Trop de bons jeux
Too many good games

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Dans le millier de nouveautés présentés au récent salon d’Essen et les innombrables jeux publiés par leurs auteurs ou par de petits éditeurs grace aux plateformes de crowdfunding, on pourrait s’attendre à beaucoup de créations médiocres et produites à la va-vite. Signe sans doute de la vitalité du monde du jeu, et du développement d’une véritable  culture ludique, ce n’est pas vraiment le cas. Il y a bien quelques trucs un peu ridicules sur kickstarter, quelques auteurs naïfs qui ne font que réinventer l’eau tiède au fond de leur garage, mais ils ne sont pas plus nombreux qu’il y a vingt ans et, dans l’ensemble, la qualité ludique des jeux augmente paradoxalement avec la quantité – ce qui rend le métier difficile pour les vieux auteurs comme moi. Beaucoup des « chefs d’œuvre » parus dans les années quatre-vingt dix, dont certains sont désormais des succès commerciaux solidement installés, feraient sans doute pâle figure s’ils sortaient aujourd’hui – même s’il leur reste toujours le fait et le charme d’avoir été des précurseurs.

Bref, j’ai un peu l’impression ces derniers temps de ne découvrir que des bons jeux, et ce n’est pas désagréable. En voici quelques uns – mais il y en a plein d’autres auxquels je n’ai pas encore joué !

Petits jeux

heros a louer

Héros à Louer, de Kuro, est un petit jeu de cartes « japonais » (mais pour une fois pas japonisant) comme il en sort pas mal ces temps-ci. Les joueurs doivent y accepter ou faire passer des cartes qui leur sont proposées faces cachées, un peu comme dans mon Toc Toc Toc! ou dans le Poker des Cafards, mais avec quelques subtilités qui renouvellent très agréablement le genre. Pour une fois, je conseille d’éviter l’édition américaine, dont les graphismes quelconques vont contre l’esprit du jeu, et de préférer la version française, beaucoup plus amusante et élégante.

8 the liar

8 the Liar de Odd Hackwelder est un autre petit jeu de bluff très malin, dans lequel chacun à son tour peut défausser autant de cartes qu’il le souhaite faces cachées…. en annonçant invariablement que leur valeur totale est de 8. C’est toujours possible, mais c’est souvent faux, et on peut bien sûr dénoncer le joueur que l’on suspecte de bluffer. Une variation très intrigante amusante sur le vieux système des jeux de défausse.

dragon run

Dragon Run, de mon vieil ami Bruno Cathala, est un délicieux petit jeu de prise de risque. Chaque carte piochée fait avancer un peu plus loin dans le donjon et d’amasser des trésors, mais moins il reste de cartes, plus on a de chances de réveiller le dragon. C’est très aléatoire, mais aussi très amusant, avec plein d’effets très thématiques, capacités des aventuriers, effets des potions et pouvoirs des objets magiques. C’est le genre de jeu un peu idiot dont je peux enfiler les parties pendant des heures.

hare and tortoise

Le Lièvre et la Tortue, de Gun-Hee Kim, est, après Les Trois Petits Cochons et Baba Yaga, le troisième jeu de la collection inspirée par les fables publiée par Purple Brain. C’est sans doute le meilleur. La course oppose non seulement les deux animaux éponymes, mais également un loup, un renard et un agneau, chaque animal se déplaçant selon des règles particulières – la tortue avance d’une case par tour, le lièvre avance vite mais peut s’arrêter quand il est en tête, le loup effraie les autres animaux, l’agneau s’arrête à chaque rivière. C’est drôle, dynamique, simple et beaucoup plus simple que cela n’en a l’air quand on regarde le tableau des règles de déplacement.

wakanda

Le truc qui m’énerve un peu avec Wakanda, de mon ami Charles Chevalier, c’est que j’ai un jeu qui devrait sortir bientôt et qui devait s’appeler Wakan Tanka, et qu’il va sans doute falloir lui trouver un autre nom (et, oui, je sais, c’est moi qui ai écrit récemment un gros article sur les clichés exotiques et tout ça….). Pour revenir à nos bisons, Wakanda est donc un petit jeu stratégique pour deux joueurs dans la lignée de Battle Line, Les Cités Perdues et toutes ces sortes de choses. Pas révolutionnaire, mais léger, agréable et malin.

Jeux moyens

colt express

Colt Express, de Christophe Raimbault, est un petit jeu de programmation et de « double guessing » dont le charme tient autant à ses mécanismes, simples et malins, qu’à son impressionnant matériel, avec un joli train en carton à construire – comptez quand même une bonne heure de bricolage avant la première partie, le montage est difficile. Les joueurs sont des bandits qui attaquent le train, sautant dans les derniers wagons et remontant ensuite le long du train en délestant les passagers de leurs billets, leurs montres et leurs bijoux. On monte sur le toit, on tire d’un wagon à l’autre, et les tunnels, durant la traversée desquels les cartes sont jouées faces cachées, réservent de belles surprises. Beaucoup moins simpliste et incontrôlable qu’il n’en a l’air, Colt Express est un jeu rapide et marrant qui sort désormais lors de presque toutes mes soirées jeux.

ivor

Ivor the Engine est un dessin animé anglais, pour les plus petits, dont j’ignorais totalement l’existence. Du coup, je n’ai pas toujours compris la logique thématique du jeu de train qu’en a tiré Tony Boydell, dans lequel on doit transporter des moutons d’un bout à l’autre du pays de Galles. Qu’importe, car cela donne à ce mignon petit jeu un côté absurde qui lui convient très bien. Ivor the Engine amène un peu de légèreté et d’humour dans un genre souvent trop sérieux, le jeu de train.

black fleet

Black Fleet, de Sebastian Bleasdale, se présente dans une grosse boite, et l’on y déplace de gros bateaux sur une vaste plateau de jeu, et il y a même des cubes en bois, mais c’est en fait un petit jeu de déplacements et de combats, rapide, agressif, plein de rebondissements. J’aurais certainement adoré y jouer quand j’avais une dizaine d’années, et j’apprécie encore beaucoup à cinquante ans – c’est devenu un classique de nos débuts de soirée.

cash n guns

Les belges de Repos Prod sont habituellement plutôt doués pour le marketing – j’en sais quelque chose avec Mascarade -, mais ils se sont un peu plantés sur la nouvelle édition de Cash’n’Guns, de mon ami (oui, encore, je sais, mais c’est un milieu sympa) Ludovic Maublanc. Ils n’ont en effet pas assez dit que ce n’était pas juste une réédition de l’ancien Cash’n’Guns avec de nouveaux dessins, mais vraiment un nouveau jeu, aux mécanismes entièrement revisités pour être à la fois plus rapides et plus subtils. Si vous aimez braquer des flingues sur vos amis, à 5 joueurs ou moins jouez à Colt Express, et à 6 ou plus, préférez Cash’n’Guns.

nottingham

Sheriff of Nottingham, d’André Zatz et Sergio Halaban, est lui aussi une version largement revisitée d’un jeu déjà ancien, Hart and der Grenze. Les joueurs y sont des contrebandiers marchands qui souhaitent vendre au marché de Nottingham des marchandises mais préfèreraient ne pas payer l’octroi. Du bluff, donc, mais aussi de la négociation, car on peut toujours s’arranger avec le sheriff.

Gros jeux

manifest

Je ne sais toujours pas trop que penser du mécanisme du deck-building. Auteur, j’y vois un principe très intéressant, permettant bien des subtilités tactiques et statistiques. Joueur, je trouve les jeux de deck building le plus souvent mécaniques, peu interactifs, excessivement calculatoires et finalement ennuyeux. Manifest, d’Amanda Milne et Julia Schiller, un jeu néo-zélandais plaidé un peu au hasard sur Kickstarter, est l’une des rares exceptions. Manifest, c’est un peu le long cours revisité avec beaucoup d’astuce et de légèreté par des auteurs qui ont joué aux Aventuriers du Rail et à Dominion. Ce jeu dynamique et assez méchant est une excellente surprise totalement inattendue – c’est peut-être le jeu qu’attendaient ceux qui ont trouvé Black Fleet un peu trop léger.

sons of anarchy

Je suis un peu lassé des jeux de placements d’artisans dans des cités médiévales allemandes ou italiennes, mais j’ai adoré ma partie de Sons of Anarchy, un jeu de placement de bikers dans une petite ville américaine. On n’y trafique pas des cubes rouges ou verts, mais des flingues et de la came. Mécaniquement, c’est bien sûr un peu la même chose, mais le thème du jeu est remarquablement rendu, et la mécanique bien maline, avec suffisamment de tuiles et cartes différentes pour que chaque partie soit différente, et suffisamment d’inattendus, avec des enchères à poing fermé et des bastons qui se règlent à coup de dés, pour que le jeu ne soit pas trop technique. Sons of Anarchy,  d’Aaron Dill, John Kovaleski, Sean Sweigart, c’est une mécanique à l’allemande, un thème bien ricain, et pas mal d’humour.

five tribes

J’ai lu quelque part sur le web que Five Tribes, le dernier jeu de mon ami Bruno Cathala superbement édité par mes amis de Days of Wonder, était, à l’inverse des innombrables jeux de placement d’ouvriers (ou de pirates, de mineurs, de bikers….) le premier jeux de licenciement d’ouvriers (ou en l’occurence d’assassins, de marchands et de caravaniers). C’est une boutade, mais elle révèle sans doute l’un des aspects les plus intéressants de ce jeu très prise de tête, mais aussi très agréable et assez rapide : tandis que, dans les jeux de placement, comme dans la plupart des jeux de société modernesr. There’s always something t, la situation se complexifie au fur et à mesure du jeu, dans Five Tribes, elle se simplifie peu à peu. C’est au début de la partie, quand on a encore l’esprit clair, qu’il faut beaucoup réfléchir, et ce sont les derniers coups, quand on commence à fatiguer, qui sont un peu automatiques. C’est assez rare pour être signalé, et c’est peut-être pourquoi j’apprécie tant un jeu qui, à priori, ne devrait pas être dans mon style.

el gaucho

El Gaucho, d’Arve Fühler, publié par petit éditeur bien sympathique, Argentum Verlag, est un jeu qui a tout pour plaire à Bruno Cathala. À la lecture des règles, on a l’impression d’un système assez simple, une sorte de Cités Perdues matinées de jets de dés, mais quand on commence à jouer, on découvre un brise-neurones de très bonne facture, dans lequel on a toujours quelque chose à faire avec ses dés, et toujours une vacherie à faire à ses voisins.

xidit

Et puis, je sais, moi qui étais fan d’Himalaya, en avais même fait mon jeu de l’année quand il était sorti, et attendais sa réédition avec impatience, je devrais jouer à Lords of Xidit, de Régis Bonnessée – mais, non, je ne peux pas, je ne peux même pas me résoudre à en demander une boite à Régis. Les dessins de NaÏÏade sont superbes, je veux bien croire que les mécanismes du jeu ont été enrichis, mais je ne peux pas me résoudre à voir un thème original et bien rendu remplacé par de la fantasy classique et sans saveur… En guise de protestation, j’ai même ressorti mon vieil Himalaya, et j’en ai refait deux parties. Mais, bon, si vous n’avez pas de vieil Himalaya dans vos cartons, procurez-vous Lords of Xidit, c’est malgré tout un sacré jeu, combinant problème du représentant de commerce et programmation secrète.

C’est une longue liste car, comme je le disais en introduction, presque tous les jeux que j’ai récemment essayé se sont avérés excellents – beaucoup d’autres le sont sans doute aussi


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Among the thousand or so new games shown at the recent Essen fair and the many more published by their designers or by small publishers through crowdfunding websites, one could expect to find mostly mediocre and cheaply produced offerings. That it’s not the case probably shows the vitality of the boardgame market and the emergence of a deeper gaming culture. There are a few scary designs  showing up on kickstarter, but there are no more naive designers reinventing the wheel or the monopoly in their garage than there were twenty years ago. The overall quality of games, not only in production but also in design, seems to be paradoxically increasing with quantity – and it’s making their job quite tough for seasoned game designers like me. Many of the so-called groundbreaking games published ten or twenty years ago, some of which have become regular sellers, would pale in comparison to more recent stuff if they were published today – they just still have the good old charm of forerunners.

These last days, it feels like most of the new games I am playing are really good, and it looks like there are even more I’ll never get around to play. Anyway, here are a dozen I’ve recently enjoyed, more or less ordered from the lightest to the heaviest.

Lighter games

heros a louer

Kuro’s Seventh Hero is one more light “Japanese style” card game, and one I had not noticed earlier, may be because the US edition’s bland graphics were clearly misleading about the game’s style and feel. The French version’s illustrations are both nicer and better fitting. Seventh Hero is a very light card game in which players, a bit like in my Knock Knock! or in Cockroach Poker, must accept or pass on cards that are given to them face down – but it features some clever new twists.

8 the liar

Odd Hackwelder 8 the Liar is what one should expect from someone whose first name is “Odd”. Each player in turn may discard as many face down cards as he wants… but always pretending their total value is 8. It might always be true, indeed, but it’s often false, and other players can call the bluff. This is a very intriguing and challenging version on the “get rid of all your cards” game genre.

dragon run

Dragon Run, by my old friend Bruno Cathala, is a light and humorous risk taking game, published only in French so far, but I hope there will soon be an English version. With each card drawn, one moves deeper into the dungeon, and might get more treasure, but with each card drawn the beast is more likely to awake. The game is highly random, but also fun and thematic, with each adventurer, potion or magic item having a specific effect. It’s typically the kind of game I can play over and over for hours.

hare and tortoise

Gun-Hee Kim’s Hare and Tortoise is the third game in Purple Brain’s really cute fairy tale series, and it’s probably the best one. The race features not only the two eponymous animals, but also wolf, fox and sheep. Each animal has its specific movement rule – tortoise steadily moves 1 space forward every round, hare can move really fast but might stop when in the lead, wolf can frighten other animals, sheep stops at every river to drink. It’s fun, fast paced, very tactical and much simpler than it looks.

wakanda

The one thing I don’t like about Wakanda, by my friend Charles Chevalier, is that I have a game in the pipe whose prototype went under the name Wakan Tanka, and we might have now to look for another name – and, yes, I am the one who recently wrote a long paper about exoticism in boardgames and all that stuff. But back to our bisons – Wakanda is a cute tactical two players game, in the line of Lost Cities or Battle Line, and with really cute plastic totems. Nothing really new, but a light, enjoyable and very clever game.

Middle weight games

colt express

Christophe Raimbault’s Colt Express is a light programming and double guessing game. It has clever and very thematic systems and, most of all, a really impressive board – a 3D cardboard train that requires a whole hour to mount it before the first game. Players are bandits who jump into the the rear cars and then move forward, relieving the passengers of their greenbacks, watches and jewelry. Bandits can climb up on the train’s roof, shoot from a car to another, and lots of unexpected things happen in tunnels, where cards are played face down. Colt Express is fun and fast paced, but less uncontrollable and simplistic than it looks, and has become one of the classic openers of my game nights.

ivor

Ivor the Engine is a British cartoon I had never heard of before, but I’ll try to have a look at a few episodes online, if only to understand why, in Tony Boydell’s train game, players must always transport sheep from one part of Wales to the other. Though not as childish as it looks, Ivor the Engine is a fun and light train game – a  nice change, since train games usually feel heavy and serious.

black fleet

Sebastian Bleasdale’s Black Fleet has a big box, a large map, nice ship miniatures and even wooden cubes, but it’s just a light game of trade and piracy – meaning pick-up-and-deliver and combat with cards. It’s fun, fast paced and more tactical than strategic. I would have loved such a game when I was ten, and I still quite like it at fifty.

cash n guns

My Belgian friends at Repos Prod are usually good at marketing – as I have experienced with Mascarade – but I think they got things wrong with the new edition of Ludovic Maublanc’s Cash’n’Guns. They didn’t stress enough that this is not just a revamping of the older game, but a really new one, with much simpler, faster and more subtle systems. If you like to play with guns and shoot at your fellow players, go for Colt Express with up to 5 players, and for Cash’n’Guns with 6 to 8.

nottingham

André Zatz and Sergio Halaban’s Sheriff of Nottingham, is also a reworked version of an older game, Hart and der Grenze. Players are smugglers merchants who want to sell various stuff at the Nottingham market, but would prefer not to pay the excise. This means some bluff, but also some bargaining, since it’s always possible to come to an arrangement with the Sheriff of Nottingham.

Heavier games

manifest

 

I still have mixed feelings about deck-building. As a designer, I think it’s theoretically very interesting, allowing for lots of tactical and statistical subtleties. As a gamer, however, I think that most deck building games are heavy on maths and very light on fun and interaction. That’s not the case with Amanda Milne and Julia Schiller’s Manifest, a game from New-Zealand which I pledged more or less at random, one day I was browsing kickstarter boardgames. Manifest feels a bit like the old Long Cours lightly and cleverly reworked by designers who have played Dominion and Ticket to Ride. This dynamic and nasty pick-up-and-deliver deck-building game is an unexpected hit – and probably the right game for those who found Black Fleet a bit light for their taste.

sons of anarchy

I’m a bit bored of worker placement in German or Italian mediaeval cities, but I loved my first game of Sons of Anarchy, a game of biker placement in a small american city. It’s not about producing red and green cubes, but about buying guns and dope, and selling it at a profit. Of course, mechanically, it’s more or less the same, but the game’s setting is well implemented. The game has enough different tiles and cards to make it always different. There’s blind bidding for selling dope, and die rolls for street fights, so it doesn’t feel too technical and brain burning. Sons of Anarchy, by Aaron Dill, John Kovaleski and Sean Sweigart, is the perfect combination of German style engine, some US chrome, and dark humor.

five tribes

I’ve read somewhere on the web an insightful remark about Bruno Cathala’s Five Tribes, gorgeously published by Days of Wonder. It said that, after dozens of worker (or miner, pirate, biker…) placement games, Five Tribes was the first worker (or rather merchants, priests, assassins and caravan riders)  firing game. It’s a clever pun, but it also points at one of the most interesting features of this relatively heavy brain burner. In most boardgames – though not all – and specifically in worker placement games, things get more complex as the game goes on. Five Tribes works the other way – one must think hard in the first rounds, but the game becomes easy, almost automatic, in the very last rounds, when players are becoming tired. This might be one of the reasons why I really enjoy a game which is much heavier than the stuff I usually play now.

el gaucho

Arve Fühler’s El Gaucho is typically the kind of game Bruno Cathala likes. From reading the rules, it seems relatively simple, like an advanced version of Lost Cities with some die rolls thrown in. When playing it, however, it becomes extremely tricky, with complex decisions about which dice to use and how to use them, which cows to buy or to sell – and some opportunities for stealing the neighbors’ ones. It could become boring if it lasted longer, but at about 90 minutes, it’s a tasty main course for a serious gaming evening.

xidit

I was a fan of Himalaya, it had even been my game of the year when it was first published, and I was eagerly waiting for its new edition, so I should be playing its remake, Lords of Xidit – but I don’t want to, I even don’t want to ask Regis for a copy. Naïade’s graphics are gorgeous, I  know the game systems have been improved, but I can’t replace a game with a really original and well implemented theme with one with just one more standard bland fantasy game. As a protest, I even unearthed my old copy of Himalaya and played it again. Anyaway, if you’re not one of the lucky owners of an old copy of Himalaya, try Lords of Xidit, it’s a great game, based on pick-up-and-deliver and secret programmation.

It’s a long list because, as I said in the intro, almost all the games I’ve played recently happened to be really good – so may be you can try other ones, and they’ll be as good as these ones.

Compte Rendu d’Essen
Essen Report

messe-essen-spiel-tickets

L’autre Bruno a posté sur son nouveau site un impressionnant compte-rendu du salon d’Essen, dans lequel il liste ses sept ou huit nouveautés parues pour le salon, parmi lesquelles je recommande tout particulièrement Five Tribes, un jeu qui prend la tête sans trop prendre la tête, et Dragon Run, un petit jeu de cartes de prise de risque comme je les aime, et comme j’aime les faire. Si je ne recommande pas les autres, c’est sans doute uniquement parce que je n’y ai pas encore joué. 
J’étais bien plus modeste sur le salon, avec seulement l’extension de Mascarade, qui a cependant été très bien accueillie puisque, dès le premier jouer, nous n’avions plus de boites en anglais. En revanche, le salon a été l’occasion de nombreuses rencontres avec des éditeurs pour discuter de projets qui devraient sortir l’an prochain – mais je ne sais pas bien de quoi j’ai déjà le droit de parler.

1602179_1464632527094812_5337658764054171235_oLes deux Bruno à Essen – aucun d’entre nous n’a fait Augustus – photo chipée sur Ludovox.

J’ai donc passé le plus clair de mon temps sur le stand de Repos Prod, à signer des boites de Mascarade, aux cotés de Ludovic Maublanc, l’auteur de l’excellent Cash and Guns, Miguel Coimbra, illustrateur de Seeven Wonders et ses innombrables extensions, et toute l’équipe de Concept. De temps à autre, Antoine Bauza nous faisait l’honneur de sa compagnie pendant quelques dizaines de minutes. Bravo et merci les belges, on s’est beaucoup amusé sur votre stand.

2014-10-26 21.39.37Sur le stand Repos – photo chipée sur Tric-Trac, comme ça pas de jaloux.

J’ai aussi passé pas mal de temps avec Eric Lang, avec qui je suis en train de travailler sur plusieurs projets. Nous avons d’ailleurs profité du salon pour signer le contrat de Neeeeed!, qui sera publié l’an prochain par Lui-Même. Dans la foulée, le jeudi soir, nous avons accompagné Philippe des Pallières au speed-dating antre éditeurs et distributeurs organisé par Asmodée… et c’est nous qui nous sommes, le plus souvent, retrouvé à présenter l’excellent Mafia de Cuba. Je glissais peu à peu dans l’ivresse tout au long de la présentation, et n’ai plus guère de souvenirs de ce qu’il s’est passé après. Je me suis laissé dire que j’avais improvisé une conférence sur l’histoire des échecs au bar de l’Atlantic, au milieu de laquelle j’aurais brusquement basculé au français alors que tous mes auditeurs étaient anglophones. Enfin, bon, j’ai quand même réussi à me lever le lendemain matin pour un petit déjeuner de travail – un truc qui devrait être interdit par le droit du travail.

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Avec Eric Lang au pot de iello – Mike Elliott en arrière plan.

Le samedi soir, nous avons enfin, avec Bruno Cathala, fait une partie de la dernière version de Raptor, petit jeu à deux assez original qui devrait sortir l’an prochain, chez Matagot.
Discutant avec un éditeur, Charles Chevalier a quasiment vendu un jeu qu’il aurait fait avec moi. Seul problème, le jeu n’existe pas encore, puisque nous n’en avons que très vaguement parlé et n’avons pas réalisé le moindre test, ni même prototype. Disons que c’est une méthode de travail à laquelle je n’étais pas habitué, mais c’est assez amusant, ou en tout cas assez motivant. Bref, il va falloir se mettre très rapidement au boulot.

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Discussion avec Anja Wrede et l’éditeur sur la couverture d’un jeu à venir.

Mais, bon, la question que vous attendez tous – quelles étaient les hits du salon, les jeux dont tout le monde parlait. Il n’y avait clairement pas de grand succès incontournable cette année, de jeu dont tout le monde parlait. Écrivant ce compte rendu avec quelques jours de retard, j’ai pu en parler avec quelques amis, ou lire ici et là, sur le web, quelques posts de retour d’Essen. Je ne suis guère étonné de constater qu’ils citent comme étant « le buzz du salon » des jeux très différents. Essen a pris une telle ampleur que, du fait des connaissances préexistantes ou même parfois du simple hasard des discussions sur le salon, des « réseaux de buzz » bien distincts peuvent se créer. Certains jeux peuvent avoir été abondamment pratiqués dans les salons du Bredeney ou de l’Atlantic et ignorés dans ceux de l’Arosa, et inversement.  Je lis ainsi ici ou là que les meilleurs jeux du salon étaient Orléans ou Mélée, deux jeux dont j’ignorais encore totalement l’existence à la fin du salon. Autour de moi, les gros jeux qui buzzaient étaient plutôt Deus, Alchemists, Five Tribes et Zhanguo. Dans des formats plus modestes, j’ai entendu énormément de bien de Gaia, Grog Island, Witness et Colt Express. En jeux à deux, je n’ai guère entendu citer que le très laid Spellcaster.

Et puis, il y a la surprise toujours renouvelée devant l’abondance de jeux. Si, cette année encore, les nouveautés étaient extrêmement nombreuses, – j’ai entendu parler d’un peu plus de mille nouveaux jeux présentés sur le salon – il m’a semblé que la situation avait un peu évolué. À quelques exceptions près, les éditeurs « historiques », allemands, français ou américains, ne présentaient qu’un nombre de nouvelles boites assez limité, sans doute inférieur à ce qu’il était ces dernières années, mais cela était compensé par les nouveaux arrivants, souvent venus d’Italie, d’Europe de l’Est ou d’Extrême Orient. Au bout du compte, je pense que le nombre de jeux publiés n’était donc guère plus élevé qu’en 2013.

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Ce que j’ai ramené d’Essen

Je suis donc rentré délesté de quelques prototypes et lesté d’une cinquantaine de boites qui m’ont été offertes ou que j’ai achetées. Je pensais surtout rapporter des des trucs que j’aurai du mal à me procurer ensuite, et j’ai effectivement acheté pas mal de jeux japonais ou coréens que je n’ai pas encore regardés de près, mais j’ai aussi pris pas mal de nouveautés auxquelles j’ai juste hâte de jouer.

Après Essen, c’était encore Essen, puisque j’ai passé la journée du mardi avec Eric Lang, de passage à Paris, pour présenter une de nos créations communes à un éditeur et à tester quelques uns de ses prototypes – tous très impressionnants. Lundi prochain, je vois Charles Chevalier pour développer en urgence le jeu que l’on est censé avoir fait ensemble. J’ai déjà fait quelques parties du prototype mignon tout plein réalisé par Anja Wrede sur une de nos idées communes, et qu’elle m’a apporté sur le salon, et je vais travailler un peu sur les règles.
Au milieu de tout cela, j’ai quand même trouvé le temps de faire quelques parties des jeux ramenés d’Allemagne. 8 – The Liar s’est avéré un jeu de bluff plus subtil qu’il n’en a l’air. Colt Express est un jeu de programmation et de coups fourrés comme je les aime – mais comptez plus d’une heure pour le montage des petits wagons avant la première partie. Ivor the Engine, un jeu de trains acheté un peu au pif parce que la boite était jolie, s’est avéré rapide, amusant, méchant et beaucoup moins enfantin que les graphismes ne le laissaient penser. J’avais déjà joué à Dragon Run sur le prototype, mais j’y ai encore rejoué sur la vraie boite, et on rigole toujours beaucoup, même si c’est vraiment très aléatoire.
Pour l’instant, les seules demi-déceptions ont été les jeux gadgets. Lift-It, le jeu le plus photographié d’Essen, celui qui se joue avec une grue fixée sur le crane; le principe en est génial, mais le jeu ne fonctionne pas vraiment car les constructions sont déjà très difficiles à réaliser pour des adultes sobres, alors que le public naturel de ce type de jeu devrait être des enfants sobres ou les adultes ivres. C’est l’inverse pour La Rivière sans Fin, le jeu sur roulement à billes – l’étroitesse de la rivière fait que l’on ne peut s’y doubler, et le jeu devient vite un peu automatique. J’espère qu’il y aura une version plus sophistiquée.

Bref, c’était bien, c’était fatiguant, et je suis l’un des rares français à ne pas être rentré malade. À l’année prochaine !


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The other Bruno has already posted on his new website an impressive Essen fair report (in French), listing the seven or eight new games he had on the fair. I strongly recommend both of them, Five Tribes, an original and relatively fast paced brain burner, and Dragon Run, a fun risk taking game, the kind of game I like to play and I would have liked to design. I don’t recommend the other ones, but that’s mostly because I didn’t play them yet.
I was much more modest this year, with only one new offering, the Mascarade expansion. It was very well received, since there no more english language copies by the end of the first day. On the other hand, I had much time to meet publishers and designer friends, and to discuss a few projects. There are a few games in the pipe, but i don’t know what I’m allowed to say, so I’d rather not say anything.

1602179_1464632527094812_5337658764054171235_oBoth Brunos in Essen – none of us did Augustus 😉

I spent most of my time at the Repos Prod booth signing Mascarade, next to Ludovic Maublanc, the designer of the outstanding Cash and Guns, Miguel Coimbra, the illustrator of Seven Wonders and its many expansions, and the whole Concept team. From time to time, Antoine Bauza stopped by for a few minutes. Cheers, and thanks to the whole belgian team, we had a great time.

2014-10-26 21.39.37At the Repos booth.

I also spent some time with Eric Lang, with whom I’m now working on several projects. On thursday, we signed the contract for Neeeed, a card game that will be published by Lui-Même, and then went with Philippe des Pallières at the distributors / publishers speed dating night organized by Asmodée. Eric and I ended up explaining Mafia de Cuba instead of Philippe, and we had great fun. I slowly got drunk, and don’t remember anything of what happened afterwards – I’ve been told I improvised a lecture on the History of Chess at the Atlantic bar, in the middle of which i suddenly switched from English to French, despite the fact that all my listeners were americans. Anyway, I managed to wake up early the next morning for a working breakfast – even though I know working breakfast ought to be forbidden by labor laws.

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With Eric Lang at the Iello party – Mike Elliott on the right.

On saturday night, I finally managed to play with Bruno Cathala a game of the last version of Raptor, our two players game that will be published next year by Matagot.
Charles Chevalier almost managed to sell to a publisher a game he is supposed to have designed with me. Well, the only problem is that we just had a very vague discussion about it, but there hasn’t been a single playtest, not even a prototype made. It’s a new work method for me, may be I’ll get used to it – but it definitely has some motivational efficiency. Now we must start actual work.

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Discussing the cover of our upcoming game with Anja Wrede and the publisher.

And now for the question most of my readers are eagerly waiting for – what were the games that buzzed, the games that everybody was talking about, the hits. There was no single major hit, no game everybody was talking about. I’m writing this report several days after the fair, so I had time to talk with friends, and to have a look at other reports on the web. I’m not surprised that they name very different games as the « buzz of the fair ». Essen has become so big, and the gaming world so diverse, that depending on what you’re looking for, on who you know, or just on the people you happen to meet, people end up in very different and relatively independent buzz networks. A game might have been intensely played in the gaming rooms at, say, the Berdeney hotel, and totally ignored at the Atlantic or the Arosa, and vice versa. I’ve read here or there that the most praised games on the fair were Melle and Orleans, but I didn’t hear once of these games on the fair. In my very own network, the buzzing heavy games were Deus, Alchemists, Five Tribes and Zhuanguo. Lighter buzzing stuff was Gaia, Grog Island, Witness and Colt Express. I heard much of only one two players game, the very ugly Spellcasters.

Like every year, I was overwhelmed by the hundreds of new games available – I’ve been told there were around one thousand games published for the fair. This is, however, the result of new trends. Most of the « historical » German, French or US publishers seem to have fewer new games than in the former years, but this was largely compensated by the many new games shown by younger publishers from Italy, from eastern Europe or from the Far East. In the end, I think that the number of new games was more or less the same as last year.

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My Essen haul

My bags were much heavier on the way back – four or five prototypes less, about fifty new games more. I had decided to bring back only stuff I cannot get easily here, mostly Korean or Japanese stuff, but I could not hold to my resolution and had to get more – some of them offered, most of them bought – that I just wanted to play one of these days, or to have a look at.

After Essen, it was still Essen. I spend most of Tuesday in Paris with Eric Lang. We visited a publisher to show one of our common designs, and then played two of his prototypes, which really impressed me. Next Monday, I’ll meet with Charles Chevalier to work on the game we’re supposed to have designed together. I’ve already played a few games of a cute little game designed with Anja Wrede which we discussed on the fair.  
I even found time to play some of the games I brought back from Germany. 8 – The Liar is a nice bluffing game, more subtle than it looks. Colt Express is a fun and nasty game of take-that hidden programmation, exactly what I like, but assembling the cardboard cars before the first game requires more or less one hour. I bought Ivor the Engine mostly because the box looked cute and very british, and I was surprised to discover a clever and nasty train game, much less childish than it looks. I had already played Dragon Run on the prototype – this risk taking game is heavily based on luck, but it’s always fun.
Our only two half disappointments were with the two games I bought because of what looked like a clever gizmo. Lift-It, the game played with a crane fixed on one’s forehead, was certainly the most photographed game on the show, but the gameplay was disappointing. It looks like a game for children, or drunk adults, but even the simplest construction are very hard to build even by sober adults. The Endless River has the reverse problem – using a ball bearing as a board is a great idea, but the river is too narrow for a boat to overtake another, and, as it is, the game is really childish. I hope there will be a more sophisticated version.

All in all, I had a great time. I came back tired, but not ill like many of my friends. See you next year.

Jeux de langues
(sorry, untranslatable pun)

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Lorsque j’écris un article pour ce blog, je l’écris d’abord en français, avant de le traduire – ou parfois de l’adapter – en anglais. À l’inverse, je rédige toujours mes règles de jeux en anglais, pour éventuellement les mettre plus tard en français si je trouve un éditeur francophone. Cette expérience un peu paradoxale, ainsi que la récente lecture des essais de George Orwell sur la langue – sans doute les seuls textes d’Orwell avec lesquels je ne sois pas trop d’accord – , puis du bizarre et excellent Miss Herbert d’Adam Thirlwell, m’ont amené à réfléchir un peu au lien entre la pensée, la langue et l’écriture.

Les mettre dans cet ordre, c’est déjà s’inscrire en faux contre l’idée généralement admise selon laquelle la langue dans laquelle nous parlons, et dans laquelle nous penserions, structurerait notre pensée. L’idée que selon notre langue maternelle, nous serions condamnés à penser différemment, et à ne jamais vraiment nous comprendre, me semble non seulement terriblement pessimiste et politiquement dangereuse, mais aussi carrément fausse. J’en veux pour preuve qu’il y a bien des étrangers parfois très exotiques que je comprends parfaitement, que nous discutions en français ou en anglais, et bien des français dont la pensée me reste totalement étrangère.

Lorsque j’imagine une règle de jeu, je ne la conçois ni en français, ni en anglais – je la conçois tout court, j’imagine des cartes, des pions, des mécaniques, mais pas des mots. Il me semble évident que ma pensée est alors fortement structurée, mais qu’elle n’est pas structurée par le langage, du moins au sens de la langue, avec son vocabulaire, sa grammaire, sa syntaxe. Lorsque je me demande si je pense en français ou en anglais, ma pensée se ralentit parce qu’elle se force à utiliser l’une ou l’autre langue, à la manière du capitaine Haddock ne sachant plus s’il dort avec la barbe sur ou sous l’oreiller. Il va de soi que, ayant déjà de sérieux doutes sur le conscient, je ne pense pas non plus que l’inconscient soit structuré comme un langage.

Si je rédiges les règles de jeux en anglais, c’est pour des raisons très techniques, parce que la langue anglaise est plus simple, plus directe, plus claire, plus efficace pour présenter un texte simple, informatif et directif – et ce même pour quelqu’un qui, comme moi, écrit un anglais assez approximatif. J’ai d’ailleurs souvent du mal à mettre certaines de mes règles en français, car l’anglais me permettait d’exprimer ma pensée de manière plus efficace et plus précise. Lors d’une discussion – en anglais – entre auteurs de jeu à Essen, nous étions d’ailleurs arrivés à la conclusion qu’il était aisé de rédiger une règle de jeu complexe en anglais, assez facile de le faire en allemand, difficile de le faire en français et carrément impossible de le faire en italien.
Bien sûr, je ne nie pas qu’il y ait aussi un intérêt professionnel, au sens de commercial, à rédiger des règles en anglais. Un jeu en anglais est plus facile à présenter à des éditeurs internationaux, et même à certains éditeurs français, qu’un jeu en français. Ce n’est cependant pas la raison essentielle, ou en tout cas pas la seule raison, pour laquelle je suis passé à une langue qui n’est pas la mienne.

Si je rédige mes autres réflexions sur le jeu en français, c’est parce que j’ai une meilleure maîtrise de cette langue, ce qui me permet plus de raffinements dans les jugements et les critiques, et je ne parviens alors  souvent pas à traduire exactement mes idées et opinions en anglais. Le français me permet donc alors d’exprimer ma pensée de manière plus précise – mais il ne s’agit plus de la même précision que celle requise par des règles de jeux, pour laquelle l’anglais convient mieux. Il y a d’ailleurs quelques jeux que je continue à faire en français, ce sont des jeux d’ambiance, de baratin, comme Speed Dating ou Devine qui vient dîner ce soir, qui demandent des références culturelles que je ne maîtrise que pour la langue et la société française.

Certaines langues se prêtent donc beaucoup mieux à exprimer certaines idées, mais rien ne nous empêche de concevoir les idées que notre langue n’exprime pas, ou mal. Il est juste un peu plus difficile d’en discuter. Et même si son auteur n’est sans doute pas entièrement d’accord avec cette opinion, vous devriez lire Miss Herbert, d’Adam Thirlwel, traduit en français sous le titre Le Livre Multiple 😉


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When I write a blog entry, I usually first write the French version, and then translate it in English. Conversely, I always write game rules in English, and translate them in French if and when a French speaking publisher asks me for it. This paradoxical experience, as well as recent readings of George Orwell essays on language – probably the only Orwell essays with which I mostly disagree – and of Adam Thirlwell’s fun and erudite Miss Herbert, made me think a bit on the relation between thought, language and writing.

Arranging them in this order is already going against the commonly admitted idea that the language we speak and supposedly think in determines the way we think. The idea that people with different mother tongues are condemned to think differently, and therefore never truly understand each other, sounds to me not only terribly pessimistic and politically dangerous, but also plain wrong. The best proof is that there are many strangers, including some very exotic ones, whose thought sounds perfectly clear to me, no matter we speak in French or English, and a few French people whose thought process I find desperately alien.

When I design a game rule and system, I don’t do it in French or in English – I imagine it with cards, tokens, meeples, systems, but no words. My thought is obviously structured, but it is not structured by the language  – meaning vocabulary, grammar and syntax – but by ideas. If I start to ask myself if I am thinking in French or in English, the only result is that I start thinking slower. This reminds me of a scene in the Belgian comic Tintin in which captain Haddock is asked whether he sleeps with his beard over or under the sheets. The following night, of course, he cannot sleep… Of course, since I’m already skeptical about conscious thought being structured as language, I’m even more wary about the unconscious…

I write most of my game rules in English mostly for practical reasons, because the English language is lighter, more precise, more direct, more efficient for technical and informative texts like game rules. This is true even for a French designer like me, whose English is quite rough. Last year at the Essen fair, I remember a discussion between game designers from all the western world, whose conclusion was that writing rules is very easy in English, relatively easy in German, difficult in French and almost impossible in Italian.
Writing rules directly in English is also better for business. It’s much easier to submit a game in English to international publishers, and even to some French ones. That’s not the main reason, or at least not the only reason, for me to work directly in English.

If I write my other texts in French, it’s because I have much better mastery of it, and therefore can be more subtle and accurate in my judgement and opinions. Often, and that’s indeed the case now, I have some difficulties translating these opinions in English. I can express my opinions more precisely in French, and my game rules more precisely in English, because they require different kinds of precision. The few games I still design entirely in French are party games such as Speed Dating or Guess Who’s Coming For Dinner. They require lots of cultural references which I master only in french and about France.

Some languages are obviously better designed to express some kind of ideas, but this doesn’t mean that our language prevents us from conceiving different or new ideas. It just makes discussing them a bit more difficult. And even though he probably doesn’t agree with this opinion, you ought to read Adam Thirlwell’s Miss Herbert – it’s a great book.

Devine qui vient dîner ce soir !

On a changé deux fois de gouvernement en quelques mois, et ils s’est passé quelques trucs ici et là dans le monde, j’ai donc fait quelques changements mineurs à la liste des cartes de Devine qui vient dîner ce soir. Je suis sûrement moins à jour sur les sportifs, les acteurs, les personnalités des médias, parce que je suis moins attentif à ce qu’il s’y passe, mais vous pouvez utiliser les cartes vierges pour ajouter les personnalités qui vous semblent nécessaires.

Devine qui vient dîner ce soir – cartes
Devine qui vient dîner ce soir – règles


We’ve had two new governments in France in a few months, and the rest of the world has also been quite busy these last months. I have therefore updated the list of cards in Guess Who’s Coming for Dinner – but it’s still only in French, since I don’t know enough of american culture – or any other culture – to make a specific set.

Extension de Mascarade
Mascarade expansion

L’extension de Mascarade arrive en septembre, une petite boite plus fine que celle du jeu de base, mais bien pleine de douze nouveaux personnages pour rendre vos parties encore plus mouvementées.

Mascarade extension

Lorsque j’ai proposé Mascarade à l’éditeur, tout le mécanisme central du jeu était là, mais il n’y avait dans le jeu que six personnages, et je pensais avoir à peu près fait le tour des possibilités offertes par le système de jeu. L’équipe de Repos Prod a vite fait de me montrer mon erreur en en imaginant quelques nouveaux, et le développement du jeu fut ensuite une longue série d’allers et retours, chacun rebondissant sur les idées de l’autre et en amenant de nouvelles, avant que nous ayons à notre disposition un nombre suffisant de personnages – et la certitude que nous pourrions en trouver d’autres pour une future extension si le jeu rencontrait le succès.

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L’alchimiste choisit si chaque joueur passe son or à son voisin de droite ou à son voisin de gauche.

C’est de la même manière que nous avons conçu l’extension, avec cette fois plus d’idées venant de l’équipe de Repos que de moi-même. Je n’étais déjà pas vraiment, ou pas complètement, l’auteur de Mascarade, ayant seulement imaginé le principe de base et la moitié des personnages; je suis encore moins l’auteur de l’extension, dont quelques personnages s’inspirent de propositions faites par des joueurs – y compris la Mendiante, qui avait donné lieu à un concours de nouvelles idées – et dont les autres ont pour la plupart été imaginés et testés dans les locaux de Repos Production. Je crois bien n’avoir personnellement imaginé que la Comédienne – qui reste l’un de mes personnages préférés – et le Nécromant. Qu’importe si le résultat est bon, et permet réellement de renouveler le jeu – et je suis convaincu que c’est le cas.

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Dix ans plus tard, avec le recul, je porte un jugement assez mitigé sur l’extension de Citadelles, La Cité Sombre. Si les nouvelles cartes quartiers sont amusantes et renouvellent réellement le jeu, les nouveaux personnages y sont moins évidents, moins directs que les premiers, sans doute parce que les idées les plus simples, et donc les meilleures, avaient été déjà exploitées dans le jeu de base. Je suis heureux de constater que ce n’est pas le cas avec l’extension de Mascarade, sans doute parce que le mécanisme central, plus simple et plus souple, se prête mieux aux variations un peu sauvages.

Mascarade – l’extension
Un jeu de Bruno Faidutti
Illustré par Jeremy Masson
2 à 13 joueurs –
30 minutes
Publié par Repos Production (2014)
Ludovox          Vind’jeu         
Tric Trac         Boardgamegeek


The Mascarade expansion arrives in september. The box is thinner than the original’s game one, but it contains twelve new characters to add more fun and chaos to your games.

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When I submitted Mascarade to the publisher, the core system was there, but there were only six different characters, and I thought there were very few possibilities for other ones. The Repos Prod team soon showed me I was wrong with suggesting several new characters, and this made me think of some other ones. The game was then developed back and forth for months, with new ideas from both sides, until we thought we had enough cards – and we were sure we could find more if the game sold well enough and we wanted to design an expansion.

The Princess gets two gold from the bank and chooses a player who must show their card to all, without looking at it themselves.

The Princess gets two gold from the bank and chooses a player who must show their card to all, without looking at it themselves.

The expansion was designed in the same way, and this time there has been more ideas from the Repos team than from me. I was not really, or not completely, the author of Mascarade, having designed only the core system and half of the cards, I am even less the author of the expansion. Some characters have been suggested by players – including the Beggar after a design contest – and most of the other ones have been designed and tested in Brussels. If I remember right, I had the original idea for only two of the new characters, the actress – which is still one of my favorites – and the necromancer. Anyway, the result is great, giving the game a fabulous replayability.

content

When looking back to the Citadels Dark City expansion, published almost ten years ago, I’m not really satisfied. The new district cards are fun and the new scoring opportunities really add to the game, but the new characters abilities are a bit convoluted and therefore less interesting than the original ones. I don’t think anyone really plays with them. The obvious reason was that the most simple, direct and effective ideas had only been used in the basic game. Luckily, things are different with the Mascarade expansion, probably because the core system, being simpler and lighter, gives more opportunities for wild variations.

Mascarade Expansion
A game by Bruno Faidutti
Art by Jeremy Masson
2 to 13 players – 30 minutes
Published by Repos Production (2014)
Boardgamegeek

La carte et le poing
Fists and Cards

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Il est toujours tentant, surtout avec un jeu aux règles simples, de procéder à une modélisation mathématique. Le jeu sur lequel je travaille actuellement avec Eric Lang, largement basé sur le dilemme du prisonnier, s’y prête tout particulièrement…. et pourtant. Quelques expériences menées ces derniers jours montrent les limites de l’approche par la modélisation mathématique ou par le calcul stratégique.

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Assez régulièrement dans la partie, les joueurs doivent faire une choix tactique entre trois décisions que nous avons baptisées Paix, 1, et Guerre. Dans les prototypes qui ont servi à tous les tests, ce choix est effectué sur un cadran. Chaque joueur prend un petit cadran de carton et oriente la flèche vers le symbole de son choix, et les cadrans sont ensuite révélés.

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Les cadrans coûtant un peu cher à produire, nous mous sommes d’abord demandés s’ils ne pouvaient pas être remplacés par des cartes. Dans cette version, chaque joueur a trois cartes avec les symboles de la Paix, du 1 et de la Guerre. Chaque joueur choisit une carte, et les cartes sont révélées simultanément. Les joueurs trouvent cela un peu moins agréable à utiliser que les cadrans, mais cela fonctionne très bien, et statistiquement, les résultats obtenus sont les mêmes.

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Nous avons ensuite eu l’idée de supprimer tout matériel, et de procéder comme à Pierre / Feuille / Ciseaux, avec une main ouverte pour la Paix, un point fermé pour la Guerre, et un pouce levé pour le 1. En théorie, ce mécanisme est parfaitement équivalent aux deux autres. En pratique, il donne un feeling et des résultats un peu différents, plus de guerre et moins de paix. Peut-être le geste du bras tendu pousse-t-il «naturellement » à l’agressivité, peut-être le fait de devoir prendre la décision en un instant, sans pouvoir hésiter ni revenir en arrière, nous pousse-t-il à des choix plus risqués. En tout cas, on ne joue plus tout à fait de la même manière.

Cela m’a rappelé un article que j’avais écrit il y a quelques années, dans lequel j’expliquai la différence entre piocher une carte au début ou à la fin de son tour. Là encore, en théorie mathématique, cela ne devrait faire aucune différence, mais en réalité cela influe beaucoup sur le style du jeu.


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It’s always tempting to reduce a game to a mathematical model, especially with relatively simple games. The game I’m actually designing with Eric Lang, based on the prisoner’s dilemma, is a perfects candidate…. but a recent experience has shown the limits of a strategic or mathematical approach.

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Every round, players have to choose secretly and simultaneously between three possibilities, which we have names Peace, 1 and War (or sometimes Greed). In our first prototypes, players had cardboard dials, and had to point a plastic arrow to one of the three symbols for Peace, 1 and Greed before the dials were revealed simultaneously.

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Dials are expensive to produce, so we first tried to replace them with cards. Players have three cards with the symbols for Peace, 1 and Greed. Each player plays a card face down, then the cards are simultaneously revealed. It works, the results are more or less the same, but most players prefer dials.

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Now comes the real experience. Get rid of cards and dial, and play this à la Rock / Paper / Scissors. A closed fist means War / Greed, an open Hand means Peace, a thumb up means 1. Theoretically, this system is equivalent to the two former ones. When playing, however, the feeling is very different, and it seems that the results are slightly more aggressive, with more wars and less peace. May be holding one’s arm makes one agressive, may be the requirement to play fast, without hesitation, makes us less careful ? Anyway, it’s the same game, but it plays a bit differently.

This reminded me of an article I wrote a few years ago about the timing for drawing cards in card games – after one’s turn or before one’s turn. Once more, theoretically, there ought to be no difference, but in practice there is, and it makes games feel differently.

Pirates !

Les pirates de notre imaginaire sont cruels, ivrognes, souvent vêtus de noir, portent de longs sabres recourbés, arborent fièrement un drapeau à tête de mort… bref, de sinistres personnages. Pourtant, les enfants, et même ces grands enfants que sont les joueurs, les aiment bien.
On peut trouver plein d’explications à cela. Bandeau sur l’œil, capitaines unijambistes, singes et perroquets, tout cela illustre le fait que le monde de la piraterie n’est pas perçu comme un univers historique mais comme un monde imaginaire et exotique, plus proche du médiéval fantastique ou de la science fiction que du XVIIème siècle. Que l’île de la Tortue soit bien réelle, que Francis Drake l’ait été, cela n’est que très marginal dans un passé qui échappe suffisamment aux historiens pour que l’imagination s’y donne libre cours. Elle le fait sans trop en rajouter dans la violence, et en faisant des équipages pirates les porte parole assez décalés de préoccupation contemporaines. Les pirates de nos jeux sont en effet ceux des films – ce sont des brutes, violents, ivrognes et machos, qui cachent parfois un cœur d’or, et leurs équipages sont « multiculturels », mixtes et fraternels. Les capitaines pirates sont des entrepreneurs sans scrupules motivés uniquement par l’appât du gain et le goût du sang, mais les frères de la côte sont une utopie socialiste qui aurait inventé la sécurité sociale. Chacun y trouve donc son compte, et les illustrateurs aussi s’en donnent à cœur joie avec les gueules cassées, les longues barbes, les ponts de navires, les perroquets et les singes.

Bref, la mer, le soleil, la baston, des visages virils découpés au sabre et hâlés au soleil – le thème idéal pour un film d’aventure, une bande dessinée ou un jeu. J’ajoute que, pour des raisons que j’ignore, la violence y est mise particulièrement à distance, comme le montre le fait que les parents qui n’aiment guère voir leurs enfants jouer aux petits soldats ne s’inquiètent aucunement de les voir se déguiser en pirates.

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La Fièvre de l’Or, jeu d’enchères conçu avec Bruno Cathala et originellement paru en 2004 est épuisé depuis longtemps. Il y a quelques années, un éditeur polonais, Egmont, en a publié une nouvelle version… sur le thème des pirates. J’avoue avoir été d’abord sceptique sur ce changement de thème, mais à l’usage il s’avère que le nouvel univers convient tout aussi bien au jeu, et que les illustrations de Maciej Szymanowicz sont absolument superbes. Le succès de l’édition polonais a attiré la curiosité de quelques éditeurs français, et elle devrait donc d’ici quelques mois arriver en France, publiée par Bombyx.

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Un peu avant sans doute arrivera Black Fleet, de Sebastian Bleasdale, publié par mes amis les Space Cowboys. Black Fleet est un jeu au feeling un peu retro, où l’on déplace ses galions et ses frégates sur une carte, allant d’île en île et attaquant à l’occasion les navires adverses. A la fois très tactique, du fait des déplacements sur la carte, et un peu imprévisible du fait des nombreuses cartes spéciales dont peuvent bénéficier les joueurs, Black Fleet est un jeu familial, léger, dynamique auquel je prédis un grand succès, un jeu de pirates à l’ancienne mais modernisé, dynamisé, accéléré.

Mais si j’ai eu envie de parler de jeux de pirates, c’est surtout parce que, hier soir, avec quelques amis, nous avon consacré une soirée entière aux jeux de pirates, et j’y ai découvert pas moins de trois excellents jeux.

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L’idée de départ était de jouer à Francis Drake, un jeu de Peter Hawes publié par Eagle Games. Ce jeu avait remporté un grand succès à mes dernières rencontres ludopathiques. Il a fallu trouver quatre joueurs encore capables s’asseoir autour d’une table pour un jeu de plusieurs heures avec quelques dizaines de pages de règles, mais je n’ai pas regretté l’expérience. Francis Drake, c’est deux jeux en un. Les joueurs préparent d’abord leur expédition, recrutent leur équipage, arment leur navire, cherchent des informations –  c’est du « placement d’ouvrier » dans une rue où l’on ne peut pas reculer et dont l’ordre des boutiques change à chaque tour, ce qui permet des configurations très différentes. Ensuite, ils partent en expédition dans les Caraïbes, essayant de profiter des meilleures occasions, d’attaquer les forts et les galions espagnols devant lesquels les autres pirates ne sont pas passés d’abord – et il y a là un peu de bluff assez amusant. Donc, quelque chose de beaucoup moins classique, de beaucoup moins abordable et de beaucoup moins « baston » que Black Fleet, mais un jeu d’une grande richesse dont je sais qu’il ressortira.

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Comme il nous restait du temps, nous avons aussi essayé deux petits jeux de cartes de pirates, bien plus modestes et tous deux très intéressants.
Port Royal est un jeu à l’allemande, un de ces nombreux jeux de pioche de cartes basés sur un mécanisme de « stop ou encore » (en bon français on devrait dire « quitte ou double », mais plus personne ne comprend). Comme dans la première phase des tours de Francis Drake, les joueurs sont des capitaines pirates qui dans les rues non plus de Plymouth mais de Port Royal cherchent à recruter leur équipage.  À partir d’un mécanisme déjà utilisé cent fois – à votre tour, vous piochez aussi longtemps que vous voulez, mais si vous piochez un deuxième navire de la même couleur, vous perdez tout – Alexander Pfister est parvenu à concevoir un jeu bien plus subtil qu’il n’y parait, où il nous manque toujours une pièce d’or, où l’on veut toujours piocher une carte de plus. Rien de très original, donc, mais un petit chef d’œuvre quand même.

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Pour terminer la soirée, nous avons joué à Dread Curse, de Stuart Sirk, un jeu de cartes acheté un peu par hasard. Ici, les joueurs sont membres d’un même équipage et, avec le sens de la camaraderie bien connu des frères de la côte, cherchent à s’embrouiller l’un l’autre, se voler des pièces d’or et se refiler la maudite tâche noire. J’ai beaucoup aimé, mais préfère vous mettre en garde – ce jeu n’est pas pour tout le monde. Si vous êtes de ceux qui reprochent parfois à mes jeux d’être chaotiques et incontrôlables, n’essayez surtout pas Dread Curse. Entre les effets des personnages, assez violents, et ceux des cartes, parfois monstrueux, ce jeu part dans tous les sens, va très vite, et les rebondissements sont incessants. On a vraiment beaucoup ri à ce qui ressemble à un croisement de Fluxxx et de Citadelles, mais je pense que nous aurions été nerveusement épuisés si nous avions voulu en faire plus d’une partie.

Voici donc trois excellents jeux de pirates, dans des styles très différents, du petit jeu délirant, Dread Curse, au monstre qu’est Francis Drake, en passant par un jeu à l’allemande de facture très classique, Port Royal. Et deux autres qui arrivent bientôt, Piraci et Black Fleet. Je ne souhaite qu’une chose, que les pirates reprennent dans le monde ludique la place que les sinistres zombies leur ont indument volé depuis quelques années.

Pirates are ferocious, drunk, dressed in black, carry long curved swords and sport a sinister black flag dispalying skull and bones. Not really nice fellows, but children like them, as do gamers, who often are old children.   .
One can find many explanations. One-legged captains, eye-patches, monkeys and parrots, all these icons show that the pirate’s world is not perceived as historical but as exotic fantasy, more similar in a way to medieval heroic fantasy or to science fiction than to historical XVIIIth century. Even though Turtle island is real, though Francis Drake was a historical figure, the pirates world is not known to us through historians but through novelists, and imagination can get loose about it. It does, without adding much violence, and pirate crews become surprising spokesperson about. The boardgame pirates are the as the videogames or movies ones. They are violent and brutish drunks, but they are kind hearted, their crews are mixed, « multicultural » and fraternal. They are the best and the worst possible people. Pirate captains are the epitome of private entrepreneurs, driven by the lure of profit and a taste for blood, but the brotherhood of the coast is a socialist utopia which invented the welfare state. Pirates suit all tastes, and Illustrators also have great times drawing scarred and bearded faces, old ships, parrots and monkeys.
Sea, sun, brawls and fights, tanned and virile faces – the best possible setting for an adventure movie, comics or game.  Also, and I don’t know the reason why, the obvious violence is neutralized, kept at a distance. Concerned parents who don’t like to see their children play war never have a problem with pirates outfits….


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Boomtown, an auction game I designed with Bruno Cathala, was published in 2004 and is long out of print in the US. A few years ago, a Polish publisher, Egmont, decided to retime it as pirate game. I was skeptical, but I l must admit the new settings fits as well as the old one, and Maciej Szymanowicz graphics are absolutely gorgeous. The Polish version was a hit, and it caught some interest from the French publisher Bombyx. A french version of the Polish version will soon be published in France, and may be later in the US.

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Sebastian Bleasdale’s Black Fleet, published by my friends at Space Cowboys, will probably be there first. Black Fleet has a retro look and feel. Players move their galleons from island to island, trade various resources and occasionally attack one another. Movement on the map is very tactical, but there’s also much luck with the many action cards in the players’ hands. Black Fleet is a light and dynamic board game. It has a very classical feel, but it’s much faster paced, more fun, less pedestrian than games from the eighties. I’m confident it will be a hit.

But the true reason I’ve started this article about pirate games is that, yesterday night, with a few friends, we’ve spent a few hours playing only pirate games, and I’ve discovered three great new games.

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The original idea for the evening was to give a try at Peter Hawes’ Francis Drake, published by Eagle Games, which had been a hit at my ludopathic gathering. I had to find four players who were still able to sit at a table for a long game, more than two hours, with rules a dozen pages long. I didn’t regret this experiment. There are two games in one in Francis Drake. First, players prepare their expedition, recruit crew members, find a ship, upgrade it, listen for rumors… this first game is worker placement in the main street of Plymouth, a one way street in which the shops are rearranged every round, making it a new challenge every time. Then, ships sail to the Carribean, planning to attack Spanish ships, Spanish forts, Spanish ports. There’s some interesting planning and bluffing, when each player tries to be the first to launch an attack on a given target. This is much heavier stuff than Black Fleet, it’s more about planning and less about launching surprise attacks, but it’s a very rich and deep game which I will certainly play again.

And then, because we had time left, we played two lighter and faster pirate-themed card games, and both were also really good.
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Port Royal is a typical German style card game. Like in the first phase of Francis Drake, players are pirate captain walking the street of Port Royal and trying to hire crewmen, buy a ship and launch an expedition. The basic system might have been overused – on one’s turn, one draws cards one after another, stopping when one wants, and if one happens to draw two ships of the same color, one loses one’s turn. The genius of Alexander Pfister was to build a fresh, intricate, subtle and terribly tense game on this unoriginal premise. A game in which one always wants to draw one card more, one always lacks one gold. Nothing very original, but one of the very best card games I’ve played recently.
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Then we ended the game night with Stuart Sirk’s Dread Curse, a card game I had bought more or less at random. This time, players are all members of the same crew and, of course, try to cheat and steal one another. I better warn all those who sometimes find my own designs too chaotic and uncontrollable for their taste – this is far worse. Character cards have violent effects, action cards have even more violent ones, and the game flow is very fast, completely chaotic but undeniably fun. If you have the guts for a mix between Fluxxx and Citadels, give Dread Curse a try. We had great fun, but were really too exhausted for a second game.

So, here are three great pirates games, in three very different styles. A light and zany card game, Drad Curse. A more restrained and classical one, Port Royal. A heavy multifaceted board game two or three hours long, Francis Drake. And two more soon to hit the shores, Piraci and Black Fleet. Now, I would like pirates to take back the leading place in the gaming world, which has been unduly stolen from them by zombies two or three years ago.