was certainly not as professional as he is now, but the cover and board of China Moon were really nice.

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Twenty years later, he is a well known illustrator, I am a well know designer, and he makes the graphics for raptor, a two player boardgame I have designed with Bruno Cathala – or rather Bruno Cathala has designed with some aid from me. The result is impressive, deliberately kitsch, with a cover looking like a movie poster from the sixties – a clever way to make a not so direct wink at a more recent movie – and cards in a rather realistic style.

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The illustrator can be involved in two very different ways in a game design. Most times, the illustrator just send the pictures he was asked for, and all the templates and prepress are done by the publisher. Sometimes, and that’s how Vincent Dutrait likes to work, , the illustrator also makes the card templates and the various game symbols and icons, and delivers an almost finished game mock-up. Well, it’s lucky we were checking the various steps, because that’s how we avoided the following symbol – obviously figuring a frightened scientist squatting in the high herbs to hide from the raptors.

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Let’s quote Vincent about the way he designed the cards : “Working on asymmetric card sets was very interesting. I went so far as to use slightly different templates to give a wild nature and jungle feel to the raptor cards, and a more clean and civilized look to the scientist ones.” Indeed, I had not noticed that the border lines were straight and clean on the scientist cards and irregular on the raptor ones.

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There were some interesting discussions about Raptor’s cover picture, with its angry and menacing dinosaur almost jumping out of the box. I would personally have validated Vincent’s first color drawing, but some at Matagot found it too light, too cartoony for what is a relative serious and strategic game. So, Vincent was required to soften the contrast between the fun and cartoonish scientists and the aggressive and realistic raptors. He did it, and the result is great – I only wonder why the pretty blonde lost her glasses in the way.

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Raptor arrives soon, next fall, and I hope I won’t have to wait twenty more years to have another game illustrated by Vincent Dutrait.

Raptor
A game by Bruno Faidutti & Bruno Cathala
Graphics by Vincent Dutrait
2 players – 30 minutes
Published by Matagot (2015)
Boardgamegeek
Vincent Dutrait’s website

Ludovox à Paris est Ludique

L’équipe du site lyonnais Ludovox était à Paris est Ludique et a tourné pas mal de petits reportages sur des jeux qui vont bientôt sortir. Voici donc les présentations de Warehouse 51, d’Argo, de Waka Tanka et de Raptor, ce dernier présenté par l’autre auteur, Bruno Cathala.

The Ludovox team came from Lyon to Paris est Ludique, and shot several short videos about upcoming games. Here are the presentations (in French, sorry) of  Warehouse 5, Argo, Waka Tanka and Raptor – the latter by Bruno Cathala.

 

 

 

 

Les Bruno sont de retour (III)
The Brunos are back (III)

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Deux rééditions, Mission : Planète Rouge et le Collier de la Reine, mais aussi un nouveau jeu pour deux joueurs, Raptor, sur lequel nous travaillons depuis plus de deux ans. J’en ai déjà conté l’histoire ici, il y a quelques semaines, mais les belles illustrations de Vincent Dutrait, que je viens de recevoir, sont l’occasion d’en parler à nouveau.

Dans une île paradisiaque, que l’on imagine quelque part dans l’océan Pacifique ou Indien, vivent des dinosaures « recréés » par l’homme à partir de leur ADN, comme dans Jurassic Park – dont nous ne savions pas qu’une suite était en préparation lorsque nous avons commencé à travailler sur ce jeu. Parmi eux, bien sûr, les rapides et féroces velociraptors.

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Sur l’île des dinosaures se trouve aussi une équipe de chercheurs, qui pensaient être là pour se livrer tranquillement à quelques expériences scientifiques. Car bien sûr, il y a un problème – une femelle raptor a brisé la grille de son enclos et a pondu ses œufs dans le parc. Un joueur joue donc l’équipe de scientifiques, qui doivent tuer neutraliser la maman raptor et capturer les bébés avant qu’ils ne se dispersent dans la forêt où nul ne pourra les retrouver. Son adversaire joue la femelle raptor et ses petits, qui doivent dévorer effrayer les scientifiques et parvenir à s’enfuir.

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Dans le parc se trouvent, en début de partie, maman raptor et ses cinq petits, tandis que quatre scientifiques arrivent sur les bords du plateau de jeu. Chaque joueur dispose de neuf cartes, numérotées de 1 à 9, ayant chacune un effet particulier. Les cartes permettent au joueur scientifique de déplacer ses hommes en jeep, de mettre le feu à la forêt, de déployer du gaz anesthésiant, voire d’héliporter des renforts. Le joueur raptor, quant à lui, peut rappeler les petits auprès de leur mère ou se cacher dans la forêt.

À chaque tour, les deux joueurs jouent une carte face cachée, puis la révèlent simultanément. Le joueur ayant joué la carte de plus faible valeur peut en appliquer l’effet, et son adversaire dispose ensuite d’un nombre de points d’action (mouvement ou attaque) égal à la différence entre les valeurs des deux cartes. Chacun connaissant les cartes de l’adversaire, ce petit système permet des calculs savants, mais aussi pas mal de bluff et quelques coups fourrés. Bref, c’est bien un jeu de Bruno Cathala, calculatoire et stratégique, et de Bruno Faidutti, subtil et méchant.

Raptor
Un jeu de Bruno Faidutti & Bruno Cathala
Illustré parVincent Dutrait
2 joueurs – 30 minutes
Publié par Matagot (2015)
Ludovox          Tric Trac          Boardgamegeek


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Two new editions, of Mission: Red Planet and Queen’s Necklace, but also a brand new two players game, Raptor, on which we are working for more than two years. I’ve already written a long history of this game here, a few weeks ago, but Vincent Dutrait’s gorgeous illustrations, which I just received, are a good opportunity to talk a bit more about it.

Dinosaurs, probably recreated by man from their DNA, live a paradise island, somewhere in the Indian or Pacific Ocean. Among them, of course, the fierce and fast velociraptors. This is more or less the storyline of the Jurassic Park movie, of course, but Bruno and I didn’t know a sequel was in the works when we started working on this game.

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There’s also on the island a team of scientists, who originally came here to carry out a few experiments on the dinosaurs, but now have to improvise a survival strategy after a pregnant female raptor escaped from her pen and laid her eggs in the park. One player controls the scientists who must kill neutralize the female raptor and capture the babies before they run wild into the forest where no one will ever find them again. The opponent controls mamma raptor and her hatchlings, who must get rid of the annoying humans and escape into the wild.

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The game starts with mamma raptor and the five hatchlings in the center of the park, while the scientists arrive at its extremities. Each player has nine cards, each with a value from one to nine and a special effect. The scientist cards allow for jeep movement in the park, for lightning fire, for using sleeping gas or even bringing reinforcements by helicopter. The dinosaur player’s cards can be used to call back hatchlings next to their mother, to extinguish fire, or to hide in the bushes.

Every round, both players play a face down card, and the cards are revealed simultaneously. The player who played the lowest value card can first use its effect. Then his opponent can spend as many action points as the difference between the values of the two cards for movement and attack. Since each player knows the cards left in his opponent’s hand, this makes for some tactical calculations, as well as some clever bluffing. Raptor is both a tactical brain burner by Bruno Cathala and a nasty little card game by Bruno Faidutti.

Raptor
A game by Bruno Faidutti & Bruno Cathala
Graphics by Vincent Dutrait
2 players – 30 minutes
Published by Matagot (2015)
Boardgamegeek

Les Bruno sont de retour (II) – Mission Planète Rouge
The Brunos are back (II) Mission Red Planet

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Mission : Planète Rouge, conçu en collaboration avec Bruno Cathala, a été publié en 2005 par Asmodée – vous pouvez lire ici une histoire de la conception de ce jeu et de sa première édition. Pour des raisons que l’on peu plus ou moins comprendre après coup, il n’a pas alors rencontré un grand succès. La synthèse entre jeu de majorité à l’allemande, aux règles assez simples, et jeu de cartes très thématique et très interactif à l’américaine, n’était pas encore à la mode. Le thème steampunk, choisi par l’éditeur, n’était pas aussi populaire qu’il l’est devenu depuis. Bref, ce jeu était en avance sur son temps. Il est vrai aussi que l’édition, avec son papier trop brillant, ses pions ridiculement petits, ses cartes qui collent et ses cartons qui se décollent, n’était pas à la hauteur des belles illustrations de Christophe Madura. Malgré un très bon accueil critique, l’édition française ne s’est pas vendue du tout, et l’édition américaine ne s’est pas vendue beaucoup. Pourtant, deux ans plus tard, les boites de Mission Planète Rouge, et plus encore celles de Mission: Red Planet, se revendaient à pris d’or, et sur les forums un peu ésotériques du boardgamegeek il était désormais présenté comme un classique, souvent comparé à Citadelles. Tout comme il y a huit personnages dans Citadelles, il y en a effet neuf dans Mission: Planète Rouge, Recruteur, Explorateur, Scientifique, Agent Secret, Saboteur, Femme Fatale (en français dans le texte), Agent de Voyage, Militaire et Pilote. Mais ce jeu est aussi un jeu de majorité, les personnages envoyant et manipulant des astronautes pour tenter de s’emparer des précieuses ressources de la planète nouvellement ouverte à l’exploitation minière.

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Version Asmodée, 2005

C’est au salon d’Essen, en 2013, que, au détour d’une conversation, John Grams, de Fantasy Flight Games me demanda si Bruno et moi avions récupéré nos droits sur Mission: Planète Rouge et serions intéressés pas une nouvelle édition. Il ne connaissait pas personnellement le jeu, mais plusieurs de ses revendeurs aux États-Unis lui avaient suggéré de s’y intéresser. Nous ne pouvions laisser passer cette chance, qui était aussi pour l’autre Bruno l’occasion de glisser un pied chez FFG, éditeur avec lequel il n’avait encore jamais travaillé.

Tout est ensuite allé très vite.
À Minneapolis, chez Fantasy Flight, où je passai quelques jours à l’été 2014, ce fut Steven Kimball qui prit en charge le développement de Mission : Red Planet – et je voudrais avoir toujours des chefs de projet aussi efficaces. Rien n’a changé dans les grandes structures du jeu, si ce n’est peut-être l’ajout de Phobos, lune de Mars qui joue le rôle d’une sorte de base de commandos parachutistes. Mais dans les détails, tout a été soigneusement reconsidéré, testé, réévalué, mission après mission, personnage après personnage, pour enrichir le jeu tout en préservant sa légèreté. En quelques mois, après de nombreuses et fructueuses discussion à trois, nous avions une nouvelle version du jeu, sur une carte de Mars largement repensée, et dans laquelle près de la moitié des cartes découverte et mission avaient été remplacées ou modifiées.

Mission : Red Planet
Un des premiers prototypes de la nouvelle version du jeu

On peut désormais jouer à six joueurs, et même à deux grâce à une variante de Bruno Cathala, sa spécialité – je ne l’ai même pas essayée, je lui fait confiance. C’est à la dernière minute, alors que les fichiers allaient bientôt être envoyés chez l’imprimeur, qu’un joueur me suggéra ce qui fut le tout dernier changement, qui ne modifie en rien les règles mais rend le jeu bien plus amusant, numéroter les personnages non pas de 1 à 9, mais de 9 à 1, créant une sorte de compte à rebours avant le décollage – et je n’en reviens pas qu’aucun d’entre nous n’y ait pensé plus tôt !

Si l’on reste dans l’univers Steampunk, le style graphique d’Andrew Bosley pour l’édition Fantasy Flight Games est bien éloigné des illustrations que Christophe Madura avait réalisées pour Asmodée – plus léger, plus BD, tout en nuances de beiges et de roux. J’aime beaucoup, et j’ai hâte de recevoir mes boites.

Je n’ai qu’un seul petit regret, j’ai toujours trouvé le titre Mission: Planète Rouge un peu ridicule. S’il ne tenait qu’à moi ce jeu s’appellerait Planète Rouge, ou tout simplement Mars. Comme il avait déjà acquis une certaine notoriété, il n’était pas possible d’en changer le titre pour cette seconde édition. Mission: Red Planet est donc de retour. Au dos de la boite, l’éditeur assure qu’il s’agit là de l’  « édition définitive d’un classique », et je pense qu’ils ne sont pas loin d’avoir raison.

Nous avons commencé le travail de développement de la nouvelle version de Mission Planète Rouge alors que je venais d’écrire mon analyse postcolonialiste des jeux de société, dont il aurait aussi pu être une bonne illustration – l’exploitation minière d’une lointaine colonie aussi vide que Catan. Je me suis donc amusé à rebaptiser « résistance indigène » l’une des cartes découvertes faisant perdre quelques astronautes aux joueurs. En écrivant « décoloniser Catan », je ne pensais pas que cet article, qui reçoit aujourd’hui à lui seul plus de visites que tout le reste de mon site, serait aussi discuté et qu’il me faudrait désormais justifier les thèmes de tous mes jeux. Je m’en sors assez facilement sur Mission : Planète Rouge, mais ça va être nettement plus dur pour ma prochaine annonce, dans quelques semaines ;-).

Mission : Red Planet (Mission: Planète Rouge)
Un jeu de Bruno Faidutti & Bruno Cathala
Illustré par Andrew Bosley
2 à 6 joueurs –
60 minutes
Publié par Fantasy Flight Games (2015)
Tric Trac         Ludovox          Boardgamegeek


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Mission : Red Planet, codesigned with Bruno Cathala, was first published in 2005 by Asmodée – you can read an older blogpost here that tells the story of the original design and its first edition. For various reasons, which are always easy to figure out after the fact, it was a near flop. The mix between a German-style majority game and an American- style interactive card game, something that is now commonplace, was then still a bit disturbing. The steampunk setting, chosen by the publisher, was still a bit too geeky. I must also admit that, despite great graphics by Christophe Madura, the edition was mediocre, with excessively glossy paper, sticky cardstock, and badly glued cardboard. Despite some rave reviews, the French edition of Mission : Planète Rouge didn’t sell, and the US Mission: Red Planet didn’t do much better. But two years later used copies of the game were selling at top dollar. Though few people had actually played the game, it was being called a classic on gamers’ websites such as BoardGameGeek, and it was often compared with my older Citadels. As there are eight characters in Citadels, there are nine in Mission: Red Planet: Recruiter, Explorer, Scientist, Secret Agent, Saboteur, Femme Fatale, Travel Agent, Soldier and Pilot. But it’s not a city-building game, it’s a majority game, in which players send astronauts to Mars in order to seize the valuable natural resources of a planet that has just opened up for mining and colonization.

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A nearly final prototype

At the 2013 Essen fair, I was having a casual talk with John Grams of Fantasy Flight Games. He asked me if Bruno and I had got our rights on Mission: Red Planet back, and if we would be interested in a new edition. He hadn’t actually played the game, in fact didn’t really know the game, but some of his US resellers had inquired about it and suggested it would be a great idea to republish it. Of course, neither of us could miss the opportunity -,especially not Bruno Cathala, who had not yet worked with Fantasy Flight.

Then everything happened very fast.
In summer 2014, I spent a few days at FFG headquarters in Minnesota, where Steve Kimball took charge of the development of Mission: Red Planet. I wish I could always work with such an efficient developer. The basic system of the game stayed unchanged, the only important new feature being the addition of the moon Phobos, from which paratroopers can be airdropped anywhere on Mars. But every detail of the game, every mission, character or discovery card was reconsidered, retested and fine tuned to make the game richer and better balanced while keeping its rhythm smooth and light. After a few months and long e-mail discussions between Bruno, Steven and I, we had a new version of the game with a brand new map of Mars and half of the mission and discovery cards had been replaced or redesigned.
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The game now supports up to six players. There’s even a two players variant, but since it’s Bruno Cathala’s specialty, I trust him on it and didn’t even playtest it. The very last change, a few days before the files went to the printer, was suggested by a playtester – invert the numerical order of the characters, so that they can be counted down from 9 to 1 instead of 1 to 9. I’m still amazed none of us had this idea earlier.

The setting is still steampunk, but Andrew Bosley’s art for Fantasy Flight Games is very different from Christophe Madura’s for Asmodée. It’s much lighter, more like European comics, all in beige and red shades. I love it, and I’m eager to get the final product.

I’ve only one minor regret: the game’s name. I’ve always found Mission : Red Planet a bit ridiculous, and would have liked the game to be called simply Red Planet or even Mars. Anyway, the game was already well known with its old name and it wasn’t possible to change it now. So Mission : Red Planet is back. At the back of the box, the publisher’s blurb says that this is the definitive version of a classic, and it might very well be true.

We started working on this new version of Mission: Red Planet when I had just written my article about postcolonialism and boardgames. This game about rivalries in the exploitation of the natural resources of a far away and supposedly empty recently colonized planet could also have been a good illustration for it, and I just renamed Native Resistance, one of the discovery cards that eliminates a few astronauts from the planet. When I wrote about postcolonial Catan I didn’t think this blogpost would set off such a strong debate. It gets now more hits every day than the whole rest of my website, and it looks like I’ll have to find a politically correct justification for the theme of all my future new games. That’s relatively easy with Mission: Red Planet, but it will be much harder for the game that will probably be my next announcement.

Mission : Red Planet
A game by Bruno Faidutti & Bruno Cathala
Graphics by Andrew Bosley
2 to 6 players –
60 minutes

Published by Fantasy Flight Games (2015)
Boardgamegeek
The announcement at FFG

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A four players game in progress

Le raptor et les araignées
The Raptor and the Spiders

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Bruno Cathala testant Raptor à Etourvy.

En 2011, j’ai été contacté par les gens de Sophisticated games, détenteurs des droits de publications de jeux de société inspirés de l’œuvre de Tolkien, qui souhaitaient profiter de la sortie prochaine du film inspiré par The Hobbit pour publier deux ou trois jeux basés sur cette histoire. Ayant été un grand fan de Tolkien dans mon adolescence, l’idée m’a bien sûr séduit, et je décidai aussitôt de répondre à cet appel. Il était bien entendu que d’autres auteurs avaient également été contactés, et que mon jeu ne serait pas nécessairement parmi les un ou deux sélectionnés, mais j’étais prêt à prendre le risque. Pour un auteur de jeu, travailler sur l’œuvre de Tolkien est le genre d’occasion qui ne se présente pas deux fois.

Le lendemain, j’avais relu l’Histoire d’un aller et retour, et le surlendemain, j’avais choisi un épisode, celui de Bilbo et les nains attaqués par les araignées dans la forêt de Mirkwood, qui me semblait pouvoir faire un intéressant jeu tactique asymétrique, un joueur jouant le hobbit et les nains, un autre les arachnides. Les jeux à deux n’étant pas ce que j’ai le plus de facilité à faire, je décidais de faire appel à la collaboration d’un spécialiste du genre, accessoirement excellent ami, Bruno Cathala – qui n’avait jamais lu le hobbit mais s’empressa de réparer cet oubli. Ce fut un sacré boulot, avec de multiples versions, des plateaux de diverses formes, et plusieurs fois j’eus l’impression que nous repartions de zéro. Le résultat, je dois l’avouer, est surtout un jeu de Bruno Cathala – disons 25% de Bruno Faidutti, le thème et l’idée de départ, et 75% de Bruno Cathala, les mécanismes et les centaines de parties tests et de réglages. C’est en particulier Bruno (l’autre) qui eut l’idée du système de cartes action, dans lequel le joueur ayant joué la plus faible carte effectue l’action correspondante avant que son adversaire n’ait autant de points de déplacement que la différence entre les valeurs des cartes. Oui, je sais, ça a l’air compliqué dit comme cela, mais c’est très simple à jouer et cela crée des choix tactiques et psychologiques redoutables.

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Prototype de Mirkwood, avec les araignées de Descent.

Nous étions assez contents de nous. Nous avions un jeu tactique et stratégique aux mécanismes originaux, plein de rebondissements, et au thème très bien rendu. Les araignées s’efforçaient d’endormir les nains, puis de les envelopper dans leur toile, tandis que Bilbo, armé de sa dague, cherchait à libérer ses amis. Même l’anneau avait sa place, permettant au hobbit de disparaître pour resurgir en un autre endroit de la forêt. Nous avions surtout choisi un thème original, un épisode du récit et non l’ensemble du voyage de Bilbo, déja conté dans quelques jeux.  Je crois qu’il s’en est fallu d’assez peu, mais notre jeu, Mirkwood, ne fut pas sélectionné.

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L’un des premiers prototypes de Raptor.

J’étais d’autant plus déçu qu’il me semblait évident que ce jeu, conçu à partir d’un récit très précis, et mettant en scène les personnages du conte, ne pouvait pas être adapté à un autre thème. Je pensais donc garder en souvenir dans un coin mon prototype de Mirkwood, et en rester là. J’ai donc été surpris et dubitatif lorsque, quelques mois plus tard, je reçus un coup de téléphone du Bruno des montagnes m’annonçant qu’il avait réalisé une nouvelle version de notre jeu sur un thème complètement différent. Quelques jours plus tard, et après une partie via Skype, je me rendis à l’évidence : le nouveau thème, la chasse aux dinosaures, fonctionnait parfaitement. Le hobbit était devenu maman raptor, les nains des bébés raptors, et les araignées des scientifiques cherchant à capturer des dinosaures échappés de quelque Jurassic Park. Bien sûr, le nouveau thème imposait encore quelques petits bricolages, quelques adaptations, mais il était déjà étonnant de cohérence. Là encore, ce fut l’autre Bruno, décidément plus consciencieux que moi, ou plus doué pour les réglages fins, qui s’en chargea.

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Mon prototype de Raptor

Présenté à Matagot, le jeu plut beaucoup et le contrat fut rapidement signé…. mais les choses n’allaient pas en finir là. Le développement se poursuivit en effet après la signature du contrat, et fut long et semé d’embuches. Raptor est un jeu asymétrique, Bruno un auteur pointilleux et Matagot un éditeur exigeant. Un jour, c’était le joueur raptor qui gagnait trop facilement. Quelques semaines plus tard, après réglages subtils et parfois découverte de nouvelles stratégies possibles, c’était le scientifique. Tout le monde semblait très préoccupé par l’équilibre du jeu, et je regrette aujourd’hui un peu de ne pas être intervenu plus tôt pour dire que tout cela n’avait guère d’importance tant que chacun a plus ou moins sa chance et que les joueurs s’amusent. Les réglages successifs aboutirent surtout à compliquer le jeu, et à affaiblir l’évidence du thème, et que le mieux est l’ennemi du bien. Pour je ne sais plus quelle raison, les incendies furent même délaissés pour être remplacés par des barrières électrifiées bien moins romantiques. Toutes les cartes avaient deux, parfois trois effets distincts. En voulant trop en faire, nous avions cassé l’évidence originelle du jeu. Fort heureusement, tout le monde, plus ou moins en même temps, se faisait la même remarque, et nous décidantes donc d’un commun accord de revenir à la version Raptor initiale de Bruno. Nous y jouâmes, et tout le monde fut d’accord pour dire que ce jeu était bien meilleur que celui qui avait été obtenu après deux ans de développement. Bruno refit encore quelques réglages, mais en s’interdisant toute nouvelle règle et toute carte un peu complexe avec plusieurs effets. C’était la bonne démarche, et en quelques semaines, le jeu était prêt.

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Illustrations de Vincent Dutrait.

Raptor arrive dans quelques mois, publié par Matagot et illustré par Vincent Dutrait. il y aura les noms des deux Bruno sur la boite, mais j’ai parfois l’impression que mon seul rôle dans tout cela fut d’avoir été un peu à l’origine de cette histoire, avec un thème qui n’est même plus présent dans le jeu tel qu’il va être publié. Bref, c’est surtout un jeu de Bruno Cathala, dont je me sens plus testeur que véritablement auteur. Mais c’est un jeu que j’aime beaucoup.

Raptor
Un jeu de Bruno Faidutti & Bruno Cathala
Illustré parVincent Dutrait
2 joueurs – 30 minutes
Publié par Matagot (2015)
Ludovox          Tric Trac          Boardgamegeek


Raptor
Bruno Cathala plays Raptor at Etourvy

In 2011, I was contacted by the people at Sophisticated games, who own the license right for games based on J.R.R. Tolkien’s books, asking if I would be interested in submitting a game design  based on the Hobbit book, that they could publish when the movie will get out. Having been a Tolkien fan as a teenager, I was very excited at the prospect, and jumped on the occasion. It was clear from the beginning that they had asked several game designers to work on the idea, and that they would select only one or two of a dozen submissions, but I was willing to take the risk. Working on a game based on Tolkien’s books is the kind of opportunity a designer like me cannot let go by.    

Two days later, i had found my old copy of There and Back Again, and read it again for the first time in about twenty years. I had also found the episode I wanted to describe in the game, the Mirkwood Forest, when Bilbo and the dwarves are attacked by giant spiders in a deep and dark forest. I thought it could make for an interesting asymetrical two players game, with one player moving the dwarves and hobbits, and the other playing the spiders trying to capture them in their web.
Two players games are not my strong suit, so I also decided to ask Bruno Cathala for some help. Bruno is indeed  both a very good friend and a specialist in strategic two players games. Bruno accepted at once, even though he had never read the Hobbit so far – but he did in the following days.
It was a long and hard work. We made a dozen different boards, with square or hexagonal spaces, or with movement lines, and several times I felt like we were starting all over again. I must admit that the result was mostly a Bruno Cathala game – let’s say 25% Bruno Faidutti, for the original idea and the storyline, and 75% Bruno Cathala, for the core game systems, hundreds of test games and lots of fine tuning. Bruno designed the action card system, in which the players select their card simultaneously, then the player who played the lowest value card can use its special effect, before the other player has as many action points as the difference between the two card values. It might sound complex, but it’s very simple and challenging when playing, and generates subtle tactical and bluffing opportunities.

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Mirkwood prototype, with Descent spiders

We were quite satisfied with our game, Mirkwood. We had designed an original two players tactical game, dynamic, challenging, and true to the book. The spiders had to capture the dwarves in their web and put them to sleep, while the hobbit tried to cut the web with his dagger, free his friends and escape from the forest. The ring allowed the hobbit to disappear for a while and reappear somewhere else in the forest. I liked the idea that we had chosen a specific episode from the book, and not designed one more game about the whole journey of Bilbo. Our game was seriously considered for publication, but in the end was not selected.

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An early Raptor prototype

I was disappointed, and certain that our game, based on a very specific story and using the characters from the book, could not be adapted to another setting. I was ready to keep my prototype of Mirkwood as a souvenir, and play it once every other year. I was very surprised and skeptical when, a few months later, Bruno called me and proudly told me that he had made a new version of the game in a completely different setting. A few days later we played a game of the new Raptor game on Skype, and I had to admit that the n32 storyline, dinosaur hunt, was as consistent and convincing as the original Mirkwood forest episode. The hobbit was now mummy raptor, the dwarves were raptor eggs ready to hatch, and the spiders had become scientist trying to capture the mother who had just escaped from some Jurassic Park. Of course, there were some minor changes due to the new setting, mostly in the card effects, but nothing really critical. Once more, Bruno, who is much better than I am at fine tuning, or may be just less lazy, made most of the work.

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My Raptor prototype

We showed the new raptor prototype to Matagot. They liked it a lot, and we signed almost at once, but this was not the end yet. After the contract was signed, a long development process started, full of pitfalls and fires. Raptor is an asymmetrical game, Bruno is a persnickety designer, and Matagot a demanding publisher. They wanted the game to be perfectly balanced. On day, the raptor player was winning six games in ten. A few weeks later, after Bruno made some fine tuning and new strategies appeared, it was the scientist player. They were all obsessed with balance, and I regret that I didn’t jump in earlier to say that this doesn’t really matter as long as both players have some chance to win and the game is fun to play. Successful tunings and changes made the game carefully balanced, but they had two perverse effects – they made the game more complex and less thematic. At some time, the romantic fires were even replaced with ugly electric barriers. Most of the cards ended with two, or even three different effects. Fortunately, all the people involved finally realized that something was getting wrong, and we all decided to start again from Bruno’s original Raptor design, the one we had when the contract was signed. We played it again, and we all agreed it was a much better game than the one we had come up with after two years of development. So Bruno started again from it, trying to balance it again but with strict limitations – no new rules, one effect per card. This time, it was a matter of weeks.

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Graphics by Vincent Dutrait.

Raptor will be out in a few months, published by Matagot and illustrated by Vincent Dutrait. Both Bruno’s will be credited on the game box, but I sometimes feel that my only part in this game was to come up with the original opportunity, and the original setting which wasn’t even kept till the end. In short, it’s mostly a game by Bruno Cathala, and I feel more like a playtester than like a co-designer – but it’s a game I like a lot.

Raptor
A game by Bruno Faidutti & Bruno Cathala
Graphics by Vincent Dutrait
2 players – 30 minutes
Published by Matagot (2015)
Boardgamegeek