📖 La licorne de mer

La licorne de mer était certes moins connue que celle de terre, mais peintres et graveurs l’ont néanmoins représentée à l’occasion, tantôt plutôt licorne, tantôt plutôt poisson.

Le monoceros de mer

Au Moyen Âge et à la Renaissance, les licornes de mer doivent moins à une mauvaise description du narval ou poisson-scie qu’à l’idée qu’aux créatures terrestres, homme compris, correspondent des créatures marines.

L’univers marin était mal connu, et les textes des traités médiévaux ne donnent guère de détail sur l’unicornis ou le monoceros de mer. S’il a la même corne et parfois la même silhouette que la licorne terrestre, il ne combat pas le lion ou l’éléphant de mer, ne purifie bien sûr pas les eaux, et n’est pas particulièrement intéressé par les jeunes vierges ou les sirènes.

L’enlumnieur de ce manuscrit du De natura rerum de Thomas de Cantimpré (Bibliothèque de valenciennes, ms 320, fol 125r), à la fin du XIIIe siècle, est à ma connaissance le seul à avoir pensé que le coup de la jeune vierge pouvait aussi marcher avec la licorne de mer.

À la fin du Moyen Âge, le monoceros de mer ressemble de plus en plus à une licorne. L’animal n’étant pas censé voler, ce qui nous semble des ailes sur les gravures de l’Ortus Sanitatis de Johannes de Cuba est sans doute des nageoires.

Au XVIe siècle, si Olaus Magnus, qui avait vécu en Suède, puis Conrad Gesner ont sans doute entendu parler du narval, les animaux représentés dans leurs ouvrages sont encore des monoceros de mer.

Le capricorne ou hippocampe unicorne

Le capricorne était souvent marin, et rarement unicorne. Celui du psautier de Saint Louis et Blanche de Castille est le seul que j’aie trouvé dans un manuscrit médiéval qui ait les deux caractéristiques.

C’est pourtant ce modèle qui s’est ensuite répandu dans l’art baroque, où il côtoie toutes les créatures marines de la mythologie grecque. On remarque que, s’il en a la longue corne spiralée, l’animal n’y a jamais la barbiche ou les sabots fendus de la licorne, il s’agit bien d’un hippocampe unicorne, pas d’une licorne de mer.

Si cet hippocampe unicorne apparait à l’occasion sur les cartes marines, voyageurs et cosmographes sont peu nombreux à la décrire. Je n’ai trouvé qu’une représentation d’une telle licorne de mer, accompagnée d’une sirène, dans un traité du XVIIe siècle sur les indes orientales et occidentales et la Chine rédigé par un érudit allemand qui n’avait guère voyagé qu’en France, en Italie et aux Pays-Bas.

Et la licorne des airs ?

S’il y avait des poissons-licornes, personne ne croyait vraiment aux oiseaux licornes. On peut en croiser un ou deux, dans les marges des manuscrits ou les sculptures des églises, mais ce sont des délires d’artiste sans grande signification. C’est aussi à la Renaissance qu’apparaissent les toutes premières licornes ailées, mais cela, j’en parle dans mon livre, et dans d’autres posts de ce blog.

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