Treasure of the Dwarves

D’un éditeur l’autre

Ceux qui me connaissent un peu, ou suivent mon actualité sur ce site web, savent que j’ai été déçu par la sortie de Dreadful Circus. L’éditeur avait en effet non seulement changé le thème du projet que je lui avais confié, ce qui pouvait se comprendre, mais aussi et surtout profondément modifié le système de score et la plupart des équilibres du jeu. Je ne me reconnaissais plus dans le jeu publié. L’équipe de Portal étant composée de gens sympathiques, que je connais depuis fort longtemps et avec lesquels je n’avais pas envie de me fâcher, nous avons discuté calmement pour trouver une solution. Ils avaient des torts, puisque ce sont eux qui ont fait tous ces changements sans les discuter préalablement avec moi, mais aussi des excuses, notamment la période du Covid qui avait rendu les tests difficiles. J’avais des torts, n’ayant pas été aussi vigilant que j’aurais dû et n’étant pas intervenu à temps pour reprendre en main le développement du jeu. Bref, nous nous sommes mis d’accord pour que je récupère les droits au 1er janvier 2023, et j’ai rapidement commencé à chercher un nouvel éditeur pour mon « jeu des coffres ». Un peu échaudé par l’expérience de Dreadful Circus, je ne cherchais plus un gros éditeur, mais plutôt quelqu’un qui accepte de publier le jeu tel que je l’avais imaginé et développé – et aucun de mes jeux n’a été autant testé, modifié, bricolé avec soin que celui-ci, que je considère comme mon chef d’œuvre – au sens propre du terme, pas nécessairement le meilleur, mais celui dans lequelon retrouve tout mon style et ma technique.

Une partie du prototype dans mon ancien appartement de la rue de Belleville. Au centre, côté mur, Camille, avec qui j’ai fait Trollfest, et plus récemment Trollympics, qui sort également chez Trick or Treat.

Trollfest, conçu avec Camille Mathieu, venait de sortir. Le travail avec la petite équipe de l’éditeur américain avait été très agréable, et j’étais particulièrement content du résultat final. Trick or Treat a donc été l’un des premiers auxquels j’ai de nouveau proposé de publier mon jeu des coffres, et je suis extrêmement heureux qu’ils aient accepté, même si je sais fort bien qu’ils en vendront moins que de gros éditeurs mieux installés. Tout s’est passé comme pour Trollfest, avec un forum en ligne auquel participaient toutes les personnes impliquées dans l’édition, auteur compris, et je pense vraiment que c’est la formule, simple, souple et efficace, que devraient utiliser tous les éditeurs.

Mécanisme, matériel, thème

On demande souvent aux auteurs de jeu s’ils partent habituellement d’un thème ou d’un mécanisme. Je réponds généralement que cela dépend, et qu’il arrive aussi que le déclic initial soit un élément ou une contrainte matérielle.
Pour le trésor des nains, le points de départ est le mécanisme des enchères. En 2017, j’avais commencé à travailler, avec Eric Lang, sur un gros jeu de plateau dans lequel des magiciens répondaient aux appels d’offre des autres joueurs en faisant des propositions sous forme de cartes insérées dans une petite enveloppe. Le jeu était intéressant, mais beaucoup trop long et lent. Nous l’avons abandonné, mais j’avais gardé en tête l’idée des offres secrètes présentées dans des enveloppes.

Un des premiers prototypes de Wizardopolis

Un peu plus tard, en 2018 ou 2019, j’avais acheté au BHV un lot de boîtes en papier mâché, de diverses tailles et formats. Elles sont longtemps restées sur mon bureau, et m’ont inspiré quelques idées de jeux – dont Maracas, publié chez Blue Orange.. Repensant au système d’enveloppes de Wizardopolis, je me suis alors dit que des boites pourraient être plus pratiques à manipuler, à condition d’y mettre des jetons et non des cartes.

Des jetons, c’est à dire des pièces d’or, peut-être des gemmes ou divers objets. Qui imagine-t-on conserver son trésor dans des coffres? Des dragons, à la rigueur, mais surtout des nains. Ce n’est pas le thème le plus original qui soit, je l’ai déjà exploité dans Le Roi des Nains, mais il colle parfaitement aux mécanismes du jeu. J’ai vaguement essayé de trouver autre chose, mais toutes mes idées, et celles de mes amis joueurs, étaient finalement moins amusantes et moins cohérentes. Mieux vaut être efficace qu’original.
L’ordre d’apparition des trois éléments constitutifs du jeu est donc ici le mécanisme, le matériel, et finalement le thème. Tout n’a ensuite été que réglages, même si ces réglages ont pris des années.



Comme vous pouvez le voir sur les photos, il n’y avait pas d’écran dans mon prototype; chaque joueur y avait deux boîtes, une plus grosse, le coffre, et une plus petite, la boîte. C’est plus pratique et thématiquement plus cohérent, mais les boîtes, comme tous les éléments de jeu un peu originaux, coûtent cher, et elles ont donc été remplacées par des écrans dans le jeu édité. Je ne serais pas étonné d’apprendre que les auteurs de Time Capsule, que j’ai vu tourner l’an dernier aux rencontres ludopathiques et que je compte bien me procurer un de ces jours, sont aussi partis des mêmes petites boites.

Une partie à Etourvy.

Bluff, enchères et combos

Je suis, me suis-je laissé dire, l’un des auteurs de jeux dont le style particulier se reconnaît le plus aisément. Alors que les ordinateurs de plus en plus puissants et malins ouvrent au jeu des voies nouvelles et inattendues, je m’efforce de concevoir des jeux permettant encore de rassembler des joueurs nombreux autour d’une table avec quelques bières. Ces jeux auxquels il ne serait pas vraiment possible de jouer en ligne sont parfois des jeux où l’on rit de bon cœur, parfois des jeux où l’on regarde ses adversaires en silence, les yeux dans les yeux. Les meilleurs, ou en tout cas ceux que je préfère, sont les deux à la fois, drôles et tendus. Ceux qui apprécient mon style ne seront donc pas déroutés par ce Trésor des Nains, un jeu d’enchères, de bluff et de combinaisons simple et fourbe, qui fonctionne avec la même efficacité de 3 à 8 joueurs – bon, disons de 4 à 8, c’est peut-être un peu moins bien à 3.

En résumé, les nains ne sont pas des héros, mais des gens calculateurs qui savent fort bien la valeur de l’argent ; certains, plein de roublardise et de rouerie, sont peu recommandables, alors que d’autres sont tout à fait dignes d’estime, pourvu qu’on ne leur en demande pas trop.

J.R.R. Tolkien, Le Hobbit

Treasure of the Dwarves est un jeu d’enchères, avec un mécanisme original. À chaque tour de jeu, un ou deux joueurs mettent chacun une carte en vente. Chacun doit faire une offre pour l’une des cartes proposées, en mettant un certain nombre de pièces ou de gemmes dans un petit coffre.
Treasure of the Dwarves est un jeu de bluff. Le vendeur regarde le contenu des coffres dans l’ordre de son choix, mais ne peut revenir sur une offre qu’il a déjà refusée. Ce serait en effert contraire aux très rigides règles de politesse naine, qui sont à peu près aussi strictes que les japonaises – et nul n’a envie de se faire hara-kiri avec une hache de bataille. Un nain plus malin que les autres, et tous les nains sont assez malins, peut parfois s’en sortir en faisant une offre médiocre et en espérant qu’elle sera consultée en dernier, quand le vendeur n’aura plus le choix qu’entre cela et rien.
Treasure of the Dwarves est un jeu de combinaison, dans lequel chacun accumule des ressources, en gemmes, en métal et en cartes et construit ses propres conditions de victoire au fil de la partie, un peu comme dans un jeu que j’aime beaucoup, Fantasy Realms.
Treasure of the Dwarves est très interactif, voire carrément méchant, les opportunités de manipuler les adversaires, voire de saboter leurs trésors adverses ne manquant pas.
Treasure of the Dwarves est donc un jeu tout à la fois tactique, quand on essaie de miser juste ce qu’il faut pour avoir les bonnes cartes et coincer ses adversaires, et stratégique quand on prépare son scoring final.

Il n’y a, je crois, aucune création dans laquelle je me sois personnellement autant investi que dans Treasure of the Dwarves, et aucune qui soit aussi représentative de mon style, de mon idée du jeu de société. En cinq ans de développement, j’ai fait des centaines de parties avec des dizaines de testeurs, équilibrant soigneusement les effets des cartes et les points rapportés par les gemmes, les pièces et les cartes. Plusieurs testeurs y ont apporté leur grain de sel, notamment Vincent Pessel, très fort pour repérer les petits déséquilibres, et Croc, qui a eu l’idée des deux enchères simultanées, permettant d’accélérer les parties avec des joueurs nombreux. Si l’on exclut les jeux d’ambiance, il y a peu de jeux de société qui, comme le trésor des nains, tournent vraiment bien jusqu’à 8 joueurs, sans temps mort pour aucun des joueurs..

“Je pensais que les nains aimaient l’or,” dit Angua.
“Ils disent ça pour l’attirer dans leur lit.”

Terry Pratchett, Pieds d’argile.

Les illustrations

Deux artistes, Roland MacDonald et Donald Crank, ont contribué aux illustrations de Treasure of the Dwarves. L’illustration de couverture, qui aurait pu illustrer un roman de Tolkien, donne de la société naine une image très classique. Les objets magiques, sans doute très anciens, laissent en revanche deviner une lointaine et inattendue influence culturelle des hommes lézards vivant près des fleuves et lacs souterrains. L’un des nains sur les boites a même un peu l’air d’un étranger qui n’est pas de chez nous. Après tout, que savons nous réellement des origines du monde nain ? Dans les traditions germaniques, les nains vivent sous des montagnes creuses, mais sont aussi des créatures associées aux lacs et rivières.

Nains et objets magiques

Treasure of the Dwarves n’a pas pour thème la mythologie. Pendant quelques temps, pourtant, j’ai joué avec l’idée de donner à quelques artefacts des noms tirée des mythologies nordique et germanique, dans lesquelles les nains sont des créatures souterraines petites mais puissantes, spécialisées dans la fabrication et la garde de trésors magiques. Sur l’histoire de ces traditions, je recommande le livre de Claude Lecouteux, Les nains et les elfes au Moyen Âge, même s’il est parfois un peu daté, ainsi que, dans un contexte très britannique, celui de Francis Young, Twilight of the Godlings.

Si j’ai assez vite abandonné l’idée de références mythologiques ou littéraires précises, c’est d’une part parce que cela aurait donné à ce jeu une apparence de sérieux qui ne me semble pas conforme à son esprit, et d’autre part parce qu’il m’a semblé plus important que tous les noms des objets suggèrent, d’une manière ou d’une autre, leur effet.

L’Edda en prose, écrit au début du XIIIe siècle, conte comment le dieu Loki coupa et vola la magnifique chevelure dorée de Sif, l’épouse de Thor. Thor, en colère, exigea de Loki qu’il les lui rende, ce qui n’était possible qu’en faisant appel aux forgerons nains, dans leur antre souterrain de Svartheim.
Loki s’adressa d’abord aux trois frères, fils du grand forgeron nain Ivaldi. Ils firent une chevelure d’or fin pour Sif, mais ne s’arrêtèrent pas là. Ils forgèrent ensuite Gungnir, une lance que rien ne peut bloquer, puis  Skíðblaðnir, un navire pliable que son propriétaire peut ranger dans sa poche, ce qui est bien pratique en voyage. Loki s’en vont ensuite voir deux autres artisans nains, Brokkr et Eitri, qu’il mit au défi de réaliser pour les dieux de plus beaux objets encore. Ils relevèrent le défi et fabriquèrent trois autres objets, Gullin-börsti, un sanglier de métal qui brille dans l’obscurité, Draupnir, un anneau ou bracelet qui se copie lui-même tous les neuf jours, et enfin Mjöllnir, un marteau au manche malheureusement trop court (encore la faute à Loki, mais ce serait long à expliquer) qui brise tout ce qu’il touche. Les dieux jugèrent que Loki avait perdu son pari, Frey conserva le sanglier et le bateau, Odin prit l’épée et l’anneau, et Thor, comme chacun sait, le marteau. Bien sûr, Loki trouva un moyen de s’en sortir et de continuer à jouer aux dieux des tours pendables.

Illustration d’Arthur Rackham pour Le chant des Nibelungen, 1910

D’autres passages de l’Edda content comment les nains créèrent Gleipnir, la laisse souple comme la soie et solide comme l’acier qui retient le féroce loup Fenrir. Gleipnir est faite du bruit de pas d’un chat, de la barbe d’une femme, des racines d’une montagne, des tendons d’un ours, du souffle d’un poisson et du crachat d’un oiseau. Ce sont aussi les artisans nains qui forgèrent Huliðshjálmr, le heaume d’invisibilité, Thrymgyöll, la grille fermant les enfers, Brisingamen, le torque d’or de Freya, ainsi que Járngreipr, les gants d’acier que doit utiliser Thor pour brandir son marteau au manche trop court. L’Edda poétique conte comment les nains Dvalinn et Durinn forgèrent l’épée à la garde d’or Tyrfing, qui ne ne rouille pas, ne manque jamais son but et tranche la pierre et le métal aussi aisément que la toile mais qui, une fois sortie de son fourreau, ne peut y être rangée avant qu’elle n’ait tué un homme et causé trois grands malheurs. Il en va de même d’une autre épée naine, Dáinsleif, l’épée du roi Högni, qui fut dégainée au moins une fois, après l’enlèvement de sa fille.

Alberich vole l’or du Rhin. Carte à collectionner allemande, 1905.

Le chant germanique des Nibelungen, écrit quelques décennies plus tard, est un peu la continuation de cette histoire, avec un peu moins de dieux et d’objets magiques, mais avec un dragon, Fafnir, qui sera tué par Sigfried d’un coup de l’épée magique Gram, ou Nothung, ou Balmung, forgée ou au moins reforgée par les nains. Les Nibelung, premiers propriétaires du trésor du Rhin, sont souvent décrits comme des nains, et le trésor est ensuite gardé par le nain Alberich. Parmi les objets du trésor se trouvent aussi une cape d’invisibilité que Sigfried utilise pour remplacer le mari Günther lors de la nuit de noces de Bünnhild, et une baguette magique qui donne rien de moins que le pouvoir absolu sur toutes choses mais ne semble curieusement intéresser personne. Dans les versions postérieures, jusqu’au Ring der Nibelungen de Richard Wagner, ces objets deviennent Tarnhelm, le heaume de métamorphose, et bien sûr l’anneau éponyme, porteur de grand pouvoir et d’une terrible malédiction.

C’est bien sûr ce qui inspira J.R.R. Tolkien. Dans le Hobbit et Le seigneur des anneaux, les nains n’ont pas créé les anneaux, mais ils ont forgé bien d’autres puissants artefacts comme Narsil, l’épée d’Elendil, le Heaume du dragon de Dor-lòmin, et même la tunique de Mithril offerte à Bilbo. Ils ne sont pas seulement forgerons, puisqu’ils sont aussi les créateurs de l’Arkenstone qui brille dans l’obscurité, ou des instruments de musique joués par Thorin et ses compagnons après la prise d’Erebor. Dans le Silmarillion, l’un des trois silmarils est enchassé dans Nauglàmir, le bracelet des nains.

L’idée que les nains n’ont pas recours à la magie, voire en ignorent tout, est devenue assez populaire dans les univers des jeux de rôles de Fantasy. Elle provient d’un contresens littéraire et historique. Dans la mythologie, et même dans l’œuvre de Tolkien, si les nains sont assez imperméables à la magie, c’est parce qu’ils sont eux-mêmes des créatures magiques. L’opposition entre une magie elfique proche de la nature et faite de sortilèges et une magie naine « incarnée » dans des objets est aussi une idée très récente – les textes les plus anciens ne distinguent même pas très clairement les nains des elfes.

Les nains forgeaient au soir pour le héros futur.
L’enclume sous leurs coups sonnait dans la clairière,
Et l’étincelle chue au choc du marteau dur
Posait son escarboucle aux tentures de lierre.

Les nains forgeaient, avec l’épée aux quillons d’or,
La targe d’airain noir où s’acharnait la guivre,
Le casque où le griffon tentait un vain essor
Et le cor triomphal ouvert en fleur de cuivre.

Les Kobolds martelaient et les licornes blanches
Éblouissant la nuit de soudaines clartés,
De leur corne trouaient le rideau vert des branches
Et frissonnaient au bruit des marteaux enchantés.

Mais quand les nains sentant se clore leur attente
Haussèrent vers le ciel le fer qui resplendit
Les licornes vers eux hennirent d’épouvante.
Et lointain, dans la brume, un cheval répondit.

— Léon Vérane, Les licornes, 1911

Si les nains des traditions nordiques et germaniques sont, au send étymologique du terme, autochtones, ceux de Tolkien, les 12 nains à la recherche de leur royaume perdu, sont aussi un peu juifs. Du coup, j’aurais pu ajouter l’Arche d’Alliance et quelques autres trucs, mais là, ça aurait commencé à devenir n’importe quoi….

Introduire tout ou partie de ces allusions mythologiques et littéraires dans ce jeu, avec bien sûr une certaine légèreté, aurait pu être une occasion d’affirmer que si les références culturelles ne peuvent certes pas être ignorées, elles ne doivent pas pour autant être toujours prises au sérieux. Malheureusement, les merveilleuses propriétés de ces « authentiques » objets magiques ne collaient généralement pas avec les mécanismes du jeu. Les références seraient en outre passé à côté des joueurs qui, dans leur quasi totalité, ne connaissent pas plus ces objets que je ne les connaissais avant de commencer à travailler sur ce jeu. J’ai jugé plus important de donner aux cartes des noms qui rappellent leurs effets que de faire quelques références érudites. En outre, dans la plupart de ces histoires, si les artefacts magiques sont forgés ou frappés par les nains, ils passent rapidement dans le monde des dieux ou des hommes. Il n’empêche qu’un jeu avec des nains et des trésors magiques, c’est toujours un peu un jeu sur les Eddas, sur les Nibelung, sur Tolkien, sur le bon vieux D&D, et il vaut toujours mieux mélanger un peu tout ça, comme l’a excellemment fait, en littérature, Terry Pratchett. 

La langue naine a plus de mille mots pour “or”, mais en cas d’urgence, comme lorsqu’ils voient de l’or qui ne lui appartient pas, un nain peut utiliser n’importe lequel d’entre eux.

Terry Pratchett, Soul Music.

Il y a quand même un Graal, parce que si personne ne sait ce qu’est le Graal, tout le monde en a entendu parler, et une référence un peu plus obscure, l’œil de Zoltar. Cet artefact a été ajouté au jeu lors des derniers tests. Son effet étant similaire a celui de l’œil multicolore (Colored Eye), je voulais en faire aussi un œil. Cela aurait bien sûr pu être l’œil d’Odin, mais c’était un peu prétentieux. J’ai donc opté pour l’œil de Zoltar, titre d’un délicieux petit roman fantastique de Jasper Fforde. Je venais de lire le livre suivant, la grande guerre des trolls, et n’ai pas pu résister à faire un peu de pub à l’excellente série de la dernière tueuse de dragons. Ce qui peut sembler au premier abord n’être qu’une autre série de fantasy pour adolescentes est bien plus que cela, une suite de bouquins terriblement drôles et intelligents.

Des nains et des dragons

Si les dragons sont présents dans nombre de mes jeux, à commencer par L’or des Dragons, Les pierres des dragons, et plus récemment Dragons, c’est bien sûr parce que je m’inspire de l’univers médiéval fantastique générique dans lequel j’ai pas mal baigné et que je continue à apprécier. Je ne pouvais pas vraiment mettre de dragons dans Le trésor des nains, où il n’y a jamais vraiment de combat, mais il est bien évident que nombre des gemmes, des pièces et des objets brillants ou magiques que s‘échangent les nains ont appartenu à un moment ou à un autre à un dragon. Il y a donc des écailles de dragon, et même une dent de dragon, reliques auxquelles les nains attachent d’autant plus d’importance que la tradition dit que le premier dragon, Fafnir, était originellement un nain, que la peur et l’avarice ont peu à peu transformé en monstre .

Un magnifique rubis gros comme l’œuf d’une oie. Il appartenait à un magicien pour qui j’ai une grande admiration. Vous pouvez retrouver…. l’œil de Zoltar.

Jasper Fforde, L’Œil de Zoltar.

Les joyaux de la couronne

Bien loin des forêts germaines ou nordiques, les nains ont bien failli partir au Japon pour les regalia. Ayant décidé, pour des raisons d’équilibre du jeu, que trois ou quatre cartes représenteraient les joyaux de la couronne du roi sous la montagne, il fallait choisir quels seraient ces joyaux. Pour un français, et je pense pour tous les occidentaux, les joyaux auxquels on pense d’abord sont ceux de la couronne britannique, de loin la plus médiatisée. Leur liste est assez fluctuante, et ils sont de toute façon trop nombreux. Restaient deux sets officiels de trois joyaux. Ceux de l’empereur du Japon, qui n’ont jamais été montrés au public, sont un miroir, une épée et une courbe et mystérieuse pièce de jade. Ceux de l’empereur d’Autriche, visibles au Schatzkammer Museum de Vienne, sont une couronne, une orbe et un sceptre.

J’ai d’abord pensé mettre un miroir, une épée et un morceau de jade, parce que je suis toujours partisan, pour des raisons autant esthétiques que politiques, de mélanger les cultures de la manière la plus ironique et désordonnée possible. Le problème était le miroir, sans doute le plus connu de ces joyaux, car ill était évident que seule une carte copiant les effets d’une autre pouvait être appelée ainsi. J’ai donc choisi de m’inspirer plutôt des joyaux austro-hongrois, peut-être moins connus, que j’avais découverts en écrivant ma thèse sur les licornes – le manche du sceptre impérial, en effet, est en corne de licorne. Et puis l’Autriche est dans le monde germanique, les Nibelungen, tout ça, donc ça passe mieux, tant pis pour les mélanges et l’ironie. 

Toujours plus loin

Il y a une trentaine d’années, j’essayais systématiquement, le plus souvent sans succès, de convaincre les éditeurs d’inclure dans mes jeux quelques cartes vierges sur lesquelles les joueurs pourraient laisser dériver leur imagination. Après tout, c’est comme cela, en imaginant cartes et pouvoirs pour Rencontre Cosmique, que j’ai pris goût à la création ludique. Je n’insiste plus aujourd’hui, car si l’on apprécie et pratique un jeu suffisamment pour vouloir y ajouter des éléments, on l’apprécie et pratique aussi assez pour utiliser des sleeves, ces pochettes protectrices pour cartes à jouer, dont il existe des versions à dos opaque permettant de personnaliser n’importe quel jeu. C’est ainsi que j’ai récemment ajouté une quinzaine de cartes de mon cru à ma boite de Vale of Eternity.
Quoi qu’il en soit, le Trésor des Nains se prête assez facilement à ce petit jeu, et vous pouvez m’envoyer vos meilleures idées. Prenez garde cependant à ne pas trop déséquilibrer le jeu. Certaines cartes peuvent bien sûr être meilleures que d’autres, c’est ce qui fait le sel des enchères, mais pas trop, ou pas tout le temps, ou pas pour tout le monde. Surtout, prenez soin de préserver l’équilibre global entre les trois manières de marquer des points, les pièces, les gemmes et les cartes.

Avec l’équipe de Trick or Treat Games à la GAMA 2025, pour la sortie de Treasure of the Dwarves et Trollympics.

Treasure of the Dwarves
Un jeu de Bruno Faidutti
Illustré par Roland MacDonald & Donald Crank
3 à 8 joueurs – 45 minutes
Publié par Trick or Treat Studios
Parution début 2025



From one publisher to another

Those who know me a bit, and follow this blog, know that I’ve been disappointed with a recent game of mine Dreadful Circus. The publisher changed the setting of the game, something I can understand, but also and more critically modified most of the scoring systems and the game balance. I didn’t like the result. I really like Portal, I know Merry and Ignacy for quite long, and I didn’t want to fall out with them. We discussed calmly and friendly to find a solution. They had wrongs, since they did all these groundless changes, but they also had excuses, especially the Covid period which made playtesting difficult. I had wrongs, since I was not careful enough and didn’t jump in in time to take the development back in hand. Anyway, we agreed that I would get the rights on the game back at the end of 2022, and I started to look for another publisher for my “dwarven chest game”. Having been frustrated by the Dreadful Circus experience, I didn’t look for a big publisher but rather for someone who would agree at once to publish my game as I had designed it. None of my games has been tested, fine-tuned, tinkered with more than this one, and I hold it to be my masterwork – in the original sense, not necessarily the best one but certainly the one in which I have invested all my style and experience.

Playing the prototype in my new apartment, rue de la Villette.

Trollfest, designed with Camille Mathieu, was just out. I had really enjoyed working with the small team at Trick or Treat Games and was really pleased with the result. Trick or Treat was one of the first companies I submitted this game to, and I am extremely pleased they liked it and wanted to do it, even when I know quite well they will probably sell less than big and installed publishers. Like with Trollfest, we worked through an online forum where most of the people involved in the publication took part, including the designer, and I know think this is the simple, flexible and efficient process most publishers should use.

Mechanism, components, setting

Game designers are regularly asked if their designs usually start from a setting or from a mechanism idea. I usually answer that it depends, and that the initial spark can also be a component.
The Treasure of the Dwarves started from a mechanism idea, the “no coming back” auction system. In 2017, I had started working, with Eric Lang, on a relatively heavy boardgame in which magicians were answering to other players’ adjudications with sets of cards placed in a small envelope. The game was challenging, but far too long and too slow. We gave up, but I had kept in mind the idea of secret offers presented in envelopes.

Wizardopolis prototype

Later, in 2018 or 2019, I bought a set of papier mâché boxes of various shapes and sizes in a Parisian department store, thinking I might use them in future prototypes. They stayed on my desk for quite long, and inspired a few games, including Maracas, later published by Blue Orange. Remembering the Wizardopolis envelope auction system, I thought that small boxes might be easier to manipulate, but could only contain tokens, no cards.


Tokens, of course, meant coins, may be gems and various items. Who is known to keep coins, gems and other treasures in chests ? Dragons, may be, but most of all dwarves. It’s nothing new but it fits the systems. I tried to find something more original, but all of my and my playtester friends’ ideas were either less fun or less consistent, and often both. Better efficiency than originality at all cost
In this case, the order of appearance was mechanism, component, and finally setting. Then it was only design and fine tuning, but it lasted for years.

As you can see on the pictures, there were no screens in my prototypes. Each player has two boxes, a big one, the chest, and a smaller one, the box. It is more convenient, and thematically more consistent. Unfortunately boxes, like any unusual component, are relatively expensive. That’s why the bigger chests have been replaced by screens in the published game. I’ve seen a copy of Time Capsule played last year at my ludopathic gathering, and I would not be surprised to learn that its designers also started from the same kind of tiny boxes. Anyway, I plan to buy and play this game one of these days.

A late prototype in a nice Parisian game café, Le Duchesse.

Bluffing, auctions and combos

I’ve been told that I am one of the boardgame designers whose style is the easiest to spot when playing a new game. While computers create new and sometimes unexpected  ways of gaming, I try to design social games, games which still allow to get several people around a wooden table, if possible with a few beers. These games which cannot satisfactorily be played online are either games in which players are laughing at each other, or games in which players are silently looking in each other’s eyes. The best ones, or at least the ones I prefer, are both – fun and tense. If you like my style, you won’t be disappointed with Treasure of the Dwarves, a game of auction, bluffing, combos and deceit which works as well with 3 to 8 players – OK, may be with 4 to 8, it’s less fun but still very tense at 3.  

Dwarves are not heroes, but a calculating folk with a great idea of the value of money. Some are tricky and treacherous and pretty bad lots; some are not but are decent enough people , if you don’t expect too much.

J.R.R. Tolkien, The Hobbit

A computer rendering of the final components.

Treasure of the Dwarves is an auction game with an original bidding system. Every round, one or two players auction a magical item card. Each player must make an offer for one of the available cards with putting one or more coin or gem in a small chest.
Treasure of the Dwarves is a bluffing game. The seller looks at the content of the chests in any order, but cannot go back to a box they have already seen. It would indeed go against the dwarven etiquette rules, which are even stricter than the Japanese ones, and no one wants to do hara-kiri with a battleaxe. A clever dwarf, and dwarves are usually clever, can sometimes get an item at a good price with a mediocre offer, hoping it will be looked at last. 
Treasure of the Dwarves is a combo game, in which players accumulate resources in gems, coins and cards, and use cards to build their own scoring systems during the game. This “scoring rules building” feels a bit like in a game I really like, Fantasy Realms.
Treasure of the dwarves is a mean and highly interactive, with many opportunities for deceit and take-that. One can both manipulate opponents and sometimes sabotage their treasures.
Treasure of the Dwarves is therefore both a tactical and a strategy game. It is tactical when trying to make the right bid for the right card. It is strategic when planning one’s final scoring.

“I thought dwarfs loved gold,” said Angua.
“They just say that to get it into bed.”


Terry Pratchett, Feet of Clay.

I don’t think there’s a single boardgame which I have more playtested, developed, fine-tuned than this one. It is certainly the most representative of my design style, my idea of what a boardgame should be. Over five years, I have played it hundreds of times, carefully balancing and rebalancing the scorings for coins, gems and cards. Several playtesters added their grain of salt to it, especially Vincent Pessel, who is very good at spotting small imbalances and rules issues, and Croc, who had the idea of two simultaneous auctions. This is what makes possible to play a fast and fun 8 player game, something relatively rare with non-party games.

The art

Two artists, Roland MacDonald and Donald Crank, have contributed to the art in Treasure of the Dwarves. The cover art, which could have featured in an illustrated edition of Tolkien, gives the traditional image of the dwarven society. The many magic items are more surprising. One can imagine that they are very old, and show traces of the distant cultural influence of some other underground people, may be the lizard men living near the underground lakes and rivers. At least one of the dwarves on the boxes above looks definitely suspicious. After all, what do we really know of the origins of dwarven culture ? In German traditions, dwarves live in hollow mountains, but are also linked with rivers and springs.

Should it rather be Treasure of the Dwarfs ?

No reviewer (that I have seen), although all have carefully used the correct dwarfs themselves, has commented on the fact (which I only became conscious of through reviews) that I use throughout the ‘incorrect’ plural dwarves. I am afraid it is just a piece of private bad grammar, rather shocking in a philologist; but I shall have to go on with it. Perhaps my dwarf – since he and the gnome are only translations into approximate equivalents of creatures with different names and rather different functions in their own world – may be allowed a peculiar plural. The real ‘historical’ plural of dwarf (like teeth of tooth) is dwarrows, anyway: rather a nice word, but a bit too archaic. Still I rather wish I had used the word dwarrow.


Letter from J.R.R. Tolkien, 1938

Dwarves and magical items

Treasure of the Dwarves is not really, or not seriously, about mythology, and the magical items in it have been given names that suggest their in-game abilities. For some time, however, I toyed with the idea of using items from the Norse and German mythologies, in which dwarves are described as small but powerful underground creatures specialized in crafting and guarding magic stuff. The English word dwarf comes from the old Norse dverg. To learn more about the cultural history of these creatures, I recommend Claude Lecouteux’s Hidden History of Elves and Dwarfs, even when its approach is old fashioned, as well as, in a more specifically British context, Francis Young’s recent book, Twilight of the Godlings, in which I’ve found this marvelous explanation, by Sir Walter Scott, of the origins of dwarfs and of their affinities for caves and metals – dwarves are basically Baltic pygmy refugees.

There seems reason to conclude that these duergar [dwarves] were originally nothing else than the diminutive natives of the Lappish, Lettish, and Finnish nations, who, flying before the conquering weapons of the Asae [Asians] , sought the most retired regions of the north, and there endeavoured to hide themselves from their eastern invaders. They were a little diminutive race, but possessed of some skill probably in mining or smelting minerals, with which the country abounds; perhaps also they might, from their acquaintance with the changes of the clouds, or meteorological phenomena, be judges of weather, and so enjoy another title to supernatural skill. At any rate, it has been plausibly supposed, that these poor people, who sought caverns and hiding-places from the persecution of the Asae, were in some respects compensated for inferiority in strength and stature, by the art and power with which the superstition of the enemy invested them. These oppressed, yet dreaded fugitives, obtained, naturally enough, the character of the German spirits called Kobold, from which the English Goblin and the Scottish Bogle, by some inversion and alteration of pronunciation, are evidently derived.

— Sir Walter Scott, Letters on Demonology and Witchcraft, 1830

There’s defijnitelty a book waiting to be written about euhemerism gone mad.

I soon abandoned the idea of precise mythological references, of magical artifacts drawn from myths or literature. It would have given to the game a serious feel which didn’t fit with its spirit. Also, and this is probably the most important, I wanted to give to most items names that would refer to their in-game effects, not names which refered vaguely to vaguely known stories.

The prose Edda, written at the beginning of the XIIIth century, tells how Loki cut and stole the wonderful hair of Sif, Thor’s wife. Thor got angry and requested Loki to get them back, which he could only do with the help of the dwarven goldsmith in their underground lair of Svartheim.
Loki first went to three dwarf brothers, the sons of the great dwarven smith Ivaldi. They made shining golden hair for Sif, but didn’t stop there. They kept on working and forged Gungnir, a spear that could not be blocked in any, and Skíðblaðnir a  ship that could be folded and kept in its owner’s pocket.
Loki then went to see two other dwarves craftsmen, Brokkr and Eitri, and bet them his head that they could not make three nicer magical items than those. They took the bet and forged three other items, Gullin-Börsti, a magic golden pig which glows in the dark, Draupnir, a golden ring or armband that copies itself every nine days, and Mjöllnir, a short handle hammer that breaks everything it touches. The gods judged that Loki had lost his bets, and Frey kept the pig and the ship, Odin kept the sword and the ring, and Thor, as everyone knows, took the hammer. Of course, Loki found a way out of this so that he could keep playing nasty tricks to fellow gods.

Art by Arthur Rackham for The Ring of the Nibelung, 1910.

Other stories in the Edda tell that the dwarves created Gleipnir, the leash, soft as silk and solid as iron, who was used to hold the mighty wolf Fenris. Gleipnir is made from the sound of a cat’s footfall, the beard of a woman, the roots of a mountain, the sinews of a bear, the breath of a fish and the spittle of a bird. The dwarves also forged Huliðshjálmr, the helmet of invisibility, Thrymgyöll, the iron gate of the underworlld, Brisingamen, Freya’s amber torque, as well as Járngreipr, the iron gloves that Thor needs to wield Mjölnir, due to its too short handle – one more of Loki’s nasty tricks. The poetic Edda tells how the two dwarves Dvalinn and Durinn forged the golden hilt sword Tyrfing. It never misses, never rust and cuts through stone and iron as easily as through cloth, but once taken out of its sheath, it cannot be put back until it has killed a man and caused three great evils. The same is true of another dwarven sword, Dáinsleif, which has been offered to King Hörni and drawn at least once, when his daughter had been kidnapped.

The German song of the Nibelung, written a few decades later, is, in some ways, the continuation of this story, with fewer magic stuff but with a dragon, Fafnir. The dragon is killed by Sigfried with a single blow of the magic sword Gram, or Nothung, or Balmung which as been forged, or at least reforged, by dwarves. The Niebelung, the original owners of the Rhine treasure, are often described as dwarves, and the treasure is now guarded by a dwarf, Alberich. Among the items in the treasure are an invisibility cloak, which Siegfried uses to replace her husband Gunther during Brünnhild’s wedding night, and a magic rod which gives absolute power over everything but in which no one seems to be really interested. In later versions, such as Wagners Ring der Nibelungen, these become Tarnhelm, the helmet of shapeshifting, and the eponymous Ring, carrying both great power and a terrible curse.

The Rhine maidens after Alberich and the dwarves have stolen the rhinegold. German collectible card, 1905.

These, of course, inspired J.R.R. Tolkien. In the Hobbit and the Lord of the Rings, dwarves didn’t create the Ring, but they forged other powerful artefacts such as Narsil, the sword of Elendil, the dragon-helm of Dor-lòmin, and the Mithril Shirt which which was offered to Bilbo. They didn’t do only metal, since they also created the Arkenstone which glows in the dark, the magical music instruments played by Thorin and his companions after seizing Erebor. In the Silmarillion, one of the three silmarils is set on the Nauglàmir, the necklace of the dwarves.

The dwarves of yore made mighty spells,
While hammers fell like ringing bells
In places deep, where dark things sleep,
In hollow halls beneath the fells.

On silver necklaces they strung
The light of stars, on crowns they hung
The dragon-fire, from twisted wire
The melody of harps they wrung.

J.R.R Tolkien, The Hobbit

While dwarves from the nordic and germanic legends were, even in the etymological sense, autochtonous, Tolkiens’s ones, the twelve dawrves looking for their lost kingdom, are also somewhat jewish. So I could even have added the Ark of the Covenant and some more, but it would have started to get messy.

The idea that dwarves don’t use magic, or even avoid it, which has become popular in fantasy role-playing games, comes from a literary and historical misinterpretation. In mythology, and even in Tolkien’s books, when dwarves are impervious to magic, it’s because they are very good at it, not because they are inherently non-magical. Opposing an elven magic made of spells and a dwarven magic embodied in objects is also a very recent idea. Ancient texts don‘t even make a clear difference between dwarves and elves.

Adding these mythical and literary references in the game, in a tongue in cheek way, could have been an opportunity to state once more that cultural references are not to be ignored, but also not to be taken too seriously. Unfortunately, the magical properties of these « authentic » items didn’t always fit well with my game mechanisms and, anyway, the references wouldn’t have meant anything for players who didn’t know the items beforehand. I thought more important to give every card a name that could suggest its effect on the game than to add a few erudite winks. Also, in most of these stories, while dwarves forge, cast or mould magical artifacts, they don’t keep or trade them; swords and jewels usually end in the hands of gods, or sometimes of petty humans. Nevertheless, a game about dwarves and treasures is necessarily a bit about the Edda, a bit about the Niebelung, a bit about Tolkien, a bit about good old D&D  – and better mix them all, like Terry Pratchett did in literature.

Dwarfs have thousands of words for ‘gold’ but will use any of them in an emergency, such as when they see some gold that doesn’t belong to them.

Terry Pratchett,
Soul Music.

The two only direct references I made on the cards are the Grail, because while noone knows what the grail is, everyone knows about it, and the Eye of Zoltar. The latter was added during the latest revision of the game, and I wanted to call it an eye because its effect was similar with that of the Colored Eye, and another eye which I finally removed. Of course, I could have named it the Eye of Odin, but it would have felt a bit serious and pretentious. I finally went for the Eye of Zoltar, from Jasper Fforde’s eponymous novel. I had just read The Great Troll War, the next book in the Last Dragonslayer series, and could not resist quoting it. I urge you all to read the whole funny and clever series. Yes, it’s fantasy for teenage girls, a crowded genre, but it’s also much more than that.

A magnificent pink ruby the size of a gooses’e egg. It belonged to a wizard I admire greatly. You may find me… the eye of Zoltar.

Jasper Fforde,
The Eye of Zoltar

Dwarves and dragons

There are dragons in several of my games, including of course Dragons Gold, Fist of Dragonstones and, more recently, Dragons. The reason is, of course, that I am often inspired by the generic medieval fantasy setting in which I wallowed as a teenager, and which I still enjoy. I could not bring living dragons in Treasure of the Dwarves, where there is no violent fight, but most if not all of the coins, gems and shining or magical items traded must have belonged to a dragon at some time. They certainly have great value for dwarves, especially since old tales say that the first dragon, Fafnir, was originally a dwarf, gradually changed into an ugly monster by his fear and avarice.

The crown jewels

Far from the Germanic or Nordic forests, the dwarves seriously considered sailing to Japan to get regalia. Having decided, for game balance reasons, that there would be three or four different crown jewels of the King under the mountain, I had to decide what exactly they were. In France, and I think in most western countries, the first regalia we think of are those of the British crown. Unfortunately, the list is vague and there are, anyway, way more than three. This let me with two official sets of three items. Those from the Japanese emperor, which have never been shown to the public, are a sword, a mirror and a curved and mysterious jade stone. Those from the Austrian emperor, which can be seen in Wien in the Schatzkammer Museum, are a crown, an orb and a scepter.

I was first tempted to call my cards mirror, sword and jewel, because I believe, for more political than aesthetic reasons, that we should always try to mix cultural references in the most ironic and messy way possible (or should I write the most ironic and messy possible way?). My Japanese friends would have enjoyed the wink. The problem was the mirror, since it was obvious to me that only a card copying another card’s effect could be called mirror. So I went for the less known austro-hungarian jewels, crown, orb and scepter, which I had discovered when writing my PhD about unicorns – believe it or not, the scepter is made of unicorn horn. And since Austrian is in the Germanic world, it fits better with the Nibelungen and all that stuff, never mind mixing and irony.

Going farther

Thirty years ago, I often, usually in vain, suggested that publishers add a few blank cards in my games, so that players could try and add their own stuff. After all, that’s how I started enjoying game design, with adding alien powers and card effects in Cosmic Encounter. I don’t insist now, because if one likes and plays a game enough to want to add their own card effects, one also likes and plays it enough to buy card sleeves, and there are opaque back ones which allow one to personalize any game. That’s how I recently added a homemade cards to my copy of Vale of Eternity.
Anyway, it’s relatively easy to do this with
Treasure of the Dwarves, and you can email me your best ideas. Be wary, however, not to break the game’s balance. Some cards can be better than other ones, that’s what makes auctions meaningful, but not too much, or not always, or not for everyone. Be careful also with the global balance between the three main ways to score, coins, gems and cards.

First demos of the final game at Gama 2025.

Treasure of the Dwarves
A game by Bruno Faidutti
Art Roland MacDonald & Donald Crank
3 to 8 players – 45 minutes
Published by Trick or Treat Studios
Due in early 202
5

Trollympics

Comme la majorité des parisiens, et la quasi-totalité des bobos intellos, j’étais plutôt hostile aux jeux olympiques, dans lesquels je voyais un spectacle coûteux et un peu vulgaire et, surtout, la cause de l’annulation de la quasi totalité des habituels événements culturels estivaux de la capitale – y compris, dans le domaine du jeu, Paris est Ludique. J’en voulais beaucoup à Anne Hidalgo, la compétente et courageuse maire de Paris, de s’être laissée entraîner dans cette galère.

Après coup, même si beaucoup des causes de mes réticences sont toujours là, j’ai un peu changé d’avis. Cela a commencé avec la cérémonie d’ouverture. M’attendant soit à un festival de mièvrerie bien-pensante, soit à des « reconstitutions » historiques lourdingues façon Puy du Fou, je ne l’ai regardée intégralement que quelques jours plus tard, après en avoir vu des extraits intéressants, pour découvrir un spectacle provocant et intelligent, même si, comme l’éternité, c’était un peu long, surtout sur la fin.

J’aurais bien aimé que ce type soit représenté dans notre jeu, mais les illustrations ont été faites avant la cérémonie.

La frontière entre le sport et le jeu de société est extrêmement ténue, et parfois arbitraire Curieusement pourtant, le sport ne m’a jamais vraiment intéressé, ni comme activité, ni comme spectacle. Si certains sports ne sont que de simples et ennuyeuses mesures de performance, où l’on cherche juste à savoir qui court le plus vite ou saute le plus haut, beaucoup, notamment ceux où s’affrontent deux joueurs ou deux équipes, sont structurellement des jeux. Ce qui différencie le sport du jeu de société est bien sûr l’importance de la force physique, mais la tactique, la stratégie, la chance et même le bluff sont loin d’être absents des compétitions sportives. Certaines activités, qui mettent souvent en jeu la dextérité, comme la Pétanque ou même le Mollky, ont un statut ambigu, classés tantôt parmi les sports, tantôt parmi les jeux. Il n’y a pas qu’en français que le même verbe, jouer, est utilisé pour les jeux et pour de nombreux sports, et on parle d’ailleurs des jeux olympiques. Si de nombreux sportifs professionnels sont aussi adeptes des jeux de société, c’est parce que les deux activités répondent à la même angoisse, au même besoin de sortir du réel en se fixant des objectifs totalement arbitraires et dénués de sens.

Une autre différence importante entre sport et jeux de société, et c’est elle qui me gêne un peu, est l’importance donnée à la victoire. Le champion sportif est fêté, peut même recevoir une médaille, devenir célèbre, ce qui rompt le « cercle magique », la séparation stricte d’avec le monde réel qui est au cœur du jeu. Cela peut arriver dans certains jeux, et c’est sans doute la principale raison qui m’a fait renoncer au jeu d’échecs, mais c’est quand même plus rare et moins prégnant. Il y a des tournois de jeux de société mais, dès le lendemain, on a oublié qui a été vainqueur. Il y a des joueurs, des auteurs, des éditeurs de toutes nationalités, mais personne n’y attache trop d’importance. C’est différent dans le sport et, pour les jeux olympiques, j’avais peur que la combinaison de la compétition exacerbée et du spectacle flamboyant amène à une mise en scène un peu obscène des nationalités des athlètes, voire à une sorte d’hystérie nationaliste. C’est viscéral, je n’aime pas les nations.

Ayant pris soin de quitter Paris pendant les jeux, je n’ai donc pas assisté aux épreuves, et ne suis pas allé jusqu’à en regarder à la télévision, mais il me semble que ce piège a été largement évité. Les athlètes vedettes, ceux dont les images tournent en boucle sur les réseaux sociaux, ne sont pas toujours les vainqueurs mais aussi ceux dont l’attitude a semblé particulièrement sympathique, comme ce tireur turc avec la main dans sa poche. Si j’en crois les amis qui ont assisté à une ou deux épreuves, et quelques images vues ici et là, le nationalisme des supporters était aussi très ludique, personne ne prenant ça au sérieux. Les spectateurs maquillés aux couleurs de leurs drapeaux en deviennent même sympathiques, quand ils montrent, voire crient, que l’idée même de nation ne peut et ne doit pas être prise très au sérieux.

Bref, je ne vais pas me mettre à faire de la boxe ou regarder des matchs de foot, mais c’était finalement un beau spectacle. L’intelligence de la cérémonie d’ouverture a aussi finalement fait passer le fait que tant d’autres spectacles culturels ont été annulés l’été dernier.

Au fait, j’ai conçu, avec mon amie Camille Mathieu, un jeu de cartes et de dés sur les jeux olympiques, ou plutôt Trollympiques. L’action de Trollympics se déroule dans le même univers que celle de notre jeu Trollfest, avec des épreuves de rodeo licorne et de lancer de nain. Nous n’avons pensé que trop tard au crowdsurfing synchronisé. Rien de si extraordianire, en fait – saviez-vous que parmi les disciplines représentées aux vrais jeux olympiques ont figuré, à une date ou une autre, le tir aux pigeons vivants, le toilettage de caniches, le tir à la corde, le plan d’urbanisme et la peinture artistique ?

Trollympics avait été imaginé avant Trollfest, mais nous avions d’abord signé avec un éditeur hollandais qui a cessé son activité, nous rendant les droits sur le jeu. Étant très heureux de l’édition de Trollfest, et notamment des splendides dessins de David Hartman, nous avons  récupéré les droits, nous avons tout naturellement contacté Trick or Treat games, et tout est allé assez vite – pas assez cependant pour rattraper le retard dû à l’épisode hollandais et sortir au moment des jeux olympiques.

Comme Trollfest, Trollympics est un jeu « poids moyen », ce que l’on appelle parfois un jeu « familial », même si l’on y joue surtout entre amis. Tout comme Trollfest a parfois été décrit comme « les Aventuriers du rail avec de l’humour et de l’interaction », on pourrait décrire Trollympics comme « Seven Wonders avec de l’humour et une brouette de dés ». Une partie se déroule en deux manches, les jeux d’hiver puis ceux d’été. À chaque manche, les joueurs se constituent en « draftant » une écurie d’athlètes qu’ils vont ensuite assigner aux différentes épreuves, qui ne sont pas toujours exactement celles qui étaient prévues. Bien évidemment, un nain sera plus performant dans l’épreuve de coupe de bois, et un elfe dans celle de patinage artistique. Ajoutez à cela quelques cartes pour embêter ses adversaires, voire tricher un peu et corrompre les jurés, et un système de paris, et cela donne un jeu de cartes et de dés rapide et mouvementé.

C’est après avoir terminé cet article que j’ai réalisé que j’aurais peut-être mieux dû comparer les jeux de Trollympics à ceux de la Grèce antique qu’à ceux d’aujourd’hui. Les jeux des trolls, des nains et des elfes sont en effet sans doute plus proche de ceux des Athéniens et des Thébains – on arrête de se foutre sur la gueule une quinzaine de jours et pour pouvoir se saouler la gueule ensemble au soleil.

Trollympics
Un jeu de Camille Mathieu et Bruno Faidutti
Illustrations de David Hartman
3 à 6 joueurs – 45 minutes
Publié par Trick or Treat Studios (2025)
Boardgamegeek



Like most Parisians, and almost all Parisians intellectual hipsters, I was originally hostile to Olympic games. I considered them an expensive and rather vulgar event and, most of all, the reason why almost all Parisians summer cultural events had been cancelled, including boardgame events such as Paris est Ludique. I was a bit angry against our excellent and courageous mayor, Anne Hidalgo, wondering how she got lured into this mess.

After the event, while some of my reservations are still there, I have nevertheless changed my mind. It started with the opening ceremony. I was expecting either a soppy and cutesy ballet, or a succession of clumsy Disneyish pseudo-historical reconstructions, something at which French parks like the Puy du Fou are very good. As a result, I didn’t bother to watch it at once, and only saw it a few days later after having seen a few strange extracts. It was a clever and thought-provoking spectacle, even if, like eternity, it felt a bit long, especially near the end.

I would have liked to see this guy featured in our game, but the art was made before his appearance in the ceremony.

Surprisingly, while the distinction between sports and games is razor-thin and sometimes arbitrary, I have never been much interested in sport, neither as an activity nor as a spectacle. Indeed, while some sports are just plain and boring contests on who runs the fastest or jumps the highest, many, especially those in which two opponents or two teams are facing each other, have the same structure as boardgames. Of course, what makes them different is the main role of physical strength or ability, but tactics, strategy, luck and even bluff are also part of most matches. Some activities, often based on dexterity like Bocce or Mollky, even have an ambiguous status and depending on the social context are called sometimes games, sometimes sport. In many languages, the same verb – to play in English – can be used for both activities. And, of course, we’re now talking of the Olympic “games”. The reason why so many sportsmen are also avid boardgamers is indeed that both activities give more or less the same answer to the same existential anguish, being an opportunity to leave reality for a while with focusing on arbitrary and meaningless goals.

What has always bothered me with sports, and it’s a difference with boardgames, is the excessive importance of victory. The winner is celebrated, can even win a medal and become a star, which breaks the « magic circle », the strict separation with reality which is at the heart of any game. It can happen with boardgames, and is probably the main reason why I gave up chess, but it’s not as systematic and never as strong. There are boardgames tournaments, but no one ever remembers who won them. There are gamers, game designers, game publishers from different parts of the world, but no one tries to oppose them and find out who is better. I was really afraid that, with Olympic games, the mix between exacerbated competition and public performance could lead to an unhealthy staging of athletes’ nationalities, or even to a kind of nationalist hysteria. I viscerally dislike nations.

This is why I carefully left Paris during the games, didn’t attend any olympic event and didn’t even watch a single one on TV. I might have been wrong, since it seems that the nationalist competitive trap has mostly been avoided. The most celebrated athletes, those whose image I saw on social networks, are not always the winners but also those whose attitude looked nice, like this Turkish hand-in-pocket shooter. If I am to believe my friends who attended a few events, and the pictures I’ve seen here and there, the supporters’ nationalism was very lighthearted and playful. This even makes the spectators with make-up in their national flag colors look nice and clever, showing that the nation idea itself cannot and should not be taken seriously.  

I’m not going to start watching boxing or football matches, but I must admit that it was, by all accounts, a nice and healthy show. And the clever opening ceremony made me forget that so many other cultural events had been cancelled last summer.

And, by the way, I’ve designed with my friends Camille Mathieu a card and dice game about the Olympic, or rather the Trollympics, games. Trollympics is set in the same universe as our Trollfest, and has events such as Unicorn Rodeo, Dwarf Tossing, and Standing on the Shoulders of Giants. Unfortunately, it was too late when tought of adding synchronized crowdsurfing, which would have fitted well. Nothing so outstanding – did you know that, at one date or another, Live pigeon shooting, poodle clipping, tug of war, town planning and artistic painting have been olympic sports ?

Trollympics was designed before Troillfest, but we had first signed with Dutch publisher which went out of business before it could publish it. Since we were really happy with the edition of Trollfest, Camille and I then logically contacted Trick or Treat games. Everything went relatively fast, but not fast enough to make for the delay caused the Dutch episode and publish the game in time for the Paris Olympics.

Like Trollfest, Trollympics is a light and casual game, more suited to family and friends than to hardcore boardgamers. Trollfest has sometimes been described as “Fantasy Ticket to Ride with humor and interaction”, Trollympics could similarly be described as “Fantasy Seven Wonders with humor and tons of dice”. A game of Trollympics is made of two successive parts, Winter and Summer games. In both parts, players first draft a hand of athlete cards which are later sent to the various events, which are not always the ones originally scheduled. Of course, a Dwarf is likely to be better at Timber Cutting and an elf at Figure Skating. With a few action cards to meddle with opponents’ plans, or even cheat and corrupt the jury, and even a betting system, it makes for a fun and fast paced card and dice game.

It’s only after having finished this article that I realized I should may be rather have compared the Trollympics to the ancient Olympice games than to the modern ones. The games of trolls, dwarves and elves are indeed probably more similar with those of Anthenians and Thebans – people just stop fighting each other for real for one or two weeks to have fun getting drunk together in the sun.

Trollympics
A game by Camille Mathieu & Bruno Faidutti
Art by David Hartman
3 to 6 players – 45 minutes
Published par Trick or Treat Studios (2025)
Boardgamegeek

Halloween Party

Halloween Party est une nouvelle version d’un jeu de cartes déjà assez ancien, conçu avec Gwenaël Bouquin, et originellement publié il y a une quinzaine d’années sous le nom de Toc Toc Toc ! Les quelques modifications apportées aux règles à l’occasion de cette nouvelle édition visent à rendre le jeu plus varié, plus tendu et plus équilibré.

Le principe est tout simple. Chaque joueur a une main de cartes et, à son tour, pose une carte personnage face cachée devant un autre joueur en disant « toc toc toc ! ». Le joueur devant lequel est posé la carte doit alors choisir entre ouvrir la porte, et laisser le personnage entrer, rejoignant ainsi sa petite fête de Halloween, ou refuser d’ouvrir, auquel cas le personnage s’en va chez le joueur qui avait d’abord joué la carte. Bien sûr, si la plupart des convives sont bienvenus, et certains, comme les musiciens, particulièrement appréciés, d’autres doivent être évités avec soin, comme les ivrognes ou le terrible chevaliers ans tête. La pioche étant face visible, chacun finit par savoir plus ou moins quelles cartes les autres joueurs ont en main, et l’on peut essayer de deviner ce qu’ils nous proposent. C’est donc un jeu de bluff tout simple, accessible aux plus jeunes mais assez fourbe pour séduire les joueurs avertis

 Lorsque la sympathique équipe américaine de Trick or Treat m’a contacté, à la recherche de jeux de société dont le thème pourrait leur convenir, c’est bien sûr ce jeu qui m’est d’abord naturellement venu à l’esprit. Je ne suis pas le seul à avoir fait le même raisonnement puisque Emerson Matsuuchi leur a proposé son Tricks and Treats, dans lequel les joueurs sont des enfants rivaux allant de maison en maison, essayant de récupérer les meilleurs bonbons. Je n’ ai pas encore joué à Trick and Treats, mais je suis à peu près certains que c’est aussi le genre de petit jeu de bluff que mes amis et moi apprécierons.

Halloween Party
Un jeu de Gwenaël Bouquin and Bruno Faidutti
Illustré par Drew Rausch
3 à 5 joueurs – 20 minutes
Publié par Trick or Treat Studios
Boardgamegeek

Halloween Party is a new and version of an older game, Knock Knock!, designed with Gwenaël Bouquin and originally published more or less fifteen years ago. There has been a few changes in the rules, mostly for more tension, more variability and a better balance.

The idea is extremely simple. Each player has a small hand of cards and, on their turn, plays a face-down character card in front of another player, saying “knock, knock!”. The player in front of whom the card was played can either open the door, and let the character enter their Halloween party, or keep the door closed, in which case the character moves to the party of the player who initially played the card. Of course, while most guests are welcome, and a few ones like the musicians sought-after, other ones, like drunkards or the harrowing headless horseman, should better be avoided. The drawing deck being face-up, every player ends up having some idea of the cards in other players’ hands, and can therefore try to make an informed guess of who is knocking at the door. This makes for a simple bluffing game, which can be played with kids but still has enough subtlety for old poker players.

When the team at Trick or Treat Studios, wanting to start a fittingly themed boardgame line, contacted me, this one immediately jumped to my mind. I was not the only one thinking this way, since Emerson Matsuuchi proposed his Tricks and Treats, in which players are rival kids going from house to house, trying to get the best candies. I’ve not played Trick and Treats yet, but it also looks like the kind of light bluffing game me and my friends are likely to enjoy playing.

Halloween Party
A game by Gwenaël Bouquin and Bruno Faidutti
Art by Drew Rausch
3 to 5 players – 20 minutes
Published by Trick or Treat Studios
Boardgamegeek

TrollFest

Camille Mathieu est une amie, une habituée de mes soirées jeux. Elle m’accompagne aussi souvent à des concerts, surtout mais pas seulement metal, ou du moins m’accompagnait du temps où il y avait un peu plus de concerts. Camille étant aussi correctrice littéraire, spécialisée dans l’imaginaire, il y avait une certaine logique à ce que nous finissions par travailler ensemble sur un jeu de société mettant en scène des groupes de rock composés de nains, d’orques et d’elfes. 

Dès le début, je pensais appeler le jeu TrollFest, Camille pensant plutôt à Elfest. Notre premier essai, un jeu de cartes, fonctionnait plutôt bien mais le thème rock and roll ne collait pas parfaitement avec les mécanismes. Très vite, les guitaristes, bassistes ou batteurs figurant sur les cartes sont devenus des sportifs participant à des compétitions de lancer de nain, de tricot ou de bataille de boules de neige, et TrollFest est devenu Trollympics. Ce jeu a en principe trouvé un éditeur il y a un petit moment déjà, mais tout est compliqué en ce moment, et comme on a déjà raté les jeux olympiques de 2021, je crains qu’il ne sorte que pour les prochains. Si TrollFest a du succès, cela accélèrera peut-être les choses !

Partie de test à Etourvy, avec Camille (à gauche).

Le cœur de l’activité d’un groupe de rock, ou en tout cas de l’image que l’on en a, n’est en effet pas le choix des musiciens mais la tournée. Pour notre deuxième essai, nous avons donc opté pour un vrai jeu de plateau, avec une carte où figurent des villes, les lieux de concerts, et les routes qui les relient, quelque chose que je fais de moins en moins souvent, essentiellement parce que je suis nul en dessin.

Partie de test chez moi, à Paris. Vincent réfléchit. Camille aussi, plus discrètement.

Une partie de TrollFest se déroule désormais en trois temps. Les joueurs choisissent d’abord des cartes action et musicien et constituent chacun un groupe amateur d’au moins quatre membres, un chanteur, un guitariste, un bassiste et batteur. Chacun quitte ensuite sa région d’origine pour une vaste tournée, allant de ville en ville, donnant des concerts, recrutant à l’occasion de meilleurs musiciens, embauchant même parfois des dragons pour le transport et les lumières. Les concerts les plus réussis, ceux qui rapportent le plus de points, sont dans les cités qui ont soif de culture, celles où l’on n’a pas vu passer grand monde depuis longtemps, et surtout dans celles dont le public est particulièrement réceptif à votre style musical – en gros, les nains aiment la musique de nains et les trolls la musique de trolls. S’il est peu utile d’essayer de jouer de la pop elfe chez les trolls, des big bands de fusion multiculturelle peuvent tirer leur épingle du jeu un peu partout, surtout s’ils recrutent quelques figures marginales, gnome ou kobold, ou exotiques, sirène ou minotaure. Des événements imprévus, désaccords entre musiciens, tempête de neige ou gilets jaunes, viennent parfois semer le trouble. Rien n’est plus classe, bien sûr, que de terminer sa tournée en retournant dans sa ville d’origine à dos de dragon. 

Vient ensuite le TrollFest, clin d’œil au Hellfest, le grand festival, où les groupes se succèdent sur scène, applaudissements et rappels allant aux plus techniques, aux plus charismatiques, aux plus énergiques et paradoxalement tout à la fois aux plus authentiques et aux plus multiculturels. Au fait, il y a un groupe de folk–metal norvégien très sympa qui s’appelle TrollFest, et qui chante en trollspråk, langue qui est – on aurait dû s’en douter – un mélange de norvégien et d’allemand. Du coup, on va leur faire un peu de pub et on espère qu’ils nous en feront aussi.

Trollfest a l’apparence d’un gros jeu, avec une grosse boîte carrée, un plateau de jeu, des cartes et des pions nombreux et de divers types, plusieurs manières de marquer des points. Les règles en sont pourtant très simples, puisque celles de nos prototypes tenaient sur une simple feuille de papier A4. Le jeu étant resté en développement assez longtemps, et mes amis demandant souvent à jouer sur le prototype, Camille et moi avons sans cesse été tentés d’y ajouter de petits éléments thématiques qui nous semblaient rigolos. Pendant quelques temps, nous avons même essayé de personnaliser encore plus les musiciens, quelques uns d’entre-eux étant de vraies stars avec des nombreux fans, mais ayant, comme toutes les stars, des caprices – un chanteur elfe raciste refuse de jouer avec des nains, un orque ne se produit pas dans les villes elfes, un nain a peur des dragons et ne se déplace pas par voie aérienne, un autre a le mal de mer et ne monte pas sur les navires. Très amusants sur le papier, ces effets qui étaient surtout des restrictions, ralentissaient le jeu et étaient souvent oubliés, nous avons donc dû les abandonner. Aujourd’hui, surtout avec l’effet kickstarter, beaucoup d’auteurs de jeux sont tentés de toujours ajouter des éléments à leur création. Il ne faut pas se l’interdire, et dans TrollFest le jour de la marmotte est par exemple un ajout de dernière minute qui ajoute un peu de tension, mais je voudrais profiter de cet article pour donner ce conseil aux jeunes auteurs: méfiez-vous des petites règles qui ont l’air marrantes mais qui, finalement, apportent surtout de la complexité. Quand les joueurs oublient souvent une règle, cela signifie généralement qu’elle est inutile.

Au printemps 2021, j’ai été contacté, en même temps que d’autres auteurs connus come Tom Lehmann, Richard Launus ou Richard Garfield, par l’équipe de Trick or Treat Studios, un important fabricant américain de masques inquiétants, de costumes de Halloween et de bidules à collectionner désireux de se lancer dans le jeu de société. Je leur ai donc proposé les deux jeux de mon catalogue qui me semblaient thématiquement les plus proches de leurs univers, et ils ont, à ma grande surprise, décidé de publier les deux. Je pensais que l’autre, un petit jeu de cartes, sortirait d’abord mais c’est visiblement TrollFest qui les a le plus amusés. Il est vrai que, lors d’une discussion en ligne avec toute l’équipe, nous avons constaté que leurs goûts musicaux n’étaient pas très différents des nôtres, et qu’ils étaient responsables des costumes de quelques groupes de metal, et notamment des masques de Ghost

Leur illustrateur, David Hartman travaille aussi avec Rob Zombie, musicien metal et réalisateur de films d’horreur, pour lequel il a réalisé les clips de American Witch et Lords of Salem, et les illustrations de ses albums. David a visiblement pris beaucoup de plaisir à dessiner les nombreux musiciens de TrollFest, ce qu’il a d’ailleurs fait avec une vitesse impressionnante. Son style est sombre et sanglant, mais aussi léger et plein d’humour, et assez différent de ce à quoi nous sommes habitués dans le monde du jeu – mais je crois qu’on va le retrouver dans d’autres production de Trick or Treat Studios

Leur programme initial comprend, outre notre TrollFest, Blood Orders, un jeu de vampire relativement ambitieux de Nick Badagliacca (mais je ne vais pas lui faire trop de pub, moi aussi j’ai un jeu de vampires qui vient de sortir, Vendetta) et World-Z League, de David Gregg, un jeu de baston avec des élastiques et des zombies qui me fait très envie.

Je les ai vus sur scène, et c’était un peu décevant.

Ceux qui me connaissent seront peut-être un peu surpris de voir, dans TrollFest, un artifice thématique que j’avais jusqu’ici plutôt évité, celui de la rivalité entre peuples fantastiques – les américains parlent de races -, elfes, nains, orques, trolls et vampires. J’ai toujours été un peu gêné par le lien évident entre ces univers de fantaisie ludique et littéraire et la tendance, en particulier dans le monde anglophone, à essentialiser race et culture, tout en prétendant bien sûr faire le contraire, et j’en ai déjà discuté un peu sur ce blog. Je me méfie des identités, des traditions, des authenticités toujours reconstruites et souvent réactionnaires, et pense que nous avons tort de fétichiser des différences culturelles finalement assez superficielles. Si je les ai pourtant mis en scène dans ce jeu avec une certaine jubilation, c’est pour toute une série de raisons.

Camille (à gauche) et Croc (au centre) jouant à Trollfest à Etourvy.

Les nains, les elfes et les autres peuples de TrollFest ne sont pas là pour se foutre sur la gueule. La musique adoucissant les mœurs, ils cohabitent très pacifiquement, du moins tant qu’ils n’ont pas forcé sur l’hydromel. On peut certes gagner à TrollFest avec un groupe de musique traditionnelle naine, authentique et sans doute réac, voire avec du metal orc ou elfe un peu facho, mais aussi, comme d’ailleurs dans la scène musicale d’aujourd’hui, en montant un joyeux orchestre bordélique et multiculturel. 

J’apprécie beaucoup ceux qui mélangent tout et n’importe quoi en refusant de prendre les identités au sérieux, comme Gogol Bordello, The Cherry Coke$, Dakhabrakha, the Amsterdam Kletzmer Band, La caravane passeou le bien-nommé Kultur Shock, et c’est ce genre de musique, autant que du metal, que j’écoutais en travaillant sur TrollFest. C’est pour cela que, sur ma playlist Trollfest, j’ai mis des musiques d’un peu partout et pas juste du metal germano-nordique, dont le style correspond pourtant le mieux à nos univers fantastiques, ne serait-ce que parce qu’il puise aux mêmes sources.
La musique est aujourd’hui, avec la cuisine, l’un des rares domaines culturels où le mélange des genres joyeux et décomplexé semble encore l’emporter sur les tristes replis identitaires. J’espère bien que cela va durer et même rebondir sur d’autres domaines quand on aura réalisé que la véritable diversité se vit tous ensemble et non chacun dans son coin, que c’est non seulement plus rigolo mais aussi, au fond, plus honnête et plus respectueux. C’est peut-être aussi pour cela que je ne suis pas fan des jeux de Roll & Write.

Quoi qu’il en soit, les univers fantastiques sont sans doute plus une illustration qu’une cause de la lecture essentialiste des catégories sociales, à l’américaine, qui gagne aujourd’hui l’Europe. Il n’y a donc pas de risque à en faire usage, surtout lorsque c’est, comme dans TrollFest ou dans les romans de Terry Pratchett qui en sont une des inspirations, pour s’en moquer gentiment. 

Et puis, merde, ce n’est qu’un jeu. Dire ceci n’est pas une boutade, c’est un argument important dans une société qui semble prendre de plus en plus les univers virtuels, ludiques ou littéraires, plus au sérieux que le monde réel – ce qui est surtout un moyen de prétendre faire de la politique en évitant de s’attaquer aux vrais problèmes.

TrollFest
Un jeu de Camille Mathieu et Bruno Faidutti
Illustrations de David Hartman
3 tà 6 joueurs – 45 minutes
Publié par Trick or Treat Studios (2022)
Boardgamegeek
Playlist


Camille Mathieu is a good friend, and a regular at my Parisian game nights. We often attend concerts together, mostly but not obly metal, or at least we did when there were still concerts. Camille also works as a proofreader, specialized in fantasy literature. It is only logical that we ended up designing a boardgame together featuring rock bands composed of dwarves, orcs and elves. 

From the very beginning, I wanted to call our game TrollFest, while Camille thought of Elfest, a reference to the French metal festival Hellfest. Our first prototype was a pure card game. It worked really well, but the rock’n’roll theme didn’t really fit with the game system. Soon, the singers, drums or guitar players became athletes competing in dwarf tossing, knitting or snowball battle, and the first TrollFest became Trollympics. The game has found a publisher, but everything is a bit complex nowadays, we already missed the 2021 olympics, and I’m afraid it will only be published for the next ones. If Trollfest is a hit, it might speed things a bit.

Palytesting Trollfest in Etourvy. Camille is the girl with the raven tattoo.

The core of a band activity, or at least of how we imagine it, is not the choice of musicians but the tour. For our second try, we decided to do a big box game with a real board, a map of the fantasy world with cities, concert venues and roads.

Et partie de test chez moi, à Paris.

A game of TrollFest is made of three phases. At the beginning of the game, players draft action and musician cards and build an amateur band of at least four musicians, a singer, a drummer, a guitar and a bass guitar player. Every group then leaves its starting city for a big tour around the country, moving from town to town, holding concerts, sometimes recruiting additional or better musicians, sometimes even hiring dragons for the final light show. The main way to score points during the tour is to give concerts. The most successful ones are in the cities where the local crowd is most receptive to your musical style – basically, dwarves like dwarven music played by dwarven musicians, trolls like troll music played by trolls, etc. While playing elf pop in orc city halls makes little sense, multicultural big bands can have some success everywhere, especially if they also recruit a few exotic characters, like a siren or minotaur. Unexpected events such as disagreement between musicians, snow storm or yellow vests blocking the roads sometimes interfere with the band’s well planned tours. Nothing is more classy, of course, than to arrive on a dragon’s back to end one’s tour in one’s home city.

Then comes the big rock festival, the TrollFest, named after HellFest. All the bands play on the main stage, and the best performances score extra points for charisma, technical skill, energy and, paradoxically, both authenticity and diversity. By the way, there’s a fun Norwegian folk-metal band names TrollFest. They sing in trollspråk which is, not surprisingly, a mix of German and Norwegian. If this game is good press for them, may be they’ll reciprocate!

David made this exra drawing just for fun, let’s hope we’ll find some place for it in the rules.

With its big square box, lots of cards and various tokens, and several ways of scoring points, Trollfest might look like a big and intimidating game. It isn’t, it’s almost as straightforward as Ticket to Ride, and the rules of my prototype were written on a single sheet a paper. However, since the game was in development for quite a long time, and some of my friends really liked it and often asked to play it, Camille and I were often tempted to add a thematic elements which sounded like they could add some fun to it. For a while, some musician cards had special abilities or, mostly, restrictions. A few of them were big names with, like every star, bizarre whims. A racist elf singer didn’t want dwarves in the band. An orc didn’t want to play in elf cities. A dwarf was afraid of dragons and coul not travel by air, another one suffered from seatsickness. This sounded fun when writing it, but it slowed the game and, too often, the players forgot these effects so we had to abandon them. These last years, in part due to publishers asking for Kickstarter stretch-goals, many designers have been tempted to add layers and layers of rules and elements to their game, and many games feel interesting but overdevelopped. The late addition of stuff is not always a bad idea, and in Trollfest, for example, the Groundhog Day has been added in the very last weeks of testing and really adds some fun tension to the game. I would like, however, to give a small piece of advice to young designers – be careful when adding small rules which sound fun and thematic but often add unnecessary complexity. If players tend to forget a rule, it usually means it’s not necessary.

In the fall of 2021, I was contacted, together with other well known game designers such as Tom Lehmann, Richard Launius and Richard Garfield, by the people at Trick or Treat Studios, a major US producer and seller of Halloween masks, scary costumes and collectibles, who wanted to move into boardgaming. I showed them the two games in my catalog which seemed to fit best with their universe and, to my surprise, they decided to do both. I thought the other one, a small card game, would be published first but they were very excited by TrollFest, and its development went very fast. We had a long zoom session with the whole team and found that we had similar musical tastes, and that they were designing the costumes of a few metal bands, including the scary masks for Ghost.

Their graphic artist, David Hartman, also works with Rob Zombie, a metal musician and horror movie producer. He made the video clips for the movies Lords of Salem and American Witch, and the art for his albums. His style is of course dark and gore, but also light and full of humor, and he visibly had great fun drawing the musicians for TrollFest, which he did incredibly fast. It’s different from what we are used to in the boardgaming world, but I think we will see it also in other games by Trick or Treat Studios.

Among the Trick or Treat launch line are also Blood Orders, an ambitious vampire card game by Nick Badagliacca (but I won’t promote it too much since I also have a new Vampire game, Vendetta) and World-Z league, by David Gregg, a battle game with zombies and rubber bands which looks really fun and which I’m eager to play.   

Trollfest, le groupe.

Those who know me might be surprised to find in TrollFest a thematic trick I’ve always been extremely wary of, the rivalry between irreductibly different fantasy races – here elves, dwarves, orcs, trolls and vampires. The obvious relation between these literary or gamey fantasy worlds and the habit, mostly in the United States, to essentialize race and culture (while pretending to do the opposite) has always made me feel uncomfortable, and I’ve already discussed it a bit on this website. I’m wary of identities, of reactionary traditions, of reconstructed authenticities, and I think we are wrong in emphasizing and fetishizing cultural differences which are, in the end, extremely superficial. I nevertheless jumped in head first in fantasy races with this game, for several reasons. 

Ignacy Trzewiczek and friends playing the newly released Trollfest in Etourvy.

Dwarves, elves, trolls and other races in TrollFest are not here to fight. Music soothes the mood and they coexist very peacefully, at least as long as they don’t drink too much mead. One can win in TrollFest with a traditional dwarven music group, very authentic and backward-looking, or even with a vaguely fascistic elven or orc metal band, but also, like in today’s musical scene, with a merry and messy multicultural big band. Cultural mess is not cultural appropriation, because it’s going in every direction and not taking anything seriously.

I personally like bands who borrow everywhere, mix everything and refuse to consider culture a frozen thing, bands like Gogol Bordello, The Cherry Coke$, Dakhabrakha, the Amsterdam Kletzmer Band, La caravane passe or the well named Kultur Shock. When working on TrollFest, I was more listening to that kind of music than to metal. It’s also why my Trollfest Youtube Playlist has lots of strange fusion music from all over the world and not just german-scandinavian metal, even when the latter fits better with how we imagine a fantasy world which comes from the same sources.
Music is now, together with another passion of mine, cooking, one of the few cultural domains where diversity produces a joyful and uninhibited mix and not a sad retreat into segregated and fantasized identities. I hope it will stay so. It might even bounce back into politics, when everyone will realize that diversity is better all together than each in his corner (can you say this in English?), that it’s not only more fun but also, in the end, more honest and respectful. May be that’s also why I’m not that fond of roll & write game
s – games, like music, are better when played together.

Bruno Cathala playing Trollfest in Etourvy.

Anyway, medieval fantasy worlds are an image, and not a cause, of the essentialist understanding of social structure, a kind of analysis which first got popular in the US but is now becoming commonplace in European politics. Using fantasy races should therefore not be a problem, especially in humorous and obviously ironic settings, like inTrollFest or in Terry Pratchett novels, which have been one of the inspirations for this game.

And, fuck, it’s just a game. Saying this is not just a wisecrack, it’s an important argument when politics seem sometimes to take fantasy universes, be they literary or gamey, more seriously than the real world.

TrollFest
A game by Camille Mathieu and Bruno Faidutti
Art by David Hartman
3 to 6 players – 45 minutes
Published by Trick or Treat Studios (2022)
Boardgamegeek
Playlist

We forgot to put Zombies (and kobolds, and others) in Trollfest, but of course, there are zombie bands !