Le bon vieux temps du jeu à l’allemande
From the good old times of german style eurogames

La fin des années quatre-vingt-dix et le début des années 2000 ont sans doute été l’âge d’or du gros jeu de société « à l’allemande ». On n’avait pas encore inventé le draft et le deckbuilding, les jeux de coopération étaient réservés aux plus petits, mais des auteurs comme Klaus Teuber, Reiner Knizia, Wolfgang Kramer, Friedemann Friese ou Alan Moon savaient déjà faire de très bons jeux de développement, majorité, d’enchères ou de parcours. Si quelques jeux, comme les Colons de Catan, Les Aventuriers du Rail, dans une moindre mesure Puerto Rico, El Grande ou PowerGrid, sont devenus des classiques, d’autres ont eu leur heure de gloire puis ont été un peu oubliés.
Depuis deux ou trois ans, quelques éditeurs malins et/ou nostalgiques sont allé rechercher des classiques oubliés de cette époque. On a vu de nouvelles éditions de grosses boites qui avaient disparu des étals, comme Elfenland, Samurai, Euphrat & Tigris, Tikal, Amun Re, Medina, Mexica, Manhattan… ou Mission Planète Rouge.



D’autres auteurs et éditeurs présentent des nouveautés dont le style rappelle délibérément les jeux d’il y a quinze ans. C’est le cas de Raiders et Explorers of the North Sea, de Shem Phillips, ou de Ethnos, de Paolo Mori.

Voici cinq autres grosses boites armes entre 2000 et 2005 qui me semblent avoir fort bien vieilli mais dont je ne sache pas qu’il soit prévue de nouvelle édition. Qui sait, peut-être cet article incitera-t-il un éditeur à s’y intéresser de près.

Aladdin’s Dragons, souvent désigné par son nom allemand, Morgenland, est un jeu de Richard Breese, publié en 2000 par Hans im Glück. Richard Breese est connu aujourd’hui pour sa série des « Key Games » – Keyflower, Keythedral, Key Harvest et d’autres – et Aladdin’s Dragons est d’ailleurs une adaptation fort réussie dans un univers oriental du premier d’entre eux, Keydom. Varié et facile à mettre en place, c’est un mélange astucieux de tactique, d’enchères et de bluff, une recette qui marche presque toujours. Chaque tour, les joueurs doivent répartir leurs personnages entre le marché, le caravanserail, la salle des gardes, la maison d’Aladin, le palais du sultan et les grottes des dragons. Aladdin’s Dragons est plutôt plus léger, moins calculatoire, que ce que Richard Breese a fait depuis, et reste un des tout meilleurs jeux pour faire découvrir les jeux de société modernes. Je n’ai jamais vraiment compris pourquoi ce n’était pas devenu un grand classique.

J’apprécie tout particulièrement, aussi bien comme joueur que comme auteur, les jeux dans lesquels bluff et tactique s’entremêlent. C’est le cas dans Aladdin’s Dragons, c’est aussi le cas dans Himalaya, de Régis Bonnessée, paru en 2002. Les joueurs y programment secrètement les déplacements de leurs caravanes de yacks tout au long vallées himalayennes, franchissant les cols enneigés pour se procurer les marchandises disponibles et aller les livrer dans les villages, les temples et les monastères. Un peu de psychologie, un peu de « pick-up and deliver », un peu de majorité, là encore des éléments assez classiques s’emboitent superbement pour faire un jeu fluide, évident, rapid, au thème léger mais plein de charme. Lords of Xidit, paru il y a deux ou trois ans, reprend les mécanismes d’Himalaya, mais il les complexifie un peu et, surtout, n’a pas vraiment de thème et donc moins de charme. Ce qu’il aurait fallu, et j’espère que c’est encore possible, c’est publier à nouveau Himalaya, sans changement de règles, avec juste un matériel un peu plus pratique.

San Marco, d’Alan R. Moon et Aaron Weissblum est paru en 2001 chez Ravensburger. Le jeu s’inspire d’El Grande : sept quartiers, des petits cubes en bois aux couleurs des joueurs, et un doge baladeur qui emprunte les ponts pour faire marquer des points aux deux joueurs ayant le plus de cubes dans chaque quartier. L’originalité est ailleurs, dans un système de répartition des cartes actions, où l’un des joueurs divise une dizaine de cartes en lots, mais choisit son lot en tout dernier. Certaines cartes donnent des points de pénalité, d’autres permettent d’ajouter des pions ou d’en enlever, de bâtir un pont, ou encore de déplacer le doge. Répartir les cartes en paquets équilibrés, en tenant compte de la situation, est un art très subtil. À ce jour, San Marco reste sans doute mon préféré parmi tous les jeux de “placements de petits cubes en bois dans des régions”. C’est sans doute parce qu’il est rapide, dynamique, tactique, et en outre diablement joli. J’espère que, s’il est réédité un jour, le plateau restera celui, charmant et coloré, dessiné par Alessandra Cimatoribus. Et puis, j’ai même une astuce pour permettre au nouvel éditeur de faire des économies – le jeu est plus intéressant, car plus tendu, avec trois ponts de moins.

Maharaja, publié en 2004, est l’œuvre de Wolfgang Kramer et Michael Kiesling, les deux auteurs de Tikal, Mexica, Java et quelques autres réédités ou en passe de l’être. Les joueurs déplacent des architectes de ville en ville, rivalisant pour bâtir les plus riches palais pour les seigneurs locaux, mais devant parfois payer pour leur passage aux joueurs contrôlant les tavernes des villages traversés. Il y a des personnages un peu comme dans Puerto Rico ou Citadelles : le Mogul, le sadhu, le moine voyageur, l’artisan, personnages qui passent parfois d’un joueur à l’autre et donn. Les grandes cités sont visitées dans un ordre plus ou moins prévisible par le Maharadja, qui à chaque tour paiera royalement les joueurs ayant le plus embelli la ville où il arrive. Sans être excessivement compliqué, Maharaja est un gros jeu, plus complexe que San Marco, mais c’est un jeu subtil qui peut être joué rapidement, et l’un des très rares « gros jeux » du début des années 2000 que je ressorte encore à l’occasion.

Un autre est Bootleggers, de Don Beyer, Ray Eifler et Steve Gross, un jeu de plateau à l’allemande avec un vrai thème à l’américaine, et d’ailleurs le seul des jeux de cette liste à avoir été publié outre-atlantique, en 2004. Nous sommes en 1921, la loi américaine interdisant « la fabrication, le transport et la vente des liqueurs toxiques » est entrée en vigueur. Chaque joueur est à la tête d’un gang qui espère bien tirer le meilleur profit de la fabrication, du transport et de la vente des liqueurs toxiques. On début avec un petit alambic familial, un petit camion, et deux gangsters, puis l’on développe son activité en agrandissant sa distillerie, en important de l’alcool canadien, en recrutant quelques hommes de main, et en prenant grâce à eux le contrôle des débits de boissons. Bootleggers est un jeu de gestion très original, au thème fort bien rendu mêlant, dans un ensemble fluide et remarquablement cohérent, des mécanismes multiples – mises cachées (pour l’ordre du tour), majorité (pour le contrôle des speakeasies), jets de dé (pour la production et la demande de whisky), prises de risque (pour les livraisons), cartes action, négociations (pour la location de camion ou la revente de whisky). Il y faut donc de la psychologie, de la diplomatie, un certain sens tactique, et un peu de chance au dé – je sais, ce dernier point est un peu passé de mode, mais c’est dommage.

Je viens de réaliser qu’il n’y avait pas de jeux de Reiner Knizia dans ma liste. Ce n’est pas qu’ils soient moins bons, ou que je n’aime pas ses créations, c’est juste qu’il semble se débrouiller mieux que les autres pour faire ressortir ses vieux trucs – Râ, Samurai, Euphrat & Tigris, Medici, Amun Re sont déjà de retour en boutique.

Si les ventes de Mission: Planète Rouge sont honorables, j’ignore totalement ce qu’il en est des autres grosses boites du début des années 2000 récemment rééditées. J’espère qu’elles sont honorables, surtout pour des jeux comme Samurai, Elfenland, Medina ou Tikal qui auraient certainement été dans ma liste s’ils n’étaient pas déjà de retour. J’espère même qu’elles sont assez bonnes pour encourager les éditeurs à continuer un peu dans cette voie, par exemple avec l’un des cinq excellents jeux ci-dessus. Promis, je leur ferai de la pub.


The late nineties and the early 2000 were the golden age of « big box german games ». Draft and deck building had not really been invented yet, cooperative games were still just for kids, but Klaus Teuber, Reiner Knizia, Wolfgang Kramer, Friedemann Friese or Alan Moon already knew how to design great development, majority, auction or pick-up and deliver games. A few of them, most notably Settlers of Catan and Ticket to Ride, but also to a lesser extent Puerto Rico, Powergrid or El Grande, have become classics. More have been highly praised and then more or less unjustly forgotten.
These two or three last years, a few publishers, be they clever or just nostalgic, have  tried to unearth some of these early eurogames. New editions of games like Elfenland, Samurai, Euphrat & Tigris, Tikal, Amun Re, El Grande, Manhattan… or Mission Red Planet have been published.



Other designers and publishers are publoishing new stuff that feels very much like these german games from fifteen years ago, games like Ethnos or Explorers and raiders of the North Sea.

Here are five more big boxes from the early 2000s which, in my opinion, aged really well and of which there is no new edition in the pipe, at least that I know of. May be this blogpost will incite some publisher to have a second look at them.

Richard Breese’s Aladdin’s Dragons was published in 2000 by Hans im Glück. Richard is now well known for his « Key » games – Keyflower, Keythedral, Key Harvest and a few more – and Aladdin’s Dragons is indeed a cleverly devised adaptation of his first boardgame, Keydom. The game is a mix of double guessing, tactics and bidding, a recipe that never fails and makes for a light and fluent game. Every round, players must assign their facedown character tokens to various places, the market, the caravanserai, Aladdin’s house, the guard room, the Sultan’s palace and, of course, the dragons’ caves. The game is lighter and less brain burning that Richard’s later design, and it’s still one of my games of choice to introduce new people to modern boardgames. It should have become a classic, and I can’t understand why it didn’t.

Both as game designer and a a gamer, I particularly enjoy games which mix tactics and double-guessing. It’s the case with Aladdin’s Dragons, it’s also the case with Regis Bonnessée’s Himalaya, published in 2002. Players’ yack caravans navigate the Himalayan valleys, crossing snowy passes to get available goods and carry them to villages, temples and monasteries. Pick-up and deliver, double-guessing and majority intertwine in subtle ways to make a fluid, obvious and charming game in a charming and original setting. Lords of Xidit, published two or three years ago, recycles the Himalaya system but complexifies them a bit and, more problematic, moves the action to an unconvincing fantasy setting, removing most of the game’s charm. I hope it’s still possible to have, some day, a reprint of Hiamalay, with the original rules and setting, and just slightly bigger and better components.

Alan R. Moon and Aaron Weissblum’s San Marco was published in 2001. It’s a majority game inspired by El Grande: seven districts, wooden cubes in the players’ colors, and a Doge figure moving from district to district to score points for the two players with the most cubes. What’s new, and what’s great, is the card dealing system, in which one player divides the cards in small lots, and every other player selects one before he takes the last remaining one. Some cards give negative points, other cards allow the player to place or move cubes, to place or move a bridge, or to move the Doge. San Marco is still my favorite « wooden cubes majority » game. It is fast paced, dynamic, tactical, and it looks really cute. If it is published again one of these days, I hope it will still have the gorgeous coloured board drawn by Alessandra Cimatoribus. I even have an idea to help the publisher lower the production costs – the game is more tense and therefore better with two or three bridges fewer.

Maharaja, published in 2004, was designed by the same team who had already done Tikal, Mexica, Java and a few other games which are or will soon be republished. Players move their architect pawns from city to city, vying to build the richest palaces for local landlords, and also paying when moving through villages whose taverns belong to other players. There are characters, a bit like in Citadels or Puerto Rico, the Mogul, the Trader, the Sadhu, the wandering monk, the builder, the craftsman, and they sometimes pass from one player to another. Maharaja is not overly complex, but it’s heavier than San Marco or Aladdin’s Dragons. it’s also a subtle and intricate game which can be played at a fast pace, and one of the very few heavier games from the early 2000 which I still occasionally play.

Bootleggers, by de Don Beyer, Ray Eifler & Steve Gross, is another one. It has clean eurogame mechanics but is nevertheless the only game in this list with a strong and consistent theme, and the only one that was published first in the US, in 2004. The year is 1921 and the law prohibiting the “manufacture, sale or transportation of intoxicating liquors” seems to be here to stay. Each player is a mob boss who wants to make the best profit of the manufacture, sale and transportation of intoxicating liquors. You start with a small family still, a small truck and two mobsters, and then develop your activities, expand your still, import booze from Canada, buy new trucks to carry moonshine crates, recruit some more mobsters, and seize the control of speakeasies. Bootleggers is a very original management game, with a strong and well-implemented theme. The many different mechanisms are brought together in a very consistent and fluent game engine. There’s double guessing (for turn order), majority (for control of speakeasies), dice rolls (for booze production and demand), risk taking (for deliveries), action cards, negotiations (for truck renting or booze selling). To win, you need psychology, strategy, diplomacy and some luck with the dice – I know, the latter is not much in fashion nowadays, and that’s a shame.

I just realised there’s no game by Reiner Knizia in my short list. It’s not that are bad, or that I don’t like them, it’s just that he seems to be better than other seasoned designers at bringing his old stuff back on the market – Râ, Samurai, Euphrat & Tigris, Amun Re all already have new editions.

I know the sales of Mission: Red Planet are OK, but I’ve no idea how the other revamped versions of old big euro games are selling. I hope their sales are correct as well, especially for games like Tikal, Medina, Samurai or Elfenland, which would have been in this list if they were not already back. I even hope sales are good enough for publishers to keep on looking for forgotten jewels, and I suggest they consider the five games in my short list. If they do, I promise I’ll promote them here.

Kubenbois
Wodenkubs

Mon ami Tom Vuarchex à coutume de se moquer des pousseurs de cubes en bois, ou kubenbois, une spécialité ludique germanique qu’il tient pour un peu lourde et indigeste, une sorte de choucroute ludique. Sans doute en rajoute-t-il pour se donner un genre, mais je comprend un peu sa lassitude tant, ces dernières années, les jeux de société à l’allemande, tout en devenant stratégiquement de plus en plus sophistiqués, semblent avoir perdu de la fraîcheur qui, dans les années quatre-vingt-dix, faisait le charme de nouveautés comme Les Colons de Catan, San Marco, Tikal, Morgenland ou Elfenland.

Trois jeux auxquels j’ai joué récemment me semblent illustrer cette dérive – Descendance, Lords of Waterdeep et Québec. Tous sont des jeux de gestion de ressources plein de cubes en bois, conçus et équilibrés avec soin, d’un intérêt tactique ou stratégique indéniable, mais qui ne parviennent pas à m’amuser, à m’exciter, à m’intéresser.

Le premier problème vient du thème de ces jeux, ou plus exactement de la manière à la fois superficielle et surfaite dont ce thème est inscrit dans le jeu. Il y a une dizaine d’années, il était de bon ton de se moquer de jeux allemands au thème inexistant ou insignifiant. Les auteurs de Descendance, Lords of Waterdeep ou Québec semblent au premier abord avoir compris la leçon et avoir introduit dans des jeux assez complexes des éléments thématiques nombreux, jusqu’aux commentaires historiques à la fin des règles de Québec, et aux “flavor text” des quêtes de Lords of Waterdeep. On y croit vaguement à la lecture des règles, mais tout s’efface dès que la partie commence. Les kubenbois de Waterdeep sont censés représenter les clercs, guerriers, voleurs ou magiciens que l’on recrute dans les tavernes d’une cité médiévale fantastique et que l’on envoie accomplir des quêtes, mais très vite on ne voit que des cubes-ressources blancs, noirs, oranges ou mauves avec lesquels on achète des cartes. Le thème est peut être riche, presque baroque, mais il ne fonctionne pas. C’est un peu la même chose avec Québec – des bâtiments historiques, une carte géographiquement fidèle, un scoring censé représenter le développement militaire, agricole, artisanal et culturel, mais très vite on ne fait que poser des cubes sur des cases qui ne représentent que de potentiels bonus qui ne correspondent à rien de thématique, ou permettant de marquer des points rouges, jaunes, verts ou violets. Sans se situer dans un contexte historique ou imaginaire aussi précis, Descendance se veut aussi un jeu à la thématique riche, avec ses générations de personnages, avec les points que l’on marque en restant au village pour faire carrière dans le commerce, l’Eglise ou l’administration, ou en partant voyager au loin. La encore, ce sont les fameux kubenbois qui posent problème – les cubes roses sont la Connaissance, les bruns la Foi, les verts le charisme, les orange l’habileté – drôles de ressources – mais qu’importe, puisque les joueurs n’y font pas attention et ne font que manipuler des cubes de ressources de différentes couleurs.

Le thème d’un jeu n’a pas pour seule fonction de permettre aux illustrateurs de se défouler et à l’auteur de trouver des noms pour ses cartes, ses pions ou ses cubes. Qu’il soit ou non à l’origine du jeu, il doit donner une cohérence à l’ensemble des mécanismes et des éléments, et permettre ainsi aux joueurs de s’y retrouver. Si je me suis senti un peu perdu dans ces jeux, c’est que le thème m’a parfois semblé, au contraire, apporter plus de confusion que d’unité

.

S’il y a de mauvais jeux de kubenbois, il y en a aussi de bons, voire de très bons. Les kubenbois de Belfort ou de Kingdom of Solomon, deux jeux “à l’allemande” récemment publiés par de petits éditeurs américains ne prétendent pas représenter des connaissances ou des aventuriers mais tout simplement du bois, du métal, des pierres utilisées ensuite pour construire des bâtiments. C’est sans doute moins original, mais cela marche, on s’y prend, et ces jeux sans grande prétention mériteraient sans doute d’être plus remarqués que des blockbusters à l’américaine ou des produits trop bien formatés pour le Spiel des Jahres.
Leurs thèmes ne sont ni meilleurs, ni moins bons que ceux des jeux dont j’ai parlé plus haut. L’univers religieux de Kingdom of Solomon ne l’empêche pas d’être très agressif, les bonnes places n’étant jamais assez nombreuses pour tous les joueurs. Je n’y ai même pas joué, mais j’ai suivi avec attention toute une partie, et même comme simple spectateur, j’ai tout compris et c’était passionnant. Les nains et les elfes de Belfort sont des stéréotypes, mais ils contribuent à ce que le jeu respire l’humour et les coups bas. Un peu plus ancien, Alien Frontiers ou Magnum Sal sont aussi deux excellents jeux de gestion de ressources à l’allemande, un peu plus interactifs que la moyenne, et qui auraient largement mérité le même succès que Descendance ou Lords of Waterdeep.

Bref, je pense comme Tom qu’il y a dans l’univers des kubenbois une certaine dérive vers des univers baroques mais peu cohérents, aussi riches que superficiels, vers des jeux d’optimisation calculatoires mais sans problématique, sans vision d’ensemble. Il semble y avoir un public pour de tels jeux, je n’en fais pas clairement pas partie, mais je n’en suis pas pour autant hostile à tous les cubes en bois. J’ai hâte de jouer pour de vrai à Kingdom of Solomon – à quatre, ce doit être une tuerie -, et de voir les nouvelles éditions d’Alien Frontiers ou de Bootleggers.

Une partie de Belfort aux Rencontres Ludopathiques, avec des boissons traditionnelles naines.
A game of Belfort at the ludopathic gathering, with traditional dwarf drinks.


My friend Tom Vuarchex, the author of Jungle Speed,moften mocks the “woodencubes pushers” and holds the kubenbois (wodenkubs) for a heavy and hardly digestible German specialty, the sauerkraut of games. He is prone to exaggeration and likes to overplay his role in the French gaming world, but I can understand him since i have also become tired of some German style strategic games, all about worker placement and resource management, which have lost the freshness that was, in the nineties, the great charm of games like Settlers of Catan San Marco, Tikal, Aladdin’s Dragons or Elfenland.

Three games I have played recently are very good examples of this trend. The Village, Lords of Waterdeep and Quebec are management games full of wooden cubes of different colors, cleverly designed, carefully balanced, tactically and strategically challenging, but they all fell flat for me.

These games all have a schizophrenic approach to theme, their setting being in the same time superficial and overplayed. Fifteen years ago, we used to mock the absence or blandness of the German games’ themes. The authors of The Village, Lords of Waterdeep or Quebec got the point and seem to have built their games on complex and rich thematic settings, be they history or fantasy, with even historical comments in the rules of Quebec and various flavor texts on the quest cards of Lords of Waterdeep. All this sounds more or less convincing and consistent when reading the rules, but soon withers away when the game starts. The woodencubes in Waterdeep are supposed to be adventurers, clerics, warriors, wizards and thieves recruited to fulfill various quests, but soon they become just white, orange, purple and black resource cubes spent to buy victory point cards. The setting might look rich, even baroque, but it just doesn’t work. It’s the same with Quebec. The game has historical buildings, and a complex scoring system supposed to represent military, agriculture, manufacturing and culture. This is instantly forgotten, and players just move cubes around to get esoteric bonuses and score purple, yellow, green or red points.
The Village doesn’t have such a detailed and specific setting, just generic Middle Ages, but it also pretends to be thematically rich and accurate, with clever rules for the aging and death of characters, with points scored either in the Village in the trade, church or state career, or in long distance trade. Once more, the problem comes from the wooden resource cubes – pink cubes are for knowledge, brown ones are faith, Green ones charisma and orange handcraft skill. Well, no one cares, may be because faith or knowledge are not naturally considered accountable resources, and players just manipulate wooden cubes in different colors.

The setting of a game is not only an inspiration for the illustrator and a help for the designer in finding cute names for cards, tokens or cubes. No matter wether theme or mechanisms came first, the setting is here to give unity and consistency to all the game parts and systems, and to guide players in the game. In these three games, I’ve felt lost and not guided, as if the setting brought more confusion than consistency.

There are bad,mor simply bland, wooden cubes games, but there are also good, even very good ones. The wooden cubes in Belfort, or in Kingdom of Solomon, two “euro games” recently published in the US, don’t pretend to be knowledge or people, but are just the good old building resources, wood, stone, ore and gold, used in building various… buildings and monuments. It may be less original, it may sound unassuming, but it’s consistent with the gameplay. These lower profile and less ambitious games deserve more attention than D&D blockbusters or preformatted Spiel des Jahres. Their themes are neither better than worse than those of the other games I’ve talked about before, but hey work much better. Despite its religious setting, Kingdom of Solomon is a nasty worker placement and resource management game in which there’s never enough good spots and enough temples to build for everyone. I’ve actually not played it, but I’ve looked at a whole game, and it was like a good movie. The dwarves and elves in Belfort might be more generic and stereotypical than the D&D characters in Deepwater, but that’s also why the game feel humorous, which is nicely balanced by a nasty enough gameplay. Some slightly older eurogame style resource management games, such as Alien Frontiers or Magnum Sal, are much better and nastier than average and would have deserved the same exposure as The Village or Lords of Waterdeep.

So, like Tom, I’m wary that the «wooden cubes» world is following a wrong trend, towards baroque but extremely thin themes, towards computing and reckoning games with no consistent philosophy. There seem to be enough players for these games to sell, but I’m not – which doesn’t want I won’t decline to push the occasional wooden cube, providing the game is light, interactive, thematic and consistent enough. I’m eager to try Kingdom of Solomon – it must be very nasty with four players – and to see the new editions of Alien Frontiers or Bootleggers.