Mystère à l’Abbaye, 3e édition
Mystery of the Abbey, 3d edition

Le financement participatif n’est plus, dans l’édition ludique, une nouveauté mais je continue à me poser pas mal de questions sur l’impact de Kickstarter, et aujourd’hui de son concurrent Gamefound, sur le marché du jeu.
Côté plus, cela permet la sortie de jeux très ambitieux, ou de rééditions, comme aujourd’hui avec The Artemis Odyssey et Mystère à l’Abbaye, qui n’auraient sans doute pas vu le jour sans cette possibilité. Cela a permis l’apparition de  tout un écosystème de petits studios d’édition, les italiens de Mojito Games en sont un, qui n’auraient  pas pu financer de tels projets par les procédés plus classiques. J’achète d’ailleurs beaucoup de jeux sur Kickstarter, un peu moins sur Gamefound.
Côté moins, cela encourage les jeux surproduits, plein d’extensions et de matériel inutile à une époque où l’on devrait plutôt chercher la sobriété. Cela ne profite guère aux tout petits jeux, qui sont de plus en plus mon centre d’intérêt, et contribue à ce que le milieu des joueurs reste un milieu d’initiés. Surtout, même avec l’invention récentes des pledges groupés pour les revendeurs, cela marginalise les boutiques spécialisées, un peu comme Amazon et les liseuses tuent lentement les librairies.

Pour les auteurs, c’est compliqué. Je n’aime pas le travail de promotion supplémentaire sur les réseaux sociaux que nous devons faire, ou que nous sentons obligés de faire, lorsque l’un de nos jeux arrive sur Kickstarter ou Gamefound, mais je suis content lorsque cela permet la sortie d’un jeu qui n’aurait sans doute pas été publié autrement, et c’est le cas de cette nouvelle édition. Et puis, il y a le problème du calcul des droits d’auteur sur les jeux en financement participatif. Si l’on accepte un pourcentage un peu plus faible du CA éditeur parce que le jeu sera vendu directement, on se retrouve lésé lorsque, après le lancement initial, il est retiré pour une vente en boutique. Et les contrats avec plusieurs taux selon le mode de distribution deviennent vite des usines à gaz. Ou alors, on base les contrats sur le prix boutique, mais on tombe alors dans d’autres problèmes….

Je ne sais même plus ce qu’il y a à ce sujet dans le contrat de Mystère à l’Abbaye, il faudrait que j’aille vérifier, mais je suis très heureux de voir arriver cette nouvelle version de ce qui fut l’une de mes premières collaborations avec mon ami Serge Laget. Il est malheureusement mort avant d’avoir pu voir les boites de cette troisième édition, ni d’ailleurs celles de The Artemis Odyssey ou celles de Castel (et je commence à me demander si ce dernier va vraiment sortir).

La troisième édition de Mystère à l’Abbaye est publiée par un petit éditeur italien, Mojito Studios, qui s’est fait une spécialité des rééditions un peu luxueuses de jeux des années 2000. Avant de signer, Serge et moi avon d’ailleurs demandé l’avis de Bruno Cathala et Ludovic Maublanc, auteurs de Cléopatre et les Architectes, qui nous ont dit que tout s’était très bien passé pour eux et que l’on pouvait y aller. Tout s’est aussi très bien passé pour nous.

Pour ceux qui ne le connaissent pas, Mystère à l’Abbaye est t un jeu de déduction familial d’un format très classique, hommage tout à la fois au Cluedo, pour les mécanismes, et au Nom de la Rose, pour l’histoire, même si le jeu prend bien des libertés avec ces deux sources d’inspiration. Un moine est mort, et ses collègues, les joueurs, enquêtent pour trouver l’assassin. Des cartes permettent d’innocenter certains occupants de l’abbaye, les livres de la bibliothèque donnent accès à des indices, et les rumeurs circulent à la sortie de la messe. Quand on en sait trop, il faut parfois faire vœu de silence. Vous trouverez plus de détails dans l’article que j’avais consacré, en 2012, à la deuxième édition.

Les changements sont peu nombreux pour cette nouvelle édition, for joliment illustrée par Naïïade. Par souci de simplification, nous avons retiré du jeu de base la Crypte, que peu de joueurs utilisaient, mais elle revient sous la forme d’une mini-extension avec le kickstarter, tout comme quelques nouvelles cartes sorties pour moitié de notre imagination ou de celle de l’éditeur, pour moitié des forums assez actifs consacrés à ce sujet. Les Templiers de l’édition Days of Wonder, dont on se demandait un peu ce qu’ils faisaient là, sont enfin redevenus des Dominicains comme dans la toute première édition, chez Multisim. Comme pour Cléopatre, l’édition devrait être assez luxueuse, tout ça. Elle est prévue pour l’instant en Anglais, Italien et Espagnol, mais il y aura probablement, peut-être plus tard, des boîtes en français. Je trouverais rigolo de faire une version en latin, mais je ne suis pas certain qu’il y ait un marché pour cela, et mon latin un peu rouillé n’est pas assez bon pour prendre en charge la traduction.

Mystère à l’Abbaye
Un jeu de Serge Laget et Bruno Faidutti
Illustré par Naïïade
3 tà 6 joueurs – 60 minutes
Publié par Mojito Studios
Prévu pour 2024
Boardgamegeek



Boardgames Crowdfunding is nothing new any more, but I am still wondering what will be the lasting effects of Kickstarter, and now its competitor Gamefound, on the boardgame market and business. On the bright side, it makes possible the publishing of ambitious projects, or of new editions of older games sur as, for example, The Artemis Odyssey  and Mystery of the Abbey, which would probably not have been possible without it. It made possible the emergence of a bunch of new small publishers such as the Italian Mojito Games, which would not have found the funds to start their business otherwise. I buy many such games on Kickstarter, and a few ones on Gamefound. On the dark side, it favors big and often overproduced games, filled with unnecessary expansions and showy components, in a time where we should focus on sobriety. It’s not made for smaller and lighter games, on which I am focusing on now. It makes boardgames an even more geeky and insiders’ world. Most of all, even when some campaigns now have shop grouped pledges, it marginalized the friendly local game shops, a bit like Amazon and tablet are slowly killing bookshops.

On the designer’s side, things are also ambiguous. I don’t like the extra work of promoting a new Kickstarter or Gamefound campaign on social networks, but I am happy when, like with this new edition of Mystery of the Abbey, it makes possible something which would probably never have happened otherwise. The royalty rate is also an issue. If we accept a smaller rate based on turnover because the game will be sold directly, we end up wronged if, after the initial crowdfunded print run,  a new one one is made for standard shops. On the other hand, contracts with different rates depending on the distribution network soon become Rube-Goldberg machines. And it’s another story if based on MSRP.

I don’t remember what we decided for Mystery of the Abbey, I should check, but I am very happy to see that one of my first codesigns with my late friend Serge Laget is back. Serge unfortunately died too soon to see the copies of this next edition, as well as those of the Artemis Odyssey or of the new Castle – if the latter is finally published, which is far from certain.

The new edition of Mystery of the Abbey is published by a small Italian publisher, Mojito Studios, who specializes in luxuous remakes of classic games from the 2000s. Before signing with them, Serge and I asked Bruno Cathala and Ludovic Maublanc, the desiners of Cleopatra and the Society of Architects, for advide. They told us everything went well for them, so we followed. We were right, everything went well for us as well.

Mystère à l’Abbaye is a family-style deduction game, inspired by Clue / Cluedo for its mechanisms, and by Umerto Eco’s Name of the Rose for its background story, but it takes liberties with both its sources. A monk has been killed, and its colleagues, the players, investigate the murder. Cards help to exculpate some of the Abbey monks, the library books give hints, and rumours fly around after the mass. When someone knows too much, it might be better to make a vow of silence. More about it in the blogpost I wrote in 2012 for the second edition.

There has been very few changes for this new version, with gorgeous art by Naïïade. For the sake of Simplicity, the Crypta, which few players really used, has been removed, but it’s back as an optional expansion with the Kickstarter, together with a dozen of extra cards, half o which come from the various internet forum discussions about the game. The Templars of the Days of Wonder version, who had no reason to be there, are back as Dominicans, like in the very first French edition, and it makes more sense. The components should be as gorgeous as those in Mojito Studio’s last offering, Cleopatra and the Society of Architects. So far, only English, Italian and Spanish language copies are scheduled, but there will probably be a French version, may be a few months later. I would love to see a Latin version of the game, but I’m not sure there’s a market for it, and my rusty Latin is not good enough to do the translation.

Mystery of the Abbey
A game by Serge Laget et Bruno Faidutti
Art par Naïïade
3 to 6 players – 60 minutes
Published by Mojito Studios
Scheduled for 2024
Boardgamegeek