➕ La licorne à voile et à vapeur

C’est parce qu’elle est forte et rapide que la licorne a donné son nom  à bien des navires, dont le plus connu est celui commandé par le chevalier François de Hadoque dans Le Secret de la licorne.

C’est à bord de La Licorne que Montcalm  arrive au Canada en 1756. Cette frégate de vingt-six canons prit part, le 17 juin 1778, aux premiers accrochages maritimes entre les marines anglaises et françaises lors de la guerre d’indépendance américaine. Face à un adversaire supérieur en nombre et en puissance de feu, La Licorne tenta de s’enfuir et fut capturée. Après quelques coups de peinture, elle devint une frégate anglaise baptisée, sans grande originalité, The Unicorn.

Cet épisode relaté dans bien des chroniques d’alors a sans doute inspiré Hergé quand il a créé le trois-mâts La licorne, commandé par le chevalier François de Hadoque, dans Le Secret de la Licorne. C’est cependant à un autre navire plus récent, une frégate britannique, qu’il a emprunté sa figure de proue. Le HMS Unicorn, mis à flots en 1824, l’un des plus anciens navires encore en service, peut-être visité en Écosse, dans le port de Dundee.

Pirates, explorateurs ou simples voyageurs d’occasion, les héros des romans d’aventure du XIXe siècle commencent souvent leur périple en embarquant à bord du brick, de la corvette, de la goélette, de la frégate, du trois-mâts ou parfois du paquebot La licorne.

La licorne, vous vous en doutiez sans doute si vous avez bien suivi ce blog, peut être à voile et à vapeur, et l’un des premiers navires de la compagnie Samuel Cunard à traverser l’Atlantique, en 1840, fut le paddle-steamer (vapeur à roue à aubes) Unicorn. Originellement construite pour faire modestement Liverpool – Glasgow, cette licorne eut une vie mouvementée puisqu’elle assura ensuite la ligne Halifax – Terre Neuve, transporta du courrier entre New York et San Francisco, puis de nouveau des passagers entre San Francisco et Panama, passa quelques temps en Australie et finit sa carrière entre Canton et Shanghai.

La compagnie des Messageries Maritimes, active de 1851 à 1977, avait pour emblème – on ne disait pas encore logo – une licorne. Le fumoir de l’un de ses plus beaux paquebots, Le Champollion, lancé en 1925, était décoré de motifs empruntés aux tapisseries de La Dame à la licorne. « Comme sur le Champollion son frère aîné, le fumoir des premières classes du Mariette Pacha, est un coin, non pas d’antique Égypte, comme d’autres locaux décorés du navire, mais un coin de vieille France : une vraie taverne moyenâgeuse, en noyer et vieux chêne, à panneaux de maroquin rouge, qui reporte les buveurs de cocktails au bon temps de Rabelais et qui pourrait s’appeler : « Le bar de la Licorne ». Mais pourquoi la Licorne ? Pourquoi ce motif qui développe sous les yeux de très modernes buveurs ses mystiques volutes de légende aimable et fabuleuse? Parce que la Licorne est l’emblème des Messageries Maritimes depuis 1851 l’année de leur fondation; et, depuis cette date, la Licorne n’a plus cessé d’apparaître sur tous les documents imprimés ou gravés de cette Compagnie[1]. »

Bien des bateaux moins connus se sont appelés et s’appellent encore la licorne, des yachts comme des pétroliers, des péniches comme des voiliers. Une recherche sur le site Shipindex, qui recense tous les noms de navire, trouve encore aujourd’hui plus de 600 Unicorn pour seulement 250 Siren – et on parle bien de bateaux, pas de chevaux ou de voitures !


[1] L’Égyptienne, revue mensuelle : politique, féminisme, sociologie, arts, Août 1927.

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *